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Gaulthérie odorante

Gaultheria fragrantissima

La gaulthérie odorante (Gaultheria fragrantissima) est un arbuste de la famille des Ericaceae (qui regroupe myrtille, airelle, bruyère, arbousier...), originaire des forêts de l'Himalaya.

Elle est la source d'essence de Wintergreen, semblable à celle extraite de la Gaultheria procumbens canadienne. Sa très forte teneur en salicylate de méthyle explique ses propriétés anti-inflammatoires et analgésiques.

Étymologie et nomenclature

La première description botanique a été faite par Nathaniel Wallich en 1820 dans Asiatic Researches[1]. Wallich était un botaniste danois installé en Inde qui herborisa au Népal, dans le Bengale et en Birmanie.

Le terme de latin botanique Gaultheria fragrantissima est composé d'un nom de genre Gaultheria, créé par Carl Linné en 1753. Il dédia ce taxon à Jean François Gaulthier, botaniste et médecin à Québec qui lui avait fait parvenir un petit arbuste rampant (Gaultheria procumbens) du Canada[2]. En 1753, cette espèce canadienne était la seule du genre Gaultheria, décrite par Linné.

L'épithète spécifique fragrantissima est emprunté au latin fragans « odorant, parfumé»[3], sous la forme superlative.

Description

Racème de fleurs de G. fragrantissima
Grappes de fruits de G. fragrantissima,
de couleur magenta

Gaultheria fragrantissima est un arbuste de 1 Ă  m de haut, rarement un petit arbre (jusqu'Ă  4 m), Ă  feuilles persistantes[4].

Les feuilles alternes, comportent un pĂ©tiole de 3-5 mm, un limbe de forme diverse, elliptique, oblongue-elliptique, ovale, obovale, ou Ă©troitement obovale-lancĂ©olĂ©e, de 5-17 cm de long sur 2-6,5 cm de large, coriace, Ă  base cunĂ©iforme, parfois obtus-arrondi, au bord serrulĂ©, Ă  apex aigu[4]. Elles sont vert foncĂ© sur la face supĂ©rieure et vert-blanchâtre, ponctuĂ©es, sur la face infĂ©rieure.

L'inflorescence est un racème de 3-9 cm, portant de nombreuses fleurs. Le calice glabre possède 5 lobes triangulaires de mm. La corolle blanche tubulaire-urcĂ©olĂ©e, de 4-5 mm, est bordĂ©e de lobes très courts.

Le fruit est une capsule globuleuse de 4-6 mm de diamètre, pubescente. Lors de la fructification le calice devient bleu-pourpre, magenta[n 1] et charnu.

La floraison a lieu de janvier à mai, la fructification de juin à août.

  • Feuilles coriaces, persistantes de Gaultheria fragrantissima, Kerala
    Feuilles coriaces, persistantes de Gaultheria fragrantissima, Kerala
  • Revers des feuilles blanchâtre et ponctuĂ©, racèmes de fleurs blanches, urcĂ©olĂ©es, Kerala
    Revers des feuilles blanchâtre et ponctué, racèmes de fleurs blanches, urcéolées, Kerala
  • Feuille et racème
    Feuille et racème

Distribution

La gaulthérie odorante est une plante des montagnes de l'Himalaya, croissant au Bhoutan, en Inde, Sri Lanka, Malaisie, Myanmar, Népal, Vietnam du Nord et Chine (Tibet, Yunnan)[4].

Elle croĂ®t dans les forĂŞts sempervirentes, dans les fourrĂ©s sur pentes sèches, entre 1000 et 3 200 m d'altitude. Des chercheurs indiens la signalent dans le nord-est de l'Inde, le NĂ©pal et Bhoutan, entre 1800 et 2 500 m ainsi que dans les Palani Hills au Kerala, au-dessus de 1 500 m[5].

C'est un arbuste des sous-bois aux sols acides et bien drainés[6].

Utilisations

Le fruit, de couleur magenta pourpre, est comestible. Il fournit une bonne source de micronutriments, d'anthocyanes, de flavonoïdes et composés phénoliques. Il a une forte activité antioxydante[7].

Huile essentielle

L'huile essentielle obtenue par hydrodistillation de feuilles fraîches de gaulthérie est appelée communément essence de Wintergreen (Bruneton[8], 2009). Qu'elles proviennent de la gaulthérie couchée (G. procumbens) d'Amérique du Nord, de la gaulthérie odorante himalayenne ou de l'écorce de bouleau flexible (Betula lenta), toutes ces essences sont composées essentiellement du salicylate de méthyle.

L'huile essentielle extraite est lĂ©gèrement jaunâtre, avec un puissant arĂ´me camphrĂ© et un gout doux-amer qui pourrait ĂŞtre dĂ» Ă  la prĂ©sence d'un grand nombre de composants volatils oxygĂ©nĂ©s dans les feuilles (d'après l'Ă©tude de Bantawa et al[5] (2011) des gaulthĂ©ries odorantes prĂ©levĂ©es dans la rĂ©gion de Darjeeling - Kalimpong, de la partie de l'Inde entre le NĂ©pal et le Bhoutan). Le rendement moyen d'huile essentielle est de 1,22 Ă  1,79 % (v/v). Soit d'après Bantawa et al., un taux très supĂ©rieur Ă  ceux obtenu Ă  partir de G. procumbens durant l'Ă©tĂ© ou du Betula lenta.

La mesure par chromatographie en phase gazeuse donne 98 % du salicylate de mĂ©thyle.

L'étude de Kumar et al[9] confirme ces résultats.

Salicylate de méthyle
Composition de l'huile essentielle de
Gaultheria fragrantissima (Kumar et al[9]
)
Composé %
Salicylate de méthyle98,035
Salicylate d'Ă©thyle0,069

L'essence de Wintergreen extraite de gaulthĂ©rie odorante prĂ©levĂ©e dans la forĂŞt de Godawari Ă  1 900 m d'altitude, au NĂ©pal[10], a une composition lĂ©gèrement diffĂ©rente : le constituant majoritaire est toujours le salicylate de mĂ©thyle (94,16 %) mais le 4-hydroxy-4-methyl-2-pentanone (diacĂ©tone alcool, Ă  odeur agrĂ©able) est très prĂ©sent (5,84 %). Le salicylate de mĂ©thyle est un dĂ©rivĂ© de l'acide salicylique. C'est un antiagrĂ©gant plaquettaire qui Ă©vite la formation de caillot en empĂŞchant les plaquettes de s'agglutiner. Il a aussi une action analgĂ©sique, anti-inflammatoire, spasmolytique, insecticide et rubĂ©fiante. Le salicylate de mĂ©thyle n'existe pas sous forme libre dans les Gaultheria mais comme glycoside, appelĂ© la gaulthĂ©rine. Ce glycosiide est un conjuguĂ© de salicylate de mĂ©thyle avec un disaccharide de glucose et de xylose.

De nombreux composés phénoliques ont aussi été trouvés dans les feuilles de gaulthérie odorante[11] - [12]: acide férulique, acide p-coumarique, acide caféique, acide ursolique, acide 4-hydroxybenzoïque, acide protocatéchique, acide o-pyrocatéchique, acide salicylique, acide vanillique, acide gentisique, ainsi que (+)-Lyoniresinol-2α-O-β-d-glucopyranoside, un lignane.

L'odeur caractéristique de l'essence de Wintergreen est liée à quelques composés aromatiques : le benzoate de benzyle (odeur balsamique douce, rappelant l'ylang-ylang), acétate de menthyle (monoterpène, odeur de menthe poivrée), bêta-asarone, hexanal (odeur fruité), α-pinène (lavande), myrcène etc[10].

Emplois médicinaux

L'essence de Wintergreen est utilisée en Amérique du Nord dans la formulation de produits d'hygiène buccale, de produits cosmétiques, de préparations médicamenteuses pour l'usage externe ainsi que pour l'aromatisation de produits alimentaires[8]. Mais l'essence de Wintergreen est souvent remplacée par le salicylate de méthyle synthétique.

En Inde et en Chine, la gaulthérie odorante est récoltée dans la nature pour être utilisée en médecine populaire[11] et pour son fruit comestible[7].

Des travaux de pharmacologie ont montré que l'huile essentielle des feuilles avait des propriétés[13] - [9] - [6]:

  • anti-inflammatoires,
  • analgĂ©siques, antalgiques
  • anti-oxydantes,
  • antibactĂ©riennes, antifongiques.

L'essence de Wintergreen est utilisée en massage pour les douleurs rhumatismales, les tendinites, les contractures musculaires, les crampes, les rhumatismes. Elle s'emploie diluée dans l'huile : 2 gouttes d'essence de Wintergreen pour 10 ml d'huile végétale.

Précautions d'emploi: pour Jean Bruneton « ce produit est régulièrement à l'origine d'intoxications dont la symptomatologie est celle de l'intoxication salicylée »[8]. L'huile essentielle de gaulthérie odorante sera écartée de toutes voies d'administration pour toute personne allergique aux salicylés et interdite par voie orale pendant la grossesse, la petite enfance et auprès de tout patient sous traitement anticoagulant[6]. Cette essence est à déconseillée avec la prise d'anticoagulants qui fluidifient le sang, car le salicylate de méthyle est un antiagrégant.

Notes et références

Notes

  1. contrairement aux illustrations couramment trouvées sur internet

Références

  1. Gaultheria fragrantissima Wall., « Asiatic researches, or, Transactions of the Society instituted in Bengal for inquiring into the history and antiquities, the arts, sciences and literature of Asia » (consulté le )
  2. Carl von linné, Laurentii Salvii, 1753, « Species plantarum :exhibentes plantas rite cognitas ... » (consulté le )
  3. Dictionnaire Gaffiot, « fragans » (consulté le )
  4. Flora of China, Vol. 14, « 20. Gaultheria fragrantissima Wallich, Asiat. Res. 13: 397. 1820. » (consulté le )
  5. P. Bantawa, J.A.T. da Silva, S.K. Ghosh, T.K. Mondal, « Determination of essential oil contents and micropropagation of Gaultheria fragrantissima, an endangered woody aromatic plant of India », Journal of Horticultural Science & Biotechnology, vol. 86, no 5,‎ , p. 479-485
  6. Dominique Baudoux, Aromathérapie, Dunod, , 320 p.
  7. S. Karuppusamy, G. Muthuraja, K.M. Rajasekaran, « Antioxidant activity of selected lesser known edible fruits from western ghats of India », Indian Journal of Natural Products and Resources, vol. 2, no 2,‎ , p. 174-178 (lire en ligne)
  8. Bruneton, J., Pharmacognosie - Phytochimie, plantes médicinales, 4e éd., revue et augmentée, Paris, Tec & Doc - Éditions médicales internationales, , 1288 p. (ISBN 978-2-7430-1188-8)
  9. M. Kumar,..., N. K. Dubey, « Assessment of chemically characterised Gaultheria fragrantissima Wall. essential oil and its major component as safe plant based preservative for millets against fungal, aflatoxin contamination and lipid peroxidation during storage », J Food Sci Technol, vol. 55, no 1,‎ , p. 111-119 (lire en ligne)
  10. S. Joshi (Mulmi) and P. C. Subedi, « Phytochemical and Biological Studies on Essential Oil and Leaf Extracts of Gaultheria fragrantissima Wall », Nepal Journal of Science and Technology, vol. 14, no 2,‎ , p. 59-64
  11. Wei-Rui Liu, ..., Gai-Mei She, « Gaultheria: Phytochemical and Pharmacological Characteristics », Molecules, vol. 18, no 10,‎ (lire en ligne)
  12. G.H.N.Towers, AidaTse, W.S.G.Maass, « Phenolic acids and phenolic glycosides of Gaultheria species », Phytochemistry, vol. 5, no 4,‎
  13. Dan Zhang,..., Guan-Hua Du, « Anti-Inflammatory Activity of Methyl Salicylate Glycosides Isolated from Gaultheria yunnanensis (Franch.) Rehde », Molecules, vol. 16, no 5,‎ , p. 3875-3884

Voir aussi

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