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Farine d'os

La farine d'os est une farine animale entiĂšrement constituĂ©e d'os broyĂ© (et/ou parfois de vertĂšbres et arĂȘtes de poissons), produite Ă  partir de dĂ©chets d'abattoir ou de l'industrie agroalimentaire et de la pĂȘche[1]. C'est une poudre brunĂątre et odorante quand l'os n'a pas Ă©tĂ© dĂ©graissĂ©, sinon elle est blanche Ă  blanchĂątre. Elle peut contenir des morceaux plus ou moins gros d'os, selon le procĂ©dĂ© de fabrication.

Farine d'os.

Les anglophones utilisent l'expression Bone meal, ou bone manure (littĂ©ralement « fumier d'os ») quand cette farine est strictement destinĂ©e Ă  ĂȘtre utilisĂ©e comme engrais agricole ou de jardinage.

Histoire, utilisations

Des farines d'os sont (ou ont été) vendues comme :

  • engrais parfois dits « organiques », pour leur richesse en minĂ©raux supposĂ©s particuliĂšrement bioassimilables pour les sols et les plantes ;
  • comme complĂ©ment alimentaire ; Comme les coquilles d'huitres, la farine d'os a autrefois Ă©tĂ© utilisĂ©e comme un supplĂ©ment de calcium alimentaire dans l'alimentation humaine (ce qui n'est plus recommandĂ©).
  • comme ingrĂ©dient ou complĂ©ment alimentaire pour des animaux familiers, ou des animaux Ă©levĂ©s en zoos et parcs animaliers[2]
  • comme ingrĂ©dient ou complĂ©ment alimentaire pour des animaux de rente (bovins, porcins, ovins, volailles, animaux de pisciculture)[3] - [4].
  • comme matiĂšre premiĂšre pour (autrefois) produire de la gĂ©latine et/ou de la colle[5].

La farine d'os est parfois calcinĂ©e avant d'ĂȘtre utilisĂ©e comme engrais ou additif alimentaire[6].

Ces usages sont anciens ; on lit par exemple dans le Farmer's Magazine des années 1860 :

« La SuĂšde exposa aussi de la farine d'os prĂ©parĂ©e Ă  la vapeur et faite avec des os qui sortent tout frais de la boutique du boucher, et qui parlant contiennent encore toute leur gĂ©latine. Il est reconnu que, donnĂ©e au bĂ©tail avec un mĂ©lange de farine, de son ou de gruau d'avoine, elle constitue un fort bon aliment. La ration est, par jour, pour le bĂ©tail adulte, d'un quart de livre et de deux onces pour les jeunes bĂȘtes. On en donne aux poules, aux oies et Ă  toutes les volailles en gĂ©nĂ©ral, autant qu'elles peuvent en consommer, et on prĂ©tend que ce rĂ©gime augmente chez elles la production des Ɠufs. Les os qui ont moins de valeur sont passĂ©s Ă  la vapeur et moulus pour faire de l'engrais, et prĂ©alablement on les fait bouillir pour en extraire la graisse. On fait aussi beaucoup de noir animal pour les raffineries, qui sont au nombre de douze. La poudre sert pour teindre en noir. Le prix de la poudre d'os pour l'alimentation du bĂ©tail est, Ă  Stockholm, de 17 fr. 65 c. par quintal; pour engrais, de 10 fr. 63 c. Ă  12 fr. 80 c. ; de 20 fr. environ pour le noir animal. On exporte annuellement de SuĂšde en moyenne 10,000 quintaux d'os »[7].

Classification, sigles

Dans les statistiques, études ou rapports officiels, les farines animales (comprenant de la farine d'os) sont parfois désignées par les sigles :

  • MMBM (pour « meat meal and bone meal », au sein de la FAO par exemple[8] ;
  • FVO (pour « Farine de viande et d'os »).

Aspects juridiques

Le droit des États-Unis considĂšre que pour ĂȘtre classĂ© et vendu comme engrais, un produit doit ĂȘtre un amendement du sol garantissent un apport minimal de nutriments et notamment en azote, phosphore et potassium) et pour ĂȘtre vendu comme produit « biologique » (pour le jardinage ou l'agriculture bio, il doit provenir de sources naturelles[9] et non de la chimie de synthĂšse).

Fraudes, analyses

En thĂ©orie, les produits alimentaires doivent pouvoir aujourd’hui en Europe ĂȘtre suivis de la fourche Ă  la fourchette. Or, il est visuellement impossible de savoir de quels animaux (espĂšces et provenance gĂ©ographique) proviennent les os qui ont servi Ă  produire une farine mise sur le marchĂ©.

Des farines peuvent ĂȘtre facilement frauduleusement modifiĂ©es.

Produit Ă  risque

Dans les années 1960, certains pays comme le Canada imposaient que les farines d'os importées aient été préalablement stérilisées[10], dans ce cas pour limiter les risques de transferts d'épidémie d'anthrax.

Certains dĂ©chets d'abattoirs peuvent ĂȘtre considĂ©rĂ©s comme produits Ă  risque, par exemple dans un contexte de risque de contamination par l'anthrax, des prions pathogĂšnes ou des mĂ©taux toxiques (plomb principalement) ou des radionuclĂ©ides).
Dans le cas des prions et dans le contexte de la crise de la vache folle, le risque était plus élevé avec les os provenant de mammifÚres ruminants et pour les os de la colonne vertébrale et du crùne ou contenant de la moelle.

Tests

Des tests génétiques ou basés sur la biologie moléculaire (analyses de protéines ou de graisses) existent aujourd'hui[11]. Des analyses isotopiques peuvent parfois aider à déterminer la provenance géographique des animaux dont les os ont été réduits en farine. Durant la crise de la vache folle, des tests ont été mis au point pour une détection rapide de farine de viande et d'os provenant de ruminants[12].

Des tests ou méthodes de détection d'adultération de farines d'os et de farines animales ont été mis au point ou proposés[13].

Santé publique et risques écoépidémiologiques

Les farines d'os posent plusieurs problÚmes de santé publique et de santé environnementale :

  • Plomb : Les Ă©tudes sur le saturnisme humain et sur le saturnisme animal ainsi que sur la toxicitĂ© gĂ©nĂ©rale du plomb ont depuis plus d'un siĂšcle montrĂ© que l'os est l'organe qui accumule le plus et le plus longtemps le plomb[14], particuliĂšrement dangereux pour le fƓtus, l'embryon et le jeune enfant..et donc pour la future mĂšre, la femme enceinte ou allaitante.
    Malgré un certain nombre de réglementations visant à faire reculer le saturnisme (notamment lié aux peintures/céruses et sous-couches antirouilles à base de plomb), des études ont confirmé dans les années 1980 que de nombreuses préparations de farine d'os étaient encore contaminés par le plomb et d'autres métaux toxiques.
    L'os n'est donc plus recommandĂ© comme source de calcium chez l'homme, mais de telles farines sont encore vendues pour les animaux familiers (chiens, chats) et la farine d'os, avec une variĂ©tĂ© d'autres produits dont de la farine de viande Ă©galement issue d'abattoirs ou de l'industrie de la pĂȘche sont encore trĂšs utilisĂ©s comme ingrĂ©dients ou complĂ©ments alimentaires riches en minĂ©raux pour l'aquaculture, le bĂ©tail et la volaille, voire d'espĂšces de gibier (cervidĂ©s alimentĂ©s en forĂȘt ou lisiĂšre, parfois avec un apport en sel et autres sels minĂ©raux afin qu'ils produisent de plus beaux trophĂ©es pour la chasse).
  • Prions : Parce que les traitements industriels de matiĂšres Ă  risque ne garantissaient pas la destruction d'Ă©ventuels prions pathogĂšnes, de telles pratiques ont Ă©tĂ© Ă  l'origine de l'Ă©pidĂ©mie de vache folle (et peut-ĂȘtre d'une maladie proche (CWD pour chronic wasting disease) touchant les cervidĂ©s en AmĂ©rique du Nord) quand des farines d'os de ruminants ont Ă©tĂ© utilisĂ©es pour nourrir les mammifĂšres monogastriques, et vice versa (dont en parcs zoologiques[15]). Le risque de propagation de l'encĂ©phalopathie spongiforme bovine (ESB) ou « maladie de la vache folle » ou d'autres maladies Ă  prions par cette voie peut ĂȘtre supprimĂ© par une cuisson Ă  haute tempĂ©rature sous pression, ce qui rĂ©duit aussi le risque de contamination par des salmonelles[16].
    AprÚs le scandale de la vache folle, des farines d'os et animales ont été stockées puis progressivement détruites en grande quantité dans des incinérateurs[17].
    Selon Johnson & al (2011)[18] le risque induit par le fait de nourrir des animaux (et indirectement des humains) avec des farines d'os persiste en ce qui concerne le risque de transmission de maladies à prion, car les prions liés à des microparticules (comme on peut en trouver dans ces farines) semblent beaucoup plus « infectieux » que ceux qui ne le sont pas.
  • DigestibilitĂ© : Au-delĂ  d'une certaine quantitĂ©, la farine de viande et d'os semble perturber la digestion. Par exemple chez des poulets, une ration alimentaire riche en farine de viande et en farine d'os augmente proportionnellement le pH du gĂ©sier et du nombre de bactĂ©ries Clostridium perfringens dans tout le tractus digestif[19].

Fertilisant

Pile de crùnes de bisons nord-américains destinés à devenir du fertilisant agricole dans les années 1870[20].

Au XIXe siÚcle en Europe, il y a eu un commerce local et international florissant de farines d'os comme engrais[21], dont de farines provenant de crùnes de bison américain[20] - [4] (ce qui a contribué à ce qu'il soit décimé).

Comme engrais, la farine d'os prĂ©sente un rapport N-P-K (Azote-Phosphore-Potassium) dĂ©sĂ©quilibrĂ© ; gĂ©nĂ©ralement de 4-12-0, bien que certaines farines d'os aient par exemple Ă©tĂ© mesurĂ©es avec un ratio N-P-K de 1-13-0. C'est donc principalement une source de calcium supposĂ© trĂšs biodisponible dans les sols acides, mais trop pauvre en azote pour prĂ©senter Ă  elle seule un intĂ©rĂȘt pour les plantes[22].
De plus les plantes ne peuvent capter le phosphore de l'os que dans un sol au moins légÚrement acide (pH inférieure à 7.0), mais dans un sol acide, le plomb ou d'autres métaux éventuellement importés avec l'os seront aussi plus biodisponibles pour la plante et les champignons ou la microfaune du sol.

Des textes anciens (entre 1820 et 1831) prĂ©sentent cet engrais comme inefficace ou efficace dans certains types de sol. Une source prĂ©cise qu'un fabricant y ajoutait du salpĂȘtre (nitrate minĂ©ral) pour en empĂȘcher la fermentation et amĂ©liorer ses qualitĂ©s d'engrais[23].

Les engrais organiques exigent habituellement la prĂ©sente d'une variĂ©tĂ© de champignons symbiotiques des plantes dans le sol. Ces derniers permettent Ă  la plante de bien assimiler les nutriments et certains oligo-Ă©lĂ©ments, en les rendant plus biodisponibles pour les radicelles. Certains champignons mycorhizateurs facilitent la pĂ©nĂ©tration du phosphore dans la racine en dĂ©composant prĂ©alablement les macromolĂ©cules qui en contiennent. Et en Ă©change les plantes offrent aux mycorhizes des acides aminĂ©s et des sucres qu'ils ne peuvent synthĂ©tiser eux-mĂȘmes[24].

Divers

  • La farine d'os joue un rĂŽle important (comme engrais) dans le jeu vidĂ©o Minecraft.

Notes et références

  1. Brigham and Women's Hospital. "Bone Meal" ; consulté 22 novembre 2012.
  2. Wackernagel H (1966). Feeding wild animals in zoological gardens. International Zoo Yearbook, 6(1), 23-3 (résumé).
  3. Sigurdson, C. J., & Miller, M. W. (2003). Other animal prion diseases British medical bulletin, 66(1), 199-212.
  4. Ironside, J. W., McCardle, L., Horsburgh, A., Lim, Z., & Head, M. W. (2002). Pathological diagnosis of variant Creutzfeldt‐Jakob disease. Apmis, 110(1), 79-87.
  5. MinistÚre français du commerce (1837) Description des machines et procédés spécifiés dans les brevets d'invention, publ. par C.P. Molard. (avec description des machines... pour lesquels des brevets d'invention ont été pris sous le régime de la loi du 5 juillet 1844) ; voir p. 142
  6. Bamba, Y., Ouattara, A., Da Costa, K. S., & Gourene, G. (2008). Production de Oreochromis niloticus avec des aliments Ă  base de sousproduits agricoles. Sciences & Nature, 5(1), 89-99.
  7. (extrait du Farmer's Magazine in Méline (1863) Revue britannique : Choix d'articles traduits des meilleurs écrits périodiques de la Grande-Bretagne], Volume 3 (voir p. 401-405)
  8. Liste d'abréviations et d'acronymes, voir p. 14/426, in Hasan, M. R., & Halwart, M. (2009). Fish and feed inputs for aquaculture. Practices, sustainability and implications., FAO Fisheries and aquaculture technical paper, (518).
  9. Card, Adrian; David Whiting; Carl Wilson; Jean Reeders (December 2011). "Organic Fertilizers" (PDF). Colorado State University Extension. Colorado Master Gardener Program (CMG Garden Notes): 4. consulté 8 oct 2014.
  10. Moynihan, W. A. (1963). Anthrax in Canada. The Canadian Veterinary Journal, 4(11), 283
  11. Buckley, M., Collins, M., & Thomas-Oates, J. (2008). A method of isolating the collagen (I) α2 chain carboxytelopeptide for species identification in bone fragments. Analytical biochemistry, 374(2), 325-334.
  12. Prado, M., Berben, G., FumiÚre, O., van Duijn, G., Mensinga-Kruize, J., Reaney, S., ... & von Holst, C. (2007). Detection of ruminant meat and bone meals in animal feed by real-time polymerase chain reaction: result of an interlaboratory study. Journal of agricultural and food chemistry, 55(18), 7495-7501 (résumé)
  13. Murray, I., Aucott, L. S., & Pike, I. H. (2001). Use of discriminant analysis on visible and near infrared reflectance spectra to detect adulteration of fishmeal with meat and bone meal. Journal of Near Infrared Spectroscopy, 9(4), 297-311 (résumé)
  14. Campbell, I. R., & Mergard, E. G. (1972). Biological aspects of lead. US Environmental Protection Agency. Office of Administration.
  15. Pattison, J. (1998). The emergence of bovine spongiform encephalopathy and related diseases. Emerging infectious diseases, 4(3), 390.
  16. Animal Feed Resources Information System, University of Kentucky, College of Agriculture, Poultry Extension. "Common Protein Sources for Poultry Diets" . Retrieved 23 November 2012.
  17. Paisley, L. G., & Hostrup-Pedersen, J. (2005). A quantitative assessment of the BSE risk associated with fly ash and slag from the incineration of meat-and-bone meal in a gas-fired power plant in Denmark. Preventive veterinary medicine, 68(2), 263-275.
  18. Johnson, C. J., McKenzie, D., Pedersen, J. A., & Aiken, J. M. (2011). Meat and bone meal and mineral feed additives may increase the risk of oral prion disease transmission. Journal of Toxicology and Environmental Health, Part A, 74(2-4), 161-166 (résumé).
  19. Bernier, G., Phaneuf, J. B., & Filion, R. (1974). Entérite nécrotique chez le poulet de gril I. Aspect clinico-pathologique. Canadian Journal of Comparative Medicine, 38(3), 280.
  20. Davis, L. B. (1978). The 20th-century commercial mining of Northern Plains bison kills. The Plains Anthropologist, 254-286 (résumé)
  21. Sir John Sinclair (1832). The Code of Agriculture . Sherwood, Gilbert & Piper. p. 141–145.
  22. Chen, L.; J. Helenius; A. Kangus (2009). "NJF Seminar 422: Meat bone meal as nitrogen and phosphorus fertilizer (abstract)" (PDF). Nordic Association of Agricultural Scientists 5 (2): p. 26. consulté 23 novembre 2012.
  23. Bulletin general et universel des annonces et des nouvelles scientifiques, publié sous la direction du baron de Ferussac. - Paris, (Fain) 1823-1831. (gall.) (voir p. 17)
  24. Stern's Introductory Plant Biology. McGraw-Hill. 2011. p. 74–76. (ISBN 978-0-07-122212-9).

Voir aussi

Articles connexes

Bibliographie

  • Abrial, D., Calavas, D., Jarrige, N., & Ducrot, C. (2005). Spatial heterogeneity of the risk of BSE in France following the ban of meat and bone meal in cattle feed. Preventive Veterinary Medicine, 67(1), 69-82 (rĂ©sumĂ©).
  • Deydier, E., Guilet, R., Sarda, S., & Sharrock, P. (2005). Physical and chemical characterisation of crude meat and bone meal combustion residue : “waste or raw material?”. Journal of hazardous materials, 121(1), 141-148.
  • Johnson, C. J., McKenzie, D., Pedersen, J. A., & Aiken, J. M. (2011). Meat and bone meal and mineral feed additives may increase the risk of oral prion disease transmission. Journal of Toxicology and Environmental Health, Part A, 74(2-4), 161-166 (rĂ©sumĂ©).
  • Pu, Q., Han, L., & Liu, X. farine d’os ; Discrimination des diffĂ©rentes protĂ©ines animales transformĂ©es (PAT) par spectroscopie FT-IR en fonction des caractĂ©ristiques de leur graisse. Biotechnologie, Agronomie, SociĂ©tĂ© et Environnement, 1370(6233), 1780-4507 (rĂ©sumĂ©).
  • Stevenson, M. A., Morris, R. S., Lawson, A. B., Wilesmith, J. W., Ryan, J. B. M., & Jackson, R. (2005). Area-level risks for BSE in British cattle before and after the July 1988 meat and bone meal feed ban. Preventive veterinary medicine, 69(1), 129-144 (rĂ©sumĂ©).
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