Jean-Claude Courveille
Jean-Claude Courveille, né à Usson-en-Forez le et mort le à Solesmes, est un prêtre catholique co-fondateur de la congrégation des maristes (ou Société de Marie), dont il fut un temps le supérieur général. Il se retira ensuite à l'abbaye cistercienne d'Aiguebelle, puis à Saint-Antoine-l'Abbaye et enfin à l'abbaye bénédictine de Solesmes où il mourut.
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Biographie
NĂ© Ă Usson dans le Forez le , il est le fils de Marguerite Beynieux et du marchand Claude Courveille.
Enfant, il est atteint de la petite vérole en 1797, et des lésions cornéennes le rendent à demi-aveugle. Son père meurt en 1805[1].
À la suite de la disparition de la Vierge noire du Puy, brûlée le par Louis Guyardin, Courveille est envoyé a la Convention nationale dans le département de la Haute-Loire[2]. En 1809, il fait un pèlerinage à la cathédrale du Puy-en-Velay. Il affirme avoir été guéri miraculeusement de la cécité et se consacre alors au service de Marie[1].
Il entre au petit séminaire de Verrières-en-Forez[1], où il a comme condisciple Marcellin Champagnat[3] puis continue ses études de latin chez son oncle maternel, l'abbé Mathieu Beynieux, alors curé d'Apinac. En tant que séminariste, il refait le pèlerinage au Puy-en-Velay ; alors qu'il prit dans la cathédrale le , il affirme avoir reçu une révélation de la Vierge lui suggérant de créer une congrégation portant le nom de Marie[1].
À la Toussaint 1812, Il entre au grand séminaire du Puy-en-Velay, mais il doit le quitter pour rejoindre celui de Saint-Irénée de Lyon, car le Concordat avait rattaché sa paroisse d'origine à ce diocèse[4].
Le transfert se fait à la rentrée 1813, et Jean-Claude Courveille y retrouve Marcellin Champagnat, et fait connaissance de Jean-Claude Colin ainsi que de Jean-Marie Vianney, admis eux aussi au grand séminaire de Lyon[5].
Leur ordination a lieu le . Le lendemain, Courveille, Champagnat, Colin et neuf autres compagnons, se rendent à Notre-Dame-de-Fourvière pour y célébrer leur première messe. Les douze prêtres fondent en ce lieu une Société de Marie[5] et s'engagent à « servir l'Église dans les formes d'engagements les plus diverses »[4].
En 1817, Jean-Claude Courveille est nommé vicaire à Verrières-en-Forez, puis à Rive-de-Gier où il reste jusqu'en 1819, date à laquelle il devient curé à Épercieux, charge qu'il quitte en 1824. Il rédige ses notes concernant la fondation d'un tiers ordre mariste[4]. Il est à noter que « le bleu-ciel était sa couleur favorite : il portait le manteau bleu et imposa le costume bleu aux Frères »[6].
Avec Champagnat, vicaire à La Valla-en-Gier, l'abbé Courveille achete, une maison dans cette commune qui devient la première des frères maristes. En tant que supérieur général, il édicte une règle pour les frères, puis, en 1822, ouvre une école à Feurs tout en faisant des démarches pour en fonder une autre à Charlieu[4].
En 1823, Jean-Gaston de Pins, l'administrateur apostolique, s'inquiète de l'activisme du supérieur des maristes et tente de modérer son zèle en nommant Champagnat pour diriger la congrégation à sa place[4]. L'activité de l'abbé Courveille est alors limitée aux Petits Frères de Marie[6]. Mais, un an plus tard, Champagnat, dont la santé est chancelante, obtient de faire revenir son ami Courveille à la tête des Maristes. À nouveau supérieur général, il achète le site de l'Hermitage, près de Saint-Chamond, qui allait devenir la maison-mère de la congrégation[4].
Controverses
Ayant constaté que s'était élevée « une controverse sur son rôle au sein de la Société de Marie », une de ses dernières biographes, Gabrielle Trénard, achève sa biographie en 1824 en expliquant que plusieurs affaires de mœurs l'avaient contraint à quitter les maristes[4]. Quant à savoir qui de Courveille ou Champagnat doit être considéré comme le véritable fondateur de la congrégation, elle juge sage de prendre du recul en expliquant : « En définitive, le rôle de Courveille dans les démarches en faveur de la Société de Marie est mal connu »[1].
La première affaire de mœurs déclenche une enquête archiépiscopale qui est diligentée par de Pins et confiée au père Barou, vicaire général. Un autre des biographes de Jean-Claude Courveille, le frère Louis-Laurent, mariste, après avoir essayé d’étouffer l’affaire, déclare en 1826 que de lourdes fautes avaient été commises à l’Hermitage, que le père Courveille dut assumer[7].
En 1868, il est reconnu dans la congrégation que leur fondateur s'était « compromis avec un jeune postulant » au mois d'avril 1826. Il subit une dénonciation du père Terraillon, qui fit un rapport à l'archevêché. L'accusateur convint que jusqu'alors : « M. Courveille était regardé partout encore comme un saint, et il l'était vraiment jusqu'à cette époque »[7].
Jean-Claude Courveille préfére alors pourtant prendre ses distances. Il part pour une retraite à l'abbaye cistercienne d'Aiguebelle au cours de la semaine précédant la Pentecôte 1826. Ce n'est qu'un mois plus tard qu'il donne de ses nouvelles en écrivant le à Champagnat, prêtre et père Directeur des petits frères de Marie. Il y vante la règle particulière des trappistes qui l'avaient reçu et affirme vouloir s'y retirer : « Le Supérieur semble mettre tous ses soins à mortifier et à humilier ses inférieurs, dans toutes les occasions, et les inférieurs semblent les recevoir avec un respect, une humilité, j'ai presque dit une sainte avidité, qui fait bien voir qu'ils en sont amateurs et qu'ils laissent au Supérieur une entière liberté de leur conduite. »[7]. Cette attitude correspondant à celle qu'il aurait voulu imposer à sa congrégation, puisque son condisciple, le frère Louis-Laurent note « Sa sentimentalité refoulée se changea alors de plus en plus en une sévérité outrée et en un besoin maladif d'autorité tyrannique, comme s'il prenait un plaisir malsain à contempler ceux qui luttaient contre l'impossible »[6].
Champagnat et Terraillon ne purent s'entendre sur la réponse à donner à cette démission annoncée. Le lendemain arriva Jean-Claude Colin qui abonda dans le sens de Champagnat. Étienne Terraillon soutint de nouveau son point de vue : « Vous manquez là une belle occasion qui ne reviendra peut-être plus. Vous en serez fâchés, j'en suis sûr. M. Courveille a dans ce pays la réputation d'un saint. Si nous sommes obligés de l'écarter plus tard, comme cela pourra arriver, tout l'odieux nous retombera dessus. En profitant de cette occasion, il se sera exclu lui-même. Croyez-moi, acceptez cette démission. Vous aurez plus tard à vous en applaudir, j'en suis certain. ». Il réussit à convaincre le seul Champagnat qui cosigna la lettre de Terraillon signifiant à Courveille que sa démission était acceptée[8].
Sa mission accomplie, Terraillon quitte l'Hermitage laissant seul Champagnat pour faire face à leur décision. Celui-ci n'avait cédé que lorsque son confrère lui avait révélé la conduite de Courveille[8].
Courveille ne reste pourtant pas à Aiguebelle. Il préfère se retirer auprès des sœurs maristes de Saint-Clair-du-Rhône, après que Colin eut refusé de le recevoir chez lui à Belley[9]. Son exclusion de facto ne fit pas renoncer le père Courveille à sa mission de fondateur de la Société de Marie. Il jete son dévolu sur l'ancienne abbaye de Saint-Antoine, dans l'Isère, pour y établir un nouveau groupe avec le soutien de l'évêque de Grenoble, de Bruillard, et de Jules de Calvières, préfet de l'Isère[10].
Il achete une partie de l'abbaye pour 60 000 francs et est rejoint par quelques frères qui abandonnèrent l’Hermitage. Le , la municipalité de Saint-Antoine vote une subvention de 220 francs pour fournir aux frères de la Congrégation de Marie des tables avec leurs bancs et une chaire pour le surveillant de la classe. Deux jours plus tard, un arrêté préfectoral valide le versement de 1 600 F à M. le général de la Société des Petits Frères, qui s'était engagé à fournir des maîtres d'école aux communes qui en demanderaient[10].
Bientôt Courveille réunit autour de lui une quinzaine jeunes gens désireux de devenir religieux enseignants[10]. Il compléte son effectif avec des sœurs maristes de Saint-Clair-du-Rhône qu'il installe à Saint-Antoine pour y ouvrir une école de filles. Mais il ne peut tenir ses engagements et est privé de ses subsides. Les Frères quittèrent Saint-Antoine, seules les Sœurs sont autorisées à rester par une ordonnance royale du [11].
Le , le Conseil de de Pins se dit prêt à lui accorder l'exeat, si cela lui était demandé. Mais la requête n'est jamais formulée. Aussi, après la Toussaint, il se rend dans la Loire chez son oncle maternel, toujours curé d'Apinac. C'est de là que, le , il signe un acte de renonciation définitive en faveur de Champagnat. Pourtant à la retraite pastorale de 1832, il tente une dernière approche auprès de la congrégation pour retrouver sa place. Alors le père Colin lui dit : « Croyez-vous que nous ne soyons pas au courant de votre conduite ? ». Courveille se le tint pour dit[12].
Rejeté de la Société, il décide de mener une vie érémitique. Il construit, près de l'église d'Apinac, un ermitage et une chapelle, ce faisant, il acquiert à nouveau une grande réputation de sainteté[12]. Mais accueillant des enfants, son passé le rattrape et, convaincu de nouvelles fautes, il quitte définitivement la paroisse de son oncle[13].
Au printemps 1834, il se rend au Mans où il est considéré par l'évêque Jean-Baptiste Bouvier, comme « un prêtre zélé et vertueux ». Là , il entre en relations avec Prosper Guéranger, bénédictin qui vient de rétablir l'abbaye de Solesmes, en 1833. Le , il y prend l'habit, et le , à l'âge de 51 ans, Courveille fait profession religieuse. Chargé pendant deux années (1839-1840) des frères convers de l'abbaye, il doit abandonner toute charge en 1860, perclus et paralysé des mains à cause de la goutte. Jean-Claude Courveille vit encore six ans, et meurt le , âgé de 79 ans[14].
Notes et références
- Gabrielle Trénard, op. cit., p. 134.
- Cathédrale Notre-Dame du Puy-en-Velay
- « Forez histoire », sur forezhistoire.free.fr (consulté le )
- Gabrielle Trénard, op. cit., p. 135.
- Les missions maristes
- Frère Louis-Laurent, op. cit., p. 215.
- Frère Louis-Laurent, op. cit., p. 216.
- Frère Louis-Laurent, op. cit., p. 217.
- Frère Louis-Laurent, op. cit., p. 221.
- Frère Louis-Laurent, op. cit., p. 223.
- Frère Louis-Laurent, op. cit., p. 224.
- Frère Louis-Laurent, op. cit., p. 225.
- Frère Louis-Laurent, op. cit., p. 226.
- Frère Louis-Laurent, op. cit., p. 227.
Bibliographie
- Frère Louis-Laurent, Historique des origines de l'Institut, Bulletin de l'Institut 163, , Tome XXII, pp. 215 - 230
- Gabrielle Trénard, Dictionnaire du monde religieux dans la France contemporaine, Tome VI, pp. 134-135, sous la direction de Xavier de Montclos, Éd. Beauchesnes, Paris, 1994, (ISBN 2701013054).