Cornée
La cornée est la partie antérieure transparente du globe oculaire, en forme de calotte asphérique et légÚrement saillante. Elle transmet la lumiÚre au cristallin et à la rétine.
Anatomie
Câest le premier Ă©lĂ©ment rĂ©fractif de lâĆil, comptant pour les 2â3 du dioptre oculaire, le cristallin constituant le 1â3 restant. Elle couvre environ un cinquiĂšme de la surface de lâĆil. Elle mesure en moyenne, chez lâadulte, 11,7 mm de diamĂštre horizontal et 10,6 mm de diamĂštre vertical. La cornĂ©e est plus fine au centre (0,5 Ă 0,6 mm) qu'au bord (0,6 Ă 0,8 mm).
Rayons de courbure moyens :
- de la face antérieure : 7,8 mm
- de la face postérieure : 6,8 mm
Indice de réfraction : 1,377
Puissance moyenne : 43 dioptries.
Hydratation : 85 %
Histologie
La cornée est composée de quatre couches de cellules et de 2 membranes. De la superficie vers l'humeur aqueuse :
- l'épithélium ;
- la membrane de Bowman ;
- le stroma cornéen ;
- la couche de Dua [1];
- la membrane de Descemet ;
- lâendothĂ©lium cornĂ©en.
C'est un des trĂšs rares tissus (avec l'Ă©piderme) Ă ne pas ĂȘtre vascularisĂ© par des capillaires sanguins. En effet la cornĂ©e doit conserver sa transparence. L'absence de vaisseaux sanguins ne lui permettant pas de se nourrir ou de se protĂ©ger de l'infection, elle trouve l'oxygĂšne dans les larmes et les nutriments dans l'humeur aqueuse de la chambre antĂ©rieure qui se trouve derriĂšre elle.
L'épithélium
LâĂ©pithĂ©lium cornĂ©en est formĂ© de 5 Ă 7 couches de cellules. La couche basale formĂ©e de cellules cubiques repose sur une lame basale et est accrochĂ©e trĂšs fortement au stroma par des complexes dâadhĂ©sion (hĂ©midesmosomes). Il a un rĂŽle de barriĂšre et facilite la dispersion du film de larmes Ă la surface de la cornĂ©e. Ses kĂ©ratines caractĂ©ristiques sont les kĂ©ratines 3 et 12.
Renouvellement
Les cellules souches de lâĂ©pithĂ©lium cornĂ©en se trouvent en pĂ©riphĂ©rie de la cornĂ©e, dans le « limbe ». Ces cellules souches donnent naissance Ă des cellules amplificatrices transitoires qui produisent Ă leur tour les cellules diffĂ©renciĂ©es de lâĂ©pithĂ©lium cornĂ©en. Ce renouvellement est centripĂšte, de la pĂ©riphĂ©rie vers le centre de la cornĂ©e. Un second mĂ©canisme de renouvellement prend le relais, de la base de lâĂ©pithĂ©lium vers le haut: la couche unique de cellules basales, cubiques, produit des cellules intermĂ©diaires pavimenteuses, puis des cellules plates qui finissent par desquamer dans le film de larmes en surface de la cornĂ©e.
Ces deux mécanismes de renouvellement se produisent en permanence.
Il faut compter 1 an pour que lâephitelium cornĂ©en se renouvelle totalement.
La membrane de Bowman
La « couche de Bowman » est synthĂ©tisĂ©e au quatriĂšme mois de la vie embryonnaire, probablement synthĂ©tisĂ©e par les cellules basales de lâĂ©pithĂ©lium. Elle ne se renouvelle jamais et par consĂ©quent une lĂ©sion de celle-ci est dĂ©finitive. Câest une couche de collagĂšne diffus.
La couche de Bowman est situĂ©e entre la membrane basale Ă©pithĂ©liale et le stroma. Bien individualisĂ©e chez lâhomme, elle mesure de 8 Ă 14 ”m Ă la partie centrale de la cornĂ©e. Ne pouvant ĂȘtre rĂ©gĂ©nĂ©rĂ©e, toute rupture de la couche de Bowman va entraĂźner la constitution dâun tissu cicatriciel gĂ©nĂ©rant des opacitĂ©s dĂ©finitives.
La couche de Bowman est composée de fibres collagÚnes réparties apparemment au hasard dans la substance fondamentale.
Elle est dépourvue de cellules hormis les fines expansions des cellules de Schwann entourant les terminaisons nerveuses qui la traversent.
La substance fondamentale est constituée de mucoprotéines de composition biochimique vraisemblablement identique à celle du stroma.
Les fibres correspondent à des fibres de collagÚne présentant une striation transversale.
Elles mesurent de 20 Ă 30 ”m de diamĂštre et de 240 Ă 270 Ă
ngström de long.
Le collagÚne I est le principal constituant de la cornée et de la sclÚre.
La couche de Bowman contient comme le stroma cornéen des collagÚnes V, VI et VII.
De plus du collagĂšne IV, qui est le principal constituant des membranes basales, a Ă©galement Ă©tĂ© retrouvĂ© dans la couche de Bowman, mais en faible proportion, expliquant quâil ne sâagisse pas dâune membrane Ă proprement parler.
L'épithélium, la membrane de Bowmann et le stroma antérieur proche de l'épithélium sont parcourus par des fibres nerveuses principalement sensitives.
Le stroma
Le stroma cornĂ©en reprĂ©sente la majeure partie de lâĂ©paisseur de la cornĂ©e (400 ”m). Il est composĂ© de cellules, les kĂ©ratocytes, et d'une matrice extracellulaire contenant des protĂ©oglycannes et des fibrilles de collagĂšnes ayant un arrangement particulier responsable de la transmission de la lumiĂšre.
Les kératocytes sont des cellules quiescentes responsables du renouvellement de la matrice extracellulaire. Ces cellules peuvent quitter ce stade quiescent pour intervenir dans les processus de cicatrisation.
Les fibrilles de collagĂšne principales sont de type I/V, et leur association forme des fibres de diamĂštre constant (35 nm) et dâespacement constant (59 nm), groupĂ©es en lamelles parallĂšles Ă la surface cornĂ©enne. Les fibres I/V sont entourĂ©es d'une gangue de proteoglycannes. D'autres types de collagĂšnes sont prĂ©sents, leur rĂŽle principal est d'assurer le maintien de l'espacement rĂ©gulier. Le stroma cornĂ©en est un tissu conjonctif non vascularisĂ©, mais il est innervĂ©.
Couche de Dua
La couche de Dua est une région de la cornée humaine nouvellement découverte et proposée dans un article scientifique en mai 2013[1]. Elle est épaisse de 15 micromÚtres et située entre le stroma cornéen et la membrane de Descemet[2] - [3].
La membrane de Descemet
Il sâagit de la lame basale de lâendothĂ©lium, dâune Ă©paisseur de dix micromĂštres Ă 12 ”m
Elle est trĂšs Ă©lastique et solide tout en Ă©tant permĂ©able Ă lâeau ;
Elle est formĂ©e de deux feuillets: un feuillet dâorigine embryonnaire et un feuillet qui sâĂ©paissit tout au long de la vie. La membrane de Descemet est une membrane collagĂ©nique acellulaire entre le stroma postĂ©rieur et la monocouche endothĂ©liale, formĂ©e de collagĂšnes IV et VIII et contenant de la fibronectine, de la laminine type 1 et des protĂ©oglycanes hĂ©paran, dermatan et keratan sulfates. Elle est en continuitĂ© avec le rĂ©seau trabĂ©culaire en pĂ©riphĂ©rie de la cornĂ©e, la limite entre les deux Ă©tant constituĂ©e par la ligne de Schwalbe. La jonction Descemet-stroma est riche en fibronectine, probablement dâorigine embryonnaire, qui joue un rĂŽle dans lâadhĂ©sion des deux structures. Elle est synthĂ©tisĂ©e par les cellules endothĂ©liales et sâĂ©paissit avec lâĂąge. En microscopie Ă©lectronique elle apparaĂźt formĂ©e de deux couches, une couche striĂ©e au contact du stroma, dâune Ă©paisseur de 0,2 Ă 3 ”m, et une couche finement granuleuse, dâune Ă©paisseur de 2 Ă 10 ”m, au contact de lâendothĂ©lium cornĂ©en. La couche granuleuse apparaĂźt comme un rĂ©seau hexagonal parallĂšle Ă la surface de la membrane, avec des nĆuds sĂ©parĂ©s de 100 nm dans une substance de fond. Elle contient les Ă©lĂ©ments classiques des membranes basales : collagĂšne IV et laminine, ainsi que des Ă©lĂ©ments inhabituels dans les membranes basales comme le collagĂšne de type VIII.
Le collagĂšne VIII est lâĂ©lĂ©ment majeur du rĂ©seau hexagonal. Le collagĂšne IV forme des digitations Ă lâinterface stroma-Descemet qui percent jusquâĂ lâendothĂ©lium de façon focale. Ces Ăźlots de collagĂšne IV sont liĂ©s aux digitations des cellules endothĂ©liales et participent Ă leur fixation. Ce collagĂšne IV a une origine embryonnaire et il est progressivement enfoui dans le rĂ©seau de collagĂšne VIII durant la 8e semaine de lâorganogĂ©nĂšse. Le collagĂšne VIII contribuerait Ă la diffĂ©renciation des cellules de la crĂȘte neurale en cellules endothĂ©liales cornĂ©ennes. Les cellules endothĂ©liales cornĂ©ennes synthĂ©tisent du collagĂšne VIII et du collagĂšne IV en culture.
L'endothélium
LâendothĂ©lium cornĂ©en est une mono-couche cellulaire formant une mosaĂŻque hexagonale. Ses cellules ne se rĂ©gĂ©nĂšrent pas.
La richesse en protĂ©oglycannes du stroma cornĂ©en provoque un appel d'eau de l'humeur aqueuse vers le stroma qui tend Ă augmenter son Ă©paisseur, modifiant la courbure et la transparence de la cornĂ©e (ĆdĂšme stromal). Le rĂŽle principal des cellules endothĂ©liales cornĂ©ennes est de pomper par transport actif cette eau en excĂšs du stroma vers l'humeur aqueuse afin de maintenir une hydratation constante du stroma compatible avec le rĂŽle physiologique principal de la cornĂ©e: la transmission de la lumiĂšre. En dessous d'une certaine densitĂ© (entre 600 et 800 cellules/mmÂČ), il est admis que le nombre de cellules endothĂ©liales est insuffisant pour assurer un transfert d'eau efficace et lâĆdĂšme stromal apparaĂźt.
Pathologie
Les pathologies de la cornĂ©e relĂšvent de lâophtalmologie.
- Traumatismes
- Traumatismes mĂ©caniques : les corps Ă©trangers cornĂ©ens sont trĂšs frĂ©quents. En gĂ©nĂ©ral Ă la suite d'un accident du travail ou de bricolage, un corps Ă©tranger va ĂȘtre projetĂ© dans lâĆil et sâimpacter sur la cornĂ©e. Il peut ĂȘtre Ă©vacuĂ© spontanĂ©ment par les larmes, mais il est souvent nĂ©cessaire de le faire enlever par un mĂ©decin, sous anesthĂ©sie locale. Le port de lunettes de protection permet de prĂ©venir souvent ce type de traumatisme.
- Traumatismes chimiques : il sâagit dâune brĂ»lure causĂ©e par la projection dâun acide ou dâune base. Lorsquâun tel accident survient, il faut rincer abondamment au sĂ©rum physiologique ou Ă lâeau stĂ©rile et consulter en urgence un mĂ©decin.
- Traumatismes thermiques : par une chaleur ou un froid intenses.
- Troubles réfractifs
- Astigmatisme : la cornĂ©e peut ĂȘtre Ă lâorigine dâun astigmatisme irrĂ©gulier.UlcĂšre de la cornĂ©e secondaire Ă une kĂ©ratite bactĂ©rienne
- KĂ©ratites
- UlcÚres de cornée : ils font souvent suite à un corps étranger.
- KératocÎne : traitement connu à ce jour, le port de lentilles rigides permet de corriger la déformation, il existe aussi des anneaux intra-cornéens, des verres scléraux (lentilles plus grandes que l'iris, recouvrant le corps blanc en partie), des traitements permettant de ralentir l'évolution de la maladie, et en dernier recours la greffe de cornée.
- Diminution ou perte de transparence : dans les cas les moins sĂ©vĂšres, un diagnostic de diminution de la transparence est Ă©tabli aprĂšs un examen chez l'ophtalmologiste Ă l'aide d'un microscope (lampe Ă fente) ou d'examens plus poussĂ©s de la qualitĂ© de la vision. Dans des cas plus sĂ©vĂšres, la perte de transparence de la cornĂ©e est visible Ă lâĆil nu, limitant la visibilitĂ© de l'iris et de la pupille, donnant un aspect bleutĂ© ou complĂštement blanc Ă lâĆil. La prise en charge thĂ©rapeutique de ce type de pathologie dĂ©pend de lâimportance, de la densitĂ© des opacitĂ©s et de leur Ă©paisseur.
- Cornea guttata (gouttes cornéennes)[4] - [5].Greffe récente de la cornée, montrant ses points de suture
- La dystrophie de Fuchs[4] - [5].
- La xérophtalmie est une maladie due à une carence de vitamine A et qui, au stade terminal, se traduit par une opacité de la cornée et donc à une cécité.
- Une taie est une tache blanche et opaque qui se forme quelquefois sur la cornée.
Certaines de ces pathologies, Ă des stades avancĂ©s, peuvent ĂȘtre traitĂ©es par la greffe de cornĂ©e. Des progrĂšs concernant les greffes ont Ă©tĂ© faits en 2019, par reprogrammation de cellules souches IPS. Cette technique, si elle se confirme, laisserait entrevoir la possibilitĂ© de "fabrication" de cornĂ©e Ă la demande[6].
Prospective, recherche
Une des pistes qui semblent sur le point de se concrĂ©tiser entre 2015 et 2020 est la possibilitĂ© de restaurer des cornĂ©es Ă partir de cellules souche, ceci a dĂ©jĂ pu ĂȘtre fait sur le modĂšle animal[7].
Notes et références
- (en) H.S. Dua, L.A. Faraj, D.G. Said, T. Gray et J. Lowe, « Human Corneal Anatomy Redefined: A Novel Pre-Descemet's Layer (Dua's Layer) », Ophthalmology,â , S0161-6420(13)00020-1. (PMID 23714320, DOI 10.1016/j.ophtha.2013.01.018)
- (en) Samantha Olson, « New Cornea Layer Discovered In Human Eye: Doctors Predict Safer And Simpler Eye Treatments », Medical Daily,â (lire en ligne, consultĂ© le )
- (en) « New Layer Of Human Eye,'Dua's Layer,' Discovered Behind Cornea », Huffington Post Live Science, (consulté le )
- Par le docteur Damien Gatinel
- V. Borderie et al.dans le Journal français d'ophtalmologie, vol. 22, n° 9, octobre 1999
- La MĂ©thode scientifique, chronique "Le Journal des sciences", France Culture, 6 septembre 2019
- Monya Baker (2016) Sci fi eye experiments improve vision in children â and rabbits ; Cells grown both inside and outside the body show promise in fixing lenses and corneas ; 09 mars 2016 ; Nature doi:10.1038/nature.2016.19535
Articles connexes
Liens externes
- Notice dans un dictionnaire ou une encyclopédie généraliste :
- Ressources relatives à la santé :
- FMA
- TA2
- Uberon
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