RĂŽle du spectateur dans l'art
La position que le spectateur, rĂ©el ou virtuel, occupe dans l'art prĂ©sente plusieurs dimensions, entre l'incitation de l'artiste, l'appropriation de l'Ćuvre et le dĂ©veloppement d'une culture soit individuelle soit collective, par exemple la constitution d'un patrimoine.
Lâart est en effet conçu par lâartiste, mais aussi par le spectateur, grĂące Ă sa perception unique qui donne Ă lâĆuvre un caractĂšre qui est toujours Ă redĂ©couvrir. Le public justifie en partie l'art, le fait exister et lui confĂšre son sens ; lâĆuvre dâart est produite pour ĂȘtre contemplĂ©e.
Bref, le spectateur est actif dans la rĂ©duction de la distance qui existe entre lui et lâĆuvre, mĂȘme s'il ne peut jamais lâatteindre entiĂšrement. En dâautres termes, le spectateur doit admettre quâil ne peut pas connaĂźtre lâessence de lâart telle que le concevait Platon au Ve siĂšcle av. J.-C.
Au-delĂ des sensations, l'apprĂ©ciation des Ćuvres d'art met en Ćuvre la volontĂ©, les connaissances acquises, la dĂ©pendance des contextes. Par ailleurs, le problĂšme du relativisme contraint le spectateur Ă comprendre plus ou moins certaines Ćuvres.
Lâapproche de lâĆuvre
Lâapproche du spectateur face Ă lâĆuvre dâart met en avant deux processus : l'appel aux sens, lâacte sensoriel, c'est-Ă -dire voir, entendre, etc., ainsi que l'attention dĂ©libĂ©rĂ©e face Ă lâĆuvre, l'ensemble devant amener Ă la rĂ©flexion.
Dans ce deuxiĂšme processus interviennent lâintelligence, la comprĂ©hension, la sensibilitĂ© et le jugement ; cet aspect est donc dĂ©pendant de chaque personne. Ainsi le spectateur peut Ă©prouver en plus du plaisir esthĂ©tique, du dĂ©goĂ»t ou de lâambiguĂŻtĂ© ; il sera amenĂ© Ă sâinterroger non seulement sur lâĆuvre elle-mĂȘme, c'est-Ă -dire sur le support choisi par lâartiste, le contexte de crĂ©ation, etc., mais aussi sur ce quâĂ©voque pour lui lâĆuvre dâart par rapport Ă ce quâil a ressenti antĂ©rieurement ou Ă ses connaissances thĂ©oriques. Ceci lâamĂšnera ensuite Ă se poser des problĂ©matiques en relation avec cette Ćuvre, et plus gĂ©nĂ©ralement concernant lâart.
Lâapproche du spectateur est aussi fonction de la forme de lâĆuvre. En effet, le spectateur doit sâadapter au support artistique choisi par lâartiste ; toutes les Ćuvres ne sont pas Ă©galement accessibles au spectateur.
Dans La Place du spectateur, Michael Fried sâinterroge sur « la dĂ©finition du rapport entre le tableau et le spectateur » en sâappuyant sur la question de la thĂ©ĂątralitĂ©, et explique que toute « construction artificielle » ne peut exister que grĂące Ă la prĂ©sence du public. En effet, tout en sâappuyant sur Les Salons de Diderot, il propose lâidĂ©e que la peinture moderne est anti-thĂ©Ăątrale en ce quâelle rejette la prĂ©sence du spectateur. Selon Fried, celle-ci naĂźt avec la critique d'art et sâinterroge sur la place que le tableau doit accorder au spectateur. Elle adopte deux conceptions qui, malgrĂ© leur opposition, nient la prĂ©sence du spectateur, soit en le prĂ©sentant comme acteur de la scĂšne, soit en lâignorant. La premiĂšre est pastorale, elle absorbe le spectateur et le fait pĂ©nĂ©trer dans la scĂšne en lui faisant oublier sa propre apparence et celle des choses qui lâentourent : cet absorbement crĂ©e lâinconscience. La seconde est dramatique : elle ferme le tableau Ă la prĂ©sence du spectateur, elle le rejette en ignorant totalement son statut.
Lâart contemporain montre Ă©galement ce rapport Ćuvre/spectateur en sâinterrogeant sur lâintervention possible du spectateur dans lâĆuvre susceptible de le rapprocher de celle-ci ; mais aussi en sâappuyant sur la prĂ©sence du spectateur face Ă lâĆuvre originale ou sur la reproduction de lâĆuvre sur un support de diffusion de masse. La performance, par exemple, met plus en avant lâaction de lâartiste plutĂŽt que le mĂ©dium utilisĂ© et par consĂ©quent elle est une Ćuvre Ă©phĂ©mĂšre qui sâaccomplit dans une durĂ©e, qui nĂ©cessite la prĂ©sence, lâattention et parfois la participation du spectateur et qui ne peut pas ĂȘtre renouvelĂ©e. Ce genre de pratique artistique, puisquâelle ne permet pas le recul dans le temps, doit faire appel non seulement Ă la sensibilitĂ© du spectateur mais aussi Ă sa mĂ©moire sensorielle.
Le Land art entretient un rapport particulier avec le spectateur puisquâil est trĂšs Ă©phĂ©mĂšre et que pour atteindre le spectateur, il passe souvent par la vidĂ©o tel que Gerry Schum lâa rĂ©alisĂ© Ă travers son film Land art de 1969 par lequel il a voulu « propulser lâart hors du triangle atelier-galerie-collectionneur », c'est-Ă -dire rendre lâart accessible Ă tous grĂące au medium vidĂ©o ; par la photographie, et aussi par des miniatures qui peuvent ĂȘtre vendues et exposĂ©es facilement. Ces miniatures posent le problĂšme de la reproductibilitĂ© de lâĆuvre dâart : cette reproductibilitĂ© de lâĆuvre rapproche-t-elle le public de lâart ou lâĂ©loigne-t-elle du concept dâĆuvre dâart qui a pour qualitĂ© dâĂȘtre unique.
Avec son Ă©quipe, Gerry Schum sâĂ©tait aussi posĂ© le problĂšme de la reproduction de lâĆuvre dâart Ă travers lâun de ses films. Il y met en Ă©vidence une Ćuvre de Spoerri qui met en scĂšne le hasard : ce sont des objets jetĂ©s au hasard sur un miroir. Le concept de lâĆuvre change totalement dĂšs que celle-ci est reproduite, puisque la main de lâhomme qui replace les objets pour retrouver lâoriginal nâest plus lâĆuvre du hasard. MĂȘme si cet exemple est particulier, on peut tout de mĂȘme penser que lâĆuvre est recherchĂ©e par le public pour son caractĂšre unique, car câest cela qui fait dâelle une chose prĂ©cieuse. Elle doit ĂȘtre de toute Ă©vidence apprĂ©hendĂ©e selon ce caractĂšre quel que soit le medium ou le concept utilisĂ© pour sa rĂ©alisation et donc amener le spectateur Ă la contemplation.
Ce qui se prĂ©sente Ă nos sens est tellement abondant et diversifiĂ© quâil devient presque banal de sentir. Cet excĂšs, plus particuliĂšrement dâimages et de sons, amĂšne le public Ă adopter une attitude de « zappeur », ne sachant plus que choisir et surtout ne sachant plus sur quoi poser son attention.
Le relativisme en art
Comment comprendre que lâacte perceptif amĂšne parfois le spectateur Ă apprĂ©hender certaines Ćuvres dâune façon toute diffĂ©rente de celle que sâĂ©tait proposĂ© lâartiste en la concevant ?
Sentir est primordial pour ĂȘtre en contact avec lâĆuvre dâart puisque celle-ci est perçue par lâintermĂ©diaire des sens. Pour Kant, le jugement de goĂ»t rĂ©sulte de la seule sensibilitĂ©, car il ne considĂšre pas que ce que nous Ă©prouvons face Ă lâĆuvre soit dĂ» Ă un travail de lâesprit. Le rĂŽle de lâentendement, c'est-Ă -dire de lâesprit sâajoute ensuite Ă la perception sensible, dans les Ă©vocations, les interprĂ©tations et les problĂ©matiques que suscite en nous lâĆuvre dâart et qui fait donc appel Ă notre mĂ©moire et Ă nos connaissances dĂ©jĂ acquises. Kant distingue le beau du bon et de lâagrĂ©able puisque ces deux derniers sont liĂ©s Ă un intĂ©rĂȘt alors que la satisfaction liĂ©e au beau est dĂ©nuĂ©e de tout intĂ©rĂȘt, car elle ne se situe pas tant au niveau de lâobjet reprĂ©sentĂ© et dĂ©sirĂ© ou qui pourrait mâĂȘtre utile, mais au niveau de la reprĂ©sentation mĂȘme de lâobjet.
Lâobjet esthĂ©tique donne une idĂ©e de lâuniversel, car il ne change pas son essence selon que tel ou tel individu le perçoit. Cependant câest le spectateur qui, saisissant lâĆuvre Ă travers les grilles de sa propre perception, qui inclut la mĂ©moire empirique et thĂ©orique, rend subjective cette apprĂ©hension de lâĆuvre.
Michel Dufrenne adopte un autre point de vue en sâattachant Ă lâanalyse de lâexpĂ©rience esthĂ©tique. Pour lui, dire quâun objet est beau, câest « constater » et non pas « dĂ©finir » lâobjet en tant que tel puisque chaque objet impose sa propre norme du beau. Par contre, ce qui est universel câest que quels que soient les moyens que lâobjet esthĂ©tique utilise pour imposer sa norme, sa fin est de satisfaire lâĂȘtre sensible et dâĂȘtre signifiant au niveau du sensible.
De plus, le goĂ»t, qui se rapporte au beau, est Ă diffĂ©rencier « des goĂ»ts » qui ne se rapportent quâĂ moi et qui me font mettre une Ă©tiquette sur lâobjet lorsque je le dĂ©finis en tant quâobjet beau, laid, etc. : ce sont mes prĂ©fĂ©rences. Au contraire le jugement « de goĂ»t » laisse lâĆuvre imposer sa norme. Je juge au sens oĂč je rends justice Ă lâobjet esthĂ©tique en portant toute mon attention sur lui et en le laissant sâimposer Ă mes sens. Avoir du goĂ»t câest donc admettre que lâĆuvre sâimpose dâelle-mĂȘme et ne fait appel quâaux sens, c'est-Ă -dire laisser la porte ouverte Ă toutes les sensations. Il ne faudrait donc pas se fermer devant une Ćuvre que lâon trouve laide mais plutĂŽt « Ă©prouver » complĂštement ce sentiment et pouvoir le comprendre au-delĂ de la sensation pour arriver Ă trouver sa vraie essence.
La thĂšse de Maurice Merleau-Ponty met en Ă©vidence la distinction entre les matĂ©riaux bruts, c'est-Ă -dire les donnĂ©es de la sensation, et les matĂ©riaux Ă©laborĂ©s qui sont les concepts de la perception, c'est-Ă -dire les matĂ©riaux bruts organisĂ©s grĂące Ă lâintervention de lâintellect. La dĂ©monstration a dĂ©jĂ Ă©tĂ© envisagĂ©e par Alain : lorsque lâon regarde un cube, on ne voit que trois faces, mais on peut facilement en dĂ©duire que câest un cube grĂące Ă lâintervention de lâentendement. Au contraire, la conception empiriste voit cela sous un autre angle : toute connaissance dĂ©rive de lâexpĂ©rience sensible. Locke par exemple suppose quâau dĂ©part lâesprit est vierge, une « table rase », mais quâil dĂ©veloppe ses IdĂ©es, Ă savoir ses concepts, Ă partir des impressions reçues, c'est-Ă -dire les sensations.
Ces points de vue mettent en avant lâidĂ©e quâil est possible et quâil est nĂ©cessaire dâapprendre Ă percevoir puisque la perception est un « travail » de lâintellect, c'est-Ă -dire de lâesprit qui ne peut se rĂ©aliser quâĂ partir dâune source que sont les sensations.
La culture joue un grand rĂŽle : les connaissances que lâon acquiert sur les Ćuvres et autour dâelles peuvent permettre d'ĂȘtre plus attentif Ă elles puisquâelles sont les tĂ©moins dâune Ă©poque et dâune sociĂ©tĂ©.
Lâacte de rĂ©ception dâune Ćuvre est un acte crĂ©atif en tant quâil engendre un regard toujours nouveau et par lĂ mĂȘme, une interprĂ©tation originale de lâĆuvre. Ces regards, sans cesse renouvelĂ©s, et surtout multiples ne peuvent ĂȘtre expliquĂ©s par la seule subjectivitĂ© des sens, mais aussi par un certain « relativisme » des cultures. En effet, lâacte de rĂ©ception est dâabord influencĂ© par divers facteurs de la perception, telle que notre mĂ©moire qui garde en notre esprit des concepts imagĂ©s et qui peuvent nourrir notre imagination, des sensations dĂ©jĂ ressenties, etc. Par consĂ©quent il serait incorrect de dire que « quelquâun Ă meilleur goĂ»t quâun autre » puisque chacun apprĂ©hende lâĆuvre selon sa propre perception. On peut certes se rattacher plus ou moins au jugement esthĂ©tique dâautrui mais il sâavĂšre difficile de traduire le jugement esthĂ©tique tant les sensations sont multiples et par lĂ insaisissables par lâesprit qui est limitĂ© aux mots : beau, laid, magnifique, etc. Bergson disait que la pensĂ©e Ă©tait insĂ©parable du langage puisque nous pensons dans les mots et que ceux-ci ne permettent pas les nuances qui se trouvent au niveau de nos sensations.
De plus la culture a un rĂŽle essentiel dans la rĂ©ception de lâĆuvre dâart : selon le lieu gĂ©ographique, mais aussi selon lâĂ©poque. On a pu en mesurer l'effet dans le cinĂ©ma, notamment Ă la sortie, en 1895, du film "L'ArrivĂ©e d'un train en gare de La Ciotat" des FrĂšres LumiĂšre, en se souvenant que les spectateurs ont reculĂ© et se sont mĂȘme enfuis en voyant arriver le train « sur eux ». Ce regard nâest pas moins intĂ©ressant que celui que nous portons aujourdâhui sur le cinĂ©ma mais il est diffĂ©rent puisquâĂ lâĂ©poque les gens ne pouvaient pas concevoir « une reproduction du rĂ©el » tel quâils le percevaient. Toutefois, nous sommes si habituĂ©s aux flux importants dâimages, de sons et dâimages de la rĂ©alitĂ© en mouvement quâil nous parait insensĂ© quâune telle rĂ©action puisse se reproduire. Cependant ce nâest pas si Ă©vident puisque les peuples ne conçoivent pas tous de la mĂȘme façon « la reprĂ©sentation » du monde.
Patrick Deshayes, maĂźtre de confĂ©rences en ethnologie Ă lâuniversitĂ© Paris VII, rĂ©alisa une expĂ©rience Ă©talĂ©e sur plusieurs annĂ©es chez les indiens Huni Kuin en Amazonie, pour dĂ©couvrir si la production de « lâeffet de rĂ©el » accordĂ© au cinĂ©ma est bien valable pour tous. On aurait en effet tendance Ă supposer que cette volontĂ© dâassimiler le cinĂ©ma Ă la rĂ©alitĂ© est prĂ©sente chez tous les humains, et en particulier chez ceux qui dĂ©couvrent ce systĂšme dâimages en mouvement tels que les spectateurs naĂŻfs et sauvages.
Il sâest avĂ©rĂ© lors de cette expĂ©rience que le peuple Huni Kuin nâassociait aucunement les images filmĂ©es Ă la rĂ©alitĂ© puisque ceux-ci Ă©taient beaucoup plus touchĂ©s par les changements de plans qui, en crĂ©ant une discontinuitĂ© dans le film, ne pouvaient ĂȘtre en aucun cas « la rĂ©alitĂ© » pour eux. Ils associaient plus ces images aux rĂȘves et aux visions hallucinogĂšnes. On peut donc admettre, Ă la suite de cette expĂ©rience, que la vision « naturelle » nâest pas la mĂȘme pour tous et quâelle dĂ©pend en partie des cultures. Câest pourquoi il est aussi possible dâavancer lâidĂ©e quâune crĂ©ation est destinĂ©e dâabord Ă un public choisi qui saura naturellement lui accorder du sens et de la valeur.
Le rĂŽle du contexte de l'Ćuvre
Lâartiste se situe dans l'espace existant entre lâĆuvre et le spectateur ; il peut avoir deux attitudes opposĂ©es : soit faire entrer le spectateur dans lâĆuvre, lâinviter dans le travail de sa rĂ©alisation, ou au contraire totalement rejeter sa prĂ©sence voire son rĂŽle dans son Ćuvre bien quâil soit toujours conscient de lâexistence nĂ©cessaire dâun public. Câest lui qui, en premier lieu, dĂ©cide de la maniĂšre dont il va prĂ©senter son Ćuvre et qui va choisir les moyens pour y arriver.
Lâexemple de lâartiste Felice Varini en est une illustration. Ce peintre impose un point de vue prĂ©cis au spectateur dans lâespace architectural quâil a peint. La forme peinte apparaĂźt cohĂ©rente lorsque le spectateur se situe exactement au point de vue voulu. En imposant la position que doit prendre le spectateur face Ă sa crĂ©ation, il fait donc entrer le spectateur dans le concept de sa crĂ©ation par lâĆuvre. Le point de vue est d'autant plus imposĂ© au spectateur qu'il se situe gĂ©nĂ©ralement dans un endroit de passage obligĂ© tel quâun couloir, une ouverture sur une piĂšce, etc. Lâartiste joue Ă perturber le regard, Ă imposer des lois dans la perception du spectateur face Ă son Ćuvre.
De plus, dans l'ordre du contexte, lâartiste a aussi une personnalitĂ© propre, qui retentit au niveau de ses Ćuvres. Elle est cependant insaisissable puisque lors de la conception de lâĆuvre elle passe Ă travers la propre perception de lâartiste et devient alors subjective.
Le travail de rĂ©duction de la distance entre le spectateur et lâĆuvre peut emprunter divers chemins. Les connaissances qui aident Ă lâapproche de lâart se situent dans lâhistoire de l'art qui sâĂ©tablit tout autant sur lâhistoire, que sur lâesthĂ©tique et sur la critique d'art. Elle se base sur tous les domaines, tel que la thĂ©ologie et la politique, pour pouvoir remettre les Ćuvres dans leur contexte original pour que lâon puisse mieux les dĂ©couvrir. Elle permet au spectateur dâĂȘtre en contact avec lâĆuvre mais seulement sur le plan culturel, car comprendre ce que lâon ressent face Ă elle appartient au domaine de la sensation et est donc complĂštement subjectif. Cependant ces connaissances aiguisent les sensations car elles permettent de pĂ©nĂ©trer plus facilement lâĆuvre.
De plus, lâart nâest plus dĂ©sormais lâoutil au service dâun autre domaine, il est devenu indĂ©pendant et il se suffit Ă lui-mĂȘme, on parle dâart pour l'art, dâart authentique. Ce phĂ©nomĂšne dâindĂ©pendance ne fait plus descendre lâart dans la sphĂšre sociale et câest pour cela que lâart est encore plus Ă©loignĂ© du spectateur : en effet ce dernier doit dĂ©sormais aller vers lâart, car ce nâest plus lâart qui vient vers lui.
Plusieurs mesures ont Ă©tĂ© prises pour rĂ©duire cet Ă©cart qui se creusait de plus en plus. Ainsi les politiques culturelles qui se sont multipliĂ©es Ă partir de 1945 en France ont eu pour but de dĂ©mocratiser lâart qui Ă©tait Ă cette Ă©poque encore souvent rĂ©servĂ© Ă une Ă©lite malgrĂ© lâexistence de plusieurs musĂ©es et autres lieux de culture. Ces politiques culturelles devaient donc dâabord rendre accessibles au plus grand nombre les Ćuvres capitales de lâhumanitĂ© et dâabord de la France, permettre ensuite de protĂ©ger et de mettre en valeur le patrimoine culturel et enfin favoriser la crĂ©ation.
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