Accueil🇫🇷Chercher

Artemisia verlotiorum

Armoise de Chine, Armoise des frères Verlot

L'Armoise de Chine (Artemisia verlotiorum Lamotte), également appelée « Armoise des frères Verlot » est une espèce de plante de la famille des Astéracées. Elle croit dans les friches. Originaire de Chine, elle est désormais présente sur tous les continents.

Caractéristiques

Description de l'espèce

  • Plante vivace (hĂ©micryptophyte), dressĂ©e, haute de (60) 100-150 (250) cm, formant des colonies (souche traçante, non cespiteuse)[1] - [2].
  • Appareil vĂ©gĂ©tatif : tiges ramifiĂ©es seulement dans la partie fleurie, feuilles alternes, simples, 1 (Ă  2) fois pennatisĂ©quĂ©es mais Ă  segments jamais ou rarement dentĂ©s, vertes au dessus, gris-blanches tomenteuses en dessous, système racinaire accompagnĂ© de stolons traçants.
  • Appareil reproducteur : fleurs minuscules (3,5-5 mm) rĂ©unies par ~ 15-25 en capitules de très petite taille, formant une synflorescence compacte, unilatĂ©rale, largement feuillĂ©e. Fruits : des akènes.
Planche d'herbier issue de l'herbier de Neuchâtel
Planche d'herbier

Distinction avec les espèces proches

L'Armoise de Chine ressemble à l'Armoise commune (Artemisia vulgaris), ainsi qu'à des espèces originaires d'Asie orientale Artemisia selengensis Turcz. et Artemisia lavandulifolia DC.[1] - [3].

  • On la distingue de l'Armoise commune par son port en colonie (vs. en touffe), sa floraison automnale (vs. estivale), ses tiges ramifiĂ©es seulement dans les parties fleuries (vs. ramifiĂ©es dès les parties vĂ©gĂ©tatives), ses feuilles a odeur aromatique[4] douce[1] (Ă  forte[2]) par froissement (vs. sans[1] ou Ă  lĂ©gère[2] odeur aromatique) et Ă  segments non ou rarement dentĂ©s (vs. feuilles Ă  segments irrĂ©gulièrement mais nettement dentĂ©s), bractĂ©es de l'involucre dĂ©passant le capitule (vs. ne le dĂ©passant pas)[1] - [5] - [6].
  • Artemisia selengensis Turcz. se distingue d'A. verlotiorum : "par ses feuilles mĂ©dianes Ă  segments dentĂ©s en scie et par ses capitules redressĂ©s Ă  l'anthèse"[1].
  • Artemisia lavandulifolia DC. se distingue d'A. verlotiorum par : "sa pilositĂ© [plus dĂ©veloppĂ©e (tige aranĂ©euse-blanchâtre (...))], mais Ă  port très semblable Ă  A. verlotiorum, Ă  l'exception des feuilles infĂ©rieures Ă  segments entiers et peu nombreux comme les mĂ©dianes"[1].

Caractéristiques chimiques et toxicité

L'huile essentielle obtenue par distillation de l'Armoise de Chine serait composée majoritairement par des α-thuyone. Les autres composants bien représentés seraient : des β-thuyone, des 1,8-cinéole et des β-caryophyllène[7] - [8] - [9]. La thuyone est toxique à haute dose et peut causer des dermatites de contact[10].

Taxonomie et classification

Artemisia verlotorum a été décrite par le botaniste français Martial Lamotte en 1876 dans les "Comptes-rendus" de l'Association française pour l'avancement des sciences[11] - [4]. Cette publication originale utilise l'orthographe correcte de l'épithète spécifique : verlotorum (sans "i"), largement en usage jusqu'au milieu du XXe siècle[11] - [12].

En 2014 Trautmann rappelle que l'orthographe correcte devrait être verlotorum (et non "verlotiorum", orthographe malheureusement fréquemment utilisée)[13].

Synonymes

  • Artemisia selengensis auct.[1] - [2] [non Turcz. ex Bess., 1834]
  • Artemisia umbrosa Verlot, 1875 [non Turcz.]
  • Artemisia vulgaris var. verlotorum (Lamotte) Battandier & Trabut 1902
  • Artemisia vulgaris subsp. verlotorum (Lamotte) Coste 1906

Pampanini[14] et après lui Brenan[2] expliquent que A. verlotorum a longtemps été confondue avec A. selengensis Turcz. ex Bess. 1834.

Lorsque Jean Baptiste Verlot (es) découvre la plante en 1873 à Grenoble, il s'y réfère en doutant comme à Artemisia umbrosa Turcz[14]. La même année Martial Lamotte l'observe à Clermont-Ferrand et en donne une description détaillée[4], rejetant les synonymies avec A. selengensis Turcz. et A. umbrosa Turcz..

Malgré les travaux importants de Lamotte puis de Pampanini, en 1902 les botanistes algériens Battandier et Trabut considèrent ce taxon comme une variété de l'Armoise commune : A. vulgaris var. verlotorum dans leur "Flore de l'Algérie et de la Tunisie"[15]. Et en 1922 Gaston Bonnier la considère comme une sous-espèce de cette même plante : A. vulgaris subsp. verlotorum[16].

En 2000 les botanistes anglais James et Stace décrivent l'hybride entre Artemisia vulgaris et A. verlotiorum : A. x wurzellii[17].

Étymologie

L'épithète spécifique verlotorum / "verlotiorum" rend hommage[4] - [14] à Jean Baptiste Verlot, jardinier en chef[18] et directeur[19] du jardin botanique de Grenoble et à son frère Bernard Verlot, chef de culture au Jardin des Plantes de Paris[19].

L'épithète spécifique "selengensis" se réfère à la rivière Selenga, près de la ville de Selenginsk dans la Transbaikalie[14].

Noms dans d'autres langues

  • en allemand : Verlotscher BeifuĂź[20]
  • en anglais : Artemisia verlotiorum[17]
  • en chinois : 南艾蒿 (pinyin : nan ai hao)[5]

Écologie

Origine et distribution

D'après Pampanini[21] - [2], la plante serait originaire du Sud-Ouest de la Chine (il cite les provinces du Si-kang et du Sze-chwan, actuelles régions du Tibet et du Sichuan, ainsi que le Shensi). En 2019, la Flora of China la donne présente sur l'ensemble des provinces côtières et du centre, mais pas au Tibet ni dans le Nord[5]. Elle est aujourd'hui largement répandue de par le monde : en Asie[22] : au Népal, en Chine, au nord de l'Inde, en Indonésie, au Japon, en Corée du Sud, en Malaisie, au Sri Lanka et en Thaïlande, en Afrique du Nord, en Amérique (du Nord comme du Sud), en Europe occidentale et centrale[23] et en Océanie[5] - [12].

L'Armoise de Chine est considérée comme envahissante en Bosnie-Herzégovine[24], en Croatie[25], en Espagne[26] (elle n'est toutefois pas listée parmi les espèces envahissantes officiellement reconnues dans ce pays[27]), en Italie[28], au Monténégro[29], en Slovénie[30] et en Suisse[31]. En France[32] elle semble envahissante surtout dans la région méditerranéenne.

Habitat

Cette espèce se rencontre généralement dans les friches vivaces eutrophiles[1], préférentiellement sur sols légers (sables et graviers). Elle est souvent donnée comme une rudérale des bords des routes et des rivières[2] - [5] - [26], appréciant les substrats dérangés. Elle nécessite un bon ensoleillement (héliophile), un climat tempéré plutôt chaud (subatlantique, thermophile) et une certaine humidité du sol (mésohygrocline à mésohygrophile)[33].

En phytosociologie synusiale intégrée elle participe à caractériser les friches vivaces mésoxérophiles médio-européennes de l'ordre de Onopordetalia acanthii[33].

Parmi les milieux naturels de Suisse, on la trouve surtout entre la basse altitude et l'étage subalpin dans l'Arction (reposoirs à bétail de basse altitude) des Alpes du sud, Valais, Tessin et Grisons[34]. Elle est dispersée dans les lieux incultes et les voies ferrées[35]. Elle interfère aussi avec l'agriculture[36].

Reproduction

Plante hermaphrodite, à fleurs très petites s'épanouissant en automne, pollinisées par le vent (anémogamie), produisant - là où les conditions climatiques le permettent - des akènes dispersés par gravité à proximité du pied mère (barochorie). En Angleterre le froid arrivant durant la floraison, il y coupe court et empêche la formation des akènes, même en Italie leur formation semble très limitée[2]. La plante se multiplie également de manière végétative par ses stolons[1] - [33].

Interactions avec d'autres organismes

Dans une étude sur la possibilité de contrôle biologique de l'Ambroisie à feuilles d'Armoise, il a été observé que l'Armoise de Chine est une plante hôte secondaire d'une espèce de chrysomèle baptisée Ophraella communa[37].

Dans une étude au sujet de la réaction de certaines plantes exotiques envahissantes à l'abroutissement par les herbivores (en l’occurrence la Noctuelle du chou et la Noctuelle méditerranéenne), les chercheurs ont constaté que l'Armoise de Chine ne semble pas résister à l'abroutissement, mais le compense par une très forte production de biomasse[38].

Impact des humains sur les populations sauvages

Étant donné le caractère d'exotique envahissante de la plante et les milieux dans lesquels elle se développe (friches, bords des routes), l'activité humaine semble lui être favorable.

Bases taxinomiques

Références

  1. Jean-Marc Tison et Bruno de Foucault, Flora Gallica, Flore de France, Mèze, Biotope, , 1195 p. (ISBN 978-2-36662-012-2), p. 384
  2. (en) J. P. M. Brenan, « Artemisia verlotorum Lamotte and its occurrence in Britain », Watsonia nº1,‎ , p. 209-223 (lire en ligne)
  3. (en) « Artemisia sect. Artemisia », sur Flora of China (efloras.org) (consulté le )
  4. Martial Lamotte, « Recherches sur une nouvelle espèce du genre Artemisia », Mémoires de l'Association française pour l'avancée des Sciences. Session nº5 à Clermont-Ferrand.,‎ , p. 511 (lire en ligne)
  5. « Artemisia verlotorum in Flora of China @ efloras.org », sur www.efloras.org (consulté le )
  6. (es) Juan Quesada Rincón, Francisco Valle Tendero & Carlos Salazar Mendías, « Artemisia verlotiorum Lamotte (Asteraceae), especie alóctona invasora en Andalucía (Sur de España) », Acta Botanica Malacitana, nº33,‎ , p. 367-372 (lire en ligne)
  7. Gaston A. Vernin, « GC/MS Analysis of Artemisia verlotiorum Lamotte Oil », Journal of Essential Oil Research, vol. 12, no 2,‎ , p. 143–146 (ISSN 1041-2905, DOI 10.1080/10412905.2000.9699482, lire en ligne, consulté le )
  8. Fabien Juteau, Véronique Masotti, Josette Viano et Jean-Marie Bessiere, « Chemical Variation in the Oil of Artemisia verlotiorum Lamotte of French Origin Harvested at a Vegetative Stage and During Flowering », Journal of Essential Oil Research, vol. 17, no 3,‎ , p. 254–256 (ISSN 1041-2905, DOI 10.1080/10412905.2005.9698893, lire en ligne, consulté le )
  9. André-Paul Carnat, Jean-Claude Chalchat, Didier Fraisse et Jean-Louis Lamaison, « Chemical Composition of the Essential Oil of Artemisia verlotiorum Lamotte Growing in Auvergne (France) », Journal of Essential Oil Research, vol. 13, no 5,‎ , p. 336–339 (ISSN 1041-2905, DOI 10.1080/10412905.2001.9712226, lire en ligne, consulté le )
  10. Memory P. F. Elvin-Lewis, Medical botany : plants affecting man's health, Wiley, (ISBN 0-471-53320-3, 978-0-471-53320-7 et 0-471-86134-0, OCLC 2463636, lire en ligne)
  11. « Artemisia verlotiorum Lamotte », sur www.ipni.org (consulté le )
  12. (en) « Artemisia verlotiorum Lamotte », sur www.gbif.org (consulté le )
  13. Théo Trautmann, « Non à la délinquance orthographique des noms scientifiques », Bulletin de liaison de la Sociétét Botanique d'Alsace, vol. 33,‎ , p. 9 (ISSN 1957-6617, lire en ligne Accès libre [PDF])
  14. (it) Renato Pampanini, « Contributo alla conoscenza dell'Artemisia verlotorum Lamotte », Bullettino della Società Botanica Italiana,‎ , p. 76-90 (lire en ligne)
  15. Battandier et Trabut, Flore analytique et synoptique de l'Algérie et de la Tunisie, Alger, Vve Giralt, (lire en ligne), p. 186
  16. (en) « Artemisia vulgaris subsp. verlotiorum (Lamotte) Bonnier, 1922 », sur www.gbif.org (consulté le )
  17. (en) C. M. James, B. S. Wurzell et C. A. Stace, « A new hybrid between a European and a Chinese species of Artemisia (Asteraceae) », Watsonia nº23,‎ , p. 139-147 (lire en ligne)
  18. « Verlot, Jean-Baptiste (1816-1891) », sur idref.fr, (consulté le )
  19. « Jean-Baptiste Verlot (1816-1891) », sur collections.museum-grenoble.fr (consulté le )
  20. (de) Bundesamt für Naturschutz, « Artemisia verlotiorum Lamotte, Verlot-Beifuß », sur floraweb.de (consulté le )
  21. Prof Renato Pampanini, « Settimo ed Ultimo Contributo Alla Conoscenza Dell' “Artemisia Verlotorum” Lamotte », Giornale botanico italiano, vol. 40, no 2,‎ , p. 183–224 (ISSN 0017-0070, DOI 10.1080/11263503309437897, lire en ligne, consulté le )
  22. « Artemisia verlotorum in Annotated Checklist of the Flowering Plants of Nepal @ efloras.org », sur www.efloras.org (consulté le )
  23. « Details for: Artemisia verlotiorum », sur The Euro+Med Plantbase Project (ww2.bgbm.org) (consulté le )
  24. Semir Maslo, « PRELIMINARY LIST OF INVASIVE ALIEN PLANT SPECIES (IAS) IN BOSNIA AND HERZEGOVINA », Herbologia: An International Journal on Weed Research and Control, vol. 16, no 1,‎ (DOI 10.5644/Herb.16.1.01, lire en ligne, consulté le )
  25. (en) Igor Boršić, « Preliminary check-list of invasive alien plant species (IAS) in Croatia », Natura Croatica : Periodicum Musei Historiae Naturalis Croatici, nº17 (2),‎ , p. 55-71 (lire en ligne)
  26. (es) Sanze Lorza M., Dana Sánchez E.D. &. Sobrino Vesperinas E., Atlas de las plantas alóctonas invasoras de España, Madrid, Dirección General para la Biodiversidad, , 384 p. (lire en ligne), p. 84-85
  27. Real Decreto 630/2013, de 2 de agosto, por el que se regula el Catálogo español de especies exóticas invasoras. BOE nº del 03-VIII-2013, Sec. I. Pág. 56764. https://www.boe.es/boe/dias/2013/08/03/pdfs/BOE-A-2013-8565.pdf
  28. (en) Loretta Pace et Fernando Tammaro, « The Main Invasive Alien Plants in the Protected Areas in Central Italy (Abruzzo) », dans Global Change and Protected Areas, Springer Netherlands, coll. « Advances in Global Change Research », (ISBN 9780306480515, DOI 10.1007/0-306-48051-4_46, lire en ligne), p. 495–504
  29. Danijela Stešević, Nedeljko Latinović, Danka Caković (2013) Invasive alien plant species in Montenegro, with special focus on Ambrosia artemisiifolia. 4th ESENIAS workshop, Çanakkale. https://www.cabi.org/ISC/FullTextPDF/2015/20153384140.pdf
  30. (en) S. Follak, M. Eberius, F. Essl et A. Fürdös, « Invasive alien plants along roadsides in Europe », EPPO Bulletin, vol. 48, no 2,‎ , p. 256–265 (ISSN 1365-2338, DOI 10.1111/epp.12465, lire en ligne, consulté le )
  31. « Fiche espèce », sur www.infoflora.ch (consulté le )
  32. Fried, Guillaume. (2010). Prioritization of Potential Invasive Alien Plants in France. Conference: 2nd International Workshop on Invasive Plants in the Meditteranean Type Regions of the World, At Trabzon, Turkey https://www.researchgate.net/publication/284716338_Prioritization_of_Potential_Invasive_Alien_Plants_in_France
  33. Julve, Ph. (2018) baseflor. Index botanique, Ă©cologique et chorologique de la Flore de France. Version du 14/12/2018. Programme Catminat. https://www.tela-botanica.org/projets/phytosociologie/porte-documents/
  34. Yves Gonseth et Pierre Galland, Guide des milieux naturels de Suisse : écologie, menaces, espèces caractéristiques, Delachaux et Niestlé, (ISBN 2-603-01083-2 et 978-2-603-01083-9, OCLC 41151342, lire en ligne)
  35. Gerhart Wagner, Ernest Gfeller et Andreas Gygax, Flora Helvetica : flore illustrée de Suisse, P. Haupt, (ISBN 978-3-258-07206-7 et 3-258-07206-X, OCLC 717930974, lire en ligne)
  36. « Néophytes présentant un potentiel invasif (obligation d’information) », sur www.neophytes-envahissantes.ch (consulté le )
  37. (en) Elisa Cardarelli, Arianna Musacchio, Chiara Montagnani et Giuseppe Bogliani, « Ambrosia artemisiifolia control in agricultural areas: effect of grassland seeding and herbivory by the exotic leaf beetle Ophraella communa », NeoBiota, vol. 38,‎ , p. 1–22 (ISSN 1314-2488, DOI 10.3897/neobiota.38.23562, lire en ligne, consulté le )
  38. (en) Anne Kempel, Patrick Nater, Markus Fischer et Mark van Kleunen, « Plant-microbe-herbivore interactions in invasive and non-invasive alien plant species », Functional Ecology, vol. 27, no 2,‎ , p. 498–508 (ISSN 1365-2435, DOI 10.1111/1365-2435.12056, lire en ligne, consulté le )
Cet article est issu de wikipedia. Text licence: CC BY-SA 4.0, Des conditions supplémentaires peuvent s’appliquer aux fichiers multimédias.