Endymion
Dans la mythologie grecque, Endymion (en grec ancien Ἐνδυμίων / Endumíōn) est un simple berger ou un roi d'Élide selon les versions. Il est surtout connu pour être l'un des amants de Séléné, déesse de la Lune.
(entre 1850 et 1860), Victoria and Albert Museum.
Roi d’Élide (d) |
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Tombe d'Endymion (Olympie) (d) |
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Mythe
Il est le fils d'Éthlios, premier souverain d'Élide, et de Calycé[1] ; d'autres versions en font un fils de Zeus. Il a trois fils : Étolos, Péon et Épéios. Il choisit son héritier parmi ces trois en les soumettant à une course à pied qu'Épéios remporte[2]. Il passe aussi pour le père de Narcisse.
Il est l'amant de Séléné (Luna chez les Latins), dont il a cinquante filles rattachées au calendrier de la Grèce antique. Elles présidaient aux cinquante mois du calendrier lunaire qui séparaient deux sessions de Jeux olympiques. La tombe d'Endymion se trouve à Olympie. Selon certaines traditions, Séléné obtient pour lui qu'il conserve sa beauté dans un sommeil éternel[3] dans une grotte du mont Latmos en Carie[4].
Selon une version minoritaire[5], Endymion est élevé par Zeus dans l'Olympe, où il s'éprend d'Héra. Furieux, le roi des dieux le jette dans les Enfers, ou encore le punit par un sommeil sans fin.
Interprétation symbolique
En latin, Endymion signifie « in quod in animo cersatur, vel de quo cogitamus », c'est-à-dire : « les rêves et les projets chimériques qui occupent habituellement notre esprit ». La lune, dit-on, venait le caresser, parce que l'inconstance des idées, dont la lune est le symbole, flatte et charme notre imagination amoureuse du changement. On l'appelle le dormeur éternel, parce que l'homme qui passe sa vie à rêver un bonheur chimérique, est véritablement enseveli dans un continuel sommeil de l'âme.
En grec « Endymion » signifie "celui qui plonge dans l'ouest". Le nom « Endymion » est dérivé du mot grec ancien "endyma", qui signifie "vêtement de nuit". Le nom « Endymion » est donc associé à l'idée de dormir ou de plonger dans un sommeil profond; la référence à l'ouest peut être liée au fait que la grotte où Endymion dormait était située à l'ouest de la Grèce.
Postérité littéraire
Le mythe d'Endymion connaît une grande fortune littéraire grâce à sa richesse symbolique.
Il inspire à Michael Drayton son Endimion and Phoebe (1595). Dans le poème, Endymion est un jeune berger qui s'est voué à Phœbé. Celle-ci est également éprise de lui, et se présente comme une simple nymphe pour lui avouer ses sentiments. Endymion la repousse, arguant de son engagement au service de Séléné. Après qu'elle est partie, il regrette de l'avoir éconduite et s'endort au clair de lune en soupirant. Phœbé le visite pendant son sommeil ; à son réveil, il lui fait part de ses sentiments. C'est au tour de Phœbé de l'éconduire. Finalement, elle lui avoue sa véritable identité et annonce son intention de l'élever dans l'Olympe.
Le , a été représentée pour la première fois par l'Académie royale de musique, Endymion, pastorale héroïque en cinq actes, sur un livret de Fontenelle et une musique de Colin de Blamont[6].
Le motif du déguisement de Luna (Séléné), par lequel la déesse essaie de détourner son protégé de son propre culte, est repris par Keats dans son Endymion (1818). Ici, la feinte est double : dans le premier livre, Luna visite Endymion dans ses rêves sous le nom de Cynthia. Le jeune homme en tombe amoureux et se lance dans une quête pour la retrouver. Dans le quatrième livre, elle revêt la forme d'une jeune Indienne et finit par vaincre les résistances du jeune homme, qui abandonne son vœu pour l'amour de la déesse. La déesse se manifeste finalement sous sa véritable identité, et pardonne à Endymion sa « trahison » pour faire de lui son consort immortel. Le poème a été interprété comme une allégorie néo-platonicienne, représentant la quête humaine de l'idéal.
Rainer Maria Rilke a écrit un poème à propos d'Endymion à Paris, le , il est publié dans les Nouveaux poèmes[7].
Le poète grec Constantin Cavafy a consacré à Endymion un poème intitulé Sur une statue d'Endymion[8] qui fait le court récit d'une visite à son sanctuaire, à Latmos. Le poème de Keats a inspiré l'auteur de science-fiction Dan Simmons pour l'un des personnages de ses Cantos d'Hypérion. Dans un univers futuriste, Raul Endymion y est un berger choisi pour accompagner Enée, entité divine, dans sa quête et devenir son amant.
Marguerite Yourcenar lui a consacré un des poèmes de son recueil Les charités d'Alcippe, qui puise abondamment dans la mythologie grecque.
Léon Cathlin a publié un recueil de poèmes intitulé Le Sommeil d'Endymion, illustré par Albert Decaris en 1934, aux éditions Le Fuseau chargé de Laine.
Endymion est le troisième roman du Cycle d’Hypérion, écrit par l'Américain Dan Simmons, dans lequel il rend hommage au mythe d’Endymion (ainsi qu'au poète Keats) puisque la reprise du personnage occupe les deux derniers volumes : Endymion (1995) et L'Éveil d'Endymion (The Rise Of Endymion, 1997).
Représentations artistiques
Représentations antiques
Chez les Romains, le mythe de Séléné et Endymion se retrouve fréquemment sur des sarcophages de l'époque chrétienne et représente l'espoir d'une vie après la mort[9].
- Endymion dormant, copie romaine d'un original grec du IIe siècle av. J.-C.. Saint-Pétersbourg, musée de l'Ermitage.
Endymion recevant la déesse lunaire Séléné
Fragment de sarcophage, IIe siècle av. J.-C.
Berlin, Altes MuseumStatue d'Endymion (vers 140), musée des antiquités Gustave III, palais royal de Stockholm.
Représentations modernes
Le mythe d'Endymion constitue une source d'inspiration fréquente pour les peintres occidentaux. Parmi les représentations classiques, on peut citer celle de Cima da Conegliano (vers 1510, musée de Parme) ou Pier Francesco Mola (vers 1660, Rome, Pinacothèque capitoline). Carrache représente également la scène dans une fresque du palais Farnèse, à Rome, vers 1595-1600 : Phœbé embrasse le jeune homme endormi. Son interprétation du mythe sert de modèle à de nombreux artistes des XVIe et XVIIe siècles, comme le Domenichino au palais Giustiniani à Bassano di Sutri ou Franceschini au palais de la Podestà à Gênes. Au contraire, Poussin choisit en 1632 de représenter le jeune homme pleinement éveillé, à genoux devant la déesse.
Bien que le mythe d'Endymion n'avait jamais jamais été associé à la chaste Artémis, déesse grecque associée à la Lune, la déesse Diane, son équivalent romain, sera rattachée, à la Renaissance, au mythe d'Endymion. En 1722, le vénitien Giambattista Pittoni peint ainsi un Diane et Endymion[10].
La représentation « moderne » la plus connue est sans doute celle d'Anne-Louis Girodet, peinte en 1791 et conservée à Paris au musée du Louvre. Le pâtre est représenté endormi dans une posture lascive avec un modelé tout en courbe, sans musculature visible, ce qui était contraire à l'académisme de l'époque. Séléné n'est présente que sous la forme d'un éclairage blafard dont un rayon vient effleurer la bouche du sujet. Ce tableau marque une transition entre le style néo-classique et le romantisme en gestation.
- Sebastiano Ricci, Séléné et Endymion (1713), Chiswick House.
- Nicolas Guy Brenet, Endymion dormant (1756), Worcester Art Museum.
- George Frederic Watts, Endymion (1872), localisation inconnue.
En musique
- Marc-Antoine Charpentier, Les Amours de Diane et d'Endimion, H. 502, tragédie-pastorale, livret de Gabriel Gilbert (1681)[11].
- Hector Berlioz, Les Troyens. Au quatrième acte, dans le duo Didon-Énée dont le texte est inspiré d'un passage du "Marchand de Venise" de Shakespeare, Énée chante "La pudique Diane laissa tomber enfin son voile diaphane aux yeux d’Endymion"
En botanique
Hyacinthoides non-scripta peut aussi être nommée Endymion :
- Endymion non-scriptus, (L.) Garcke
- Endymion nutans, Dumort.
- Scilla non-scripta, (L.) Hoffmanns. & Link.
Étymologie
- Hyacinthoides non-scripta : de Hyacinthe, personnification du printemps tué puis transformé en fleurs par Apollon et du latin non-scriptus : sans marque (sur les feuilles).
- Endymion nutans : de Endymion, berger plongé par Zeus dans un sommeil perpétuel (rappelle l'aspect endormi de la plante) et du latin nutans : penché.
Remarque
Hyacinthoides non-scripta a pu être considérée comme ayant deux sous-espèces. La première était Hyacinthoides non-scripta subsp. non-scripta, la jacinthe des bois à proprement parler. La seconde était Hyacinthoides non-scripta subsp. hispanica, c'est-à-dire la scille d'Espagne.
Ce classement ne semble plus être d'actualité.
En astronomie
- Endymion, cratère lunaire; nom donné en 1935 par l'Union astronomique internationale[12].
- (342) Endymion; astéroïde[13].
Dans la culture contemporaine
Endymion fait aussi son apparition dans le manga Sailor Moon, sous l'identité de Mamoru Chiba ou Tuxedo Mask, roi de la Terre et époux de Queen Serenity, autrement appelée Sailor Moon.
Notes et références
- Apollodore, Bibliothèque [détail des éditions] [lire en ligne] (I, 7, 5).
- Pausanias, Description de la Grèce [détail des éditions] [lire en ligne] (V, 8, 1).
- Ovide, Amours [détail des éditions] [lire en ligne] (I, 13, 43).
- La précision de lieu est donnée pour la première fois par Sappho dans un poème perdu évoqué par la scholie du vers IV, 57-58 des Argonautiques d'Apollonios de Rhodes.
- Scholie du vers IV, 57 des Argonautiques, qui attribue le récit à Hésiode dans un poème perdu.
- « Endymion - Fontenelle », sur baroquelibretto.free.fr (consulté le ).
- Rainer Maria Rilke, Œuvres poétiques et théâtrales, Paris, éd. Pléiade Gallimard, 1997, p. 849 et notule p. 1686.
- Marguerite Yourcenar, Présentation critique de Constantin Cavafy, Gallimard, 1958, p. 138.
- Sarcophage avec la légende de Séléné et d'Endymion (notice du musée du Louvre).
- Pittoni à l'Ermitage.
- Charles Whitfield, « Une tragédie-pastorale de Gabriel Gilbert et Marc-Antoine Charpentier : Les Amours de Diane et d'Endimion (1681) », Littératures classiques, vol. 21, no 1, , p. 125–137 (DOI 10.3406/licla.1994.1777, lire en ligne, consulté le ).
- « Planetary Names: Crater, craters: Endymion on Moon », sur planetarynames.wr.usgs.gov (consulté le ).
- « JPL Small-Body Database Browser », sur ssd.jpl.nasa.gov (consulté le ).
Annexes
Bibliographie
- (en) Judith Colton, « The Endymion Myth and Poussin's Detroit Painting », in : Journal of the Warburg and Courtauld Institutes, vol. 30, 1967, p. 426-431.
- Natalia Agapiou, Endymion au carrefour. La fortune littéraire et artistique du mythe d’Endymion à l’aube de l’ère moderne, Berlin, 2005 (ISBN 978-3-7861-2499-3) (en ligne).
- (it) Natalia Agapiou, « L’Endymion cuirassé de Cima da Conegliano », in : Studi Umanistici Piceni, no 28, 2008, p. 211-225 (en ligne).
Liens externes
- Ressources relatives aux beaux-arts :
- (en) British Museum
- (de + en + la) Sandrart.net
- Notices dans des dictionnaires ou encyclopédies généralistes :
- « Endymion » sur mythologica.fr.