Formation de Bakken
La formation de Bakken (parfois nommĂ©e « Bakken shale ») est une formation gĂ©ologique riche en hydrocarbures non conventionnels (pĂ©trole et gaz en partie d'origine biogĂ©nique[1]), entiĂšrement situĂ©e sous le niveau du sol (elle ne prĂ©sente aucun affleurement). La partie du bassin situĂ©e dans le Dakota du Nord serait le champ pĂ©trolier le plus important restant libre pour l'exploitation aux Ătats-Unis[2].
Elle est ainsi nommĂ©e en l'honneur d'Henry Bakken, un agriculteur du Dakota du Nord et propriĂ©taire du terrain oĂč a Ă©tĂ© dĂ©couverte la formation, pendant un forage exploratoire pour le pĂ©trole[3].
GĂ©ologie
Cette formation gĂ©ologique est constituĂ©e par une succession de trois faciĂšs gĂ©ologiques successifs : argiles, dolomies et argiles. Les argiles se sont dĂ©posĂ©s dans un milieu dĂ©pourvu d'oxygĂšne (milieu anoxique) favorable Ă la prĂ©servation de la matiĂšre organique. La Formation de Bakken s'est dĂ©posĂ©e depuis le DĂ©vonien supĂ©rieur jusqu'au Mississippien infĂ©rieur, c'est-Ă -dire durant un intervalle de temps entre environ â380 Ă â340 Ma (millions d'annĂ©es) Ă cheval sur les pĂ©riodes du DĂ©vonien et du CarbonifĂšre.
Elle a été décrite pour la premiÚre fois par le géologue J. W. Nordquist en 1953[4].
GĂ©ographie
Elle recouvre environ 520 000 km2 du bassin de Williston (en), qui se trouve sous le Montana, le Dakota du Nord, la Saskatchewan et le Manitoba en Amérique du Nord[5].
Hydrocarbures
C'est une roche-mÚre riche en hydrocarbures non-conventionnels (hydrocarbures de roche-mÚre dans ce cas) qui a commencé à produire des quantités importantes d'un pétrole assez léger[6].
PĂ©trole
Du pétrole y a été découvert en 1951, mais les techniques et efforts de l'époque n'ont pas permis de l'extraire à un coût compétitif. Récemment, les techniques de stimulation et de fracturation de la roche ont rendu possible une production rentable pour et par l'industrie pétroliÚre.
Les rĂ©serves sont jugĂ©es significatives ; un rapport de l'USGS d'avril 2008 a estimĂ© que la quantitĂ© de pĂ©trole pouvant en ĂȘtre extraite avec les technologies courantes (fin 2007) Ă©tait de 3,0 Ă 4,3 Gbbl (milliards de barils, soit environ 680 000 000 m3), avec une moyenne de 3,65 Gbbl[7]. Le mĂȘme mois, un autre rapport, du gouvernement du Dakota du Nord, estimait les rĂ©serves exploitables Ă 2,1 Gbbl (330 000 000 m3)[8]. D'autres estimations vont jusqu'Ă 24 Gbbl avec les technologies courantes[9].
L'usage de la fracturation hydraulique (à partir de 2008) a provoqué un boom d'exploitation de la formation de Bakken. à la fin de 2010, le volume de pétrole extrait a atteint 458 000 bbl par jour (72 800 m3/j), quantité qui excÚde largement les capacités de transport des oléoducs localement disponibles[10] - [11], le pétrole étant alors transporté par train et camion. En 2013, la production est de 780 000 bbl par jour et pourrait atteindre 1 600 000 bbl en 2020[12].
Alors que 31 nouveaux puits ont été mis en place en 2005, ils ont été 74 en 2006, puis 163 en 2007, 433 en 2008, 468 en 2009, 728 en 2010 et 900 en 2011[2].
L'ensemble du bassin n'est pas propice Ă l'exploitation[13]. Dans le bassin de Bakken, 75 % de la zone thermiquement mĂ»re (qui produit les hydrocarbures les plus recherchĂ©s) est basĂ©e dans le Dakota du Nord, de mĂȘme que 97 % des zones « marginalement mĂ»res ».
Gaz naturel
Des quantités importantes de gaz naturel non conventionnel sont désorbées des schistes concomitamment au pétrole.
Mais en raison d'une forte demande en pĂ©trole et d'une chute des prix du gaz aux Ătats-Unis depuis l'exploitation intensive des gaz de schiste et gaz de couche les industriels n'ont pas construit Ă temps des gazoducs supplĂ©mentaires. Ce gaz (Ă©nergie fossile) est donc brĂ»lĂ© en torchĂšre, contribuant aux Ă©missions de gaz Ă effet de serre et Ă un gaspillage Ă©nergĂ©tique (Une Ă©tude a chiffrĂ© Ă 100 millions de dollars la valeur du gaz brĂ»lĂ© chaque mois dans cette seule rĂ©gion). En 2013, des pipelines sont en cours de construction pour limiter ces pertes[14].
Acheminement vers les marchés
Ce bassin est enclavé au centre du continent. L'accÚs le plus facile et rapide aux marchés est le train, solution jugée la plus flexible et n'exigeant pas d'investissements coûteux ni des délais pouvant atteindre des années comme dans le cas de la construction d'un pipeline.
Le chemin de fer a donc Ă©tĂ© massivement adoptĂ© par les pĂ©troliers depuis 2005 environ, Ă tel point qu'en 2013, BNSF, numĂ©ro 2 du transport ferroviaire aux Ătats-Unis, transportait quotidiennement 650 000 barils de brut, dont une grande partie provient de cette formation[15].
Ce pĂ©trole pourrait aussi ĂȘtre acheminĂ© aux raffineries de MontrĂ©al, QuĂ©bec et Saint-Jean par l'olĂ©oduc Ănergie Est[12]. Enfin, le tracĂ© de l'olĂ©oduc en projet Keystone XL passe par la ville de Montana, d'oĂč le pĂ©trole pourrait ĂȘtre acheminĂ© jusqu'au golfe du Mexique.
Certains analystes du marché pétrolier (par ex. Steven Kopits, directeur du New York office of energy business advisors Douglas-Westwood, à partir de 2008[16]) estiment que la hausse de production de ce bassin pourrait assez rapidement se réduire[16].
Aspects sécuritaires et environnementaux
Le transport par trains et camions est plus Ă©nergivore, polluant et dangereux que par olĂ©oducs, mais les olĂ©oducs nord-amĂ©ricains n'ayant pu absorber la rapide augmentation de production, une partie importante de ce pĂ©trole est depuis 2008 acheminĂ©e vers les raffineries de l'est par wagon-citerne DOT-111. En 2013-2014, deux convois ferroviaires de wagons de pĂ©trole ont dĂ©raillĂ© en 6 mois aux Ătats-Unis (en Alabama en nov 2013 et dans le Dakota du Nord dĂ©but 2014) et un au Canada, causant de graves incendies et en juillet 2013 dans la ville de Lac-MĂ©gantic (QuĂ©bec) a tuĂ© 47 personnes et imposĂ© l'Ă©vacuation de 2 000 rĂ©sidents. En septembre 2013, les autoritĂ©s amĂ©ricaines avaient alertĂ© sur la qualitĂ© particuliĂšre du pĂ©trole qui a brĂ»lĂ©/explosĂ© Ă Lac-MĂ©gantic ; il aurait dĂ» ĂȘtre signalĂ© comme produit dangereux et non pas seulement inflammable[17].
Ă la suite de l'accident ferroviaire de Lac-MĂ©gantic, oĂč le train transportait du pĂ©trole de cette formation, les autoritĂ©s ont entrepris de revoir la rĂ©glementation entourant ce mode de transport.
Les autoritĂ©s s'inquiĂštent de la sĂ©curitĂ© du transport par rail de pĂ©trole en provenance du nord des Ătats-Unis, notamment de la formation de Bakken. Selon le dĂ©partement des transports amĂ©ricain (communiquĂ© 2014-01-02), la composition du pĂ©trole extrait des gisements de schiste du bassin de Bakken (nord des Ătats-Unis,) le rend probablement « plus inflammable que le pĂ©trole brut traditionnel » ; Il semble notamment que ce pĂ©trole lĂ©ger extrait en mĂȘme temps que du gaz ou des condensats de gaz naturel ait un point d'Ă©clair trĂšs bas, qui le classerait parmi les produits dangereux Ă transporter[18].
Des inspections prĂ©liminaires ont Ă©tĂ© faites aprĂšs les rĂ©cents dĂ©raillements dans le Dakota du Nord, en Alabama », et au QuĂ©bec, impliquant du pĂ©trole brut du gisement de Bakken. Ă la suite de ces enquĂȘtes, l'« agence de sĂ©curitĂ© des olĂ©oducs et des matĂ©riaux dangereux » (PHMSA) « requiert de tester correctement, signaler et classifier, et, quand c'est nĂ©cessaire, de dĂ©-gazĂ©ifier suffisamment les matĂ©riaux dangereux avant leur transport ».
Il a aussi Ă©tĂ© observĂ© Ă la suite de l'accident de Lac-MĂ©gantic, que ce pĂ©trole se dissocie dans l'eau, et que des particules lourdes se dĂ©posent sur les sĂ©diments (dont en riviĂšre), rendant le nettoyage extrĂȘmement difficile[19].
Comme dans le bassin de Marcellus, les schistes noirs du dévonien sont connus pour avoir accumulé des quantités significatives de radionucléides (uranium et surtout radium, source de radon), d'autant plus qu'ils sont noirs et à haute teneur en COT (carbone organique total)[20] - [21] et en particulier de ceux du bassin de Marcellus[22].
Notes et références
- (en) L. C. Price, « Origins, characteristics, controls, and economic viabilities of deep-basin gas resources. », Chemical Geology, vol. 126, no 3,â , p. 335-349 (prĂ©sentation en ligne)
- Mason, J. (2012) Oil Production Potential of the North Dakota Bakken « Copie archivée » (version du 6 août 2018 sur Internet Archive). Oil & Gas Journal (2012-02-10), PDF, 12p
- CBC, Bakken Formation: Will it fuel Canada's oil industry?, CBC News, 27 juin 2008.
- (en) J. W. Nordquist, « Mississippian stratigraphy of northern Montana », dans 4th Annual Field Conference Guidebook, Billings Geological Society, , p. 68â82
- Dobb et Richards 2013, p. 64.
- [PDF] Technology-based oil and natural gas plays: Shale shock! Could there be billions in the Bakken?, US Energy Information Administration, novembre 2008. Consulté le 16 janvier 2009
- (en) « 3 to 4.3 Billion Barrels of Technically Recoverable Oil Assessed in North Dakota and Montanaâs Bakken Formationâ25 Times More Than 1995 Estimate » [archive du ], U.S. Geological Survey, (consultĂ© le )
- Bismark Tribune, 28 avril 2008, N.D. study estimates 167 billion barrels of oil in Bakken
- [PDF] Bakken Formation Reserve Estimates, gouvernement du Dakota du Nord, reprenant l'Ă©valuation : d'OGJ Editors. 2011. Continental: Bakkenâs giant scope underappreciated. Oil & Gas Journal 2011-02-16
- (en) « New Drilling Method Opens Vast U.S. Oil Fields », FoxNews.com, (consulté le )
- (en) « Producers turn to railroads for shipping Bakken crude », Tulsa World, (consulté le )
- (en) Edmonton Journal, 2 août 2013, Cost of shipping oil from Saint John to India: about 4 bucks
- (en) Continental Resources. 2011. Bakken field recoverable reserves. Assessment prepared by Continental Resources, Inc., Enid, Oklahoma, 14 February 2011
- http://www.pennenergy.com/articles/pennenergy/2013/07/bakken-shale-natural-gas-flaring-tops-100-million-each-month.html?cmpid=EnlDailyPetroJanuary12014
- (en) Matthew Philips et Asjylyn Loder, « Amid U.S. Oil Boom, Railroads Are Beating Pipelines in Crude Transport », Bloomberg, (consulté le )
- Jan Mueller (2013) An Interview with Steven Kopits « Copie archivĂ©e » (version du 6 aoĂ»t 2018 sur Internet Archive) May 1, 2013 « Even when we look at the âgood-newsâ shale / tight oil, some investment is slowing. In the Bakken, for example, the rig count actually peaked in September of 2012, and the year-over-year production growth rate peaked at 90% three months earlier in June. Today the growth rate, while still impressive, is down to about 40%. If that trend continues, we could see single-digit growth in the Bakken much sooner than most think »
- Le Monde Etats-Unis : inquiĂ©tudes sur l'inflammabilitĂ© du pĂ©trole de schiste, Le Monde, avec lâAFP, AFP | 03.01.2014
- (en) The Globe and Mail, 30 août 2013, U.S. officials were probing safety of Bakken oil route months before Lac-Mégantic
- Toronto Star, 1er septembre 2013, « Lac Megantic Tragedy : On the fouled ChaudiÚre River, no stone is being left unturned », p. A6-A7
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Bibliographie
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