Rapport Sarr-Savoy sur la restitution du patrimoine culturel africain
Le Rapport sur la restitution du patrimoine culturel africain. Vers une nouvelle éthique relationnelle est un rapport rédigé par l'universitaire et écrivain sénégalais Felwine Sarr et l'historienne de l'art française Bénédicte Savoy, publié pour la premiÚre fois en ligne en novembre 2018 dans une version originale française et une traduction autorisée en anglais.
Rapport sur la restitution du patrimoine culturel africain. Vers une nouvelle Ă©thique relationnelle | |
Auteur | Felwine Sarr et Bénédicte Savoy |
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Pays | France |
Genre | Rapport |
Version originale | |
Langue | français |
Titre | Rapport sur la restitution du patrimoine culturel africain |
Ăditeur | Philippe Rey |
Lieu de parution | France |
Version française | |
Collection | Seuil, Paris |
Date de parution | novembre 2018 |
CommandĂ© par le prĂ©sident de la RĂ©publique française, Emmanuel Macron, l'objectif du rapport Ă©tait d'Ă©valuer l'histoire et l'Ă©tat actuel des collections publiques françaises d'Ćuvres d'art africaines provenant d'acquisitions illicites ou bien contestĂ©es, ainsi que les revendications et un plan pour les Ă©tapes ultĂ©rieures de restitutions Ă©ventuelles. Plus prĂ©cisĂ©ment, le rapport prĂ©sente Ă©galement des recommandations pour la prĂ©paration des restitutions, telles que la coopĂ©ration culturelle internationale, la recherche de provenance, les cadres juridiques, et se termine par une liste des biens culturels concernĂ©s, ainsi que des moyens de les prĂ©senter dans un avenir proche dans des musĂ©es africains.
D'aprÚs ce rapport, c'est la premiÚre fois qu'un président français annonce la restitution d'objets d'arts africains, ce qui a depuis suscité de nombreux débats et plans de « décolonisation » des musées dans un certain nombre de pays.
En 2020, ce rapport a valu à Bénédicte Savoy et Felwine Sarr la troisiÚme place au classement annuel des « personnes les plus influentes du monde de l'art international » établi par le magazine ArtReview[1] ; et en 2021, le magazine Time les a placés parmi les « 100 personnes les plus influentes » de l'année[2].
Contexte
Le rapport fait suite Ă un discours d'Emmanuel Macron, prĂ©sident de la France, le 28 novembre 2017 Ă Ouagadougou, au Burkina Faso, dans lequel il a abordĂ© la politique de la France en Afrique subsaharienne[3]. Le prĂ©sident français a chargĂ© deux universitaires d'Ă©valuer l'histoire et la composition des collections appartenant Ă l'Ătat en France, ainsi que les revendications et les motifs et les processus Ă suivre pour d'Ă©ventuelles restitutions. Sa motivation pour une rĂ©orientation fondamentale de la politique culturelle de la France Ă l'Ă©gard de l'Afrique s'exprimait Ă travers cet extrait de son discours: « Je fais partie d'une gĂ©nĂ©ration de Français pour qui les crimes de la colonisation europĂ©enne sont indiscutables et font partie de notre histoire» [3].
Pour la premiĂšre fois, un prĂ©sident français et son gouvernement ont reconnu un droit moral de restitution du patrimoine culturel, dont les Ă©lĂ©ments sont, selon la loi française, considĂ©rĂ©s comme la propriĂ©tĂ© inaliĂ©nable de l'Ătat français[4]. Les prĂ©dĂ©cesseurs de Macron n'ont jamais soutenu le retour des artefacts africains et autres objets culturels en France. Par exemple, Jacques Chirac a soutenu des collections d'art africain et son nom est inscrit dans l'intitulĂ© officiel du MusĂ©e du quai Branly - Jaques Chirac[note 1]. La dĂ©claration de Macron a donc Ă©tĂ© considĂ©rĂ©e comme historique, quelle que soit la quantitĂ© d'art qui sera finalement rendue aux pays africains[5].
Le rapport a Ă©tĂ© prĂ©sentĂ© au public le 23 novembre 2018, et a depuis suscitĂ© de nombreuses rĂ©actions dans le dĂ©bat français et international autour de ses revendications de restitution de l'art africain des musĂ©es d'Europe ou d'AmĂ©rique[6] - [7]. MalgrĂ© l'annonce par Macron d'une restitution en temps opportun, les exigences lĂ©gales pour de telles restitutions posent des obstacles considĂ©rables : en France, tous les biens publics, y compris le contenu des collections appartenant Ă l'Ătat, comme les musĂ©es, les bibliothĂšques ou d'autres institutions culturelles, sont considĂ©rĂ©s comme des biens inaliĂ©nables[8].
Les auteurs et leur mission
Le sociologue, musicien et Ă©conomiste sĂ©nĂ©galais Felwine Sarr s'est fait connaĂźtre pour son essai Afrotopia[9]. Dans cet ouvrage, il propose des thĂ©ories postcoloniales pour une comprĂ©hension prĂ©sente et future des pays africains. Il soutient que le dĂ©veloppement ultĂ©rieur des dĂ©mocraties africaines ne devrait pas ĂȘtre provoquĂ© par la reproduction des modĂšles occidentaux. Pour lui, l'Afrique devrait plutĂŽt se rĂ©inventer Ă travers une synthĂšse des formes traditionnelles et contemporaines d' organisation sociale[10]. Ses confĂ©rences et ses recherches universitaires portent sur la thĂ©orie postcoloniale, les politiques Ă©conomiques, le dĂ©veloppement, l'Ă©conomie, l'Ă©conomĂ©trie, l'Ă©pistĂ©mologie et l'histoire des idĂ©es religieuses [11]. Ancien professeur d'Ă©conomie Ă l'UniversitĂ© Gaston Berger au SĂ©nĂ©gal, il a rejoint Duke University aux Ătats-Unis en 2020[12].
L'historienne de l'art française Bénédicte Savoy enseigne l'histoire de l'art à l' Université technique de Berlin en Allemagne et est également professeur au CollÚge de France à Paris. Savoy a publié plusieurs ouvrages sur des sujets tels que l'art mondial sur les marchés occidentaux[13], sur les musées dans des contextes internationaux ou sur l'acquisition illicite du patrimoine culturel[14]. Depuis la publication du rapport, elle s'est également fait connaßtre en tant que partisane de la restitution du patrimoine culturel africain dans les collections allemandes et participe activement aux recherches et aux débats publics sur cette question[15] - [16].
Dans sa lettre officielle de nomination, Macron a chargé les deux auteurs d'engager des discussions et des ateliers avec divers acteurs en Afrique ainsi qu'en France, notamment des recherches sur l'histoire coloniale du patrimoine culturel africain[17].
En outre, Macron a demandĂ© des propositions concrĂštes et un calendrier avec des propositions d'actions pour le retour des objets culturels. A travers son Ă©noncĂ© explicite, «Le dialogue et la participation doivent accompagner toutes les Ă©tapes de ce travail»[18] :104, Macron a non seulement indiquĂ© une approche spĂ©cifique, mais a Ă©galement ouvert la porte au dĂ©bat public sur sa nouvelle politique culturelle et le rapport qui en rĂ©sulte. Depuis, ce dĂ©bat public s'est intensifiĂ© tant en Afrique [19] qu'en Europe et aux Ătats-Unis[20] - [7].
Le contenu du rapport
Dans ce rapport, les auteurs discutent des raisons et proposent des mesures pour les restitutions d'objets culturels africains des collections publiques françaises à leurs pays ou communautés d'origine. Conformément à la commission Macron, la portée du rapport concerne spécifiquement les anciennes colonies françaises subsahariennes, et dont le patrimoine culturel a été largement transféré en France pendant et aprÚs la période coloniale[note 2].
Le chapitre introductif, intitulĂ© "Une longue durĂ©e de pertes" dĂ©crit l'histoire du patrimoine culturel africain dans le contexte de la colonisation europĂ©enne[17] :7â26. Les thĂšmes centraux sont l'appropriation forcĂ©e d'objets culturels en tant que crime contre les communautĂ©s d'origine. Aussi, l'importance de la collecte, de l'Ă©tude et de l'exposition du patrimoine africain, d'abord comme curiositĂ©s puis comme objets ethnologiques, par les musĂ©es et scientifiques europĂ©ens est prĂ©sentĂ©e comme un aspect central d'une « histoire de la violence » et de la domination. :20
Se référant à des intentions similaires à celles exprimées dans leur propre rapport, Sarr et Savoy rappellent qu'en 1978, Amadou-Mahtar M'Bow, alors directeur de l'UNESCO, a plaidé en faveur d'un rééquilibrage du patrimoine culturel mondial entre le nord et le hémisphÚres sud. Ils citent le discours de M'Bow « Un plaidoyer pour le retour d'un patrimoine culturel irremplaçable à ceux qui l'ont créé » :
Par ailleurs, le rapport considÚre le plaidoyer de l'opinion publique depuis le début des années 2010 comme l'une des principales motivations d'un changement d'attitude en Europe[17]:23. Sur la base de leur évaluation selon laquelle environ 90 % de tout le patrimoine culturel de l'Afrique subsaharienne est en possession de collections occidentales, :11 les auteurs comprennent leur rapport principalement comme un appel à la restitution opportune des artefacts et à l'établissement d'une nouvelle relation de l'Europe envers l'Afrique sur la base de la reconnaissance mutuelle:29.
AprĂšs cette brĂšve mais ciblĂ©e histoire de l'art colonial africain dans les collections occidentales et les demandes de restitution antĂ©rieures, les trois chapitres suivants intitulĂ©s « Restituer », « Restitutions et collections » et « Accompagner les retours » abordent les aspects centraux des tĂąches associĂ©es Ă de telles restitutions. Ici, les auteurs proposent Ă la fois des critĂšres de restitution ainsi qu'un calendrier concret Ă suivre par les autoritĂ©s françaises et africaines[17] :62â70. Enfin, les annexes du rapport dĂ©crivent les mĂ©thodes et les dĂ©marches suivies par les auteurs, Ă©tayĂ©es par des documents correspondants, des tableaux et des chiffres sur les collections en France ainsi que des informations sur les musĂ©es en Afrique:91â136. En raison de son vaste fonds d'environ 70 000 objets d'Afrique et de ses archives dĂ©taillĂ©es sur la provenance des objets, le musĂ©e du quai Branly Ă Paris occupe une place particuliĂšre dans la liste du rapport. Il se termine par des photographies et des informations dĂ©taillĂ©es sur une trentaine d'objets exceptionnels de ce musĂ©e, considĂ©rĂ©s comme prioritaires pour une restitution future:154â202.
Le rapport identifie également les mesures importantes suivantes pour une réorientation globale des relations culturelles : seule une coopération internationale respectueuse, avec un accÚs à la recherche, aux archives et à la documentation pour les personnes en Afrique ou dans la diaspora africaine, pourra combler les grands écarts entre l'Afrique et l'Occident en matiÚre de la préservation, l'étude et l'appréciation plus large de la culture africaine soient réduites. Ces mesures comprennent la recherche et la formation conjointes par les musées participants, l'échange d'expositions temporaires - également entre pays africains - ainsi que le soutien matériel de réseaux ou d'infrastructures appropriés pour les musées en Afrique et les experts travaillant pour eux[note 3]. Pour faire en sorte que la connaissance du patrimoine culturel africain atteigne les jeunes générations, les auteurs recommandent également des initiatives éducatives efficaces[17] :88.
Le contexte historique et géopolitique
Bien que le rapport Sarr/Savoy et les débats qui l'accompagnent fassent référence à la restitution du patrimoine culturel d'Afrique, l'annonce de Macron lors de sa premiÚre visite en Afrique en tant que président de la France s'inscrit dans le contexte plus large de l'histoire, du présent et de l'avenir des relations politiques françaises avec l'Afrique[4]. Compte tenu de l' émancipation politique croissante de certains pays africains vis-à -vis de la France, ainsi que de l'influence de la Chine en Afrique, la politique étrangÚre française est intéressée à maintenir et à développer sa relation privilégiée avec les pays d' Afrique de l'Ouest et le monde francophone au sens large[4]. Enfin, les discussions et la justification éthique des restitutions sont des exemples d'une vision changeante du colonialisme européen en Afrique[16]. En raison du passé colonial de chaque pays et de l'appréciation publique actuelle de ce passé, cette réévaluation historique a pris des voies différentes en France, en Grande-Bretagne, en Belgique ou en Allemagne[16].
RĂ©actions et premiĂšres restitutions Ă la suite du rapport
Depuis la publication du rapport, son analyse et ses recommandations ont suscitĂ© de nombreux commentaires critiques, affirmatifs ou nĂ©gatifs, tant en France que dans d'autres pays europĂ©ens[21] - [7]. Des musĂ©es et des sources gouvernementales en Allemagne et aux Pays-Bas ont publiĂ© de nouvelles directives sur les futures restitutions, la recherche de provenance et la coopĂ©ration internationale[22]. Des restitutions ultĂ©rieures ont Ă©tĂ© faites Ă la Namibie depuis l'Allemagne[23] et Ă l'IndonĂ©sie depuis les Pays-Bas[24]. En avril 2021, le musĂ©e ethnologique de Berlin et l' universitĂ© d'Aberdeen en Ăcosse ont annoncĂ© le retour des bronzes du BĂ©nin d'ici 2022[25].
Contrairement Ă certaines rĂ©actions publiques d'historiens de l'art et de journalistes, qui Ă©voquaient la vision de musĂ©es presque vides, le rapport ne prĂ©conise pas un retour en force de tout le patrimoine culturel africain de France[26]. Au contraire, Sarr et Savoy proposent que des arrangements diplomatiques bilatĂ©raux soient conclus avec les gouvernements africains pour la restitution des piĂšces importantes sur la base de propositions d'experts africains[17]:70â81. Cependant, comme recommandation gĂ©nĂ©rale, les auteurs plaident pour une restitution permanente des biens culturels acquis illĂ©galement. Ils rejettent explicitement un retour temporaire de tels objets Ă©voquĂ© par Macron et privilĂ©giĂ© par certains conservateurs de musĂ©es, comme StĂ©phane Martin, ancien directeur du musĂ©e du quai Branly[27]. Lors d'une confĂ©rence en juin 2019, en prĂ©sence de quelque 200 universitaires et reprĂ©sentants des ministĂšres de la Culture d'Europe et d'Afrique, le ministre français de la Culture a promis que « la France examinera toutes les demandes prĂ©sentĂ©es par les nations africaines », mais leur a demandĂ© de ne pas « se focaliser sur la seule question de la restitution »[28].
Aussi, dâautres personnes critiquent la forme du rapport en-dehors des solutions quâil propose. Comme le mentionne Emmanuel Pierrat dans son ouvrage sur la question : « Tout lâĂ©difice du rapport Sarr-Savoy repose sur une accusation, qui prend la forme dâune prĂ©somption absurde : les Ćuvres dâart dĂ©tenues en Europe auraient toutes Ă©tĂ© forcĂ©ment pillĂ©es »[29]. Or, cette affirmation peut paraĂźtre fausse, car mĂȘme si lâhĂ©ritage colonial est extrĂȘmement fort dans les collections des musĂ©es, il est faux de dire quâil reprĂ©sente arbitrairement lâentiĂšretĂ© du contenu prĂ©sent. Bien quâil ne sâagisse pas non plus dâune maniĂšre de faire dĂ©culpabiliser le rĂŽle des ex-colonisateurs, une part de la responsabilitĂ© ne leur reviendrait pas selon lui et ouvrirait la porte Ă dâautres solutions quant Ă la conservation de ce patrimoine dans le futur.
Parmi ces pistes de solution, certains suggĂšrent pour l'avenir de viser une forme « d'entre-deux ». En conservant certains musĂ©es en Europe, de maniĂšre consciencieuse et avec lâapprobation des concernĂ©s africains ; on lutte plus efficacement contre le trafic illicite des biens culturels en Afrique qui sĂ©vit depuis de nombreuses annĂ©es[30], en plus du soulagement de tous les enjeux budgĂ©taires liĂ©s Ă la conservation et la restauration matĂ©rielle de tels objets en Afrique[31].
Le 24 décembre 2020, le gouvernement français a promulgué une nouvelle loi qui permet la restitution définitive de plusieurs objets culturels des collections françaises au Sénégal et à la République du Bénin[32]. Déjà en novembre 2019, le Premier ministre français avait présenté un sabre historique au Musée des civilisations noires de Dakar, au Sénégal, qui aurait appartenu à Omar Saïdou Tall, un éminent chef spirituel ouest-africain du XIXe siÚcle qui a combattu les colonialistes français en les années 1850[33] - [note 4]. Cet objet symbolique, ainsi que 26 statues africaines pillées par les troupes françaises lors du pillage des Palais royaux d'Abomey en 1892 et offertes par le général français Alfred Dodds à un prédécesseur du musée du quai Branly à Paris, constituent le premiÚres restitutions permanentes en vertu de la nouvelle loi[34]. Cette restitution avait déjà été réclamée par le gouvernement béninois en 2016, mais avait été refusée par les précédents gouvernements français[35].
En mai 2021, de nouvelles enseignes expliquant leur future restitution ont Ă©tĂ© ajoutĂ©es Ă un ensemble de trois statues anthropomorphes reprĂ©sentant les rois historiques GlĂ©lĂ©, GhĂ©zo et BĂ©hanzin du Dahomey[note 5]. PrĂ©alablement au retour de 26 objets au BĂ©nin, le musĂ©e a accueilli une semaine de confĂ©rences, dĂ©bats et films documentaires historiques, consacrĂ©e Ă l'histoire du Dahomey[36]. En outre, un prĂȘt de 20 millions d'euros de l' Agence française de dĂ©veloppement a Ă©tĂ© allouĂ© Ă un nouveau musĂ©e et Ă la rĂ©habilitation des quatre palais royaux historiques d' Abomey, site du patrimoine mondial de l'UNESCO depuis 1985[37] - [38].
Le 5 octobre 2021, l'universitaire camerounais Achille Mbembe remet une version de ses travaux Ă Emmanuel Macron[39].
Le 19 fĂ©vrier 2022, une exposition prĂ©sentant l'art contemporain bĂ©ninois ainsi que les 26 Ćuvres restituĂ©es a Ă©tĂ© inaugurĂ©e par le prĂ©sident du BĂ©nin au Palais de la Marina Ă Cotonou[40]. La cĂ©rĂ©monie d'ouverture a rĂ©uni des artistes, des chefs traditionnels et des politiciens, et plus de 1000 visiteurs sont venus le lendemain pour voir les sculptures en bois, cĂ©lĂ©brant leur retour aux sources[41].
Numérisation et libre accÚs
Entre autres recommandations, le rapport appelait à la numérisation de toutes les informations sur les collections d'objets culturels africains et à la recherche et à rendre ces informations disponibles dans le monde entier en libre accÚs sur Internet[17] :86. Dans une déclaration sur cette suggestion, plus de 100 experts internationaux de la numérisation et de la recherche d'objets culturels ont fait part de leurs réserves spécifiques. En particulier, ils ont mis en garde contre une action unilatérale des collections occidentales et ont exigé que les pays africains participent à de telles décisions. En outre, les institutions africaines devraient obtenir des droits d'auteur pour ces données, puisque l'information numérique est considérée comme étant d'une importance égale à la restitution des objets culturels physiques[42].
Page web sur les fonds des collections françaises
En septembre 2021, la page « Le Monde en musée », a été publiée par l' Institut National d'Histoire de l'Art (INHA) . Il donne accÚs à une carte annotée des objets d'Afrique et d'Océanie dans plus de 240 collections publiques françaises. Il a été conçu comme un outil de recherche accessible au public et un lien entre les musées et les institutions de recherche, quelle que soit leur localisation dans le monde. Pour chacune des collections, le nom officiel avec la description de ses fonds, ainsi que des informations sur leur provenance sont donnés[43].
RĂ©actions des pays africains
Alors que des commentateurs de pays africains comme le BĂ©nin, l'Ăthiopie, le Mali, le NigĂ©ria ou la Namibie ont, depuis plusieurs dĂ©cennies, formulĂ© des demandes de restitution Ă la France, la Grande-Bretagne, l'Allemagne et d'autres pays [17] :23â26le rapport de Sarr et Savoy a suscitĂ© des commentaires positifs et suscitĂ© de grandes attentes : Kwame Opoku, journaliste culturel ghanĂ©en et ancien membre du personnel du bureau des Nations unies Ă Vienne[44], rapportait en 2019 que le Conseil international des musĂ©es africains (AFRICOM) a "officiellement adressĂ© son soutien" aux restitutions comme le suggĂšre le rapport Sarr/Savoy[19]. Certains conservateurs africains ont Ă©galement rĂ©agi de maniĂšre critique aux initiatives occidentales unilatĂ©rales concernant les restitutions. Flower Manase, conservatrice au MusĂ©e national de Tanzanie, a dĂ©clarĂ© que tout d'abord, les experts africains doivent ĂȘtre impliquĂ©s en tant que partenaires Ă©gaux, partager leurs propres rĂ©cits et impliquer les communautĂ©s d'origine[45].
D'autres commentateurs culturels africains, comme le journaliste tanzanien Charles Kayuka, ont soulignĂ© la nature occidentale ethnocentrique des expositions de musĂ©es, ce qui explique pourquoi elles ont tendance Ă ne pas susciter beaucoup d'intĂ©rĂȘt auprĂšs des visiteurs locaux en Afrique[46]. Un autre de ses arguments remet en question l'importance du patrimoine culturel traditionnel pour les sociĂ©tĂ©s africaines modernes et mondialisĂ©es :
Il est temps de réparer notre identité volée. (...) Mais les masques et les fétiches qui sont aujourd'hui entreposés dans les musées européens, il ne servirait à rien de les rendre, car ces piÚces n'ont aucune valeur pour les Africains. Ils sont vides, morts, désenvoûtés, ils ont perdu leur sens originel parce qu'ils ont été arrachés de leur contexte et sont donc devenus des objets sans signification. Car ce n'étaient pas des objets d'art, mais des objets religieux, rituels et magiques. C'est pourquoi ils étaient si importants pour les sociétés africaines de l'époque. - Charles Kayuka, Tanzanie
Dans leur rapport, Sarr et Savoy ont toutefois tenu compte de ces diffĂ©rences en appelant Ă la coopĂ©ration internationale et Ă l'implication communautaire[17] :85â86. En ce qui concerne les consĂ©quences pour la politique culturelle nationale dans les Ătats africains, Felwine Sarr a dĂ©clarĂ© dans une interview Ă un journal allemand[47] :
"Nous voulons conseiller aux participants africains (sur les efforts de restitution) de diriger la discussion dans leurs pays. Il y a déjà une place au musée des civilisations noires à Dakar. Les infrastructures varient selon les pays, mais les musées en tant qu'institutions sont similaires."
Voir Ă©galement
Remarques
- Chirac was one of the effective supporters of the Musée du quai Branly - Jaques Chirac.
- The report does not cover North African countries, whose cultures have been marked by indigenous populations such as the Berber ethnic groups and by Arab-Islamic influence.
- Following the report, France pledged to finance a loan for a museum for the future restitution of objects from the Royal Court of Abomey in Benin. Stapley-Brown, « Benin gets âŹ20m loan for new museum to show restituted heritage », theartnewspaper.com, (consultĂ© le )
- As French historian Francis Simonis pointed out, the sabre of Hadj Omar Tall actually is not an African object, but a European weapon, made for the French Army in the 19th century, and was later taken back to France from SĂ©gou in the modern state of Mali.
- The signboard next to the group of three statues from the royal palaces in Abomey, presented in May 2021, says in translation from the French original: "The President of the Republic Emmanuel Macron promulgated on December 24, 2020, the text of the law adopted by the National Assembly on December 17, 2020 for the restitution to the Republic of Benin of works taken by Colonel, then General Dodds in Abomey in 1892. This decision follows Benin's official request in July 2016. Notwithstanding the principle of inalienability of French public collections, these works cease to be part of the collection of the Musée du quai Branly-Jacques Chirac and become the property of the Republic of Benin. The return of works to Benin is currently being carried out in full collaboration with the authorities of the Republic of Benin."
Les références
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Liens externes
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- Site officiel