RTS,S
Le RTS,S/AS01E, distribué sous la marque Mosquirix, est un vaccin à base de protéines recombinantes actif contre Plasmodium falciparum, principal parasite responsable du paludisme.
Développé par les laboratoires GlaxoSmithKline depuis les années 1980 en partenariat avec l'association PATH[2], c'est le premier vaccin antipaludique à avoir été évalué par un organisme réglementaire. Le Comité des médicaments à usage humain (CHMP) de l'Agence européenne des médicaments (EMA) a ainsi rendu un avis favorable en juillet 2015[3] - [4] à la suite de la phase III de l'étude clinique conduite auprès de 15 459 enfants dans sept pays d’Afrique subsaharienne (Burkina Faso, Gabon, Ghana, Kenya, Malawi, Mozambique et Tanzanie) et dont les résultats avaient été publiés quelques jours plus tôt dans la revue médicale The Lancet[5] - [6]. Ces résultats ont établi que le vaccin présente un niveau de risque acceptable — seulement quelques cas de méningite et de convulsions — avec une certaine efficacité contre P. falciparum dans les 12 mois suivant son administration, protégeant 31 % des enfants âgés de 6 à 12 semaines et 56 % de ceux âgés de 5 à 17 mois contre le premier épisode clinique du paludisme. L'Organisation mondiale de la santé (OMS) a par la suite estimé que, bien qu'il soit modérément efficace, ce vaccin présente un intérêt pharmaceutique justifiant de réaliser un pilote à plus grande échelle[7]. La vaccination des jeunes enfants dans les zones à forte transmission du parasite, où la mortalité est très élevée, peut en effet s'avérer déterminante pour y contenir l'impact du paludisme. Un pilote était ainsi prévu début 2018 avec le Ghana, le Kenya et le Malawi afin d'établir si les résultats obtenus en phase III d'essai clinique peuvent être reproduits en conditions normales d'utilisation[8] ; finalement lancé en 2019[9], cet essai clinique a permis d'établir que ce vaccin, lorsqu'il est utilisé en complément de médications antipaludiques pendant la saison de plus haute transmission de la maladie, doit permettre de réduire l'impact du paludisme, y compris sa létalité, de 70 %[10] - [11].
Le vaccin vise la phase hépatique du cycle du parasite en ciblant les sporozoïtes dans le foie, avant la phase sanguine[12].
Le 6 octobre 2021, l'OMS « recommande l’utilisation généralisée du vaccin antipaludique RTS,S/AS01 (RTS,S) chez les enfants en Afrique subsaharienne et dans d'autres régions où la transmission du paludisme à P. falciparum est modérée ou forte[13] ».
Composition
Le vaccin Mosquirix se présente sous forme de 25 μg d'une poudre en suspension dans un solvant pour injection. Son principe actif, le RTS,S, est constitué de la séquence répétitive de l'épitope de lymphocyte T de la protéine circumsporozoïte (CSP) de P. falciparum fusionnée avec l'extrémité N-terminale de la protéine HBsAg de l'enveloppe du virus de l'hépatite B, formant l'antigène RTS du vaccin, et de la protéine S de l'enveloppe du virus de l'hépatite B, ces deux protéines étant exprimées par des cellules de levure de boulanger (Saccharomyces cerevisiae), à l'intérieur desquelles elles s'assemblent spontanément en formant des particules pseudovirales non infectieuses (VLP, pour virus-like particles)[3] - [14]. L'adjuvant AS01 est formé de liposomes, de lipide A monophosphorylé et d'une saponine végétale[2].
L'épitope de lymphocyte T de la protéine circumsporozoïte est O-fucosylé chez P. falciparum[15] - [16] et P. vivax[17] tandis que le vaccin RTS,S produit par Saccharomyces cerevisiae ne l'est pas.
Notes et références
- (en) « Mosquirix » [PDF], sur https://www.ema.europa.eu/, EMA, (consulté le ).
- Jean-Louis Koeck, « Avis européen favorable pour Mosquirix, un nouveau vaccin contre le paludisme et l'hépatite B », sur le Vidal en ligne, (consulté le ).
- (en) « Mosquirix – Plasmodium falciparum and hepatitis B vaccine (recombinant, adjuvanted) » [PDF], sur le site du CHMP, (consulté le ). -
- (en) « GSK’s malaria candidate vaccine, Mosquirix™ (RTS,S), receives positive opinion from European regulators for the prevention of malaria in young children in sub-Saharan Africa », (consulté le ).
- (en) RTS,S Clinical Trials Partnership, « Efficacy and safety of RTS,S/AS01 malaria vaccine with or without a booster dose in infants and children in Africa: final results of a phase 3, individually randomised, controlled trial », The Lancet, vol. 386, no 9988,‎ , p. 31-45 (PMID 25913272, DOI 10.1016/S0140-6736(15)60721-8, lire en ligne)
- « Développement du vaccin antipaludique », Paludisme, sur OMS, (consulté le ).
- (en) « Pilot implementation of first malaria vaccine recommended by WHO advisory groups », (consulté le ).
- (en) « Ghana, Kenya and Malawi to take part in WHO malaria vaccine pilot programme », sur le site de l'OMS, (consulté le ).
- (en) « MVIP countries: Ghana, Kenya and Malawi », sur https://www.who.int/, OMS (consulté le ).
- (en) Daniel Chandramohan, Issaka Zongo, Issaka Sagara, Matthew Cairns, Rakiswendé-Serge Yerbanga, Modibo Diarra, Frédéric Nikièma, Amadou Tapily, Frédéric Sompougdou, Djibrilla Issiaka, Charles Zoungrana, Koualy Sanogo, Alassane Haro, Mahamadou Kaya, Abdoul-Aziz Sienou, Seydou Traore, Almahamoudou Mahamar, Ismaila Thera, Kalifa Diarra, Amagana Dolo, Irene Kuepfer, Paul Snell, Paul Milligan, Christian Ockenhouse, Opokua Ofori-Anyinam, Halidou Tinto, Abdoulaye Djimde, Jean-Bosco Ouédraogo, Alassane Dicko et Brian Greenwood, « Seasonal Malaria Vaccination with or without Seasonal Malaria Chemoprevention », The New England Journal of Medicine, vol. 385, no 11,‎ , p. 1005-1017 (PMID 34432975, DOI 10.1056/NEJMoa2026330, lire en ligne)
- (en) Philippa Roxby, « Trial suggests malaria sickness could be cut by 70% », sur https://www.bbc.com/, BBC News, (consulté le ).
- (en) Lander Foquet, Cornelus C. Hermsen, Geert-Jan van Gemert, Eva Van Braeckel, Karin E. Weening, Robert Sauerwein, Philip Meuleman et Geert Leroux-Roels, « Vaccine-induced monoclonal antibodies targeting circumsporozoite protein prevent Plasmodium falciparum infection », The Journal of Clinical Investigation, vol. 124, no 1,‎ , p. 140-144 (PMID 24292709, DOI 10.1172/JCI70349, Bibcode 3871238, lire en ligne)
- « L’OMS recommande l'utilisation d'un vaccin antipaludique novateur destiné aux enfants exposés au risque de contracter la maladie », sur OMS, (consulté le ).
- (en) « Mosquirix™ Assessment report » [PDF], sur le site du CHMP, (consulté le ).
- (en) Kristian E. Swearingen, Scott E. Lindner, Lirong Shi, Melanie J. Shears, Anke Harupa, Christine S. Hopp, Ashley M. Vaughan, Timothy A. Springer, Robert L. Moritz, Stefan H. I. Kappe et Photini Sinnis, « Interrogating the Plasmodium Sporozoite Surface: Identification of Surface-Exposed Proteins and Demonstration of Glycosylation on CSP and TRAP by Mass Spectrometry-Based Proteomics », PLoS Pathogens, vol. 12, no 4,‎ , article no e1005606 (PMID 27128092, PMCID 4851412, DOI 10.1371/journal.ppat.1005606, lire en ligne)
- (en) Sash Lopaticki, Annie S. P. Yang, Alan John, Nichollas E. Scott, James P. Lingford, Matthew T. O’Neill, Sara M. Erickson, Nicole C. McKenzie, Charlie Jennison, Lachlan W. Whitehead, Donna N. Douglas, Norman M. Kneteman, Ethan D. Goddard-Borger et Justin A. Boddey, « Protein O-fucosylation in Plasmodium falciparum ensures efficient infection of mosquito and vertebrate hosts », Nature communication, vol. 8,‎ , article no 561 (PMID 28916755, PMCID 5601480, DOI 10.1038/s41467-017-00571-y, Bibcode 2017NatCo...8..561L, lire en ligne)
- (en) Kristian E. Swearingen, Scott E. Lindner, Erika L. Flannery, Ashley M. Vaughan, Robert D. Morrison, Rapatbhorn Patrapuvich, Cristian Koepfli, Ivo Muller, Aaron Jex, Robert L. Moritz, Stefan H. I. Kappe, Jetsumon Sattabongkot, Sebastian A. Mikolajczak, « Proteogenomic analysis of the total and surface-exposed proteomes of Plasmodium vivax salivary gland sporozoites », PLoS Neglected Tropical Diseases, vol. 11, no 7,‎ , article no e0005791 (PMID 28759593, PMCID 5552340, DOI 10.1371/journal.pntd.0005791, lire en ligne)
Voir aussi
- OMS, « Note de synthèse: position de l’OMS à propos du vaccin antipaludique – janvier 2016 », Relevé épidémiologique hebdomadaire, no 94,‎ , p. 33-52 (lire en ligne)