Femmes à l'Académie française
La présence de femmes à l'Académie française est récente. L'Académie, fondée en 1635 par le cardinal de Richelieu ne voit entrer une femme dans ses murs qu'en 1980, avec l'écrivaine Marguerite Yourcenar[1]. Si pendant ces 345 années, divers motifs politiques, moraux, religieux et sociétaux ont été invoqués pour en interdire l'accès aux femmes, plusieurs candidatures ont néanmoins été proposées au cours des décennies précédentes. Onze femmes ont, depuis 1980, été élues académiciennes ; sept y siègent actuellement. Hélène Carrère d'Encausse est secrétaire perpétuel de l'Académie depuis 1999.
Une conquête tardive
Sous l'Ancien régime, les femmes ne peuvent entrer dans des assemblées élues que si le règlement les y autorise (certaines assemblées permettent leur présence). Jean le Rond D'Alembert, académicien depuis 1754, propose en 1760, afin de promouvoir la candidature de Julie de Lespinasse, de réserver 4 des 40 sièges aux femmes[2]. La tentative échoue. Des années plus tard, l'Académie propose à Félicité de Genlis de l'accueillir, mais elle doit pour cela arrêter l'écriture d'un manifeste hostile aux Encyclopédistes ; elle refuse[2].
La candidature de la féministe Pauline Savari est refusée par l'Académie, le 19 janvier 1893. Et le duc d'Aumale de déclarer : « Les femmes ne sont pas éligibles, puisqu’on n’est citoyen français que lorsqu’on a satisfait à la conscription »[2].
Ce n'est qu'en 1980, sous la pression de l'opinion et à la suite du militantisme de Jean d'Ormesson qu'une femme est élue en la personne de Marguerite Yourcenar[3]. Jusque là, de nombreux académiciens s'opposaient à l'entrée de femmes, comme Claude Lévi-Strauss ou Georges Dumézil. L'historien Pierre Gaxotte déclara même : « Si on élisait une femme, on finirait par élire un nègre… »[4].
Les femmes membres de l’Académie
Année | Nom | Qualité | Fauteuil | Prédécesseur | Successeur |
---|---|---|---|---|---|
1980-1987 | Marguerite Yourcenar | Écrivaine | no 3 | Roger Caillois | Jean-Denis Bredin |
1988-2010 | Jacqueline de Romilly | Helléniste | no 7 | André Roussin | Jules Hoffmann |
Depuis 1990 | Hélène Carrère d'Encausse | Historienne | no 14 | Jean Mistler | - |
Depuis 2000 | Florence Delay | Écrivaine | no 10 | Jean Guitton | - |
2005-2015 | Assia Djebar | Écrivaine | no 5 | Georges Vedel | Andreï Makine |
2008-2017 | Simone Veil | Femme politique | no 13 | Pierre Messmer | Maurizio Serra |
Depuis 2011 | Danièle Sallenave | Écrivaine | no 30 | Maurice Druon | - |
Depuis 2013 | Dominique Bona | Écrivaine | no 33 | Michel Mohrt | - |
Depuis 2018 | Barbara Cassin | Philosophe | no 36 | Philippe Beaussant | - |
Depuis 2021 | Chantal Thomas | Écrivaine | no 12 | Jean d'Ormesson | |
Depuis 2023 | Sylviane Agacinski | Écrivaine, philosophe | no 19 | Jean-Loup Dabadie | - |
Les candidatures malheureuses
Les femmes et l'habit d'académicien
L'habit vert que les académiciens revêtent, avec le bicorne, la cape et l’épée, lors des séances solennelles sous la Coupole, a été dessiné sous le Consulat, dessin attribué au peintre Jean-Baptiste Isabey. Il est commun à tous les membres de l’Institut de France, mais n'a pas été prévu pour les femmes. Marguerite Yourcenar refuse de l'endosser, mais toutes les autres académiciennes le portent lors de leur cérémonie de réception, à l'exception d'Assia Djebar, reçue en 2006.
Les « immortelles » et les ecclésiastiques sont dispensés du port de l'épée. Hélène Carrère d'Encausse, Florence Delay, Assia Djebar, Simone Veil, Danièle Sallenave, Dominique Bona et Barbara Cassin ont cependant choisi d'en porter une lors de leur réception. L'épée de Barbara Cassin est « connectée »[19]. Hélène Carrère d'Encausse, la première femme à porter l'épée, a choisi une arme créée pour l'occasion par l'orfèvre géorgien Goudji. Jacqueline de Romilly a reçu une broche symbolique après son élection à l'Académie des inscriptions et Belles-Lettres en 1975, et a préféré remplacer l'épée par un sac à main[20].
Notes et références
- Véronique Laroche-Signorile, « Il y a 40 ans, Marguerite Yourcenar devenait Immortelle », Le Figaro, (lire en ligne , consulté le ).
- « Candidates », academie-francaise.fr.
- « Quand Jean d'Ormesson faisait entrer la première femme à l'Académie française », sur leparisien.fr,
- Michel Feltin-Palas, « L'Académie française se résout à la féminisation », lexpress.fr, 19 février 2019.
- Contre 20 à Léopold Sédar Senghor.
- Contre 15 à Angelo Rinaldi ; « Élection de M. Angelo Rinaldi (F20) », academie-francaise.fr, 21 juin 2001.
- Contre 21 à François Cheng ; « Élection de M. François Cheng (F34) », academie-francaise.fr, 13 juin 2002.
- Contre 19 à Alain Robbe-Grillet
- « Élection au fauteuil de M. Henri Troyat (F28) », academie-francaise.fr, 7 février 2008.
- « Élection blanche au fauteuil de M. Bertrand Poirot-Delpech (F39) », academie-francaise.fr, 18 octobre 2007.
- Contre 12 à François Weyergans « Élection de M. François Weyergans (F32) », academie-francaise.fr, 26 mars 2009.
- « Candidatures au fauteuil de M. Maurice Druon (F30) », sur academie-francaise.fr, (consulté le ).
- « Élection blanche au fauteuil de M. Pierre-Jean Rémy (F40) », academie-francaise.fr, 26 avril 2012.
- Contre 15 à Xavier Darcos ; « Élection de M. Xavier Darcos (F40) », academie-francaise.fr, 13 juin 2013.
- « Élection blanche au fauteuil de M. Jean Dutourd (F31) », academie-francaise.fr, 10 mai 2012.
- « Élection blanche au fauteuil de M. Pierre-Jean Rémy (F40) », academie-francaise.fr, 24 janvier 2013.
- Contre 13 à Dany Laferrière ; « Élection de M. Dany Laferrière (F2) », academie-francaise.fr, 12 décembre 2013.
- « Élection blanche au fauteuil de M. René Girard (F37) », academie-francaise.fr, 17 novembre 2016.
- « L’habit vert et l’épée | Académie française », sur www.academie-francaise.fr (consulté le ).
- « L’habit vert et l’épée », sur academie-francaise.fr (consulté le ).