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Camille Papin Tissot

Camille Papin Tissot, né le à Brest (Finistère) et mort le à Arcachon (Gironde), est un officier de marine français. Précurseur de la télégraphie sans fil, il établit les premières liaisons radios opérationnelles françaises en mer. Il est incontestablement un des inventeurs de la TSF, oublié par l’histoire comme d’autres savants aussi désintéressés que lui, tel Eugène Ducretet ou bien encore Albert Turpain.

Camille Papin Tissot
Camille Tissot Papin.
Biographie
Naissance
Décès
(Ă  48 ans)
Arcachon
SĂ©pulture
Nationalité
Formation
Activités

Biographie

Les origines familiales

Camille Tissot est né à Brest le 15 octobre 1868 au 43 rue Saint-Yves, dans une famille bourgeoise et protestante, d’un père officier de marine et d’une mère d’origine brestoise.

Son père, Pierre Louis Tissot, est né à Vauvert dans le Gard le 1er avril 1823, commence sa carrière comme aide mécanicien dans la Marine nationale en 1842.

Le 3 novembre 1866, Pierre Louis Tissot a 44 ans, il est lieutenant de vaisseau et chevalier de la Légion d'honneur quand il épouse à Brest Adeline Alexandrine Gérardin, âgée alors de 35 ans, née à Brest le 10 novembre 1831. Bretonne sur six générations au moins, avec des racines se trouvant essentiellement à Brest dans le quartier Saint-Pierre-Quilbignon, elle est issue d’une famille aisée au sein de laquelle elle a pu faire des études.

Le 9 avril 1867 naît Chilarète Tissot, le premier enfant du couple Tissot, mais le petit garçon meurt subitement deux ans plus tard. Camille Tissot a alors tout juste un an et demi.

Le couple Tissot aura ensuite une fille, Esther Adèle Tissot, née le 1er avril 1872. Les deux enfants seront essentiellement élevés par leur mère, car leur père, en activité, est souvent en mer.

La carrière militaire du marin-savant

Recommandé par son père, Camille Tissot entre à l'École navale, à Brest en 1884. Il n’est alors âgé que de 16 ans.

Il fait ses classes sur le navire école Le Borda[note 1] jusqu’en 1886. Il est ensuite affecté au port de Brest.

Dans les premières années de sa carrière dans la marine, il voyage beaucoup puisqu’en 1887 il embarque successivement sur le navire-école Iphigénie, sur le Nive, sur le Bretagne, sur le Magellan, puis en 1888, sur le cuirassé Océan. Camille Tissot gardera un bel album photo souvenir de ses différentes expéditions et de ses expériences maritimes.

En 1890, il embarque sur le croiseur à barbettes Primauguet, puis sur le Calédonien ; pour finir, il est affecté sur le croiseur Coetlogon, duquel il met définitivement sac à terre le 23 janvier 1891. Sur proposition de sa hiérarchie, et volontaire pour ce poste, il accepte d’occuper provisoirement une des chaires de physique et chimie de l'École navale, rendue vacante par l'absence de son titulaire.

Il restera en fait 21 ans professeur à l'École navale[1].

La passion des sciences lui ayant été transmise par son père, il obtient sans effort les grades de licencié ès-sciences physiques et licencié ès-sciences mathématiques pendant son service actif. C’est aussi en qualité d'officier professeur à l'École navale qu'il se consacre à l'étude des oscillations électriques et de leur application dans le domaine maritime. Il fait d'ailleurs participer ses élèves-officiers à ses expérimentations.

Son côté passionné et quelque peu original lui vaut une caricature en ombre baille que l’on peut admirer aujourd’hui encore sur les murs du hall tradition du musée de l’École navale.

Suivant l’exemple paternel, Camille Tissot acquiert progressivement ses grades au cours de ses diverses affectations :

Cette dernière promotion, exceptionnelle pour un marin n'ayant pratiquement pas navigué, est due à l'importance des travaux menés par Tissot pour la Marine nationale.

L'homme, ses amours et convictions

En 1894, Camille Tissot tombe très amoureux de Jeanne Emma Stapfer, jeune femme de 20 ans dont la famille d’origine alsacienne était venu s’installer à Brest dans les années 1870 pour échapper au régime allemand. Il l’épouse le 3 septembre de la même année, et, à cette occasion, il adopte à la demande de son beau-père la religion catholique. Mais, en réalité, Tissot, qui signe le télégramme d’annonce de son mariage par « salut et fraternité » est socialiste et athée, et la religion lui importe peu. Parmi les invités à son mariage figurent ses amis Albert Turpain et Marcel Cachin, parlementaire très engagé et futur fondateur du Parti communiste français en 1920.

Jeanne dira plus tard à ses petites-filles «… qu’il considérait que la religion est surtout utile au peuple… ».

Du mariage de Camille et Jeanne naît Camille Jeanne, le 26 juin 1896, unique enfant du couple Tissot. Camille Tissot adore sa fille, qu’il surnomme Tototte ; pour autant, fidèle à ses convictions, c’est sans compter sur la présence de son père que la jeune fille fait sa première communion.

Ses travaux

En 1902 : depuis le phare du Stiff, la station radiotélégraphique à cohéreur a une portée de 80 kilomètres.
Article de Camille Tissot, accompagné d'une dédicace à Maurice Jeance, paru dans le no 57 de juillet 1906 du bulletin de la Société des électriciens.
Poste à écouteur de faible impédance.
  • Dès l’annĂ©e 1896, alors que les travaux de Lodge et de Marconi concernant la TSF sont encore très peu connus, Tissot reprend les thĂ©ories de Hertz et les expĂ©riences d'Édouard Branly et d'Alexandre Popov pour poursuivre, sur le « Borda », des recherches parallèles et indĂ©pendantes. Il construit lui-mĂŞme son matĂ©riel de TSF avec l’aide d’Édouard Branly et du constructeur Eugène Ducretet, pour qui il mettra au point des appareils.
  • Le 3 aoĂ»t 1898, en prĂ©sence du ministre de la Marine, il Ă©tablit la première liaison radio opĂ©rationnelle française en mer : 1 800 mètres entre le « Borda » et le sĂ©maphore du parc aux Ducs Ă  Brest. Convaincu, le ministre prescrit le 6 aoĂ»t au port de Brest de financer Ă  Tissot l’achat de matĂ©riel pour lui permettre de poursuivre ses essais.
  • En 1898 Ă©galement, il Ă©tablit le contact radio entre l’île d’Ouessant et le phare de TrĂ©zien sur le continent, crĂ©ant, de fait, la première station de TSF qui ait Ă©tĂ© installĂ©e en France[2]. Cette station deviendra Ouessant TSF, indicatif FFU (station Française Fixe de Ushant), active jusqu’en 1943 puis dĂ©placĂ©e au Conquet après la guerre.
  • Avec ces appareils, Camille Tissot monte en 1899 une grande campagne d’essais et assure des communications par ondes hertziennes, d’abord entre diffĂ©rents points de la rade de Brest et l’église Saint-Martin, puis jusqu’à l’île Vierge (Plouguerneau) et le Stiff (Ouessant).
  • En 1899, Tissot publie au bulletin des travaux des officiers un rapport d’un intĂ©rĂŞt historique remarquable, dans lequel il dĂ©crit ses travaux et expĂ©riences Ă  travers la rade de Brest. Il Ă©met des rĂ©serves, Ă  plusieurs reprises, sur la qualitĂ© de certains travaux de Marconi. Ă€ l'Ă©poque de l’écriture de ce rapport, la TSF en tant que moyen opĂ©rationnel de communication n’a mĂŞme pas 18 mois.
  • Ă€ partir de 1905, Tissot fait des Ă©tudes très approfondies sur la dĂ©tection des signaux radio. Les archives de Tissot et ses cahiers d’expĂ©riences laissent penser qu’il est celui qui a poussĂ© le plus loin les essais dans ce domaine en France. C'est Ă  la suite de ces travaux que Maurice Jeance et Victor Colin amĂ©liorent durant plusieurs annĂ©es l'Ă©metteur des ondes radio. Ils emploient le moyen exposĂ© en 1892 par Elihu Thomson, c’est-Ă -dire l’arc Ă©lectrique et utilisent l'Ă©metteur Ă  arc, dit Arc de Poulsen dĂ» Ă  l'inventeur danois Ă©ponyme Valdemar Poulsen en 1903[4] - [5] - [6].
  • En 1907, Ă  la suite de ces essais, Tissot dĂ©montre la possibilitĂ© d’utiliser la TSF pour transmettre un signal horaire et rĂ©gler les chronomètres des navires en mer.
  • Il saisit le 22 janvier 1908, le Bureau des longitudes d’une proposition de crĂ©ation du service journalier d’émission de ces signaux depuis la tour Eiffel. Ce bureau procède Ă  l’installation de ce service Ă  partir du 23 mai 1910. Ce système sera ensuite Ă©tendu Ă  la transmission des longitudes.
  • En 1907, Tissot conçoit, avec F. Pellin, un rĂ©cepteur Ă  galène sans rĂ©glage fastidieux pour recevoir ces signaux Ă  bord des navires de commerce.
  • En 1911, son expertise technique est demandĂ©e par un comitĂ© d’industriels français menĂ© par E. Girardeau, durant la sĂ©rie de procès qui opposent Marconi et l’industrie française de la TSF : la SociĂ©tĂ© française radio-Ă©lectrique (SFR) et la Compagnie gĂ©nĂ©rale radioĂ©lectrique (CGR). Ă€ l'occasion de ces procès, Tissot et FerriĂ© chercheront notamment Ă  dĂ©montrer certaines failles du brevet 77777 de Marconi, mais aussi l'antĂ©rioritĂ© d'expĂ©riences de certains savants français, comme Eugène Ducretet. Marconi gagne le procès en première instance contre la SFR et la CGR, mais cette dĂ©cision de justice qui donnait le droit Ă  Marconi de demander le remplacement du matĂ©riel français par du matĂ©riel de la Wireless Company ne sera jamais appliquĂ©e en France, puisqu'en 1914 Marconi se voit dĂ©boutĂ© dĂ©finitivement de sa demande.
  • Durant la guerre, Tissot fait plusieurs sĂ©jours Ă  Bizerte (Tunisie française), pour Ă©quiper en radio des cargos charbonniers utilisĂ©s par l’armĂ©e, et travaille en mĂŞme temps sur l’écoute des bruits rayonnĂ©s par les sous-marins dans la mer.
  • Le capitaine de frĂ©gate Tissot meurt brutalement en octobre 1917, de maladie, dans la villa RĂ©gine, 2 allĂ©e des Dunes Ă  Arcachon (Gironde)[7].

Ses publications

RĂ©sonance de l'antenne.

Il a écrit trois ouvrages très détaillés et clairs :

  • MĂ©moire de thèse de doctorat sur la rĂ©sonance des antennes (1905).
  • TraitĂ© sur les oscillations Ă©lectriques (1906)
  • Manuel de TSF thĂ©orique et pratique (1912), rĂ©Ă©ditĂ© jusqu’en 1932 (6e Ă©dition).

Il est aussi l’auteur de nombreux articles de vulgarisation de la TSF dans des revues scientifiques internationales, et donnera de très nombreuses conférences sur le sujet.

Hommages

Bien que n’en étant pas membre, il intervient régulièrement devant l’Académie des sciences[8], et certaines de ces interventions sont de véritables brevets d’invention. Il reçoit plusieurs prix et récompenses de cette Académie.

Ses travaux lui ont valu d’être appelé à participer au Comité de TSF scientifique, comité dont il fut l’un des membres les plus compétents et écoutés. Il était aussi membre de plusieurs autres sociétés scientifiques à travers le monde.

Des rues portent son nom : la rue du commandant Tissot à Brest et la rue Camille Tissot à Plouzané.

Bibliographie

Plusieurs publications et ouvrages décrivent les travaux de Camille Tissot :

  • « C'est Ă  Camille Tissot que revient le mĂ©rite des premières rĂ©alisations qui furent faites dans notre marine, et son nom doit ĂŞtre placĂ© Ă  cĂ´tĂ© de ceux du gĂ©nĂ©ral FerriĂ© et d'AndrĂ© Blondel, ainsi que de celui de RenĂ© Mesny, plus tard venu dans les mĂŞmes recherches, dans la liste des savants français qui ont crĂ©Ă© la TSF en France sa mort prĂ©maturĂ©e a Ă©tĂ© une très grande perte pour notre pays et pour la science. Eugène Giboin », in Le dĂ©veloppement de la TSF dans la Marine nationale de 1897 Ă  1939, AcadĂ©mie de Marine, 1951.
  • « M. Tissot ne s’est pas contentĂ© de faire, au sujet des phĂ©nomènes mis en cause dans la TSF, des Ă©tudes systĂ©matiques qui sont de beaucoup les plus complètes qui aient Ă©tĂ© faites touchant cette intĂ©ressante application des ondes Ă©lectriques : il a encore dotĂ© nos escadres de tout un matĂ©riel des mieux Ă©tudiĂ©s qui leur a permis peu Ă  peu, et cela dès 1898, d’accroĂ®tre la portĂ©e des communications. Aujourd’hui en 1909 tous les navires de guerre munis des dispositifs Ă©tudiĂ©s par M. Tissot peuvent communiquer Ă  300 km. En 1906, le cuirassĂ© « Bruix » a pu mĂŞme communiquer avec Port Vendres, Ă  une distance de 500 km », in Albert Turpain, Manuel de tĂ©lĂ©graphie sans fil, 1909.

Notes et références

Notes

  1. Le Borda ex-Valmy (1864-1890).

Références

  1. Officiers et anciens élèves
  2. Camille Tissot précurseur Brestois
  3. Arrêté du 7 octobre 1904 : Le ministre du Commerce de l'Industrie et des Postes et Télégraphes arrête : La station radiotélégraphique d'Ouessant est ouverte à partir du 10 octobre 1904 à l'échange des correspondances privées avec les navires en mer.
  4. La revue Ă©lectrique, 1909, p. 18 [lire en ligne]
  5. La Nature : Revue des sciences et de leurs applications aux arts et Ă  l'industrie, 1914, p. 91 [lire en ligne]
  6. Gaston Émile Petit, Léon Bouthillon, La télégraphie sans fil, la téléphonie sans fil, p. 64 [lire en ligne]
  7. « 150 ans d’histoire au cimetière d’Arcachon », sur Société historique et archéologique d’Arcachon et du Pays de Buch, (consulté le ).
  8. Sur l'emploi de détecteurs sensibles d'oscillations électriques basés sur les phénomènes thermo-électriques, présentée devant l'Académie des Sciences le 6 juillet 1908

Voir aussi

Articles connexes

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