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Maurice Paléologue

Maurice Paléologue, né le à Paris et mort le à son domicile parisien situé rue de Téhéran, est un diplomate, historien et essayiste français.

Maurice Paléologue
Illustration.
Portrait par Eugène Pirou.
Fonctions
Secrétaire général du ministère des Affaires étrangères
–
Prédécesseur Jules Cambon
Successeur Philippe Berthelot
Ambassadeur de France en Russie
–
Prédécesseur Théophile Delcassé
Successeur Joseph Noulens
Ambassadeur de France en Bulgarie
–
Successeur André de Panafieu
Biographie
Date de naissance
Lieu de naissance Ancien 1er arrondissement de Paris
Date de dĂ©cès (Ă  85 ans)
Lieu de décès 8e arrondissement de Paris
Nationalité Française
Famille Paléologue (phanariotes)
Profession Diplomate
Historien
Essayiste
Distinctions Académicien
Reçu le

Biographie

George-Maurice Paléologue est le fils d'Alexandre Paléologue (1824-1866), issu d'une famille phanariote[1], lequel, banni de Bucarest, s'était établi en France après avoir été accusé de comploter contre le prince Bibesco, hospodar de Valachie. Alexandre Paléologue épousa Frédérique de Ridder en 1851, fille de Gustave De Ridder, qui fut excellente musicienne et tint un salon que fréquentèrent Michelet, Taine, Renan, Saint-Saëns et Fauré. Prématurément veuve (elle devait mourir en 1902), elle encouragea les dons intellectuels de son fils Maurice, qu’elle emmena en 1867 en Italie.

Après avoir fait des études au lycée Henri-IV, puis à Louis-le-Grand où il fut le condisciple de Raymond Poincaré, il passe une licence de droit puis entre au ministère des Affaires étrangères en 1880 et est nommé secrétaire d’ambassade à Tanger, à Pékin et à Rome. Il occupe des fonctions à la direction politique : services des affaires réservées (questions confidentielles, analyse et exploitation du chiffre). Devenu ministre plénipotentiaire en 1901, il est ambassadeur à Sofia de 1907 à 1912 et à Saint-Pétersbourg de 1914 à 1917[2], puis secrétaire général du ministère des Affaires étrangères dans le cabinet Millerand.

Parallèlement à sa carrière diplomatique, il collabore à la Revue des deux Mondes et écrit des romans et des essais littéraires. Il fréquente le salon littéraire de Rosalie von Gutmann où il croise le romancier Paul Bourget, Jules Cambon ou Ernest Seillière. Il publie plusieurs ouvrages historiques consacrés à la Russie dans lesquels on trouve un portrait intime de la dernière tsarine (Paléologue a assisté à certains de ses entretiens avec Raspoutine) ainsi que des observations de première main sur les événements qui ont secoué le pays à l’orée de la Première Guerre mondiale. Ses notes sur l’affaire Dreyfus, qui ne seront publiées qu’après sa mort, constituent un témoignage important sur le procès qu'il avait dû lui-même déposer. L’Académie française lui décerne le prix Bordin pour Vauvenargues en 1890 et le prix Narcisse-Michaut en 1905.

Il devient membre du conseil d'administration du Crédit mobilier français. Le , il est élu à l'Académie française au fauteuil de Charles Jonnart.

Oncle de Jean de Paleologu, il est le beau-frère d'André Lebon, d'Arthur Pernollet et de Jules Dietz.

Une attitude controversée

Arrivée de Maurice Palélogue à Saint-Pétersbourg (16 février 1914).

La lenteur de Paléologue à relayer des informations importantes alors qu’il était ambassadeur à Saint-Pétersbourg a été critiquée[3].

Voici une chronologie des événements :

  • : L’empereur Nicolas II regagne sa capitale pour recevoir la visite du prĂ©sident Raymond PoincarĂ©.
  • : PoincarĂ© et RenĂ© Viviani quittent la Russie sur le cuirassĂ© La France. Au mĂŞme moment, l’Autriche-Hongrie adresse un ultimatum Ă  la Serbie. Dans les quarante-huit heures, le gouvernement serbe devait promettre de dĂ©savouer et de rĂ©primer la propagande antiautrichienne, rĂ©voquer les fonctionnaires et officiers que dĂ©signerait le gouvernement autrichien et accepter la participation de l’Autriche Ă  la recherche des coupables de l’attentat de Sarajevo.
  • : La Serbie accepte toutes les demandes autrichiennes, sauf l’exigence de permettre Ă  des fonctionnaires autrichiens de collaborer sur place Ă  l’enquĂŞte et sollicite l’arbitrage de la Cour Internationale de Justice. L’Autriche demeure inflexible. Il s’ensuit une rupture des relations diplomatiques, une mobilisation gĂ©nĂ©rale serbe et une mobilisation partielle de l'Autriche-Hongrie.
  • 26 et : Le Royaume-Uni propose un compromis mais en vain.
  • : Vienne dĂ©clare la guerre Ă  la Serbie.
  • : Le tsar, pressĂ© par son grand Ă©tat-major, ordonne la mobilisation partielle contre l’Autriche-Hongrie.
  • : PoincarĂ© et Viviani regagnent Dunkerque.
  • : Perdant son sang-froid, SergueĂŻ Sazonov conseille Ă  Nicolas II d’annoncer la mobilisation gĂ©nĂ©rale, qui est publiĂ©e le lendemain Ă  l’aube : en effet, une mobilisation partielle aurait disloquĂ© le mĂ©canisme de la mobilisation gĂ©nĂ©rale[4].
  • : l’ambassadeur d’Allemagne en Russie, Friedrich von Pourtalès (en), adresse un ultimatum de l’Allemagne sommant Saint-PĂ©tersbourg de suspendre la mobilisation.
  • 1er aoĂ»t : Sans rĂ©ponse, le comte de Pourtalès remet Ă  Sazonov la dĂ©claration de guerre de l’Allemagne Ă  la Russie.
  • 1er aoĂ»t : La mobilisation gĂ©nĂ©rale est dĂ©clarĂ©e en France et en Allemagne.
  • : Berlin dĂ©clare la guerre Ă  Paris.

La Grande Guerre achevĂ©e, on s’interrogea sur ses causes. Le traitĂ© de Versailles annonça que l’Allemagne Ă©tait le principal responsable du conflit : non seulement l'Allemagne avait soutenu la « ligne dure Â» autrichienne face Ă  la Serbie en , mais elle a dĂ©clarĂ© la guerre Ă  la Russie et Ă  la France et envahi la Belgique dont elle avait pourtant garanti la neutralitĂ©. Cependant on a pu s'interroger sur les responsabilitĂ©s de la Russie. Lors de son voyage en Russie du 20 au , le prĂ©sident Raymond PoincarĂ© aurait prĂ´nĂ© la fermetĂ© Ă  la Russie. Quelles instructions verbales PalĂ©ologue reçut-il du prĂ©sident ? En 1917, Pourtalès, ancien ambassadeur d’Allemagne en Russie, accusa PalĂ©ologue d’avoir Ă©tĂ© informĂ© de la dĂ©claration de guerre russe avant mĂŞme le ministre de la guerre Soukhomlinov.

Traditionnellement, le rĂ´le dĂ©volu Ă  un ambassadeur est de « suivre les instructions de son gouvernement, mais, en mĂŞme temps, il l’informe, l’éclaire, l’avertit et quelquefois doit le retenir »[5]. En ces temps troublĂ©s de l'histoire, il paraĂ®t improbable que PalĂ©ologue n’ait pas respectĂ© Ă  la lettre ces consignes. Quelques historiens l’ont jugĂ© sĂ©vèrement (Jules Isaac). PalĂ©ologue s’est dĂ©fendu en invoquant les difficultĂ©s de communication[6] et en faisant paraĂ®tre son journal La Russie des tsars pendant la Grande Guerre (1921-1923)[7]. Dans un entretien avec Sazanov, ayant pris conscience de l'importance « des peuples non russes ». Il ajoute qu'ils « souffrent de votre centralisation administrative » et conclut que tĂ´t ou tard, la Russie devra instaurer une autonomie rĂ©gionale et que si elle ne le fait pas, elle sera confrontĂ©e au danger des sĂ©paratismes[8]. En 1937, PalĂ©ologue, interrogĂ© par Pierre Renouvin, reconnut qu’« il avait jugĂ© la guerre inĂ©vitable et nĂ©cessaire Â». Proclamer que PalĂ©ologue fut le responsable du dĂ©clenchement du conflit (parce qu'il n'aurait pas tenu informĂ© son gouvernement) serait une erreur grossière. Toutefois, RĂ©my Porte rappelle dans un article rĂ©cent que la controverse portait non sur l'absence d'information mais sur des comptes rendus partiaux de l'Ă©volution de la position russe[9]. Il reste qu'en 1914, l'Europe, divisĂ©e en deux blocs, courait depuis une dizaine d'annĂ©es vers un cataclysme. PalĂ©ologue fut un acteur dans cette tragĂ©die, sans doute, un acteur privilĂ©giĂ© compte tenu de ses rapports avec la famille impĂ©riale russe.

Avec le recul que permet l'histoire, il est dorénavant permis de relever que le jugement porté par Paléologue s'est trouvé confirmé par les événements ultérieurs, la thèse d’Albert Thomas devenant par là-même caduque.

Le premier Ă©mettait « l'hypothèse d'une dĂ©faillance prochaine de la Russie Â»[10] :

  • « L'anarchie se propage en Russie et la paralyse pour longtemps.(...) Des villes comme Moscou qui, hier encore, Ă©taient des foyers de patriotisme, sont contaminĂ©es. La dĂ©mocratie rĂ©volutionnaire paraĂ®t incapable de rĂ©tablir l'ordre dans le pays et de l'organiser pour la lutte. (...) Devons-nous ouvrir Ă  la Russie un nouveau crĂ©dit de confiance et lui accorder de nouveaux dĂ©lais ? – Non Â»[11].

Le second :

  • « Je reconnais que la situation est difficile et trouble, mais non dĂ©sespĂ©rĂ©e comme semble le croire M. PalĂ©ologue…. Je crois que la meilleure politique est de faire encore Ă  la Russie nouvelle un crĂ©dit de confiance que nous n'avons pas mĂ©nagĂ© Ă  l'ancienne Â»[12].

Le 15 décembre 1917, un armistice russo-allemand fut signé à Brest-Litovsk et des négociations de paix s'engagèrent. L'anarchie se propageait en Russie et allait la paralyser pour longtemps.

[réf. nécessaire]

Mort célibataire, Maurice Paléologue est inhumé au cimetière de Passy à Paris, dans le XVIe arrondissement. Sa tombe est située près de celle de la princesse Brassov (veuve du grand-duc Michel) et de son fils, le comte Georges Brassov.

Publications

Communication secrète du ministère des Affaires étrangères, saisie par la Cour de cassation, qui détaille de 1893 à 1897 les étapes de l’affaire Dreyfus, d’après les informations du diplomate Maurice Paléologue. Archives nationales de France.

Notes et références

  1. Sur cette famille, Mihail Dimitri Sturdza a Ă©crit : « Au dĂ©but du XVIIe siècle le savant allemand Martin Crusius rencontrait des PalĂ©ologue au Phanar et les qualifia d'authentiques. Ils portaient ce nom accolĂ© Ă  celui de Guliano, qui paraĂ®t avoir Ă©tĂ© leur vĂ©ritable nom de famille, et au surnom de muselim, qui Ă©tait la dĂ©signation d'une magistrature turque. ApparentĂ©s Ă  plusieurs des grandes maisons phanariotes, leurs descendants finirent par s'Ă©tablir en Valachie Ă  la fin du XVIIIe siècle, sans qu'ils y fut question de prĂ©tentions impĂ©riales de la part de ces PalĂ©ologue devenus boyards valaques. Ă€ la fin du XIXe siècle, ces PalĂ©ologue roumains ne subsistaient plus que par une branche bâtarde, laquelle sans doute pour rĂ©parer la tache de sa naissance illĂ©gitime fit imprimer Ă  Constantinople un arbre gĂ©nĂ©alogique lui attribuant une origine byzantine dont personne n'avait entendu parler auparavant. Ce curieux document est prĂ©servĂ© dans ce qui reste des papiers d'Eugène Rizo RangabĂ© (el) Ă  l'AcadĂ©mie d'Athènes, et mĂ©rite d'ĂŞtre citĂ©, car celui en qui s'Ă©teignit cette famille grĂ©co-roumaine ne fut autre que Maurice PalĂ©ologue (1859-1944), ambassadeur de France, l'un des grands artisans de l'alliance franco-russe. Ce diplomate fit d'ailleurs insĂ©rer dans la Grande EncyclopĂ©die du XIXe siècle une notice le concernant, et oĂą il se donne comme un rejeton de Byzance. Rien n'est moins sĂ»r par consĂ©quent que la lĂ©gitimitĂ© des prĂ©tentions impĂ©riales des PalĂ©ologue vivant sous la domination turque immĂ©diatement après la chute de Constantinople. Depuis, imposteurs, aventuriers de haut vol ou charlatans de bas Ă©tage ont abondamment fait usage du nom et du blason de la dernière maison impĂ©riale de Byzance. Leurs divertissantes aventures n'ont pas de place ici. Il suffit de rappeler que les derniers descendants authentiques de cette famille s'Ă©teignirent en la personne des marquis de Montferrat, possessionnĂ©s en Italie du Nord ». Mihail Dimitri Sturdza, Grandes familles de Grèce, d'Albanie et de Constantinople, Dictionnaire historique et gĂ©nĂ©alogique, Paris, chez l'auteur, 1983, p. 374-375.
  2. Archives du Ministère des Affaires étrangères (A.M.A.E.), Papiers d'Agents, ''Paléologue''
  3. Under the Wire - How the Telegraph Changed Diplomacy par David Paull Nickles, Harvard University Press, 2003.
  4. Voir Le crépuscule des tsars de Maurice Paléologue, page 67, édition Mercure de France, 2007.
  5. Dixit Jules Cambon.
  6. D’une part, les Allemands ayant percé le chiffre de l’ambassade de France à Saint-Pétersbourg, les télégrammes devaient être envoyés à Paris via la Scandinavie, ce qui prenait plus de temps (24 heures de retard, auxquelles s’ajoutait une demi-heure pour le déchiffrage). D’autre part, Poincaré et Viviani se trouvaient toujours en mer où ils reçurent des informations incomplètes. Par ailleurs, durant cette semaine fatidique, les dernières nouvelles étaient fournies au Quai d’Orsay par l’ambassadeur d'Allemagne !
  7. - Ă€ Sazonov : « Si grave que soit le danger, si faibles que soient encore les chances de salut, nous devons (...) tenter jusqu'Ă  l'impossible pour sauver la paix. Je vous prie de considĂ©rer que je suis, moi, dans une position sans prĂ©cĂ©dent pour un ambassadeur. Le chef de l’État et le chef du gouvernement sont en mer ; je ne peux correspondre avec eux que par intermittences et de la façon la plus incertaine ; d'ailleurs, ils ne connaissent qu'imparfaitement la situation, ils ne peuvent m'envoyer aucune instruction. Ă€ Paris, le ministère est dĂ©capitĂ© Â», en date du mardi 28 juillet 1914.
  8. Michel Heller, Histoire de la Russie et de son empire, Paris, Perrin, (1re Ă©d. 1995) (ISBN 2081235331), p. 1357 & suiv
  9. RĂ©my Porte, « Une guerre nĂ©e de l'engrenage des alliances ? Â», La Nouvelle Revue d'histoire, n°8, p. 18-21.
  10. Télégramme d'Albert Thomas à Alexandre Ribot du vendredi 27 avril 1917.
  11. Journal, lundi 7 mai 1917.
  12. id.

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