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Creuse (géomorphologie)

Une creuse est, dans le domaine de la géomorphologie, du paysage ou de l'écologie du paysage, une formation sèche (vallée sèche) typique des pays crayeux ; il ne s'agit cependant pas d'une petite vallée ou du lit mineur d'un cours d'eau, en creux, entaillant un versant perpendiculairement à une vallée.

Exemple de creuse rejointe par un ruisseau qui a contribué à son surcreusement.

Les creuses peuvent abriter une végétation (en particulier des fougères) et des micropaysages remarquables.

Elles ne semblent avoir été spécifiquement étudiées qu'à partir des travaux de Boursault (1894) qui était intrigué par les orientations préférentielles de ces vallées sèches et leur fréquent tracé en baïonnette. Le terme de creuse apparaît dans la littérature scientifique en 1998 avec Jules Gosselet. En 1997, Jean-Pierre Colbeaux et Bruno de Foucault ont proposé l'hypothèse d'une influence néotectonique[1].

Description et fonctionnement

Les structures géologiques influencent les circulations des eaux souterraines dans les milieux crayeux fissurés. Les creuses se présentent en ravins d'ordre kilométrique entaillant le fond de vallons élémentaires des plateaux de l'Artois et de la Picardie. Leur origine est naturelle (érosion, lieu d'écoulement de source intermittente). Elles peuvent mesurer de quelques centaines de mètres à un ou deux kilomètres de longueur, et leur profondeur peut atteindre plus de 10 ou 15 mètres. Elles sont généralement sèches et aux bords abrupts, voire localement presque verticales. Leur partie profonde est caractérisée par une végétation calcicole et de ravins, avec souvent des boisements (de type forêt de ravin sur les pentes) ou embuissonnements plus ou moins denses. Elles n'ont pas de véritable bassin versant et leur partie haute se termine en boutonnière (reculée).

RĂ©partition et sites

L'apparition de creuses est conditionnée par le contexte géologique et hydrogéologique d'un contexte karstique.

En France, elles sont courantes en Hauts-de-France, et plus particulièrement dans le Pas-de-Calais.

Utilisations

Les creuses peuvent avoir été surcreusées par une utilisation souvent séculaire comme chemin pour le bétail ou la descente de bois lorsque le degré de pente le permettait, voire très localement comme carrière.

Elles peuvent également permettre de recueillir l'eau de sources très temporaires.

Évaluation patrimoniale

Un travail de cartographie et d'Ă©valuation environnementale et de risque ou d'intĂ©rĂŞt patrimonial est en cours dans le Nord-Pas-de-Calais et dans le Nord de la Picardie (Cf. CSENPC, Lille), de mĂŞme que pour certains systèmes de dolines, marnières, et rideaux, avec environ 350 creuses dĂ©jĂ  prises en compte dĂ©but 2010, sur plus de 13 000 structures gĂ©omorphologiques digitalisĂ©es sur SIG. Ce travail complète la cartographie des corridors biologiques effectuĂ©e ou en cours dans le cadre de la trame verte rĂ©gionale.

Le paysagiste, l'urbaniste, l'aménageur du territoire ou l'écologue voient dans les creuses de multiples intérêts :

  • l'entretien d'un microclimat particulier, et constitution d'un rĂ©seau de lieux abritant une vĂ©gĂ©tation particulière, parfois patrimoniale et inhabituelle Ă  la rĂ©gion concernĂ©e.
  • une contribution Ă  la complexitĂ© et diversitĂ© des paysages : des micro-paysages atypiques avec par exemple une flore de milieux sub-montagneux en plaine (en raison de l'ombre et de la fraĂ®cheur, position de type ubac).
  • habituellement non cultivĂ©es et non urbanisĂ©es en raison des fortes pentes, pouvant ĂŞtre indemnes ou relativement indemnes d'eutrophisation par les engrais ou de pollution par les pesticides (notamment dans un contexte boisĂ© ou enherbĂ©, et si elles sont aussi Ă©pargnĂ©es par le ruissellement en provenance de zones de cultures intensives).
  • un rĂ´le d'abri, de corridor et de gagnage pour des espèces-gibier ou une partie de la biodiversitĂ©.
  • un rĂ´le potentiel de corridor biologique intĂ©ressant dans le cadre d'une trame verte locale, car reliant les vallĂ©es aux plateaux. Dans le Nord de la France, le Conseil scientifique de l'environnement du Nord-Pas-de-Calais a mis en avant leur importance.

Risques

Les apports d'eau y sont souvent ponctuels dans l'espace et dans le temps (souvent espacés de plusieurs décennies), cependant il existe des risques de débits torrentiels courts et brutaux à effets dévastateurs en particulier en présence de constructions en aval (Cf. creuse de Saint-Doneux, près d'Hesdin), en raison d'une probable origine de vidanges karstiques.

Il n'est pas recommandé ni d'y poser des barrages, ni de construire juste en aval ou à l'intérieur d'une creuse car les coups d'eau qui se produisent plusieurs fois par siècle peuvent y être assez importants pour ne pouvoir être contrôlés par un barrage classique. Ce type de risque devrait faire partie des portés à connaissance utilisés dans les processus d'aménagement du territoire, notamment pour les plans de prévention des risques (PPR) d'inondation, de coulées de boues, de glissement de terrain, etc. et en France pour les PLU (Plans locaux d'urbanisme).

Dans les régions très urbanisées ou densément cultivées, les creuses ont souvent fait l'objet de dépôts de déchets ménagers ou agricoles, voire industriels, ce qui amène un risque de pollution des eaux souterraines.

Voir aussi

Notes et références

  1. Sami Lallahem, 2002 - Structure et modélisation hydrodynamique des eaux souterraines : Application à l’aquifère crayeux de la bordure Nord du Bassin de Paris, Société géologique du Nord, Lille, 32, 217 pages

Bibliographie

  • Gosselet J., 1906 - Observations sur les creuses de l'Artois et de la Picardie, et reflexion sur l'importance de la dissolution souterraine de la craie. Annales de la SociĂ©tĂ© GĂ©ologique du Nord, XXXV,

237-243.

  • De Foucault B., Colbeaux J.-P., et al., 1997 - Les creuses de la rĂ©gion Nord-Pas-de-Calais. Premiers rĂ©sultats d'Ă©tudes multicritères. Annales de la SociĂ©tĂ© gĂ©ologique du Nord, 5, 385-394.
  • Lahousse Ph., Salvador P.G., Pierre G., 2003 -Contribution a la connaissance des vallons Ă©lĂ©mentaires du Nord de la France : l'exemple de la Creuse des Fosses (Authieule, plateau picard). Quaternaire, 14, 3, 189-196

Articles connexes

Liens externes

  • Ponor ou embut (hydrogĂ©ologie) : Tennevin G. et al., 2010 - HydrogĂ©ologie, L'embut de Caussols (Alpes maritimes), vidĂ©o 5 min 35 s
  • Tennevin G., 2011 - L’embut de Caussols. Article de vulgarisation scientifique www.h2ea.fr
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