Accueil🇫🇷Chercher

Chalcographie du Louvre

La Chalcographie du Louvre est une institution crĂ©Ă©e en 1797 qui recouvre trois types d'activitĂ© : une collection de plaques de cuivre gravĂ©es rattachĂ©e au dĂ©partement des Arts graphiques du musĂ©e du Louvre, une collection d'estampes, et un atelier d'impression d'estampes d'après ces planches dont la commercialisation est assurĂ©e par un magasin de vente abritĂ© par le musĂ©e du Louvre. Le mot chalcographie provient du grec et signifie « Ă©criture sur cuivre Â», il dĂ©signe d'abord l'art de la gravure sur cuivre ou diffĂ©rents supports de mĂ©tal et par extension le lieu oĂą sont conservĂ©es des planches gravĂ©es de cette manière, ou mĂŞme issues d'autres techniques. Depuis sa crĂ©ation en 1895, la RĂ©union des musĂ©es nationaux (RMN) est chargĂ©e de l'impression, l'Ă©dition, la diffusion et la commercialisation des estampes. DĂ©posĂ©e au Ateliers d'Art, Moulage et Chalcographie de la Rmn - Grand Palais Ă  Saint Denis pour permettre son exploitation, la collection reste placĂ©e sous la responsabilitĂ© du musĂ©e. Elle compte aujourd'hui plus de 14 000[1] planches gravĂ©es et continue de s'enrichir.

Gravure de Claude Mellan, Agrippine, dite aussi Mnémosyne
Claude Mellan, Agrippine, dite aussi Mnémosyne. Commande royale pour le Cabinet du roi en 1677. Affecté à la Chalcographie du Louvre en 1812.

Histoire

La Chalcographie du Louvre a été fondée en 1797 par la réunion de plusieurs collections de gravures constituées sous l’Ancien Régime. Les deux plus importantes remontaient au XVIIe siècle : le Cabinet du roi et le fonds de l’Académie royale de peinture et de sculpture. Louis XIV fut le premier à mener une politique d’encouragement de la gravure. Auparavant, les graveurs étaient plus souvent considérés comme des artisans que comme de véritables artistes et ne possédaient pas de reconnaissance officielle. En 1660, grâce à l’intervention de Robert Nanteuil, le roi prit un arrêt du Conseil qui leur accorda un statut légal. À partir de ce moment, les graveurs eurent une production beaucoup plus régulière. Le premier signe d’importance qui marqua l’intérêt du roi fut la création aux Gobelins, en 1667, d’un atelier de « graveurs ordinaires du Roi », sous la haute autorité de Charles Le Brun.

Le Cabinet du roi

La mĂŞme annĂ©e, Louis XIV dĂ©cidait, « afin d’encourager l’art de la gravure et d’en continuer l’histoire », de faire graver sur cuivre les Ă©vènements militaires et culturels importants de son règne, et de faire reproduire les vues des palais, châteaux, maisons royales les plus cĂ©lèbres du temps ainsi que les Ĺ“uvres peintes ou sculptĂ©es appartenant aux collections de la Couronne. L’exĂ©cution de ces planches fut confiĂ©e aux plus grands artistes de l’époque : GĂ©rard Audran, GĂ©rard Edelinck ou Claude Mellan entre autres. Elles formèrent une sĂ©rie de recueils qu’on dĂ©signa sous le titre de Cabinet du roi : le Carrousel de 1662 ; l’Histoire naturelle des animaux, les Plaisirs de l’Ile enchantĂ©e (reportage graphique des fĂŞtes donnĂ©es par le roi Ă  Versailles) comptent parmi les premiers rĂ©alisĂ©s. Jean-Baptiste Colbert, alors surintendant des Bâtiments du roi, s’attacha Ă  Ă©largir l’institution du Cabinet du roi et Ă  accroĂ®tre l’activitĂ© des graveurs : il fit rĂ©unir en 1670 les planches gravĂ©es en volumes agrĂ©mentĂ©s de descriptions pour les offrir aux notables du royaume et aux ambassadeurs des cours Ă©trangères, diffusant ainsi l’image de la gloire du souverain. En moins de vingt ans, plus de 300 000 livres furent consacrĂ©es Ă  l’enrichissement de ce fonds de planches gravĂ©es. En 1679, Colbert, inquiet de l’ampleur des dĂ©penses consenties, dĂ©cida de rendre le Cabinet du roi productif en vendant des tirages de ses planches. La commercialisation des gravures connut dès lors un succès grandissant. Ă€ la mort de Colbert, le fonds comportait 1 337 planches gravĂ©es. Sous Louis XV, la situation des graveurs ayant nettement Ă©voluĂ©e, il n’était plus nĂ©cessaire de les encourager. Les acquisitions se limitèrent ainsi Ă  la reprĂ©sentation des fĂŞtes et cĂ©rĂ©monies, ou bien au dĂ©cor de billets d’invitation ou de bal. Le financement provenait des Menus-Plaisirs du roi et non plus de la Surintendance des Bâtiments du roi. Le principal graveur de ce règne fut Charles-Nicolas Cochin fils. Louis XVI suivit la mĂŞme politique, les acquisitions furent encore moins nombreuses, et le principal graveur des Menus-Plaisirs fut Moreau le Jeune. En tout, 1 531 planches gravĂ©es d’origine royale se trouvent encore Ă  la Chalcographie du Louvre[2].

L'Académie royale de peinture et de sculpture

Dès 1655, sept ans après sa création, l’Académie royale décida que les graveurs pouvaient être reçus « académistes », au même titre que les peintres et les sculpteurs. Le premier graveur agréé fut Sébastien Leclerc, en 1672. Pour être admis, chacun des graveurs devait présenter un « morceau de réception » : la gravure d’un portrait, comme spécifié en 1673, puis deux sujets à partir de 1704. Jusqu’en 1789, 48 graveurs furent reçus : 65 morceaux de réception enrichirent donc les collections de l’institution. Le fonds de l’Académie fut complété par deux autres biais : les dons et les acquisitions. La série de 223 planches gravées par le comte de Caylus d’après les dessins du Cabinet du roi fut l’objet du don le plus remarquable, par Charles Antoine Coypel, en 1747. Vers le milieu du siècle, l’Académie décida d’exploiter commercialement sa collection, les produits de la vente lui permettaient alors d’acheter de nouvelles planches. Le succès de cette méthode autorisa de significatives acquisitions ou commandes. En 1773, l’institution acheta ainsi les cuivres provenant de la succession de Jean Audran. En 1789, la collection comptait 570 planches. L’Académie royale de peinture et de sculpture fut dissoute le .

La Chalcographie française

En 1792, les planches gravĂ©es du Cabinet du roi, de l’AcadĂ©mie royale, ainsi que celles du dĂ©pĂ´t des Menus-Plaisirs, de la surintendance de Versailles, de la Maison de ville de Paris et de plusieurs Ă©tablissements scientifiques et religieux furent rassemblĂ©es Ă  la Bibliothèque nationale de France, rue de Richelieu Ă  Paris[3]. Devant l’ampleur de cette collection ainsi rĂ©unie, le gĂ©nĂ©ral François RenĂ© Jean de Pommereul eut l’idĂ©e de fonder un musĂ©e national de la gravure, une « Chalcographie française », sur le modèle de la Chalcographie apostolique de Rome. Il s’agissait de fournir une nouvelle source de revenus Ă  l’État et de soutenir l’art de la gravure. Ă€ la fois musĂ©e et conservatoire des planches, cette chalcographie serait aussi le lieu d’impression et de vente des Ă©preuves et enfin l’atelier oĂą de nouvelles planches seraient gravĂ©es. Le gĂ©nĂ©ral Pommereul remit son projet de loi au directeur de l’Instruction publique et le ministre de l’IntĂ©rieur prit la dĂ©cision finale de fonder la Chalcographie nationale, le 23 florĂ©al an V (). Le premier conservateur de la chalcographie fut Louis-Marie-Joseph Morel d’Arleux, nommĂ© l’annĂ©e mĂŞme de la crĂ©ation « garde des dessins, estampes et planches gravĂ©es ». Les commandes et acquisitions, ainsi que la vente d’estampes commencèrent en . Grâce Ă  une propagande entreprise dès sa fondation auprès des Ă©coles centrales des dĂ©partements, la chalcographie connut rapidement une grande prospĂ©ritĂ©. La planche commandĂ©e en 1801 Ă  Auguste Boucher-Desnoyers, d’après La Belle Jardinière de RaphaĂ«l, rapporta Ă  elle seule près de 15 000 francs en l’espace d’un an[4]. Cependant, les cuivres de l’Ancien RĂ©gime restèrent jusqu’en 1812 dans les casiers de la bibliothèque impĂ©riale, ce n’est donc qu’à cette date que la chalcographie put concrètement exploiter son fonds de planches anciennes.

Sous le Premier Empire, furent commandés les 907 cuivres formant la Description de l'Égypte (attribués à la chalcographie qu’en 1854), ainsi que 250 autres planches, dont les séries du Sacre de Napoléon Ier, du Mariage de l’Empereur avec Marie-Louise, de la Colonne de la Grande Armée et du traité de Charles Le Brun concernant le rapport entre la physionomie humaine et celle des animaux. Aucune exploitation rationnelle du fonds dont la chalcographie disposait n’a été tentée.

La Restauration n’enrichit le fonds que des 30 planches du Sacre de Charles X et de deux portraits.

La Monarchie de Juillet n’apporta qu’un portrait de Louis-Philippe Ier et des encouragements à la publication des Galeries historiques de Versailles par Gavard.

Sous la Seconde République, une impulsion nouvelle relança les activités de la chalcographie grâce à de remarquables acquisitions : 27 planches de la Galerie du Luxembourg de Pierre Paul Rubens, 121 planches des Villes, Châteaux et maisons royales de Jacques Rigaud, 126 planches de l’Iconographie d’Antoine Van Dyck et 30 fac-similés de dessins de grands maîtres.

Le Second Empire enrichit considĂ©rablement le fonds de la chalcographie. 14 fac-similĂ©s de dessins et de nombreuses planches furent commandĂ©s aux grands graveurs de l’époque, d’après les chefs-d’œuvre de peinture du musĂ©e du Louvre. Ainsi, Ă  la suite de l’Exposition universelle de 1853, l'empereur commanda pour 350 000 francs de gravures d’interprĂ©tation. Par ailleurs, le ministère de l'Instruction publique lui donna la Statistique monumentale de Paris d’Albert Lenoir et des monographies des CathĂ©drales de Chartres et de Noyon par Jean-Baptiste-Antoine Lassus et Daniel RamĂ©e ; la ville de Paris lui cĂ©da l’œuvre de Baltard sur les Monuments de Paris, Fontainebleau, etc. ; et la bibliothèque impĂ©riale lui remit les 907 planches de la Description de l’Egypte. De plus, d’importantes planches anciennes furent acquises, notamment les deux sĂ©ries de Jacques Callot, les plus anciennes planches du fonds de la Chalcographie du Louvre : Siège de l’Isle de RĂ© et Siège de la Rochelle, gravĂ©es entre 1628 et 1630 Ă  la demande de Louis XIII. Enfin, le surintendant des Beaux-Arts dĂ©cida, en 1864, d’affecter Ă  la chalcographie tous les envois de Rome et grands prix de gravure.

La Troisième République a elle aussi contribué à l’enrichissement du fonds de la chalcographie, institutionnalisant les pratiques d’acquisitions. Le ministère de l’Éducation nationale et des Beaux-Arts versait chaque année à la Chalcographie du Louvre un certain nombre de planches acquises directement à des artistes. Le conseil de la Réunion des musées nationaux, dès sa création en 1895, recueillait les recettes des ventes d’estampes et prévoyait chaque année un crédit pour l’achat de nouvelles planches aux maîtres de la gravure contemporaine. Le ministère de l’Instruction publique affecta aussi à la chalcographie les collections significatives de planches du Monument de Ninive, de Ninive et l’Assyrie, et des Archives de la Commission des Monuments historiques. Parallèlement, le fonds s’enrichit grâce à des dons de particuliers comme la famille Gavard ou les héritiers de Charles-François Daubigny. La donation la plus importante fut celle de la Société française de gravure qui, lors de sa dissolution le , décide de faire don à la chalcographie de 102 cuivres et d’un lot considérable d’épreuves de grande qualité. Charles-Léon Wittmann était chargé des impressions dans les années 1890[5]. Le graveur Louis-Isidore Journot travailla dans ce service dans les années 1910-1920, sous la direction d'Alfred Porcabeuf.

Au XXe siècle, les acquisitions se portèrent en grande majorité vers des gravures originales, plutôt que d’interprétation (désormais moins recherchées) et vers la gravure contemporaine. Paul Angoulvent fut conservateur de la Chalcographie du Louvre dans les années 1920-1930 et contribua à faire avancer la connaissance sur cette institution en publiant plusieurs ouvrages et catalogues, édités avec la complicité d'Albert Morancé.

1989 voit l’officialisation du Cabinet des dessins du Louvre, auquel avait été plus ou moins liée, selon les périodes, la chalcographie, comme septième département du musée, sous l’intitulé « département des Arts graphiques ». Il regroupe donc la collection des dessins, ainsi que la collection Edmond de Rothschild (donnée en 1935) et la chalcographie.

Aujourd’hui, cette politique d’acquisition de gravures originales à des artistes contemporains continue, sans exclure toutefois l’enrichissement du fonds ancien. Le conservateur actuel de la chalcographie est Jean-Gérald Castex, qui a remplacé Pascal Torres en 2014.

Commande contemporaine

En 1989, dans le cadre du projet du Grand Louvre, Michel Laclotte, alors directeur du musĂ©e, a dĂ©cidĂ© de relancer la commande de matrices gravĂ©es Ă  des artistes contemporains. Jean-Michel Alberola, Pierre Alechinsky, Geneviève Asse, George Baselitz, Louise Bourgeois, Jean-Pierre Pincemin, Kiki Smith ou encore JR ont participĂ© Ă  ce programme de commande publique. Les matrices produites dans ce cadre ne sont soumises Ă  aucune limitation de tirages. Les impressions sont rĂ©alisĂ©es sur des presses anciennes par les imprimeurs en taille-douce des Ateliers d'art, Moulage et Chalcographie, de la RĂ©union des musĂ©es nationaux - Grand Palais Ă  Saint Denis oĂą sont conservĂ©es les 13 000 cuivres de la collection du Louvre. Ni numĂ©rotĂ©s, ni signĂ©s ces tirages sont commercialisĂ©s par la RĂ©union des MusĂ©es Nationaux-Grand Palais Ă  des prix « dĂ©mocratiques Â».

Les estampes contemporaines de la Chalcographie du Louvre ont été exposées en 2001 au musée du Louvre[6].

Eva Jospin est une des dernières artistes à avoir bénéficié d'une commande en 2017, elle a réalisé une eau-forte avec la collaboration de l'Atelier de taille douce de la Rmn-GP qui a été présentée à la FIAC de la même année[7]sur le stand de la Rmn - Grand Palais. En 2020 c'est Jean-Michel Othoniel que le Louvre a sollicité. L'artiste a répondu à l'invitation avec La Rose du Louvre, héliogravure réalisée en collaboration avec l'Atelier Héliog'.

Les prochaines commandes sont en cours de production aux Ateliers d'art de la Rmn-GP, elles seront dévoilées lors de l'édition 2021 de la FIAC sur le Stand des Ateliers d'art de la Rmn-GP. Les artistes sélectionnées sont Annette Messager et Rosanna Lefeuvre.

Quelques Ĺ“uvres de la collection

Notes et références

  1. « Graver pour le roi », sur Le Louvre (consulté le )
  2. C'était du moins le cas en 1933, lors de la publication de l'ouvrage de Paul Joseph Angoulvent, La Chalcographie du Louvre : catalogue général, p. 39.
  3. Les planches étaient au nombre de 1337 pour le Cabinet du roi, de 571 pour l’Académie royale de peinture et de sculpture et de 194 pour les Menus-Plaisirs. Ces chiffres proviennent du site RMN de la Chalcographie du Louvre, cité en lien externe.
  4. Paul Joseph Angoulvent, La Chalcographie du Louvre : catalogue général, Paris, Musées nationaux, 1933, p. 49.
  5. « Imprimerie en taille douce Charles Wittmann », in: Exposition internationale du livre et des industries du papier, catalogue, Paris, 1894, pp. 1-2 — sur archive.org.
  6. Musée du Louvre, Au Louvre et au présent, estampes contemporaines pour la Chalcographie du Louvre, Paris, Edition des Réunions des Musées nationaux, , 48 p. (ISBN 2-7118-4293-2)
  7. « La Chalcographie - Eva Jospin : une création présentée à la FIAC 2017 », sur ateliersartmuseesnationaux.fr (consulté le ).

Annexes

Bibliographie

  • Paul Joseph Angoulvent, La Chalcographie du Louvre, prĂ©f. Jean Guiffrey, Paris, MusĂ©es nationaux et Villeneuve-Saint-Georges, Union typographique,
    • Tome I : Histoire et descriptions des collections, 1926.
    • Tome II : Inventaire gĂ©nĂ©ral et tables de recherche, 1926.
    • Tome III : Annexe I : La Description de l'Égypte, 1930.
    • Tome IV : Annexe II : Les Galeries historiques de Versailles, 1930.
  • Collectif, Pierre Wicart (dir.), TrĂ©sors de la chalcographie du Louvre, [catalogue d'exposition], Paris, Galerie Vision nouvelle, 1973.
  • Collectif, Pascal Torres Guardiola (dir.), MĂ©moires du visible : cuivres et estampes de la chalcographie du Louvre, [catalogue d'exposition], Paris, MusĂ©e du Louvre, RĂ©union des MusĂ©es Nationaux, 2003.

Liens externes

Cet article est issu de wikipedia. Text licence: CC BY-SA 4.0, Des conditions supplémentaires peuvent s’appliquer aux fichiers multimédias.