Nostalgie de l'Union soviétique
La nostalgie de l'Union soviétique est un phénomène très répandu en Russie et au sein des minorités russes des pays issus de l'URSS. Cette nostalgie peut concerner le système politique (partis communistes), la puissance, la culture et la société soviétique, ou bien l'esthétique de la période soviétique (monuments, arts…). Souvent la nostalgie de l'Union soviétique est exprimée en raison des souvenirs de l'enfance et de la jeunesse : il s'agit d'un phénomène contradictoire qui englobe un large éventail d'opinions[1] - [2].
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Opinion positive sur le phénomène
La nostalgie de l'Union soviétique exprime une opinion positive envers le passé soviétique, phénomène dû à plusieurs facteurs[3] - [4] - [5] - [6] - [7] :
- la période soviétique correspond à la jeunesse de nombreuses générations, où les souvenirs de jeunesse sont naturellement magnifiés ;
- ces générations s'étaient adaptées à ce régime et savaient y vivre et y survivre, tandis que les règles (ou l'absence de règles) du post-communisme les a désorientées ;
- tous les actifs étaient fonctionnaires puisqu'il n'existait pas d'entreprises privées, et on ne pouvait pas se retrouver sans emploi ;
- durant l'ère soviétique, les mouvements de jeunesse, sportifs ou d'entreprise faisaient la promotion des idéaux communistes comme l'esprit d'équipe, et l'économie informelle nécessaire à la survie tissait entre les citoyens des réseaux de solidarité et des relations amicales ;
- la transition d'une économie planifiée d'État vers l'économie de marché ne s'est accompagnée ni d'une démocratisation politique ni d'une revalorisation économique des retraites et des salaires, de sorte que le niveau de vie de la majorité de la population s'est dégradé proportionnellement à la montée des prix ;
- la puissance militaire et la peur qu'engendrait l'URSS, ainsi que la fascination qu'elle exerçait sur ses sympathisants à l'étranger, de la Seconde Guerre mondiale jusque dans les années 1980, sont aussi des raisons de nostalgie, notamment en Russie qui s'efforce de réémerger comme grande puissance.
Cette perception peut aussi être un rejet de la frénésie de consommation et d'étalage de richesse des oligarques, alors que leurs prédécesseurs de la nomenklatura communiste (qui sont souvent leurs ascendants) étaient beaucoup plus discrets. La nostalgie de l'URSS et du système soviétique peut aussi se manifester par la négation des crimes (terreur, arrestations arbitraires et tortures, déportations, travail forcé avec une mortalité importante) et des faiblesses du monde soviétique (déficit presque universel, pénuries constantes, files d'attente, corruption, répression de la libre pensée et de la dissidence), par leur relativisation comme « effets secondaires » de l'héritage du tsarisme, de la guerre civile russe, de l'hostilité des pays capitalistes et de la Seconde Guerre mondiale, ou encore par la glorification des mérites du système soviétique, réels (bas prix, logement inconfortable mais abordable, éducation, santé d'accès facile) ou proclamés (« justice sociale » en dépit des privilèges de la nomenklatura, « stabilité » en dépit des purges, « sécurité » en dépit de la menace constante de déportation au Goulag par l'arbitraire du NKVD)[8]. C'est ce négationnisme qui est à l'origine de la dissolution le 27 décembre 2021, par les autorités russes, de la fondation Memorial qui tentait de permettre à la société russe de s'humaniser par le biais d'une catharsis basée sur le devoir de mémoire[9] - [10] - [11]
Opinion négative sur le phénomène
La nostalgie du régime soviétique peut également exprimer un rejet des idées et des valeurs humanistes modernes, perçues comme étrangères aux racines identitaires de la « Russie éternelle » (nationalisme, suprémacisme russe, christianisme orthodoxe…) et contraires au communisme[12]. Or ce rejet maintient la Russie, ses États-satellites (soit la plupart de ses voisins, autres que la Finlande et les pays baltes) dans un modèle politique et social qui n'intègre pas les règles des droits de l'Homme, du droit, de la démocratie et de la justice sociale ; ce modèle considère les valeurs universelles (parce qu'elles répondent aux besoins fondamentaux de tout être humain, quelles que soient ses origines et sa culture[13]) comme une ruse du capitalisme pour asservir les peuples, une idéologie exclusivement occidentale et inadaptée aux pays de l'espace post-soviétique[14] ; la Chine communiste partage ces positions en cultivant toujours officiellement la mémoire du maoïsme, même si elle déroge aujourd'hui à la plupart des principes du Petit livre rouge[15].
Pour l'ambassadeur finlandais aux États-Unis Mikko Hautala, la nostalgie russe est une matrice pour les nouvelles guerres[16] :
« I think most of us simply concluded that this is a kind of nostalgia politics. But I think most of us didn’t see or didn’t want to conclude that this [Russian] obsession with history was actually a blueprint for war. »
Notes et références
- (ru) Cet article est partiellement ou en totalité issu de l’article de Wikipédia en russe intitulé « Ностальгия по СССР » (voir la liste des auteurs).
- (ru) Ностальгия по СССР (« Nostalgie de l'URSS ») : de levada.ru consulté le 19 déc. 2018.
- Christina Maza, (en) « Russia vs. Ukraine: More Russians Want the Soviet Union and Communism Back Amid Continued Tensions » in : Newsweek - consulté le 20 déc. 2018.
- Article (en) Why do so many people miss the Soviet Union ? (« Pourquoi tant de gens regrettent-ils l'Union soviétique ? »), The Washington Post du 21 déc. 2016 - .
- Kristen Ghodsee, (en) Nostalgia for Communism, Bowdoin College - .
- Article (en) The fall of the Soviet Union - sur Levada.ru consulté le 9 janv. 2017.
- Tom Balmforth, (en) Russian nostalgia for Soviet Union reaches 13-year high (« La nostalgie russe pour l'Union soviétique atteint son plus haut niveau depuis 13 ans ») in: Reuters du 19 déc. 2018 - .
- Article (en) Most Russians Say Soviet Union "Took Care of Ordinary People" dans The Moscow Times du 24 juin 2019 – Poll|url=.
- http://www.stapravda.ru/20011208/10_let_bez_SSSR_33385.html 10 лет без СССР «Ставропольская правда» 08 декабря 2001 г.
- « Après Memorial International, le Parquet russe s'attaque au Centre des droits humains Memorial », sur Association Mémorial France, (consulté le ).
- Veronika Dorman, « Quand le Kremlin veut interdire la mémoire des crimes du communisme », sur Libération (consulté le ).
- « La Cour suprême russe dissout l’ONG Memorial, pilier de la défense des libertés dans le pays », Le Monde.fr, (lire en ligne, consulté le ).
- http://www.razgovor.org/iznutri/article423/ Россия - взгляд изнутри.
- Virginia Henderson, The Principles and Practice of Nursing, The Macmillan Company, Canada, ASIN B000PIDE0A.
- Jean Radvanyi, La nouvelle Russie, Armand Colin, coll. « U », Paris 2004, 3e éd., (ISBN 2-200-26687-1).
- La Chine devient la troisième puissance économique mondiale, Le Monde, 19 juillet 2007 et La Chine, troisième économie mondiale, Le Figaro, 20 juillet 2007.
- (en-US) Robbie Gramer, « The Russia Whisperer », sur Foreign Policy (consulté le ).
Annexes
Bibliographie
- Svetlana Alexievitch, La Fin de l'homme rouge ou le temps du désenchantement, Arles, Actes Sud, 2013, 541 p. (ISBN 978-2-330-02347-8)
Articles connexes
Liens externes
- (ru) Проект «Энциклопедия нашего детства» — СССР глазами современников
- (ru) Музей "20-й век". Воспоминания о советском детстве
- (ru) Mad-Love.Ru Родом из СССР
- (ru)Советские открытки и плакаты
- (ru) «От СССР к России. История неоконченного кризиса. 1964-1994»
- (ru) Старые советские журналы
- (en) Central Asia in Nostalgia for the Soviet Period