AccueilđŸ‡«đŸ‡·Chercher

Mission Joffre en ExtrĂȘme-Orient

La mission Joffre en ExtrĂȘme-Orient (11 novembre 1921- 12 mars 1922) est une mission diplomatique qui pour but de renforcer l'influence française dans les pays Ă©mergents asiatiques (Indochine, Cambodge, Siam, Japon, CorĂ©e et rĂ©publique de Chine) et de les remercier pour leur participation Ă  la Grande Guerre.

Le prince HĂ©ritier Hiro Hito.

Le gouvernement fait appel au maréchal Joffre, héros de la bataille de la Marne, comme ambassadeur de prestige pour cette mission.

Visite du prince héritier Hirohito en France

Le prince hĂ©ritier Hirohito effectue un tour d’Europe: Son voyage dure 6 mois et l’emmĂšne en Italie, en Angleterre, aux Pays-Bas, en Belgique et en France.

En France, il fait Ă©tape Ă  Verdun le au moment des cĂ©rĂ©monies de la bataille de Verdun. Il visite Ă  cette occasion les champs de bataille de Verdun, l’HĂŽtel de Ville et le tout nouveau musĂ©e de guerre en compagnie du marĂ©chal PĂ©tain. Le Prince ImpĂ©rial fit Ă  cette occasion un don Ă  la Ville pour une Ă©cole[1].

Le but de la mission Joffre en ExtrĂȘme-Orient

Le principe d’une mission française officielle en ExtrĂȘme-Orient : il faut rendre au Japon la visite que le prince hĂ©ritier Hirohito venait de faire Ă  la France et de resserrer nos liens d’amitiĂ© avec tous les pays d’Asie qui avaient participĂ© Ă  la victoire[2].

Le président du Conseil et ministre des Affaires étrangÚres, Aristide Briand, écrit dans une lettre du 28 juin 1921[3];

« J’ai Ă©tĂ© amenĂ© Ă  penser que l’ExtrĂȘme-Orient n’ayant encore reçu aucun des grands chefs de nos armĂ©es, il y aurait avantage pour le prestige français et pour notre action dans le monde Ă  ce que le MarĂ©chal Joffre pĂ»t s’y rendre en mission »

On demande, au vainqueur de la Marne, d’accepter cette mission en raison de son prestige. Joffre accepte trùs vite de reprendre son bñton de pùlerin pour mettre une nouvelle fois le prestige de sa gloire au service de la France[4].

Le MarĂ©chal s’embarque, avec sa famille et quelques officiers, Ă  Marseille le Ă  bord du Porthos (un paquebot des Messageries maritimes) pour l’Indochine, le royaume de Siam, l'empire du Japon, la CorĂ©e et la rĂ©publique de Chine.

La traversée

Le prince régent Haïlé Sélassié.

Le voyage dure 17 jours et ponctuĂ© de nombreuses escales oĂč il recevra de trĂšs nombreux hommages.

Lors de ses escale Ă  Port-SaĂŻd, IsmaĂŻlia et Djibouti (chef-lieu de la CĂŽte française des Somalis), le MarĂ©chal reçoit l’accueil enthousiaste des colons et des indigĂšnes. Le prince hĂ©ritier d’Éthiopie, le futur empereur HaĂŻlĂ© SĂ©lassiĂ© Ier, lui envoie au passage le salut de tout son empire[2].

Puis les trois escales supplĂ©mentaire Ă  Colombo, Penang, Singapour : Les trois gouverneurs anglais tiennent Ă  recevoir le MarĂ©chal et Ă  lui rendre les plus grands honneurs. Ils ont groupĂ© autour de leur table tous les Français qui rĂ©sident sur leur territoire, et ceux-ci, anciens combattants pour la plupart, rayonnent de pouvoir contempler de prĂšs l’un des hĂ©ros de leur patrie.

En rade de Singapour, le MarĂ©chal est montĂ© Ă  bord du Montcalm, le croiseur cuirassĂ© de la division navale d’ExtrĂȘme-Orient. Le gouvernement l’a mis Ă  sa disposition pour le transporter avec un caractĂšre plus officiel en Indochine, au Siam et au Japon.

Indochine française : Cochinchine : Saigon

Le gouverneur général de l'Indochine Maurice Long.

Le , Maurice Long accueille chaleureusement le maréchal Joffre. Une foule considérable acclame le Maréchal qui se rend au palais du Gouvernement à travers les rues toutes pavoisées : les Marseillaise retentissent à tous les carrefours ; les cloches sonnent, les rues sont noires de monde[2].

Le lendemain, dans la grande salle des fĂȘtes du Palais, le MarĂ©chal reçoit les corps et services du Gouvernement gĂ©nĂ©ral : Maurice Long prononce un Ă©loquent discours auquel le MarĂ©chal rĂ©pond par les paroles suivantes[2] :

« Vous avez, monsieur le Gouverneur gĂ©nĂ©ral, exprimĂ© dans les termes les meilleurs le sens de la visite que je viens faire en Indochine : pendant la guerre, la France a admirĂ© la gĂ©nĂ©reuse maniĂšre dont ses fils d’ExtrĂȘme-Orient ont participĂ© Ă  sa dĂ©fense. Au front, sur mer, dans les services de ravitaillement, au moment des emprunts, celle que la France considĂšre comme la plus belle et la plus Ă©voluĂ©e de ses colonies a montrĂ© surabondamment son loyalisme et son patriotisme. Et c’est pour exprimer Ă  l’Indochine sa reconnaissance et son amour que le Gouvernement de la RĂ©publique m’a priĂ© de lui apporter le salut et le baiser de la MĂšre Patrie.

Nulle tĂąche ne pouvait m’ĂȘtre plus agrĂ©able, mais laissez-moi vous dire avec quelle joie profonde je l’ai acceptĂ©e : en effet, j’ai laissĂ© en Indochine il y a plus de trente ans une partie de mon cƓur : je suis venu l’y retrouver. »

À ce moment, le Gouverneur gĂ©nĂ©ral lui tend les bras et les deux hommes s’embrassent aux applaudissements de la foule. Plusieurs visites officielles et des rĂ©ceptions ont lieu : au Gouvernement de la Cochinchine, les notables indigĂšnes sont venus des vingt provinces.

Leur dĂ©lĂ©guĂ©, M. Le-van-trung, membre du Conseil de gouvernement de l’Indochine, prend la parole et salue le MarĂ©chal en ces termes :[2]

« C’est toute la Cochinchine loyale et dĂ©vouĂ©e qui vient aujourd’hui, dans la joie, dĂ©poser devant vous l’offrande spontanĂ©e de son affection et de sa reconnaissance : elle connaĂźt aujourd’hui la rĂ©compense de se sentir mieux connue de la France et elle se rend compte que de cette meilleure comprĂ©hension sortira pour elle un essor illimitĂ©. »

Pendant trois jours, la ville de Saigon fĂȘte son illustre visiteur Ă  travers des rĂ©ceptions, dĂ©filĂ©s, banquets, etc.

Indochine française : royaume du Cambodge : Phnom Penh et Siep Riep

Grand-croix de l’ordre royal du Cambodge du marĂ©chal Joffre, conservĂ©e au musĂ©e de l'ArmĂ©e de Paris.

Le , Ă  Phnom Penh, le vieux roi Sisowath, fidĂšle ami de la France, accueille le marĂ©chal Joffre et lui rend hommage Ă  travers de somptueuses cĂ©rĂ©monies. Le Roi exprime sa reconnaissance au Gouvernement français et remet au MarĂ©chal la grand-croix de l’ordre royal du Cambodge[2].

À Angkor, le , Ă  l'occasion de la visite de Joffre, Sisowath donne un spectacle grandiose figurant la reconstitution des cortĂšges des rois khmers : plus de 90 Ă©lĂ©phants et 5 000 personnes participent au cortĂšge.

Sur la terrasse du Bengalow, en face du temple ; Autour du MarĂ©chal, on retrouve Lord Northcliffe, le Gouverneur gĂ©nĂ©ral, Maurice Long, Monsieur Finot, directeur de l’École française d’ExtrĂȘme-Orient, Monsieur Batteur, conservateur d’Angkor, Monsieur Baudoin, rĂ©sident supĂ©rieur en Cochinchine, et AndrĂ© Tudesq envoyĂ© en mission par le Journal en ExtrĂȘme-Orient[2].

Une fois la cĂ©rĂ©monie terminĂ©e, le Roi et ses ministres se font conduire auprĂšs du temple d’oĂč le MarĂ©chal et leur rendent un vibrant hommage.

Royaume de Siam

Le roi Rama VI, qui accueillit le maréchal Joffre.

Le , le MarĂ©chal est attendu Ă  l’embarcadĂšre royal par S.A.R. le prince de Nakhon Sawan, chef d’État-major gĂ©nĂ©ral de l’armĂ©e, cousin du Roi : une compagnie de la garde royale rendait les honneurs. Toute la mission est logĂ©e au Palais royal de Saranrom[2].

Le roi Rama VI accueille le maréchal Joffre et sa délégation pour une fastueuse soirée gala en de resserrer les liens entre le royaume de Siam et la France.

À la fin du düner, le Roi prend la parole :[2]

« Nous sommes heureux, dit-il, de constater que nos relations internationales et surtout celles avec la France sont devenues de plus en plus amicales et cordiales : il est du reste tout naturel que ces relations d’amitiĂ© existent avec la France, puisque le premier ambassadeur que le Siam ait envoyĂ© Ă  l’étranger fut accrĂ©ditĂ© auprĂšs du Gouvernement français. Plus tard les arts et les sciences de la France ont contribuĂ© Ă  augmenter et Ă  dĂ©velopper la prospĂ©ritĂ© du Siam ; Ă  une Ă©poque plus rĂ©cente, la France est devenue notre voisine, ce qui a Ă©tĂ© une occasion de resserrer les relations d’amitiĂ© entre les deux pays. Enfin, lors des Ă©vĂ©nements mĂ©morables qui se sont passĂ©s il y a quelques annĂ©es, lorsque la grande guerre a bouleversĂ© le monde, le Siam s’est rendu clairement compte des immenses difficultĂ©s que la France avait Ă  combattre et de l’implacable ambition de ses ennemis. Je ne veux pas m’étendre sur ce point, puisque la guerre est terminĂ©e, mais je ne puis m’empĂȘcher de dire : Je suis heureux qu’il ait Ă©tĂ© permis au Siam de contribuer au triomphe dĂ©finitif du droit et de la justice. »

Pendant plusieurs jours, le marĂ©chal Joffre se rend Ă  plusieurs cĂ©rĂ©monies dĂźners et banquets organisĂ©s Ă  son honneur. Il visite Ă©galement le camp d’aviation de Don Muong oĂč tous les avions sont d'origine française.

La fin du sĂ©jour au Siam est une rĂ©ussite. Le voyage marque une date mĂ©morable dans les relations franco-siamoises, pour le plus grand profit de l’Indochine française.

Retour en Indochine française : Hué, Hanoi et Hai Phong

Annam : Hué

La ville de HuĂ©, le , a joyeusement fĂȘtĂ© le MarĂ©chal et l’Empereur KháșŁi Định multiplie Ă  son Ă©gard les marques d’honneur et de respect, en le recevant dans son palais rouge et or, et en venant lui rendre visite chez le RĂ©sident supĂ©rieur, M. Pierre Pasquier.[2]

L’Empereur a exprimĂ© sa joie de la nomination du MarĂ©chal est choisi comme ambassadeur de la France auprĂšs de lui, et lui rappelle que le capitaine Joffre avait combattu autrefois les ennemis de son pĂšre, l’empereur Dong Khanh[5].

En gage d’admiration, l’Empereur remet au MarĂ©chal un prĂ©cieux cadeau : un bĂąton de commandement en argent, en or et en jade, choisi spĂ©cialement dans le trĂ©sor impĂ©rial : seul objet qu’il a jugĂ© digne de l’Illustre Soldat.[2][6].

Tonkin : Hanoi

Avant d'arriver Ă  Hanoi, le , une halte est prĂ©vue Ă  Ba-Dinh sur la route de Vinh Ă  HanoĂŻ. C’est un groupe de trois villages cĂ©lĂšbres par le siĂšge en et auquel a pris part le capitaine du gĂ©nie Joffre.

Plus de 200 Annamites dĂ©corĂ©s de la croix de guerre, des missionnaires, des montagnards (des Muongs) et deux ou trois vieux indigĂšnes dĂ©corĂ©s de la mĂ©daille militaire : ce sont les seuls survivants de la bataille de Ba-Dinh ; l’un d’eux est un ancien sapeur du MarĂ©chal citĂ© Ă  l’ordre de l’armĂ©e sur le mĂȘme ordre du jour que son capitaine[5].

Le MarĂ©chal arrive, le , Ă  HanoĂŻ par la gare monumentale. Une foule Ă©norme l’attend pour l’acclamer sur tout son passage jusqu’au Gouvernement gĂ©nĂ©ral ; HanoĂŻ n’a pas voulu ĂȘtre distancĂ© dans l’enthousiasme par sa rivale SaĂŻgon[2].

De nombreuses cortÚges, illuminations, réceptions des corps et services, des délégations indigÚnes, des anciens combattants, revue des troupes, dßners officiels, bals attendent le maréchal Joffre .

Le MarĂ©chal rend visite Ă  son ami le pĂšre Lecornu : curĂ© de la cathĂ©drale d’HanoĂŻ, ancien capitaine du gĂ©nie sous les ordres de Joffre. Le pĂšre Lecornu, Ă  l'agonie, dĂ©cĂ©dera quelques jours aprĂšs, le [7].

Sa Majesté Sisavong, roi de Laos, fait un voyage de deux mois pour venir saluer le vainqueur de la Marne à Hanoi[2].

Tonkin : HaĂŻphong

La ville portuaire d'Haiphong organise une grande fĂȘte pour fĂȘter le grand Soldat qui est venu remercier l’Indochine de son loyalisme pendant la guerre. [2]

Le MarĂ©chal fait ses adieux au peuple indochinois, et s’embarque sur le Montcalm, qui le rejoint en baie d’Along : il fait route vers le Japon.

Empire du Japon

Le croiseur cuirassĂ© Montcalm, entre le matin du dans la baie de Yokohama. Une haie d’enfants français chantent la Marseillaise en l'honneur du MarĂ©chal tout en agitant le drapeau japonais[8].

À la descente de la mission, Ă  la gare centrale de Tokyo, plusieurs cortĂšges et dĂ©filĂ©s sont organisĂ©s en l'honneur du MarĂ©chal et les petits Japonais crient « Banzai ! Banzai ! » (« Longue vie. »)[9].

Le maréchal Joffre à Tokyo.

Le , Son Altesse ImpĂ©riale le Prince RĂ©gent Hirohito et Sa MajestĂ© l’ImpĂ©ratrice reçoivent le marĂ©chal en audience particuliĂšre, en compagnie de l’ambassadeur de France Ă  Tokyo, M. Paul Claudel[10].

Le MarĂ©chal s’avance seul, s’incline devant le jeune Prince , et dit[8] :

« Monseigneur,

« Le Gouvernement de la RĂ©publique m’a chargĂ© du grand honneur de rendre Ă  Votre Altesse ImpĂ©riale la visite qu’Elle a bien voulu rĂ©cemment faire Ă  la France. Je viens donc au nom de mon pays remercier Voire Altesse ImpĂ©riale et Lui tĂ©moigner des sentiments de respectueuse sympathie que son sĂ©jour a fait naĂźtre parmi tous les Français qui ont eu l’honneur de La voir.

« Au cours de la Grande Guerre, les AlliĂ©s combattant cĂŽte Ă  cĂŽte ont pu se connaĂźtre et s’apprĂ©cier davantage. L’amitiĂ© qui s’est ainsi dĂ©veloppĂ©e entre eux est un des plus sĂ»rs garants de la paix universelle. Tout l’effort des reprĂ©sentants des Nations AlliĂ©es doit tendre Ă  rendre plus forte et plus intime celle amitiĂ© fĂ©conde et je m’estimerais heureux de penser que ma visite au Japon, auquel j’apporte le salut fraternel de la France, ait pu avoir sa part dans cette Ɠuvre de concorde et de paix.

« Tout l’idĂ©al de la France rĂ©side dans la paix, dans une paix honorable et juste. C’est pour la paix qu’elle a souffert, c’est pour elle qu’elle a vaincu. La France n’a jamais poursuivi aucun dessein impĂ©rialiste : elle ne veut que poursuivre son Ɠuvre millĂ©naire de civilisation avec l’aide de ses AlliĂ©s et Amis.

« Je sais que, dans cette tùche, elle peut compter sur les sympathies de Votre Altesse Impériale. Elle me permettra de Lui en exprimer ma reconnaissance et ma joie. » »

À son tour, le Prince rĂ©pond[8]:

« « Rien ne pouvait m’ĂȘtre plus agrĂ©able que d’accueillir en la personne de Votre Excellence le ReprĂ©sentant du Gouvernement de la RĂ©publique. Le Japon tout entier est fier de recevoir le grand capitaine qui, par son talent et sa tĂ©nacitĂ©, a contribuĂ© si puissamment Ă  l’établissement d’une paix juste.

« J’ai vu la France, Monsieur le MarĂ©chal, et dans ses provinces dĂ©vastĂ©es j’ai trouvĂ© les marques de son hĂ©roĂŻque effort, le souvenir des exploits de sa glorieuse armĂ©e. Nos deux pays ont luttĂ© cĂŽte Ă  cĂŽte : entre les Nations qui ont ensemble assurĂ© le triomphe du droit, se sont nouĂ©s des liens solides d’estime, de sympathie et de confiance, qui sont bien la plus sĂ»re garantie d’un rĂ©gime de concorde internationale.

« La collaboration entre les Japonais et les Français ne peut ĂȘtre que facile et fructueuse, puisqu’ils travaillent les uns et les autres dans le mĂȘme esprit, Ă  la rĂ©alisation du mĂȘme idĂ©al : le maintien de la paix et le dĂ©veloppement de ces Ɠuvres de civilisation auxquelles nos deux pays ont toujours aimĂ© consacrer leur labeur.

« C’est donc dans une pleine communautĂ© de sentiments avec Votre Excellence que je la remercie d’avoir apportĂ© au Japon le salut de la France et que je vous souhaite la bienvenue dans mon pays. » »

Joffre Ă  Tokyo.

Plusieurs banquets et repas officiels ont lieu, des toasts ont été échangés, tous empreints des sentiments les plus sympathiques et les plus chaleureux pour la France[11].

Lors d'un banquet militaire, Ă  l'ambassade de France, le marĂ©chal Joffre s’entretient avec le marĂ©chal Uehara, chef d’état-major gĂ©nĂ©ral de l’armĂ©e japonaise : sortis tous les deux de l’arme du GĂ©nie, ils se rappellent des souvenirs communs : le marĂ©chal Uehara a Ă©tĂ© Ă©lĂšve de notre École d’application oĂč le marĂ©chal Joffre a Ă©tĂ© professeur : il fut ensuite pendant trois ans lieutenant au 4e rĂ©giment du GĂ©nie : « Nos carriĂšres sont semblables, dit Uehara, sauf que je n’ai pas gagnĂ© la Marne. » Ce sont deux grands amis[8].

Pendant son sĂ©jour Ă  Tokyo, le MarĂ©chal visite la chambre des pairs, l'universitĂ© impĂ©riale, les temples, le thĂ©Ăątre impĂ©rial. Et le MarĂ©chal visite plusieurs villes japonaise (Kyoto, Osaka, KobĂ©, Miyajima) oĂč il sera triomphalement reçu[8].

Le Maréchal embarque, le à Shimonoseki, à destination de la Corée.

  • Le marĂ©chal

    Le maréchal

  • 
dans la presse japonaise.
    
dans la presse japonaise.

La Corée

Il faut treize heures pour traverser le détroit qui sépare Nippon de la Corée. De Fusang à Séoul, dix heures de chemin de fer[12].

Le à Séoul, le Maréchal est reçu par quelques militaires japonais et le prince Li qui lui font honneurs de leur ville et du port : la Corée, étant sous occupation japonaise[13].

Le MarĂ©chal est retournĂ©e Ă  TchĂ©mulpo qu'il a connu, trente cinq ans plus tĂŽt, et a tentĂ© de retrouver ses souvenirs : mais il n’a rien reconnu : c’est maintenant un grand port moderne.

Le , le Maréchal prend le train pour aller en Chine.

La république de Chine

Mandchourie

Le train stoppe dans l’immense gare dĂ©serte de Moukden, le , le marĂ©chal descend de son wagon, accompagnĂ© par le consul de France Ă  Harbin, M. LĂ©piciĂ©, vient Ă  sa rencontre. Les colonies Ă©trangĂšres alliĂ©es, les anciens combattants alliĂ©s sont rĂ©unis aux quelques Français de Moukden pour saluer l’envoyĂ© de la France.

Le maréchal Joffre est reçu par le maréchal Tchang-Tso-Ling, un seigneur de guerre, qui l'invite à un entretien suivi d'un déjeuner. le Maréchal prend congé de son hÎte pour se rendre à la mission catholique française et visiter Mgr Blois et ses PÚres.[12]

PĂ©kin

Le , le MarĂ©chal, accompagnĂ© de M. de Fleuriau, notre ministre en Chine, rend visite au prĂ©sident de la RĂ©publique chinoise, M. Shu Che Chang, qui exprime sa reconnaissance Ă  la France de lui avoir envoyĂ© un tel reprĂ©sentant, et forme des vƓux de prospĂ©ritĂ© pour notre pays.

Le Maréchal visite la ville de Pékin à pied et à voiture au contact de la population chinoise. Il est invité à dßner aux Affaires étrangÚres, suivi de bal avec l'élite chinoise.

Le , le marĂ©chal participe Ă  la revue militaire au Si Yuan, au pied du palais d’ÉtĂ©. Joffre visite de l’hĂŽpital Saint-Michel oĂč le directeur, le docteur BussiĂšre, est un des meilleurs agents de l’influence française Ă  PĂ©kin ; il est aidĂ© dans sa tĂąche par des sƓurs de Saint-Vincent de Paul françaises et indigĂšnes.

Au sortir de l’hĂŽpital, le MarĂ©chal se rend au PĂ©tang pour y faire visite Ă  Mgr Stanislas Jarlin, le vicaire apostolique de PĂ©kin. Le PĂ©tang est la cĂ©lĂšbre concession française catholique oĂč les missionnaires, les religieuses et les chrĂ©tiens chinois, dĂ©fendus par Paul Henry et une poignĂ©e de marins français et italiens, subirent le mĂ©morable siĂšge qui dura du au [14].

Mgr Jarlin, la rosette de la LĂ©gion d’honneur sur sa soutane, reçoit le MarĂ©chal au milieu de ses missionnaires lazaristes. Il lui adresse un trĂšs simple compliment de bienvenue ; il Ă©voque la grande mĂ©moire de Mgr Favier, les journĂ©es tragiques de 1900, celles de , le sacrifice de tous ceux qui sont morts pour la France que le MarĂ©chal Ă©mu essuie une larme.[12]

Tien-Tsin

Le , le MarĂ©chal quitte PĂ©kin par train spĂ©cial pour Tien-Tsin oĂč des grands prĂ©paratifs ont Ă©tĂ© faits pour le recevoir.[12]

AccompagnĂ© du colonel Pasquier, le , commandant le Corps Français d’occupation, il passe devant les troupes françaises, et remet quelques dĂ©corations ; puis le dĂ©filĂ© commence.

Les AmĂ©ricains dans des uniformes tout neufs ; la compagnie anglaise de siks, l’arme Ă  la main, farouches, suivant un gigantesque joueur de grosse caisse Ă  demi couvert d’une peau de tigre et jonglant avec ses tampons ; les quatre compagnies franco-annamites encadrant le fier drapeau du 16e colonial ; les Japonais frappant le sol Ă  chaque pas ; 


Ensuite le MarĂ©chal se dirige, sous des arcs de triomphe, vers la rĂ©ception organisĂ©e au Cercle Français. Un dĂ©filĂ© de plus d’un millier de personnes : le Conseil municipal de la Concession française, la Chambre de commerce française, une dĂ©lĂ©gation d’officiers chinois, la Chambre de commerce chinoise, les anciens combattants alliĂ©s, une jeune Alsacienne en costume, les Ă©lĂšves de l’École municipale française, la colonie française, les colonies alliĂ©es
 Lors d'un discours du consul d’Angleterre, s’écrie:[12]

« M. le marĂ©chal Joffre est un grand Français ; mais il est encore autre chose ; il est une grande figure dans l’histoire du monde, et j’exprime le sentiment de tous ceux qui sont ici, quand je dis que nous regardons le MarĂ©chal avec le mĂȘme respect que si nous Ă©tions Français nous-mĂȘmes. Ce jour demeurera pour jamais dans notre souvenir et nous serons tous fiers de pouvoir dire Ă  nos enfants et aux enfants de nos enfants : Ă  Tien Tsin, le , j’ai vu le marĂ©chal Joffre, je lui ai parlĂ©, je lui ai serrĂ© la main »

Le Maréchal prend congé du Gouverneur, et par la concession italienne, regagne le train qui le ramÚne à Pékin.

Retour Ă  PĂ©kin

Le : Une réunion regroupe la colonie française de Pékin autour du Maréchal et de notre ministre plénipotentiaire dans la cour de la Légation de France.[12]: M. de Fleuriau prend la parole:

« Nous vous prions, monsieur le MarĂ©chal, de poser la premiĂšre pierre du monument qui va ĂȘtre Ă©levĂ© ici Ă  la mĂ©moire des Français de Chine morts pour la Patrie. Mgr Jarlin vous a dit, l’autre jour, comment en 1914, Ă  l’appel de la mobilisation, tous ces Français, missionnaires, commerçants, ingĂ©nieurs, employĂ©s, Ă©taient accourus Ă  PĂ©kin de tous les coins de la Chine. De ceux-lĂ , beaucoup ne sont pas revenus, et c’est Ă  leur souvenir que nous consacrons un monument dans cette LĂ©gation, qui est le centre des Français de Chine.

Sous sa forme trĂšs simple, il sera le tĂ©moignage de l’union de tous les Français de Chine, dans le respect que nous gardons Ă  nos glorieux morts et dans le dĂ©vouement que nous vouons tous Ă  notre patrie. Nous sommes heureux de pouvoir associer votre nom Ă  ce double tĂ©moignage parce que beaucoup de nos morts ont servi sous vos ordres et aussi parce que vous personnifiez Ă  nos yeux le dĂ©vouement Ă  la Patrie. Nous respectons et aimons en vous le patriote, dans toute l’acception de ce mot qui fut jadis inventĂ© en l’honneur d’un de vos illustres prĂ©dĂ©cesseurs, le marĂ©chal Vauban. Et votre prĂ©sence trop brĂšve au milieu de nous est pour chacun de nous dans sa modeste sphĂšre une leçon vivante et un encouragement Ă  imiter votre exemple et Ă  nous consacrer comme vous Ă  bien aimer et Ă  bien servir la Patrie.

Voilà pourquoi, monsieur le Maréchal, nous, Français de Chine, tenons tant à associer votre nom à ce petit monument dont je vous demande maintenant de poser la premiÚre pierre. »

AccompagnĂ© du Ministre et des anciens combattants, le MarĂ©chal scelle le bloc , d’un peu de ciment, du monument dĂ©diĂ© aux batailles françaises (Marne, Ypres, Verdun,..) . Ensuite, Joffre a fait ses visites d’adieu au prĂ©sident de la RĂ©publique de Chine et aux ministres .

ShanghaĂŻ

Le , la mission française dĂ©barque Ă  ShanghaĂŻ. Une foule française ardente l’attend, et lorsque le MarĂ©chal parait, une sorte de dĂ©lire la secoue. C’est une visite triomphale de la Concession et des principales Ɠuvres françaises que M. Wilden, Consul gĂ©nĂ©ral de France, propose au MarĂ©chal[15].

Au Cercle Sportif Français, rendez-vous de tout le Shanghai , que la riche colonie française reçoit le Maréchal. Le président de la Chambre de commerce, dans un toast, fait un rapprochement heureux :[12]

« Il y a vingt-deux ans, dit-il, un autre MarĂ©chal passait ici une revue ; il Ă©tait arrogant et dur ; il n’avait gagnĂ© aucune victoire ; c’était un Allemand, le marĂ©chal de Waldersee. Aujourd’hui, voici que notre bonne fortune nous amĂšne un autre marĂ©chal, celui-lĂ  un vrai vainqueur, simple et bon ; et cette fois, c’est un Français ! c’est vous, monsieur le MarĂ©chal ! »

Le lendemain, un dĂ©jeuner est offert par les Gouverneurs civil et militaire chinois de ShanghaĂŻ, le MarĂ©chal est reçu par la MunicipalitĂ© française de la Concession. Tout le Conseil est assemblĂ© en sĂ©ance. Le PrĂ©sident, M. le consul-adjoint de Laprade, prononce un beau discours Ă©mouvant. Il raconte de quelle maniĂšre dramatique ShanghaĂŻ apprit la bataille de la Marne par un tĂ©lĂ©gramme de notre ambassadeur en Russie, M. PalĂ©ologue, la reconnaissance des Français et des AlliĂ©s, la manifestation populaire qui le soir mĂȘme donnait le nom de Joffre Ă  une rue baptisĂ©e depuis longtemps du nom d’un mĂ©decin allemand.

Toute la Concession flamboie, le : l’HĂŽtel de Ville, le Consulat, les Ă©coles, les maisons particuliĂšres, des pylĂŽnes, des arcs de triomphe, tout est illuminĂ© : une foule Ă©norme de Chinois curieux, encombre les rues. Lentement, l’automobile du MarĂ©chal parvient au Cercle Sportif oĂč 400 anciens combattants alliĂ©s ont tenu Ă  le recevoir. Le MarĂ©chal reçoit un hommage appuyĂ© de plusieurs officiers français et de nations alliĂ©es.

Chronologie de la Mission

  • SaĂŻgon : Du 9 au 12 dĂ©cembre 1921
  • Phnom Penh : Du 13 au 15 dĂ©cembre 1921
  • Angkor : Du 15 au 17 dĂ©cembre 1921
  • Bangkok : Du 20 au 28 dĂ©cembre 1921
  • Voyage Ă  bord du croiseur cuirassĂ© Montcalm

  • Tourane : Du 1er au 3 janvier 1922
  • HuĂ© : Du 3 au 4 janvier 1922
  • Ba Dinh : Du 5 au 7 janvier 1922
  • Hanoi – Haiphong : Du 7 au 12 janvier 1922
  • Voyage Ă  bord du croiseur cuirassĂ© Montcalm

  • Japon : Du 20 janvier au 18 fĂ©vrier 1922
  • Voyage Ă  bord du croiseur cuirassĂ© Montcalm

  • SĂ©oul : Du 20 au 22 fĂ©vrier 1922
  • Manchourie : Du 23 au 25 fĂ©vrier 1922
  • PĂ©kin : Du 26 fĂ©vrier au 3 mars 1922
  • Tien Tsin: Du 3 au 5 mars 1922
  • PĂ©kin : Du 6 au 8 mars 1922
  • Shanghai : Du 9 au 12 mars 1922
  • DĂ©part aux États-Unis : 12 mars

Le retour en France

Le 12 mars 1922, le MarĂ©chal quitte la Chine pour rentrer en France ; il prĂ©fĂ©rait, sur la sollicitation de ses amis amĂ©ricains de traverser les États-Unis plutĂŽt que de refaire le long voyage par Suez : pour la deuxiĂšme fois, il a accompli le tour du monde.

Le retour du MarĂ©chal Joffre aux États-Unis.

Sa mission officielle est terminĂ©e : partout oĂč il est passĂ©, son renom, sa gloire ont profitĂ© Ă  la Patrie. La France a renforcĂ© ses liens Ă©conomiques, militaires, amicales avec le Japon, la Chine et la ThaĂŻlande et la France a pu contrer les influences anglaise et amĂ©ricaine.

Voir aussi

Les cadeaux offerts au maréchal Joffre

Pendant son voyage en ExtrĂȘme-Orient, le marĂ©chal Joffre reçoit une quantitĂ© de cadeaux diplomatiques (ordre royal du Cambodge, plusieurs sabres d'honneur, tableaux, objets de dĂ©corations...).

Une partie des cadeaux se trouve actuellement au musĂ©e de l’ArmĂ©e de Paris.

Bibliographie

Document utilisĂ© pour la rĂ©daction de l’article : document utilisĂ© comme source pour la rĂ©daction de cet article.

Références

  1. « Hirohito à Verdun »
  2. André d'Arçais.
  3. Antoine OUSTRIN, « Le centenaire de la mission du maréchal Joffre », sur Société d'histoire des français en Chine,
  4. Shinobu ChûjÎ, « Paul Claudel et la fondation de la Maison Franco-japonaise »,
  5. Claude Colomer, Joffre le colonial, , p 79 et 71
  6. François de Tessan, S.M. Kha-Dinh, empereur d'Annam, La Revue de Paris, 29e année, no 13,,
  7. « Le pÚre Lecornu », sur Archives du carmel de Lisieux
  8. AndrĂ© d’Arçais, « Avec le MarĂ©chal Joffre en ExtrĂȘme-Orient. — II, Au Japon »
  9. François de Tessan, Le Japon mort et vif, BaudiniÚre,
  10. Paul Claudel, Correspondance diplomatique. Tokyo (1921-1927),
  11. Paul Claudel, Journal. Tome I : 1904-1932,
  12. André d'Arçais.
  13. Antoine Oustrin, « le centenaire de la mission du Maréchal Joffre », sur Souvenir français en Chine,
  14. « Paul Henry »
  15. « L'Avenue Joffre à Shanghaï »
Cet article est issu de wikipedia. Text licence: CC BY-SA 4.0, Des conditions supplĂ©mentaires peuvent s’appliquer aux fichiers multimĂ©dias.