Contexte avant la course
Le championnat du monde
Björn Waldegård, champion du monde 1979.
Ayant succédé en 1973 au championnat international des marques (en vigueur de 1970 à 1972), le championnat du monde des rallyes se dispute sur une douzaine de manches, dont les plus célèbres épreuves routières internationales, telles le Rallye Monte-Carlo, le Safari ou le RAC Rally. Parallèlement au championnat des constructeurs, la Commission Sportive Internationale (CSI) a depuis 1979 créé un véritable championnat des pilotes qui fait suite à la controversée Coupe des conducteurs instaurée en 1977, dont le calendrier incluait des épreuves de second plan. Pour la saison 1980, la CSI a exclu les manches suédoise et finlandaise du championnat constructeurs, ces deux épreuves ne comptant que pour le classement des pilotes. Huit des douze manches du calendrier se disputent en Europe, deux en Afrique, une en Amérique du Sud et une en Océanie. Elles sont réservées aux voitures des catégories suivantes :
- Groupe 1 : voitures de tourisme de série
- Groupe 2 : voitures de tourisme spéciales
- Groupe 3 : voitures de grand tourisme de série
- Groupe 4 : voitures de grand tourisme spéciales
Premier champion du monde des rallyes, Björn Waldegård concourt à nouveau pour le titre 1980. Cependant, le pilote suédois, pilote officiel de Mercedes-Benz qui ne participera qu'à la moitié des épreuves du calendrier, a dû trouver un autre volant en ce début de saison, au sein de l'équipe officielle Fiat. Son coéquipier Hannu Mikkola, vice-champion en 1979, dispute quant à lui les premières épreuves à titre privé, s'étant engagé sur une Porsche au Rallye Monte-Carlo et s'alignant sur sa Ford Escort personnelle en Suède[2]. Vainqueur de la première manche sur Fiat et leader provisoire du championnat, Walter Röhrl ne dispute pas la manche suédoise, tout comme son coéquipier Markku Alén, autre favori dans la course au titre.
L'épreuve
Épreuve hivernale, le Rallye de Suède a remplacé en 1966 le Rallye du Soleil de Minuit, traditionnellement disputé en juin[3]. Lors de ses dix premières éditions, le parcours était tenu secret, seuls les pilotes locaux ayant une réelle chance de l'emporter. Depuis 1977, les équipages ont la possibilité d'effectuer des reconnaissances les deux semaines précédant la course mais à ce jour aucun pilote étranger n'a encore pu s'imposer dans la région du Värmland. Björn Waldegård et Stig Blomqvist y détiennent le record de victoires, avec cinq succès chacun.
Les forces en présence
L'Opel Ascona 400 (ici lors d'une course historique), une des favorites de l'épreuve.
L'Euro Händler Team a engagé une Opel Ascona 400 groupe 4 (1050 kg, moteur quatre cylindres de 2420 cm3 développé chez Cosworth, 260 chevaux) pour Anders Kulläng, qui dispose pour la première fois d'un modèle lui permettant de viser la victoire sur ses terres. À ses côtés, on compte une très grand nombre de Kadett GT/E en groupes 1 et 2 aux mains des principaux animateurs du championnat de Suède, dont celle de l'espoir Björn Johansson, engagée par Opel Suède, d'une puissance de 190 chevaux[5].
Sur cette épreuve non inscrite au championnat constructeurs, la marque turinoise n'est pas officiellement présente mais assiste toutefois Björn Waldegård, engagé par Fiat Suède sur la 131 Abarth groupe 4 avec laquelle il a terminé troisième du dernier
Rallye Monte-Carlo, et sur laquelle quelques adaptations (garde au sol relevée, voies rétrécies, carrossage arrière réduit, différentiel spécifique) ont été apportées pour la manche scandinave. Cette voiture de 1020 kg (hors plein d'essence), à transmission classique, est animée d'un moteur deux litres seize soupapes à injection Kugelfischer développant 238 chevaux à 8000 tr/min[4]. Fiat Suède a également engagé deux 131 Abarth groupe 2 pour Gert Blomqvist et Bengt Öberg.
Dans l'attente de l’homologation de la nouvelle version groupe 4, Datsun Europe a engagé deux berlines 160J PA10 groupe 2 (965 kg, moteur deux litres, 198 chevaux à 7800 tr/min[6]), confiées à Timo Salonen et Per Eklund, ce dernier débutant dans l'équipe.
La puissante Saab 99 turbo de Stig Blomqvist.
Victorieux en 1979, le constructeur suédois engage à nouveau un coupé 99 turbo groupe 2 pour Stig Blomqvist, une traction pesant 1080 kg. Par rapport à l'année précédente, ce modèle a gagné en puissance, le quatre cylindres deux litres turbocompressé développant désormais 270 chevaux à 6000 tr/min, et bénéficie d'une direction assistée[7]. Second pilote de la marque, Ola Strömberg dispose quant à lui d'une 99 EMS groupe 2 à moteur atmosphérique de 150 chevaux[5].
Le Dealer Team Vauxhall a engagé une Chevette HSR groupe 4 pour le Finlandais Pentti Airikkala. Cette voiture d'environ une tonne est équipée d'un moteur quatre cylindres de 2300 cm3 à double arbre à cames en tête développant 235 chevaux à 7400 tr/min[6] et s'avère très efficace sur la neige.
La marque ayant provisoirement renoncé aux rallyes, Hannu Mikkola a racheté une Escort RS1800 groupe 4 usine de la saison passée, dont il a confié la préparation au spécialiste David Sutton. Pesant 980 kg, cette voiture à transmission classique dispose d'un moteur deux litres alimenté par carburateurs, d'une puissance de l'ordre de 260 chevaux[6]. Également engagés à titre privé, les Suédois Bror Danielsson et Morgan Carlsson, ainsi que le Norvégien Martin Schanche, disposent de modèles identiques.
Habituel coéquipier de Waldegård et Mikkola chez Mercedes, Ingvar Carlsson dispute son rallye national au volant d'une BMW 320i groupe 2 privée.
Le constructeur tchèque a engagé un coupé 130 RS groupe 2 (800 kg, moteur arrière, 1300 cm3, 120 chevaux à 7800 tr/min) pour le Norvégien John Haugland.
Déroulement de la course
Première étape
Les concurrents s'élancent de Stockholm le vendredi après-midi, en direction de Karlstad. La température est relativement douce pour la saison, avec des pluies intermittentes, et par endroits la neige a fait place à la boue. Les quatre premières épreuves chronométrées sont très courtes et ne permettent pas de creuser d'écart significatif. À l’issue de ces dix kilomètres contre la montre, Hannu Mikkola s'est positionné en tête, sa Ford Escort devançant de dix secondes la Saab de Stig Blomqvist et de quinze l'autre Escort de Bror Danielsson. Cependant, dans le dernier secteur avant l'arrivée de cette première étape, le pilote finlandais compromet toutes ses chances en sortant de la route ; l'équipage parvient à repartir mais les trois bonnes minutes perdues l'ont relégué à la quatre-vingt-onzième place du classement général. Alors qu'il occupait la troisième position, Danielsson a perdu deux minutes à cause d'un câble d’accélérateur cassé et perdu de nombreuses places. Blomqvist rallie Karlstad en tête, avec quatorze secondes d'avance sur l'Opel Ascona d'Anders Kulläng et dix-huit sur la Datsun de Timo Salonen. Aucun abandon notable n'a été enregistré lors de cette première journée et la course reste très ouverte, les quinze premiers équipages classés se tenant en moins d'une minute.
Karlstad, terme de la première étape et point central du Rallye de Suède.
Deuxième étape
Les équipages repartent le samedi matin de Karlstad, sous le soleil, pour une boucle de près de six-cents kilomètres. Déjà retardé la veille, Danielsson est à nouveau victime de problèmes mécaniques quelques kilomètres le départ, et doit définitivement garer son Escort, joint de culasse claqué. Blomqvist et Mikkola se montrent de loin les plus rapides lors des deux premières épreuves, le Finlandais amorçant une belle remontée. Alors qu'il venait de s'emparer de la sixième place, Stromberg renonce peu après, tringlerie de boîte de vitesses de sa Saab hors d'usage. En tête, Blomqvist garde l'avantage sur Kulläng jusqu'à mi-étape, l'écart entre les deux hommes étant alors de vingt-quatre secondes, tandis que Björn Waldegård (sur Fiat 131 Abarth) a pris le meilleur sur la Vauxhall de Pentti Airikkala et la Datsun de Timo Salonen pour s'installer en troisième position. Toujours aux avant-postes, Mikkola est revenu dans les dix premiers du classement général.
Alors qu'il contrôlait la course, Blomqvist crève à l'avant droit peu après Hamra et doit remplacer sa roue en pleine spéciale, perdant deux minutes et demie ; il est relégué en sixième position, une minute derrière l'Opel Kadett de Björn Johansson, tandis que Kulläng s'empare du commandement avec vingt-huit secondes d'avance sur Waldegård et plus d'une minute sur Airikkala et Salonen, tous deux en pleine bagarre. Blomqvist attaque très fort dans les trois secteurs suivants, réduisant de près de trente secondes son retard, et remonte en troisième position à seulement une demi-minute de Waldegård. Ce dernier réagit et fait jeu égal avec son rival dans les deux dernières épreuves chronométrées. Kulläng regagne Karlstad avec près d'une minute d'avance sur Waldegård, une minute et demie sur Blomqvist. Airikkala est quatrième, alors que Salonen, dont la voiture manque de puissance sur les tronçons rapides, a rétrogradé à la septième place derrière Mikkola, auteur d'une spectaculaire remontée, et Johansson.
Troisième étape
Longue de presque neuf-cents kilomètres, la dernière étape, disputée de nuit est la plus difficile. Les cent-un équipages rescapés repartent de Karlstad le samedi dès vingt-deux heures. Blomqvist et Kulläng se montrent d'emblée extrêmement rapides tandis que Waldegård (qui a fait monter un rapport de pont plus court sur sa Fiat) perd du terrain. Après trois épreuves spéciales, Blomqvist est revenu en seconde position, mais malgré une attaque permanente ne va pas parvenir à inquiéter Kulläng, les deux hommes dominant totalement cette dernière étape, se partageant les meilleurs temps, et vont accomplir les 237 kilomètres chronométrés à la même moyenne record de 98,65 km/h, l'écart initial d'une minute et demie ayant à peine fluctué au cours de la nuit. Souvent malchanceux les années précédentes, Kulläng remporte sa première victoire en championnat du monde. Rapidement débordé par la Saab de Blomqvist, Waldegård a ensuite assuré sa troisième place, contrôlant le retour de Mikkola, ce dernier terminant quatrième après un long duel avec Johansson qui s'est montré très performant dans les épreuves nocturnes, échouant à seulement une vingtaine de secondes du Finlandais. Handicapé par des problèmes de différentiel, Airikkala n'a pu défendre sa position et termine sixième, loin devant Salonen, distancé en fin de parcours.
Classements intermédiaires
Classements intermédiaires des pilotes après chaque épreuve spéciale[5]
Première étape (ES1 à ES5) |
Deuxième étape (ES6 à ES16) |
Troisième étape (ES17 à ES29) |
Classement général