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Jules Isaac

Jules Isaac, né le à Rennes et mort le à Aix-en-Provence, est un historien français. Il est l'auteur, à la suite d'Albert Malet, de célèbres manuels d'histoire, usuellement appelés « Malet et Isaac ». Jules Isaac est également un pionnier des Amitiés judéo-chrétiennes, notamment à travers son livre Jésus et Israël et sa participation active aux travaux de la conférence de Seelisberg.

Jules Isaac
Biographie
Naissance
Décès
Sépulture
Nom de naissance
Jules Marx Isaac
Nationalité
Formation
Activités

Biographie

Il naît le à Rennes[1], où réside alors son père, militaire de carrière, alsacien ayant opté pour la France en 1871. Il est issu d'une famille de juifs patriotes : son grand-père paternel Élias Isaac était trompette-major dans un régiment d'artillerie[2], son père Marx Isaac (1829-1891) accomplit une belle carrière d'officier sorti du rang qui lui permit de devenir lieutenant-colonel d'artillerie et officier de la Légion d'honneur[3], et son oncle Victor-Marx Isaac (1834-1891), sous-officier d'artillerie décoré de la Médaille militaire, obtint lui aussi la Légion d'honneur en tant que capitaine de l'armée territoriale[4].

À treize ans, il perd ses deux parents à quelques mois d’intervalle, et devient interne au lycée Lakanal à Sceaux. À l'âge de vingt ans, il fait la connaissance de Charles Péguy ; c'est le début d'une longue amitié, marquée en particulier par la création des Cahiers de la Quinzaine. Avec Péguy, Isaac s'engage dans le camp dreyfusard.

Il est reçu à l'agrégation d'histoire, en 1902, année de son mariage avec Laure Ettinghausen. Elle est née le 24 mars 1878 à Paris[5]. Il enseigne à Nice, puis à Sens. Il est introduit par Ernest Lavisse chez Hachette, qui publie la collection de manuels d'histoire d'Albert Malet. Isaac est d'abord chargé de rédiger des aide-mémoire pour le baccalauréat. Nommé professeur au lycée Louis-le-Grand, puis au lycée Saint-Louis, il étend sa collaboration à des manuels pour l'enseignement primaire supérieur également issus de la collection Malet.

Albert Malet meurt au front en 1915 tandis que Jules Isaac survit à 33 mois de tranchées et à une mauvaise blessure reçue à Verdun[6]. C'est donc seul qu'il rédige la nouvelle mouture imposée par de nouveaux programmes. Mais le nom de Malet reste associé au nom de la collection. Membre de la Ligue des droits de l'homme et du citoyen, puis du Comité de vigilance des intellectuels antifascistes, Jules Isaac s'engage en faveur d'une meilleure compréhension entre Français et Allemands, et milite en particulier pour une révision des manuels scolaires. En 1936, il est nommé inspecteur général de l'Instruction publique.

Âgé de 63 ans en 1940, il est révoqué en vertu du statut discriminatoire des Juifs pris par le gouvernement de Vichy. « Il n'était pas admissible, déclare le ministre de l'éducation et académicien Abel Bonnard le 13 novembre 1942 dans le journal Gringoire, que l'histoire de France soit enseignée aux jeunes Français par un Isaac. »[7] Il se réfugia en zone libre d'abord à Aix-en-Provence, puis lorsque les Allemands envahirent le Midi en 1942, il s'établit au Chambon-sur-Lignon chez son fils aîné Daniel Isaac, professeur au Collège Cévenol, et qui ne tarde pas à partir pour l'Espagne. Il s'installe alors à Riom, près de sa fille, Juliette Boudeville, et de son gendre, Robert Boudeville[8], qui travaillait au Central de l'Agence Havas à Vichy. Impliqués dans un réseau de résistance, ces derniers furent arrêtés, ainsi que sa femme, Laure Isaac, et son fils cadet, Jean-Claude (né le à Paris[5]), par la Gestapo à Riom le , puis déportés par le Convoi No. 61, en date du [5], par les Allemands à Drancy[9] puis à Auschwitz où ils furent assassinés[10], excepté son fils qui réussit à s'échapper d'un camp en Allemagne. En 1945, Jules Isaac est rétabli dans ses droits comme inspecteur général honoraire.

L'Amitié judéo-chrétienne

Jules Isaac consacre alors une grande partie de ses efforts à la recherche des causes de l'antisémitisme. Il publie Jésus et Israël, rédigé pendant la guerre, puis inspire la Charte de Seelisberg. Cofondateur, avec entre autres Edmond Fleg, et actif animateur de l'Amitié judéo-chrétienne en 1947, il s'emploie à combattre en particulier les racines chrétiennes du mal qui, si elles ne sont pas les seules, lui paraissent les plus profondes et encore vivaces dans la seconde moitié du XXe siècle[11]. Son idée essentielle est de mettre en valeur la nature profondément juive du christianisme primitif. Il participe à la conférence judéo-chrétienne de Seelisberg où il propose avec le grand rabbin Kaplan dix-huit points de redressement de l'enseignement chrétien concernant Israël[12].

Jules Isaac ne cesse de lutter contre ce qu'il appelle : l'enseignement du mépris. Il dénonce les siècles de catéchèse qui ont persuadé les chrétiens de la perfidie juive et de son caractère satanique, soulignant le lien entre les pratiques de l'antisémitisme chrétien et le système hitlérien[12].

Le , lors d'une audience papale, il demande à Pie XII la révision de la prière universelle du Vendredi saint dont l'oraison Oremus et pro perfidis Judaeis (littéralement « Prions aussi pour les Juifs perfides » en latin) comporte des mentions offensantes pour les Juifs[13]. Ce sera fait en par Jean XXIII, avant même que le concile Vatican II ne soit convoqué.

Le , Jules Isaac est reçu en audience par Jean XXIII au cours de laquelle il lui remet un dossier contenant :

  1. Un programme de redressement de l'enseignement chrétien concernant Israël ;
  2. Un exemple de mythe idéologique (la dispersion d'Israël, châtiment providentiel) ;
  3. Des extraits du catéchisme du concile de Trente montrant que l'accusation de déicide est contraire à la saine tradition de l'Église[14].

Jules Isaac noua une amitié avec Jean XXIII qui eut de l'influence dans la rédaction de la déclaration sur les religions non chrétiennes Nostra Ætate, approuvée en 1965 par le concile Vatican II.

« Le , à l'hôtel Lutetia, là où quelques années auparavant les survivants des camps d'extermination achevaient leur sinistre voyage, où les familles guettaient la moindre nouvelle des déportés, le MRAP décerne à Jules Isaac le prix de la fraternité. […] Le MRAP reconnait ainsi le grand retentissement de Jésus et Israël et de Genèse de l'antisémitisme. »[15]

Il meurt le à Aix-en-Provence[1] et est inhumé cinq jours plus tard dans le cimetière du Montparnasse (30e division)[16].

Publications principales

  • Cours d'histoire Malet-Isaac, en 7 volumes, 1923-1930
  • Paradoxe sur la science homicide et autres hérésies, Rieder, 1936
  • Jésus et Israël, 1948
  • Genèse de l'antisémitisme, essai historique, Paris : Callmann-Lévy, 1956 ; réédité en 1985, coll. « Agora », et en 1998, coll. « 10-18 »
  • L'antisémitisme a-t-il des racines chrétiennes ?, Paris : Fasquelle, 1960
  • Expérience de ma vie, Péguy, 1960
  • L'Enseignement du mépris, 1962

Hommages

Voir aussi

Bibliographie

Liens externes

Notes et références

  1. Acte de naissance no 1432 du 20 novembre 1977 avec mention marginale du décès, sur le site des archives municipales de Rennes.
  2. Site Leonore : acte de naissance de Marx Isaac.
  3. Site Leonore : dossier de Légion d'honneur de Marx Isaac.
  4. Site Leonore : dossier de Légion d'honneur de Victor-Marx Isaac.
  5. Voir, Klarsfeld, 2012.
  6. « Jules Isaac », sur judaisme.sdv.fr (consulté le )
  7. Cité par Michel Winock, La France et les Juifs, Seuil, Collection « Histoire », p. 221.
  8. Boudeville Robert. afmd-allier.com.
  9. Lazare Landau, 1963
  10. André Kaspi, Jules Isaac ou la Passion de la Vérité, Plon, 2002
  11. Introduction de « L'Antisémitisme a-t-il des racines chrétiennes ? », publié en annexe à L'Enseignement du mépris, Grasset, 2004 ; première publication : éditions Fasquelle, 1960.
  12. Francine Kaufmann, « Les enjeux de la polémique autour du premier best-seller français de la littérature de la Shoah », Revue d'Histoire de la Shoah no 176, septembre-décembre 2002, p. 68-96 [lire en ligne] [PDF]
  13. Enzo Bianchi, « Église et Israël : le tournant », dans Martin Rose (éd.), Histoire et herméneutique : mélanges pour Gottfried Hammann, Genève, Labor et Fides, coll. « Histoire et société » (no 45), , 1re éd., 443 p., 23 cm (ISBN 2-8309-1068-0, OCLC 300215886, BNF 38979885, lire en ligne), p. 77
  14. René Laurentin, L'Église et les juifs, p. 12, cité par Menahem Macina, Les frères retrouvés, p. 176
  15. André Kaspi, op. cit., p. 239-241
  16. Registre journalier des inhumations du cimetière du Montparnasse sur le site des archives de Paris.
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