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Aurelia aurita

La méduse commune (Aurelia aurita), appelée aussi aurélie, méduse bleue ou méduse lune, est une espÚce de cnidaires de la super-classe des scyphozoaires.

Des études génétiques en 2004 suggÚrent que cette méduse constituerait un complexe d'espÚces cryptiques[1].

DĂ©nomination

L'origine du nom scientifique Aurelia aurita est le latin aurelia, d’aurum, « or », Ă  cause de la couleur Ă©clatante de l’ombrelle et aurita, d’auris, « oreille », en raison de ses gonades en forme d’oreilles ou de fers Ă  cheval[2].

Les noms vernaculaires de méduse bleue ou méduse lune font référence à sa couleur généralement blanche-bleutée translucide[3].

Description

Cette méduse caractéristique est dotée d'un corps circulaire, en forme de coupe. Son endoderme est blanc et transparent, et son ectoderme, transparent lui aussi, est souvent légÚrement bleuté ou rosùtre. Son ombrelle est entourée de centaines de longs et fins tentacules blancs filamenteux et urticants, qui capturent et paralysent le petit zooplancton dont elle se nourrit, pour le porter jusqu'à sa bouche. De nombreuses nervures blanches sont visibles sur son endoderme, partant du centre jusqu'au bord de l'ombrelle. On distingue facilement les quatre gonades en fer à cheval, roses ou blanches, disposées symétriquement autour du centre de l'endoderme, et qui se développent à la base de la paroi latérale de la cavité gastro-vasculaire (cette symétrie d'ordre 4 s'exprime également par la compartimentation de cette cavité constituée de quatre poches stomacales radiales délimitées par quatre cloisons ou septums interradiaux, replis de l'endoderme). Elle possÚde aussi quatre bras buccaux translucides, entourant le manubrium, et souvent rangés sous l'ombrelle. Elle possÚde une centaine de fins tentacules marginaux. Elle nage en contractant son corps par ondulations réguliÚres. Chez les mùles, les gonades sont blanches ou jaunes, mais chez les femelles, elles sont roses ou violettes[4].

  • Sur ce clichĂ©, oĂč l'on a pris la mĂ©duse vue d'en bas, les tentacules, les gonades, la bouche, la cavitĂ© gastrique et l'anneau de muscles sont bien visibles.
    Sur ce clichĂ©, oĂč l'on a pris la mĂ©duse vue d'en bas, les tentacules, les gonades, la bouche, la cavitĂ© gastrique et l'anneau de muscles sont bien visibles.
  • Dessin par la NASA. Des larves d'aurĂ©lies ont Ă©tĂ© utilisĂ©es pour des expĂ©riences sur la gravitation en 1994.
    Dessin par la NASA. Des larves d'aurélies ont été utilisées pour des expériences sur la gravitation en 1994.
(1) cavité gastro-vasculaire, (2) tentacules marginaux, (3) bras buccaux, (4) mésoglée, (5) gonades, (6) endoderme, (7) bouche.

Écologie et comportement

Alimentation

Comme toutes les mĂ©duses, elle est macrophage et microphage, se nourrissant de constituants du zooplancton, des petits animaux nectoniques (petits poissons de 1,5 cm de long) ainsi que des micro-particules en suspension, qu'elle capture Ă  l'aide de ses centaines de fins tentacules de chasse. La nourriture, piĂ©gĂ©e par ses tentacules, est lentement acheminĂ©e jusqu'Ă  la bouche puis ingurgitĂ©e dans l'estomac (la cavitĂ© gastro-vasculaire) oĂč elle subit la digestion. Les produits de la digestion sont distribuĂ©s Ă  l'ensemble de l'organisme par de nombreux canaux radiaires puis par le canal circulaire. Les produits d'excrĂ©tion empruntent le trajet inverse et sont Ă©liminĂ©s sous forme de sortes de pelotes de rĂ©jection par le mĂȘme orifice que la bouche, cette derniĂšre servant aussi d'anus, comme chez tous les cnidaires[5].

Les jeunes mĂ©duses, avec un diamĂštre d'environ cm sont typiquement macrophages ; il a ainsi Ă©tĂ© calculĂ© qu'une jeune Aurelia aurita est capable de consommer plus de 60 alevins de hareng par jour. Ce n'est qu'une fois adulte et avec un diamĂštre plus grand atteint, qu'elle opte pour une alimentation microphage, digĂ©rant complĂštement une ration de phytoplancton en quatre heures et une larve de morue en huit heures, pouvant mĂȘme dĂ©vorer ses propres larves. Ce changement de rĂ©gime alimentaire est probablement dĂ» au dĂ©veloppement des gonades qui rĂ©trĂ©cissent la cavitĂ© de l'estomac[6].

Le systÚme gastro-vasculaire de cette méduse montre une certaine spécialisation : 16 canaux radiaires rectilignes distribuent les éléments nutritifs à la périphérie, 16 autres canaux radiaires ramifiés transportent les déchets vers la cavité gastro-vasculaire. Cette séparation de sens de circulation préfigure la spécialisation de la circulation des fluides vitaux chez les animaux plus évolués[7].

  • Le spĂ©cimen montrĂ© ici a capturĂ©, entre ses tentacules filamenteux, un zooplancton, probablement un copĂ©pode.
    Le spécimen montré ici a capturé, entre ses tentacules filamenteux, un zooplancton, probablement un copépode.
  • Agrandissement ; la proie devient ici bien visible.
    Agrandissement ; la proie devient ici bien visible.
  • Agrandissement.
    Agrandissement.

Reproduction

Son mode de reproduction est caractĂ©ristique de la plupart des scyphomĂ©duses. En effet, la reproduction se fait en deux stades : le stade libre et le stade benthique. Les mĂ©duses s'orientent grĂące au soleil et forment des regroupements en vue de la reproduction Ă  la fin de l'Ă©tĂ©, aprĂšs une migration orientĂ©e. La mĂ©duse mĂąle rejette du sperme, qu'une mĂ©duse femelle rĂ©cupĂšre pour fĂ©conder ses ovules. Les Ɠufs ainsi obtenus donnent vie Ă  une larve d'1 mm de diamĂštre possĂ©dant de nombreux cils, appelĂ©e planula, qui grandit et tombe au fond de la mer, pour former un polype qui se fixe Ă  un support. Il lui pousse alors des tentacules, puis cette formĂ© fixĂ©e commence Ă  se diviser de haut en bas. Cette phase de reproduction asexuĂ©e, appelĂ©e strobilisation, a lieu aprĂšs l'hiver et donne dĂšs le dĂ©but de l'annĂ©e des ephyra (jeunes mĂ©duses d'1 cm de diamĂštre) qui grandissent jusqu'Ă  devenir des mĂ©duses adultes[8].

  • Mode de reproduction d'une mĂ©duse Aurelia aurita.
    Mode de reproduction d'une méduse Aurelia aurita.
  • Polypes d'Aurelia aurita.
    Polypes d'Aurelia aurita.

Parasitisme

On retrouve souvent le crustacé amphipode commensal Hyperia galba logé dans les cavités sous-ombrellaires de cette méduse.

Prédateurs

Les mĂ©duses, essentiellement composĂ©es d'eau ne contiennent que peu de calories, ce qui fait qu'elles ont (adulte) relativement peu de prĂ©dateurs. Elles sont nĂ©anmoins des proies pour certaines autres espĂšces : la tortue luth (Dermochelys coriacea) s'est spĂ©cialisĂ©e dans leur prĂ©dation, mais cette espĂšce est en forte rĂ©gression en raison de la pollution, du fait qu'elle mange des sacs plastiques en les confondant avec des mĂ©duses, qu'elle est victime des filets de pĂȘche et parce que ses sites de pontes sont dĂ©gradĂ©s ou braconnĂ©s. D'autres prĂ©dateurs occasionnels de mĂ©duses sont notamment les manchots, les homards et le thon rouge[9]. Elles sont rapidement digĂ©rĂ©es et donc non retrouvĂ©es dans l'estomac des prĂ©dateurs, ce qui fait que ces derniers sont encore mal recensĂ©s[9].

RĂ©partition

MĂ©duse pratiquement cosmopolite et trĂšs rĂ©pandue, elle Ă©volue dans tous les ocĂ©ans et les mers du globe si ce n'est les eaux trĂšs froides des pĂŽles sud et nord. Cette espĂšce nage souvent Ă  la surface de l'eau, ou Ă  trĂšs faible profondeur, en pleine mer ou prĂšs des cĂŽtes, dans les ports et les estuaires. Elle peut vivre solitaire ou en vastes groupes de la mĂȘme espĂšce, venant souvent s'Ă©chouer sur le rivage. Elle dĂ©rive souvent avec le reste du plancton, au grĂ© des courants, faisant partie ainsi du macroplancton[3].

Anomalies

Cette aurélie photographiée en SuÚde comporte une anomalie des nombres de gonades caractéristiques

On observe frĂ©quemment, en aquarium ou en milieu naturel, des mutations chez les aurĂ©lies, dues souvent Ă  un accident de dĂ©veloppement. Ainsi, le nombre de gonades peut changer chez certains individus. Elles peuvent ĂȘtre de trois, cinq, six, sept voire plus chez une aurĂ©lie portant une mutation. Des spĂ©cimens renversĂ©s comme tel un parapluie aprĂšs une rafale ont aussi souvent Ă©tĂ© observĂ©s, sans que l'on ne sache exactement pourquoi ; si ce n'est que cette malformation tend Ă  ĂȘtre plus frĂ©quente en aquarium public[2].

Plus gĂ©nĂ©ralement, des changements morphologiques s'observent frĂ©quemment entre les aurĂ©lies : des changements de couleurs (blanc, bleu ou rose) mais aussi des diffĂ©rences dans les formes des gonades (en forme de cƓur, plus grands, reliĂ©s entre eux, plus Ă©pais sur les contours
 etc.).

Symétrie vitale

Une Ă©tude menĂ©e par l’institut de technologie de Californie, montre que lors de la perte d’un membre, celui-ci n’est pas automatiquement remplacĂ©, ou pas immĂ©diatement, mais la mĂ©duse peut rĂ©organiser sa structure afin de rĂ©tablir une symĂ©trie – chez les Ă©chinodermes, et chez certaines espĂšces de mĂ©duse un processus de transdiffĂ©renciation Ă©tait dĂ©jĂ  connu. Cette symĂ©trie semble ĂȘtre vitale chez certaines espĂšces de mĂ©duse et notamment Aurelia aurita, puisqu’elle permet Ă  l’animal de se propulser et de s’alimenter. Si un empĂȘchement de la rĂ©organisation de la structure de cette espĂšce, aprĂšs avoir Ă©tĂ© amputĂ©s, ne leur permet plus d’atteindre leur maturitĂ©. Aucune action du processus n’est biochimique, mais purement mĂ©canique et obtenue en modifiant la pression exercĂ©e dans chacun des muscles. En effet c’est alors qu’ils se rĂ©organisent spontanĂ©ment dans le corps gĂ©latineux de la mĂ©duse. Un avantage Ă©vident est que le processus est trĂšs rapide, quelques heures seulement Ă  4 jours au maximum. Cela permet donc Ă  l’animal de survivre beaucoup plus efficacement, que s’il fallait attendre la rĂ©gĂ©nĂ©ration d’un nouveau membre[10].

L'aurélie et l'homme

Pullulation et impact humain

L'espĂšce infeste pĂ©riodiquement les plages, pour la plus grande terreur des baigneurs, d'oĂč l'expression courante « annĂ©e Ă  mĂ©duses »[11].

Piqûre

Cette méduse est considérée comme inoffensive car son venin est sans réel danger pour l'homme.

Selon certaines sources, la piqĂ»re d'aurĂ©lie, gĂ©nĂ©ralement peu urticante, peut ĂȘtre ressentie de façon trĂšs diffĂ©rente selon les individus, allant de symptĂŽmes nuls Ă  une petite inflammation superficielle qui ne dure pas beaucoup plus de deux heures[2].

D'autres sources affirment au contraire que la piqûre, certes sans danger pour l'homme, est douloureuse. O⁷n peut facilement diminuer la douleur de la piqûre en appliquant des premiers soins : rincer la zone piquée avec du vinaigre (mais ne jamais rincer à l'eau douce, ni frotter, car cela stimule la libération du venin) puis retirer les tentacules à l'aide d'une pince et enfin appliquer une vessie de glace[12].

Pullulation

Dans les centrales nuclĂ©aires au bord de la mer, lĂ  oĂč des tonnes d'eaux chaudes sont dĂ©versĂ©es, les pullulations d'aurĂ©lies sont frĂ©quentes. Elles peuvent ĂȘtre responsables, Ă  cause de leur nombre, du colmatage des crĂ©pines d'aspirations. De plus, des baisses des prises de pĂȘches peuvent s'observer localement, Ă  cause de la prĂ©dation massive des alevins par les mĂ©duses juvĂ©niles. Plus gĂ©nĂ©ralement, les observations de scyphistomes d'aurĂ©lies se font surtout dans des zones portuaires ou des estuaires, sans doute Ă  cause de leur richesses en particules nutritives. L'aurĂ©lie fait partie des espĂšces les plus courantes lors de prolifĂ©ration de mĂ©duses, en raison de sa large distribution gĂ©ographique, bien que d'autres espĂšces la devancent en matiĂšre de quantitĂ© d'individus et de distribution en Ă©tendue et en profondeur lors de telles pullulations.

  • Un essaim de mĂ©duses Aurelia aurita dans les eaux du Danemark.
    Un essaim de méduses Aurelia aurita dans les eaux du Danemark.

Consommation humaine

En Asie, les aurélies sont consommées, notamment en Chine et en Indonésie. On les mange notamment aprÚs les avoir bouillies et enfleurées avec de l'huile de sésame.

Aquariums publics

Dans les aquariums publics, seuls des individus mùles sont présentés. En effet, cela évite les reproductions entraßnant la pullulation de larves dans le bassin, ainsi que les lùchés de vitellus par les femelles, responsables de pollutions inesthétiques.

MĂ©decine

Au XIXe siÚcle, aux Pays-Bas, des personnes souffrant de rhumatisme se baignaient dans des bassins remplies d'aurélies pour soigner les douleurs[2], cette thérapie se basant sur la croyance que les piqûres stimulaient le flux sanguin[4].

Galerie

Photographies

Vidéos

Notes et références

  1. (en) M.N. Dawson, « Macro-morphological variation among cryptic species of the moon jellyfish, Aurelia (Cnidaria: Scyphozoa) », Marine Biology, vol. 144, no 1,‎ , p. 203–203 (DOI 10.1007/s00227-003-1070-3).
  2. (fr) Référence DORIS : espÚce Aurelia aurita
  3. « La méduse Aurélie », sur oceanopolis.com (consulté le ).
  4. (en) Lisa-ann Gerschwin, Jellyfish. A Natural History, University of Chicago Press, , p. 122.
  5. Jacqueline Goy et Anne Toulemont, Méduses, Musée océanographique, , p. 10
  6. Jacqueline Goy, Anne Toulemont, op. cit., p. 20
  7. Jacqueline Goy, « Les paradoxes des mĂ©duses », Pour la Science, no 299,‎ , p. 36 (rĂ©sumĂ©)
  8. Peter Hayward, Tony Nelson-Smith, Chris Shields, Guide des bords de mer. Mer du Nord, Manche, Atlantique, Méditerranée, Delachaux et Niestlé, , p. 48.
  9. Garry Hamilton, « The secret lives of jellyfish Long regarded as minor players in ocean ecology, jellyfish are actually important parts of the marine food web », Nature News.com, vol. 531,‎ , p. 432–434 (lire en ligne)
  10. https://www.youtube.com/watch?v=mQZylDXgNnA
  11. Dino Simeonidis, Guide sous-marin de l'Atlantique : cÎtes et ßles de Dunkerque à Biarritz, Delachaux et Niestlé, , p. 87.
  12. Karim Amri, Animaux mystĂ©rieux : Ils peuvent tuer mais aussi sauver des vies, Éditions Favre SA, , 286 p. (ISBN 978-2-8289-1636-7), Aurelia aurita (MĂ©duse lune) pages 38 et 39

Voir aussi

Article connexe

Liens externes

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