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Robert VIII Bertrand de Bricquebec

Robert VIII Bertrand de Bricquebec, ou plus simplement Robert Bertrand, surnommé « le Chevalier au Vert Lion »[1] (né en 1273 - mort en 1348 à Beaumont-en-Auge), baron de Bricquebec, vicomte de Roncheville, est un seigneur normand du début du XIVe siècle. Il fut à la fois homme d'État, diplomate et militaire et servit notamment sous Philippe V le Long, Charles IV le Bel et Philippe VI de Valois. Il a été élevé à la dignité de maréchal de France en 1325 et exerçait la charge de « capitaine de la mer sur les frontières de Normandie », avec autorité de Honfleur au Mont-Saint-Michel[2].

Robert VIII Bertrand de Bricquebec
Robert Bertrand
Robert VIII Bertrand de Bricquebec
Sceau de Robert Bertrand.

Naissance
DĂ©cès (Ă  75 ans)
Origine Royaume de France
Dignité d'État Maréchal de France
Années de service 1285 – 1346
Commandement Seigneur de Guernesey, Lieutenant ès parties de Bretagne
Conflits Croisade d'Aragon
Grand raid de 1322
RĂ©volte des Karls
Guerre de Cent Ans
Guerre de Succession de Bretagne
Faits d'armes Siège de Gérone
Bataille d'Old Byland
Bataille de Cassel
Campagne de la Manche
Bataille de L'Écluse
Bataille de Champtoceaux
Siège de Caen
Distinctions Membre du Conseil du Roi
Autres fonctions Baron de Bricquebec, Vicomte de Roncheville, Député de la noblesse de Normandie aux États généraux
Famille son frère Guillaume Bertrand, évêque de Bayeux

Fait remarquable, les Bertrand, célèbre famille normande, n'ont jamais porté de nom à particule, le nom patronymique est tout simplement Bertrand, souvent orthographié en Bertran. Le « de Bricquebec » n'a été ajouté ultérieurement par les généalogistes que pour différencier avec d'autres patronymes éponymes. Tous les documents de l'époque précisent correctement le nom : Robert Bertrand, sire de Bricquebec.

Biographie

Premières années

Le premier fait d'armes de Robert remonte à la croisade d'Aragon en 1285 : à la suite des massacres des Vêpres siciliennes en 1282, le roi de Naples Charles d'Anjou demande du secours à son neveu le roi de France, Philippe III le Hardi. Une armée entre en Italie, une autre fait diversion en Espagne. Figueras, Castillon, Gérone sont prises. À côté du connétable de Clermont de Nesles, se tient un écuyer, enfant de douze ans, son neveu, Robert VIII Bertrand. Il semble qu'au cours de la bataille de Gérone en ce jeune écuyer blesse grièvement par un trait le roi d'Aragon, Pierre III, qui meurt peu après.

Entre les campagnes militaires et les missions, l'administration du domaine des Bertrand se poursuit : le domaine est d'abord celui de Bricquebec (et de son château forteresse), et aussi un vaste domaine sur la rive gauche de la Seine : tout d'abord la vicomté de Roncheville (première baronnie de Normandie), Honfleur, Barneville-la-Bertran, Beaumont-en-Auge... De par sa mère, Robert reçoit des terres en héritage ou en dot en Picardie : Ossay, Nesles, Roye, Avesnes, le Vermandois... Roncheville est située sur la commune de Saint-Martin-aux-Chartrains, butte féodale située dans la vallée de la Touques. Il n'en reste plus rien, à peine la trace de fossés.

Activités diplomatiques

En 1316, Robert Bertrand est mandé à Saint-Germain-en-Laye par le roi de France pour les octaves de la Pentecôte. Il y rencontre Henri de Sully, son futur beau-père.

En 1321, Robert Bertrand est envoyé en mission en Lorraine auprès de l'évêque de Verdun et au Luxembourg, au sujet de la garde de l'évêché de Verdun. Cette garde disputée entre Édouard Ier de Bar et Jean Ier de Bohême avait abouti à une guerre entre les deux protagonistes. La médiation du roi de France au sujet d'un évêché situé hors du royaume de France, mais stratégiquement important, n'a abouti qu'à une trêve, les batailles repartant de plus belle dans la guerre des quatre seigneurs au détriment de la ville de Metz et de sa région.

En , Robert Bertrand, accompagné de son beau-père Henri de Sully et d'autres chevaliers, sont envoyés par le roi de France Charles IV le Bel en mission auprès du roi d'Angleterre Édouard II. Ils le suivent lors de sa campagne contre le roi d'Écosse, Robert Ier. La rencontre décisive a lieu le dans le Yorkshire, près de l'abbaye de Byland. Les chevaliers français, certes en mission, ont le devoir de défendre l'hôte qui les accueille. La bataille d'Old Byland est violente et longue. Mais la panique s'empare du roi Édouard et son épouse la reine Isabelle de France qui abandonnent leurs effets personnels ! Restent sur le champ de bataille les chevaliers normands, français et les Anglais qui n'ont pas cédé à la panique. Mais ayant devant eux un adversaire plus puissant, et n'ayant pas l'habitude de fuir, ces vaillants chevaliers tombent dans les mains des Écossais et sont faits prisonniers. Le , une trêve est signée entre les rois d'Angleterre et d'Écosse, une rançon est versée, et le , Robert Bertrand et les chevaliers français s'embarquent à Douvres pour regagner la France.

Maréchal de France

En 1325, le roi Charles le Bel fait Robert Bertrand maréchal de France. À cette époque les maréchaux de France sont au nombre de deux, leur rang est juste en dessous du connétable de France. Leur solde annuelle est de 500 livres tournois, ce qui constitue une somme importante. Il est le seul maréchal créé pendant le cours règne de Charles IV.

En 1327, le marĂ©chal Bertrand se rend dans l'Agenais et dans le Bordelais pour pacifier ces deux rĂ©gions. Il montre ses capacitĂ©s militaires et ses talents de nĂ©gociateur. Il reçoit donc du roi une gratification de 5 000 livres tournois. Mais il faut savoir que la gratification permet de rembourser les frais et dĂ©bours de la campagne de Guyenne de l'Ă©tĂ© 1324.

Robert Bertrand est par ailleurs retenu par la situation flamande épineuse. En 1325-1326, il se rend dans les Flandres pour calmer une rébellion paysanne. En 1328, le maréchal repart en Flandre à la suite d'une nouvelle révolte des Flamands, accompagné cette fois du nouveau roi Philippe VI de Valois. Les rebelles flamands commandés par Nicolaas Zannekin sont annihilés par l'ost royal lors la bataille de Cassel.

En 1336, devenu « membre du Conseil du roi », à Paris, Bertrand signe, en présence du roi Philippe, un traité d'alliance avec Alphonse XI, roi de Castille. La même année, il est représentant de la noblesse de Normandie aux États généraux. En 1338, le frère puîné du maréchal, Guillaume Bertrand, est intronisé évêque à Bayeux.

DĂ©but de la guerre de Cent Ans

En 1338, à la suite de l'éclatement de la guerre de Cent Ans entre la France et l'Angleterre, ordre est donné de prendre l'île de Guernesey aux Anglais et le maréchal devient, par décision du roi de France, le seigneur de Guernesey. L'île, avec son château Cornet, est reprise par les Anglais en [3].

En 1339, le roi d'Angleterre Édouard III riposte en menant une armée en Flandre à Anvers. Le vendredi , Bertrand est présent lors de la confrontation de Buironfosse qui ne débouche sur aucun combat ! Une prédiction défavorable, un mauvais présage d'un lièvre se jetant dans les rangs de l'armée française, l'indécision des conseillers du roi Philippe VI... tout cela fait que le roi de France lève le siège du camp de bataille sans combattre.

En 1340, un dĂ©sastre maritime a lieu pour la France Ă  la bataille de l'Écluse : la flotte française est dĂ©truite par les navires anglais aidĂ©s par les barques flamandes, 15 000 hommes sont hors de combat, 170 navires français perdus. L'Angleterre devient la maitresse des mers. La question cruciale est maintenant la suivante : comme les Anglais dominent dĂ©sormais les mers, oĂą dĂ©barqueront-ils en France quand ils voudront le faire ?

En 1341 éclate la guerre de Succession de Bretagne : le nouveau duc, Charles de Blois, demande secours à son oncle, le roi Philippe VI. Une armée, avec le maréchal Bertrand, se met en route, attaque la forteresse de Champtoceaux, puis la ville de Nantes qui se rend en . Le maréchal devint par ordonnance royale Lieutenant ès parties de Bretagne avec les pleins pouvoirs. Puis Rennes tombe en , ensuite Vannes, Auray et son château, Carhaix...

En , Robert Bertrand, âgé de 71 ans, se démet (ou est démis, on ne sait) de sa charge de maréchal de France. Il reste néanmoins membre du Conseil du roi.

Le , une imposante flotte anglaise forte de 32 000 hommes se prĂ©sente devant Saint-Vaast-la-Hougue. Robert Bertrand IX, un de ses fils, et 300 hommes tentent vainement de les empĂŞcher de dĂ©barquer. Robert est blessĂ© ainsi que son fils et doit se retirer avec seulement trente survivants de sa troupe. L'armĂ©e anglaise prend Saint-LĂ´ le et arrive Ă  Fontenay-le-Pesnel le . Le roi Édouard III envoie alors un messager Ă  la ville de Caen lui demandant de se rendre pour Ă©viter morts et destructions. Les bourgeois caennais refusent la proposition. La bataille de Caen se fait quartier par quartier, la ville est pillĂ©e et brĂ»lĂ©e, 95 chevaliers français et normands faits prisonniers, 2 500 morts. Seul le château de Caen rĂ©siste toujours hĂ©roĂŻquement, sous la direction de l'Ă©vĂŞque de Bayeux, Guillaume, l'âme de la rĂ©sistance, soutenu par son frère le marĂ©chal. L'armĂ©e anglaise continue sa route vers Paris en laissant 1 500 hommes poursuivre le siège du château. Mais un jour, les dĂ©fenseurs font une sortie et massacrent les soldats occupants. La ville de Caen devient libre...

Mort

Atteint par l'épidémie de peste noire qui frappe le pays à cette époque, le , s'éteint « haut et puissant monseigneur Robert Bertrand, chevalier, sire de Bricquebec, de Roncheville, de Barneville,... membre du Conseil du roi et ancien maréchal de France ».

Mariages et descendance

Le , à Poitiers, Robert Bertrand épouse Marie de Sully, fille aînée d'Henri IV, de Sully, baron de Châles et grand bouteiller de France, et de Jeanne de Vendôme. Henri de Sully a dix enfants dont huit filles, dont Mahaut de Sully (qui se marie en 1318 à Jean de Lévis, seigneur de Mirepoix), Jean de Sully (qui se marie en 1320 à Marguerite de Bourbon, petite-fille de Saint Louis) et Jeanne de Sully (mariée en 1336 à Jean, vicomte de Rochechouart).

Robert VIII Bertrand et Marie de Sully ont deux garçons et deux filles :

  • Jeanne Bertrand dite l'AĂ®nĂ©e (nĂ©e en 1320), elle reçoit Bricquebec et Ă©pouse Guillaume Paynel ;
  • Robert IX, nĂ© en 1321, tuĂ© Ă  l'âge de vingt-cinq ans Ă  la bataille de CrĂ©cy le ;
  • le deuxième garçon, Guillaume, mariĂ© Ă  Jeanne Bacon, est tuĂ© Ă  la bataille de Mauron en Bretagne le , sans descendance. Notons qu'Ă  cette bataille de Mauron, dĂ©cède Guy de Clermont de Nesle, petit-fils de Guy Ier de Clermont de Nesle, marĂ©chal de France ;
  • (Philippes-)Jeanne Bertrand, (1325-?), vicomtesse de Roncheville (dont elle hĂ©rite), mariĂ©e Ă  GĂ©rard Chabot, puis en 1353 Ă  Guy IV de la Roche-Guyon (1315-1372) ;
  • Jeanne Bertran dite la jeune.

La première lignée mâle de la famille Bertrand s'éteignit.

Robert VIII Bertrand se remarie, avec Jeanne Tesson.

Leur deuxième fils, Guillaume, a une fille qui épouse le Breton Olivier II de Clisson, dont le fils, Olivier III de Clisson épouse Isabeau de Malines. Olivier IV de Clisson épouse d'abord en 1320 Blanche de Bouville, puis en 1330 Jeanne de Belleville. Du second mariage : Olivier V de Clisson, connétable de France, qui épouse Catherine de Laval. Leur fille, Béatrix de Clisson épouse Alain VIII de Rohan. Alain IX de Rohan épouse en 1407 Marguerite de Bretagne. Leur fille Catherine de Rohan épouse en 1447 en secondes noces Jean d'Albret, vicomte de Tartas. Leur fils Alain d'Albret (1440-1522), épouse Françoise de Blois. Leur fils Jean d'Albret, est roi de Navarre par son mariage avec Catherine de Foix, reine de Navarre. Leur fils, Henri II d'Albret, prince de Béarn, roi de Navarre, épouse Marguerite de Valois, duchesse de Berry. Leur fille, Jeanne d'Albret (1528-1572), reine de Navarre, épouse Antoine de Bourbon. Leur fils : Henri IV, roi de France et de Navarre.

Ainsi, le roi de France Henri IV est le descendant d'une famille normande, les Bertrand.

  • La deuxième fille du marĂ©chal Robert Bertrand, Philippa hĂ©ritière de Roncheville, se marie en deuxièmes noces Ă  Guy IV de la Roche-Guyon (château de La Roche-Guyon)... et nous arrivons Ă  Marie de la Roche-Guyon fille de Guy VII, qui Ă©pouse Michel d'Estouteville, arrière-petit-fils de la première fille du MarĂ©chal, Jeanne Bertrand hĂ©ritière de Bricquebec, dont la fille Adrienne, duchesse d'Estouteville, Ă©pouse François de Bourbon. Sa fille Marie de Bourbon a comme arrière-petit-fils Jacques-François de Goyon-Matignon (nĂ© Ă  Torigni-sur-Vire en 1689, dĂ©cĂ©dĂ© en 1751) qui devient Grimaldi par son mariage avec l'hĂ©ritière de Monaco. En Ă©pousant l'hĂ©ritière, Jacques de Goyon de Matignon doit se conformer aux règles rĂ©gissant la succession au trĂ´ne. Il adopte, pour lui (Jacques Ier de Monaco) et ses descendants le nom et les armes des Grimaldi. En revanche, il est autorisĂ© Ă  conserver certains de ses titres français : sire de Matignon, comte de Torigni-sur-Vire, baron de Saint-LĂ´, baron de La Luthumière (12 km nord de Bricquebec, commune de Brix), baron de Hambye. En revanche, son titre de duc d'Estouteville, hĂ©ritĂ© de ses ancĂŞtres OrlĂ©ans-Longueville, n'a pu se transmettre Ă  sa descendance... Ces titres, crĂ©Ă©s pour un Français par les rois de France, Ă©taient forcĂ©ment soumis Ă  la loi salique, c'est-Ă -dire, ne pouvant se transmettre que par « primogĂ©niture mâle lĂ©gitime absolue ».

Ainsi, la famille princière de Monaco descend par lignée féminine du maréchal Robert Bertrand, sire de Bricquebec.

Sceau

Son sceau (rond, diamètre 25 mm) qui prĂ©sente un Ă©cu tenu par un homme d'armes, armĂ©e d'une Ă©pĂ©e, portant d'or au lion de sinople, couronnĂ© et onglĂ© d'argent (d’oĂą le surnom de « chevalier au vert lion ») est appendu Ă  un ordre donnĂ© Ă  Thomas Fouques, maĂ®tre de l'artillerie du roi, Ă  Rouen, d'envoyer sans dĂ©lai au bailli du Cotentin Ă  Valognes 60 arbalètes avec les baudres et dix milliers d'artillerie (Bricquebec, )[2].

Liens externes

Notes et références

  1. Le Château de Bricquebec
  2. Plaisse 1994, p. 18.
  3. André Plaisse, La grande chevauchée guerrière d'Édouard III en 1346, Cherbourg, Éditions Isoète, , 111 p. (ISBN 2-905385-58-8), p. 15-16.
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