Jean de Montmirail
Jean de Montmirail, appelé aussi Jean ou Jehan de Montmirail, né en 1165 et mort le , est un chevalier français, seigneur de Montmirail.
Connétable de France |
---|
Comte |
---|
Naissance | |
---|---|
Décès | |
Activités | |
Père |
André de Montmirail, Sire de la Ferté-Gaucher (d) |
Mère |
Hildiarde d'Oisy (d) |
Conjoint |
Environ Helvide de Dampierre (d) (environ Ă partir de ) |
Enfants |
Marie de Montmirail Mathieu de Montmirail Jean II de Montmirail Felicie de Montmirail, Dame de La Ferte-Gaucher (d) |
Ordre religieux | |
---|---|
Étape de canonisation | |
FĂŞte |
Il est également comte de La Ferté-Gaucher, de Condé-en-Brie et de Bellot ; seigneur d'Oisy, de Crèvecœur, de Bellonne, et châtelain de Cambrai ; de la Ferté-sous-Jouarre, de Tresmes[1], de Gandelu et vicomte de Meaux.
Connétable de France, il sauve à Gisors la vie de Philippe-Auguste, un cousin éloigné[2], et participe à la troisième croisade. Il se retire comme moine à l'Abbaye de Longpont où sa piété fait de lui un « Bienheureux »[3].
Biographie
Jean, fils d’André, naît en 1165 à Montmirail, dans un village de Champagne. Ayant perdu sa mère dans sa première jeunesse, il est élevé par la seconde femme de son père, la Comtesse de la Ferté-Gaucher. Son père André ne néglige rien pour que l’éducation de son fils soit complète. Il veut qu’il l’emporte sur tous les autres seigneurs de son temps, non seulement par la fortune, mais encore par la qualité de l’esprit et du cœur. Il étudie la langue latine et le droit romain. Il devient très instruit dans le droit coutumier de Vitry et de Cambrai : il en donne des preuves dans le cours de sa vie et s’en montre un fidèle observateur.
Après qu’il a été formé à toutes ces matières, André ne peut se dispenser d’introduire à la cour son fils qui est du même âge que Philippe, fils de Louis VII. Le jeune seigneur de Montmirail est accueilli avec bienveillance. Jean brille à la cour de Philippe Auguste. Il est alors le premier seigneur par son rang, sa fortune, l’illustration de sa naissance et ses qualités. Il est baron de Montmirail, comte de La Ferté-Gaucher, seigneur de la Ferté sous Jouarre, de Tresmes, d’Oisy, de Crèvecœur, de Bandelues, de Condé-en-Brie, (de la Fère, de Saint-Gobain, de la Chapelle en Brie), vicomte de Meaux et châtelain de Cambrai et fait preuve de nombreux talents[4]. Il fait forte impression sur son Roi : une amitié intime se forme entre les deux jeunes gens. Il devient non seulement l’ami de Philippe Auguste, mais aussi son favori et plus tard, son conseiller.
Philippe Auguste lui concède le titre de Baron et il figure à ce titre dans le traité conclu entre le Roi de France et Blanche de Navarre, Comtesse de Champagne.
Voulant prévenir les dangers auxquels les faveurs du monarque pouvait exposer son fils, la Comtesse de la Ferté-Gaucher lui propose de contracter alliance avec une femme digne de lui par sa naissance, ses qualités et son éducation. La Comtesse lui présente pour compagne Helvide de Dompierre et de Bourbon, troisième sœur de Gui de Dompierre et de Bourbon. Philippe Auguste n'est sans doute pas étranger à une alliance aussi bien assortie.
L’historien contemporain de Longpont (« Histoire du Bienheureux Jean ») nous le présente comme un guerrier fameux et en fait l’éloge :
Jean de Montmirail, ce Prince digne de toute notre admiration, aussi distingué par ses qualités du corps que de l’esprit, tenant avec gloire le premier rang dans toute la France, se montrait le plus intrépide, déployant partout sa libéralité, suivant la coutume de ce noble temps
Vaillance et vigilance
Le courage de Jean de Montmirail est relaté dans les contes comme étant exceptionnel. Richard Cœur de Lion et Philippe Auguste se sont réconciliés pour la croisade, mais l’harmonie ne pouvait durer longtemps entre ces deux héros qui semblent être nés pour rivaliser de gloire. Après leur retour de Terre Sainte, il est question d’exécuter le traité conclu en Palestine et par lequel le Prince anglais doit rendre à la France Gisors et le Vexin, qui avaient été donnés à Marguerite et ensuite à Alix, sœurs de Philippe Auguste. Gisors avait été pris en 1106 par Henri Ier Beauclerc à Louis VI le Gros. Mais, sur le refus d’obéir aux lettres de Richard, arrêté et prisonnier en Allemagne, Philippe entre de force dans le Vexin, prend Gisors et fait prisonnier le Comte de Gloucester. Richard ayant obtenu sa liberté de Henri VI, empereur d’Allemagne, rassemble secrètement une armée et va fondre sur le Vexin avec 1 500 cavaliers et 40 000 fantassins. Le Roi Philippe, courroucé, veut alors se rendre au fort de Gisors, accompagné seulement de 500 lances. Ne voulant pas reculer devant son vassal, alors qu’il allait être encerclé par les Anglais, il refuse de rebrousser chemin. Abandonné par sa troupe qui ne peut le suivre au milieu de ses ennemis, il va infailliblement être fait prisonnier, lorsque Jean se précipite au milieu de leurs rangs, porte des coups rapides et vigoureux, parvient à écarter une multitude d’ennemis permettant ainsi à Philippe de s’échapper sain et sauf, puis de rentrer à Gisors. Revenant promptement à Paris, il rassemble ses troupes et fait payer cher à Richard sa surprise. Jean se hâte de retourner à Montmirail et, réunissant la noblesse et les gens de guerre de ses terres, amène au Roi un renfort considérable. Les Anglais sont repoussés partout. Philippe Auguste arrache de force des mains du Roi d’Angleterre, Gisors et toute la Province.
Jean renonce bientĂ´t Ă la vie mondaine. En 1200, il s'Ă©tablit dans un ermitage en la forĂŞt de Beaumont, Ă une demi-lieue de Montmirail et, plus tard, se consacre Ă Dieu.
Sa vigilance à maintenir partout le bon ordre peut se comparer à la sollicitude pastorale d’un évêque. Il déploie un zèle infatigable pour prévenir les scandales, arrêter les abus, pourvoir aux besoins des peuples confiés à ses soins et parcourt son domaine pour rendre la justice.
Chartes
Nous ne saurions citer toutes les chartes de Jean envers les Ă©glises et les couvents :
- Charte de 1194 en faveur de l’Abbaye d'Essômes.
- Charte de 1198 en faveur de l’Abbaye de Vaucelles.
- Charte de 1201 en faveur de l’Abbaye d'Anchin.
- Charte de 1202 en faveur du monastère de Cantimpré.
Cette dernière charte nous apprend que Jean a à cette époque trois enfants en âge de donner leur consentement aux actes de leur père. La date de son mariage avec Helvide de Dampierre n’a jamais été précisée. D’après diverses chartes et cette particularité qu’il se maria fort jeune, il semble que l'on puisse fixer l’époque de son mariage au plus tard vers 1185 :
- Jean de Montmirail épousa Helvide de Dampierre, sœur de Guy de Dampierre, sire de Bourbon (-l'Archambault), qui eut pour enfants Archambaud, le grand seigneur de Bourbon (père entre autres de Marguerite de Bourbon, reine de Navarre, comtesse de Champagne et de Brie), et Guillaume de Dampierre, comte de Flandre et de Hainaut[5].
Générosité
Jean se montre également généreux envers :
- le prieuré de N.D. du Charme, de l’Ordre de Fontevraud, au Diocèse de Soissons, et il lui fait d’importantes donations en 1202.
- Charte en faveur de L’Abbaye Notre-Dame du Verger de Oisy-le-Verger. Acte portant destination primitive de la maison du Verger fondée dans le Petit Marais sur la Sensée (1209)
- Établissement de Charité fondé à Paris en 1202, en faveur de l’Abbaye de Val-Secret.
- Donation aux monastères de Jouy, de Saint-Jean des Vignes, du Mont-Dieu, qui prit plus tard le nom de l’Amour-Dieu, et du prieuré Saint-Étienne à Montmirail (1203)
- Consentement à l’échange de terres qui avait été conclu entre Hugues de Crèvecœur, vassal de Jean, et l’église Saint-Aubert à Cambrai. (1206)
- Fondation de l’Hôtel-Dieu à Montmirail. (1207)
- Confirmation de la fondation de sa tante Marguerite de Blois, de la maison de Cerfroid, maison-mère et de fondation de l'Ordre de la Sainte-Trinité et de la Rédemption des Captifs (Trinitaires, Mathurins, 1212)
- Louis, fils aîné du Roi des Français atteste que Jean de Montmirail a garanti au Roi jusqu’à concurrence d’une somme de mille Livres, la fidélité de Hellin II de Wavrin le Jeune, sénéchal de Flandre. (1213), son gendre
Jean Ier de Montmirail meurt à Longpont le à l’âge de 52 ans. Selon une lettre adressée par le roi Louis XIII au pape Innocent X, il serait mort en odeur de sainteté[6].
Famille
Il est le fils d'André sire de Montmirail, La Ferté-Gaucher et Condé-en-Brie, et d'Hildiarde d'Oisy (†1177), châtelaine de Cambrai, dame d'Oisy et de Crèvecœur, vicomtesse de Meaux, Dame de La Ferté-sous-Jouarre et de Tresmes.
Il épouse Helvide de Dampierre, dame de Somsois, née en 1158 et morte après 1224[7] - [8], sœur de Guy II de Dampierre, connétable de Champagne.
Il a pour descendants :
- Guillaume, qui meurt avant son père et qui n’a laissé aucun souvenir
- Jean II de Montmirail, seigneur de Montmirail et d'Oisy
- Mathieu de Montmirail, seigneur de Montmirail et d'Oisy
- Élisabeth[9], religieuse
- Félicie, mariée à Hellin, seigneur de Wavrin et sénéchal de Flandre ;
- Marie de Montmirail, mariée à Enguerrand III de Coucy, d'où la succession des fiefs familiaux dans la Maison de Coucy.
Son tombeau
Un tombeau en marbre noir et blanc fut érigé dans l'abbaye de Longpont, vers l'an 1250. Ce mausolée et ses statues ont été détruits en 1793. (Dessin établi d'après des gravures qui datent de 1641). L'inscription suivante y était gravée[10] :
IN LONGO PONTE VOLUIT SE SUBDERE SPONTE
OBSEQUIO CHRISTI LAPIDI QUI SUBJACET ISTI
CUJOS IBI CINERES MONTIS MIRABILIS HÆBES
OLIM JURE BEI NOMEN EI (ID EST JOANNIS)
GRATIA SIT CHRISTO QUI NOS DECOBAVIT IN ISTO
AMEN.
AVE MARIA GRATIA PLENA.
Au premier étage du mausolée, le seigneur de Montmirail est encore représenté jeune, revêtu de son armure guerrière, avec le casque et la visière levée. Son épée repose à sa gauche ; à sa droite est son bouclier chargé de ses armoiries qui sont de gueules au lion rampant d'or. A ses pieds, son chien fidèle, emblème de la fidélité de ses vassaux et de celle qu'il avait eue lui-même pour le roi son suzerain. Une pierre de la même dimension en largeur et en profondeur que tout le monument forme le second étage. Jean y est encore représenté, mais dans un costume différent. Il est couché et revêtu de la grande robe de religieux de saint Bernard ; ses mains sont enveloppées dans les manches ; son visage est sillonné de rides et sa tête est chauve. Cette double représentation traduit deux conditions fort diverses : seigneur terrien et humble religieux.
Le haut du mausolée est un ouvrage d'architecture ogivale du style le plus pur. Le couronnement est porté sur des colonnes élégantes et soutenu aux quatre angles par des arcs-boutants. Chaque face est ornée d'une rose, d'un riche entablement, de galeries et de clochetons. Quatre anges déploient leurs ailes au-dessus des chapiteaux et présentent au Bienheureux une couronne et une palme. Le jour pénètre de toutes parts dans le monument.
Le Bienheureux Jean de Montmirail
Jean de Montmirail fut béatifié vers 1250, un reliquaire peut être visible à l'Abbaye Notre-Dame de Longpont.
Extrait de la lettre circulaire de Monseigneur l’évêque de Soissons et Laon[11] :
…Un décret de la Sacrée Congrégation des Rites, approuvé par Léon XIII en date du , vient de reconnaître et de rendre obligatoire, pour tout le Diocèse de Soissons, sous le Rit « double-mineur » fixant cette fête au de chaque année…
…Nous ne nous attarderons pas à faire l’histoire du Bienheureux Jean de Montmirail : elle peut tenir en quelques mots :
- Jean, Seigneur de Montmirail, se rattachant aux familles des Rois de France, Robert le Pieux, Hugues Capet, Charlemagne, naquit à Montmirail en 1165. Haute naissance, immenses richesses, valeur chevaleresque, tout se réunissait pour l’attacher à ce monde et l’y fixer ; Il en fut de longues années l’ornement et la gloire. Un jour, Dieu parla plus fort à son âme que la gloire de ce monde et lui fit voir que s’il est beau de servir un roi de la Terre, il est encore plus beau de servir le Roi du Ciel.
Jean comprit tout, et le noble et brillant seigneur se fit l’humble serviteur des pauvres et des malades dans un hôpital qu’il avait fait construire dans sa demeure. Ce n’était pas encore assez pour son humilité. Cet éclat qui avait environné toute sa vie et dont il restait encore quelque chose, malgré tout ce qu’il pouvait faire pour l’éteindre, il voulut l’anéantir en s’anéantissant lui-même et en disparaissant entièrement dans l’obscurité d’un cloître. Il vint frapper à la porte de l’Abbaye de Longpont, de l’Ordre de Cîteaux : Jean l’Humble y donna le modèle des plus pures vertus religieuses et y mourut le .
Notes et références
- Seigneurie à l'est de Meaux, mais aucune commune actuelle ne porte plus ce nom (simplement des noms de rues, lieux-dits...). A pu recouper les communes de Crouy-sur-Ourcq, Certigny, May-en-Multien, Congis-sur-Thérouanne, Poincy, Pommeuse, au nord-est de Seine-et-Marne, en Multien. Aux XVIe – XVIIIe siècles, la famille Potier, avec Gesvres-le-Chapitre, l'a eu comme duché de Tresmes et duché de Gesvres. http://www.crouy-sur-ourcq.fr/spip.php?article6
- Il descend de Constance de Vermandois (née en 1086)
- Monseigneur Paul Guérin, camérier de sa sainteté Pie IX, Les Petits Bollandistes, vie des Saints de l'Ancien et du Nouveau Testament, Paris, Bloud et Barral, Libraires, , 656 p., p. 511 à 529
- Abbé Boitel, Histoire du Bienheureux Jean, surnommé l’Humble, p. 174
- Le Carpentier, histoire de Cambrai et du Cambrésis, p. 236
- Lettre du roi Louis XIII au pape Innocent X, au sujet du bienheureux Jean de Montmirail, citée par l'abbé Boitel, op. cit., 1859, p.632.
- Fille de Guillaume Ier de Dampierre
- Enterrée dans l'un des cloître de l'Abbaye de Vaucelles
- nommée dans la Charte de Cantimpré et morte sans postérité
- Revue de l'art chrétien, de la Société de Saint-Jean, publié par St. Augustin, Desclée, De Brouwer et Cie, 1859
- relative à l’introduction dans la liturgie soissonnaise de la fête du Bienheureux Jean de Montmirail, Soissons, le 14 septembre 1891
Voir aussi
: document utilisé comme source pour la rédaction de cet article.
Bibliographie
- Adolphe de Cardevacque, « Oisy et ses seigneurs », Mémoires de la Société d'émulation de Cambrai, vol. XXXVII,‎ , p. 126 (lire en ligne, consulté le ).
- Monseigneur Paul Guérin, Les petits Bollandistes, Vie des Saints, Paris, Bloud et Barral Libraires, , p. 511ss.
- Abbé Boitel, Histoire du Bienheureux Jean, surnommé l’Humble, Paris, H. Vrayet de Surcy éditeur, , 677 p..
- FĂ©lix-Victor Goethals, Histoire de la Maison de Wavrin, Bruxelles, , p. 23.