Glissement de terrain
Un glissement de terrain est un phĂ©nomĂšne d'origine sismique, gĂ©ologique ou gĂ©ophysique oĂč une masse de terre descend sur une pente, autrement dit un plan de glissement, qui peut ĂȘtre plus ou moins continu, et plus ou moins incurvĂ©. L'impact de ces glissements peuvent ĂȘtre considĂ©rable, incluant des pertes en vie humaines, la destruction des infrastructures, des dommages causĂ©s aux terres et la perte des ressources naturelles.
les signes précurseurs d'un glissement de terrain comme des fissures ou des renflements dans une pente, un écoulement inhabituel d'eau sur une pente, un changement soudain dans le débit des cours d'eau et l'éboulement de petites roches.
AprĂšs la mise en mouvement la masse conserve globalement sa consistance et sa physionomie. Elle est donc toujours reconnaissable ; ceci diffĂ©rencie le glissement de terrain de la coulĂ©e de boue ou de sable (qui n'ont pas de formes propres). Dans certains cas, des millions, voire dizaines de millions de m3 peuvent ĂȘtre concernĂ©s, et brutalement dĂ©truire des villages entiers (comme au NĂ©pal en 2015 oĂč un glissement de terrain a enseveli plusieurs villages dont celui de Langtang (en) et environ 400 personnes. Il a Ă©tĂ© estimĂ© que l'Ă©nergie libĂ©rĂ©e Ă©tait l'Ă©quivalent de celle de la bombe atomique qui a explosĂ© au-dessus d'Hiroshima).
Les glissements de terrain sont l'un des types de mouvement gravitaire (ou mouvement de masse de géo matériaux), pourtant, par analogie avec certains auteurs anglophones (landslide en anglais), on utilise parfois improprement le terme « glissement de terrain » pour désigner des phénomÚnes différents (solifluxion par exemple).
Les glissements de terrain sont souvent des formations marneuses et argileuses, qui se caractĂ©risent par des loupes superficielles de glissement (appelĂ©es aussi loupes d'arrachement (et parfois de solifluxion), sortes de demi-sphĂšres biconvexes avec des structures d'arrachement et de rupture en tĂȘte (partie haute de la loupe dĂ©gageant parfois une couronne et une niche dâarrachement comme dans les falaises des Vaches Noires) et de grosses dĂ©formations de la surface en pied et en front[1] de glissement (partie basse de la loupe).
Causes (directes ou indirectes) et facteurs favorisant
- Diminution des résistances du sol et sous-sol : le cas le plus fréquent est la diminution de l'angle de frottement interne des argiles sous l'effet de l'eau[2]. Dans quelques rares cas, cette derniÚre est vaporisée (du fait des énergies libérées par les trÚs grandes masses en jeu), son effet est alors multiplié (avéré à l'éboulement du mont Granier de 1248). Des paramÚtres hydrologiques sont trÚs souvent en cause dans les glissements de terrains[3] - [4].
- Augmentation des charges en amont, comme la construction d'un ouvrage.
- Diminution des appuis en pied de pente, comme un terrassement mal pensé et trop raide, ou à une échelle différente le retrait d'un glacier.
- Plus rarement, un facteur déclenchant anthropique peut intervenir, comme une vibration de machine, une explosion, un séisme induit, la déforestation de pente, etc.
- SĂ©isme en cours.
- SĂ©quelles d'un sĂ©isme passĂ© ; des sĂ©quelles « structurelles » peuvent rendre le sol et sous-sol plus vulnĂ©rable Ă un glissement de terrain. Ce dernier peut ĂȘtre induit par un nouveau sĂ©isme ou simplement par de fortes pluies (en ayant rĂ©organisĂ© les Ă©coulements d'eaux souterraines), mĂȘme plusieurs dĂ©cennies aprĂšs le sĂ©isme en cause. Des Ă©tudes rĂ©centes ont montrĂ© qu'un mouvement de sol peut ĂȘtre dans ces conditions jusqu'Ă 30 fois plus important que dans les rĂ©gions voisines Ă©pargnĂ©es par le sĂ©isme prĂ©cĂ©dent[5].
- Augmentation de la chaleur : le sol d'une pente desséchée peut s'effriter, ce qui peut provoquer un « glissement sec », ou ensuite induit par de fortes pluies.
- Hydroclimatologie et hydrogĂ©ologie de la zone. En raison du rĂ©chauffement global, les glaciers de montagne fondent anormalement vite, en libĂ©rant d'importantes masses d'eau, alors que dans le mĂȘme temps des pergĂ©lisols ou des glaces qui maintenaient la cohĂ©rence de certaines pentes ou roches se dĂ©litent, provoquant des avalanches de roches (de plus en plus frĂ©quentes en Alaska, dans les Alpes et lâHimalaya[5]).
- Glissement de terrain au niveau de la vallĂ©e de WaipiÊ»o sur les falaises littorales du HÄmÄkua Pali, lors du sĂ©isme de 2006 Ă HawaĂŻ.
- Le glissement de terrain dans la vallée du Vajont ayant détruit plusieurs villages. Erto e Casso (Italie).
- Flimser Bergsturz (de), en Suisse, le plus grand glissement de terrain connu au monde aux effets encore visibles, vu depuis une plateforme Ă touristes. Septembre 2022.
Autres phénomÚnes géologiques de nature proche
- Les Sturzstrom sont des glissements de terrain ayant des effets similaires Ă une coulĂ©e de boue (mĂȘme en milieu aride)[6].
- Les glissements sous-marins (avalanches sous-marines) qui peuvent se propager sur de longues distances, dans des canyons, et qui endommagent parfois des installations (ex. : plateformes pétroliÚres, cùbles) et peuvent provoquer des tsunamis.
- Les paléoglissements sont des glissement de terrain de couches meubles plus anciennes.
Le glissement de terrain ne doit pas ĂȘtre confondu avec :
- les écroulements en masse de roches cohérentes, qui sont appelés éboulements rocheux ;
- les effondrement locaux et affaissements, dont le mouvement global n'est pas conforme à la pente, et qui sont causés par des cavités souterraines (terrain karstique parsemé de nombreuses dolines par exemple) ;
- les phĂ©nomĂšnes de retrait/gonflement de certaines argiles sous l'effet des variations d'humiditĂ©, oĂč le mouvement n'est pas non plus conforme Ă la pente, et est rĂ©versible et non gravitaire ;
- les phĂ©nomĂšnes volcaniques, oĂč les mouvements concernent de la lave liquide et non des sols ;
- les avalanches, qui concernent la neige et non les sols, bien que le terme avalanche de roche existe Ă©galement.
Les phénomÚnes d'érosion sous l'effet des eaux météoriques (ravinement) sont parfois difficiles à différencier des glissements superficiels évoluant en coulées de boue ; le critÚre de différenciation porte sur l'existence d'un mouvement du sol significatif avant la phase de liquéfaction en coulée boueuse.
Procédures expérimentales
Plusieurs matériels et méthodes sont utilisés sur le site de Valabre afin de caractériser au mieux ce processus d'effondrement. Des essais mécaniques ont été réalisés sur les gneiss du socle[7].
Essais uniaxiaux
Cet essai a permis d'avoir des connaissances sur lâanisotropie des gneiss. Il consiste Ă transporter un bloc de gneiss au laboratoire afin dây prĂ©lever six carottes de 80 mm de hauteur et de 40 mm de diamĂštre. Cinq de ces Ă©chantillons ont Ă©tĂ© soumis Ă une compression uniaxiale sous presse. Ils sont chargĂ©s mĂ©caniquement par une presse asservie de type MTS system, pilotĂ© par un systĂšme Testar IIm, avec une rigiditĂ© de 102 N/m qui peut servir Ă la rĂ©alisation des essais de compression. Elle est Ă©quipĂ©e d'un vĂ©rin vertical de force maximale 1,1 MN et de course 100 mm et d'un vĂ©rin horizontal de force maximale 225 kN et de couse de 50 mm[8].
Ătude pĂ©trographique au microscope optique polarisant
Le microscope optique polarisant est un outil dâobservation de lame mince pour dĂ©terminer les caractĂ©ristiques microscopiques (taille, forme, textureâŠ).
Le gneiss est une roche métamorphique, constitués par des lits clairs quartzofeldspathiques (feldspaths alcalins et plagioclases) et des lits sombres représentés par de la biotite[9].
La foliation est toujours prĂ©sente et correspond au plan dâaplatissement dâanisotropie de la roche due gĂ©nĂ©ralement Ă une dĂ©formation ductile et qui sâest produite en mĂȘme temps que le mĂ©tamorphisme.
La foliation est essentiellement marquée par des cristaux de biotite associée souvent à la muscovite[10].
Les micas prĂ©sentent un aspect tabulaire, sâalignant dans le plan de foliation et soulignant des bandes de cisaillement[11].
La biotite, micas le plus abondant présente parfois une rétromorphose en chlorite plus ou moins intense.
Conséquences et études
Outre les dégùts humains et matériels qui surviennent parfois, ces évÚnements peuvent modifier (parfois significativement) le paysage, créer des lacs[12] ou petites retenues d'eau, plus ou moins durables ou instables, affecter des infrastructures et modifier le fonctionnement de la circulation locale de l'eau et des sédiments[13], ce qui affecte aussi les écosystÚmes. Ils laissent notamment des traces dendochronologiques, qui permettent de rétrospectivement les étudier[14] - [15] - [16], ce qui intéresse aussi des disciplines scientifiques telles que la paléosismique[17], la datation des glissements de terrain[18] et la dendrogéomorphologie[19].
L'imagerie satellitaire, aérienne et par drones (utilisés au Népal par exemple) et l'amélioration des technologies GPS ont permis d'utiliser la photogrammétrie numérique pour mieux comprendre les conséquences et la nature de certains types de glissements de terrain, dont en France au Sauze dans les Alpes-de-Haute-Provence[20].
Prévention contre le risque de glissement de terrain
La prĂ©vention contre le risque de glissement de terrain consiste Ă rĂ©aliser des travaux permettant de stabiliser les sols susceptibles de prĂ©senter des signes dâinstabilitĂ©[21]. Pour cela, trois catĂ©gories de travaux de stabilisation sont possibles[22] - [23].
Terrassements
Les techniques de terrassement permettent de stabiliser les terrains en extrayant ou dĂ©plaçant une certaine masse de roche pour garantir un Ă©tat dâĂ©quilibre.
- LâallĂšgement en tĂȘte de glissement : ce procĂ©dĂ© consiste Ă allĂ©ger la tĂȘte du glissement afin de diminuer la masse des terrains et rĂ©duire les forces exercĂ©es. Les pentes raides des talus peuvent aussi ĂȘtre attĂ©nuĂ©es pour diminuer les risques de glissement, ce procĂ©dĂ© n'est rĂ©alisable que si le talus possĂšde une dimension rĂ©duite.
- La purge totale : cette solution n'est applicable que sur un glissement de terrain de taille réduite et aprÚs que le glissement ait eu lieu. cela consiste à dégager le matériel glissé.
- La substitution partielle : cette mĂ©thode substitue la purge totale si elle ne peut ĂȘtre rĂ©alisĂ©e. Elle consiste Ă rĂ©aliser des bĂȘches, des contreforts et des masques.
- Le chargement en pied : ce précédé consiste à édifier un ouvrage de butée pour mieux soutenir la charge des terrains et retenir les déplacements. Celui-ci est souvent associé à du drainage.
Les dispositifs de drainage
Lâeau est considĂ©rĂ©e comme le facteur prĂ©pondĂ©rant de lâinstabilitĂ© et donc des glissements des terrains. Ce dispositif permet de rĂ©duire lâaction de lâeau (drainage, dissolutionâŠ) ainsi que de la canaliser pour lâĂ©vacuer hors des terrains instables.
- Drainage de surface : Ce procĂ©dĂ© a pour but de canaliser les ruissellements de surface pour minimiser les infiltrations dâeau qui causeront lâinstabilitĂ© des terrains.
- Tranchées drainantes : Ce sont des ouvrages qui permettent de rabattre le niveau des nappes phréatiques diminuant ainsi les pressions interstitielles au niveau de la surface de rupture.
- Drainage profond[24] : Ce procĂ©dĂ© a pour but dâĂ©vacuer les eaux Ă lâintĂ©rieur du massif et dans la masse instable.
Introduction dâĂ©lĂ©ments rĂ©sistants
Celle-ci a pour but de rĂ©duire ou arrĂȘter les dĂ©formations des terrains, elles ont donc une influence sur les consĂ©quences des glissements de terrain.
- Enrochement : cette mĂ©thode permet de contrer lâavancĂ©e des matĂ©riaux en installant des blocs de roches au pied du terrain instable.
- Gabions : muraille de pierres entourĂ©e de grillage mĂ©tallique pour stopper lâĂ©volution du terrain vers la route.
- Ouvrage rigide : il sâagit dâun mur qui sera composĂ© de deux parties :
- Partie inférieure rigide en béton installée sur le pied du glissement avec ancrage ;
- Partie supérieure souple composée de pierres emboßtées.
- Nappe gĂ©osynthĂ©tique : il sâagit dâune nappe gĂ©osynthĂ©tique installĂ©e sur le terrain instable fixĂ©e par des ancrages et associĂ©e Ă du bĂ©ton projetĂ©. Cela a pour but de bloquer le mouvement du sol. Un mur de soutĂšnement est souvent installĂ© le long de la route pour bloquer la progression du terrain sur la route.
- SystĂšmes dâancrages : on en distingue deux types :
- Un ancrage passif : il est constituĂ© par des armatures (barres dâacier) scellĂ©es dans la roche. Ce procĂ©dĂ© permet de fixer un volume de roche instable sur un faciĂšs stable se trouvant en profondeur ;
- Un ancrage actif : constitué de barres en acier scellées au fond de trous au-delà de la zone instable et mises en tension.
- Nappe de géotextile biodégradable et écran en rondins de bois entrecroisés ; elle est composée de deux parties :
- Une partie supérieure composée de géotextile biodégradable favorisant la revégétalisation ;
- Une partie inférieure composée de rondins de bois entrecroisés avec un remplissage de petits blocs.
Autre méthodes
- Boisement : la plantation d'arbres sur un terrain sensiblement instable peut diminuer voir stopper son glissement[25].
Notes et références
- Le bloc-diagramme d'une loupe superficielle de glissement montre en effet diffĂ©rentes parties appelĂ©es tĂȘte, corps, pied et front.
- Gargani J.. Influence of Relative Sea-Level Rise, MeteoricWater Infiltration and Rock Weathering on Giant Volcanic Landslides. Geosciences, 13, 4, 113, 2023.
- A. Billard, T. Muxart, E. Derbyshire, Y. Egels, M. Kasser, J. Wang, Glissements de terrain induits par les pluies dans les lĆss de la Province de Gansou, Chine In Annales de GĂ©ographie, Armand Colin, 1992, p. 520-540.
- P. Alfonsi, Relation entre les paramÚtres hydrologiques et la vitesse dans les glissements de terrains, Exemples de La ClapiÚre et de Séchilienne (France), Revue française de géotechnique no 79, 1997, p. 3-12.
- Jane Qiu, Killer landslides: The lasting legacy of Nepalâs quake A year after a devastating earthquake triggered killer avalanches and rock falls in Nepal, scientists are wiring up mountainsides to forecast hazards, Nature, 25 avril 2016
- (en) Kenneth J. HsĂŒ, « Catastrophic Debris Streams (Sturzstroms) Generated by Rockfalls », Geological Society of America Bulletin, vol. 86, no 1,â , p. 129â140 (DOI 10.1130/0016-7606(1975)86<129:CDSSGB>2.0.CO;2, lire en ligne, consultĂ© le )
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- (en + fr) « Foliation index determination for fine-grained metamorphic rocks », Bulletin of the International Association of Engineering Geology - Bulletin de l'Association Internationale de GĂ©ologie de l'IngĂ©nieur,â (lire en ligne)
- Joel Sarout, « Propriétés Physiques et Anisotropie des Roches Argileuses : Modélisation Micromécanique et Expériences Triaxiales. (Physical Properties and Anisotropy of Shales: Micromechanical Modelling and Triaxial Experiments) », ThÚse,
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- « Stabilisation des glissements de terrain », sur observatoire-regional-risques-paca.fr (consulté le )
- « Prévention contre les glissements de terrain », sur http://rme.ac-rouen.fr/, (consulté le )
- « Comment protĂ©ger un bĂątiment contre les glissements de terrain et les coulĂ©es de boue », KVF \ AEAI,â (lire en ligne)
- Christian Chapeau et Jean-Louis Durville, « l'eau et les risques de glissements de terrain », GĂ©osciences,â
- « Les mouvements de terrain », prĂ©vention des risques naturels,â (lire en ligne)
Voir aussi
Articles connexes
Bibliographie
- G. Colas, G. Pilot, Description et classification des glissements de terrain, Bulletin de liaison des laboratoires des ponts et chaussées, Numéro spécial, 2, 1976, p. 21-30 ;
- M. Frayssines, Contribution Ă lâĂ©valuation de lâalĂ©a Ă©boulement rocheux (rupture), ThĂšse de lâuniversitĂ© Joseph Fourier (Grenoble 1), 2005, 218 p.
- J. Palmer, Creeping earth could hold secret to deadly landslides ; Scientists investigate why mountain slopes can slip slowly for years and then suddenly speed up, with potentially fatal effects, Nature News, 2017
Liens externes
- Notices dans des dictionnaires ou encyclopédies généralistes :
- Ressource relative à la santé :
- La géologie des Abymes de Myans