Aaron Swartz
Aaron Swartz, né le à Highland Park, prÚs de Chicago, et mort le à New York[1], est un informaticien, écrivain, militant politique et hacktiviste américain.
Naissance | |
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DĂ©cĂšs |
(Ă 26 ans) Brooklyn |
SĂ©pulture |
Shalom Memorial Park (d) |
Nom de naissance |
Aaron Hillel George Swartz |
Nationalité | |
Formation |
Université Stanford North Shore Country Day School (en) |
Activités |
Programmeur, militant politique, homme d'affaires, wikimédien, écrivain, cybermilitant, hacktiviste |
PĂšre |
Robert Swartz (d) |
MĂšre |
Susan Swartz (d) |
Site web |
(en) www.aaronsw.com |
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Blog officiel | |
Distinctions |
Fervent partisan de la liberté numérique, il consacra sa vie à la défense de la « culture libre », convaincu que l'accÚs à la connaissance est un moyen d'émancipation et de justice.
Aaron Swartz a eu une influence dĂ©cisive dans lâessor dâInternet. Il participa au dĂ©veloppement de plusieurs techniques, notamment le format flux RSS[2] ou encore celle des licences Creative Commons[3] (CC). Sa contribution ne s'arrĂȘte pas au plan technique, il fut aussi connu pour ses efforts de dĂ©mocratisation de lâinformation sur le web en manifestant contre des projets de loi tels que la Stop Online Piracy Act (SOPA).
Ăcrivain prolifique sous diffĂ©rentes formes (blogs, pamphlets politiques, textes de confĂ©rences), l'ouvrage Celui qui pourrait changer le monde (paru en français en 2017) rassemble ses principaux textes qui reflĂštent son engagement intellectuel sur des enjeux sociĂ©taux dont le droit d'auteur, la libertĂ© d'accĂšs des connaissances et des savoirs dont les publications scientifiques ou la transparence en politique.
Il a étendu ses réflexions dans le domaine de la sociologie, l'éducation civique et politique[4] - [5].
Il se suicide le à l'ùge de 26 ans[1] dans son appartement. Son procÚs fédéral en lien avec des accusations de fraude électronique devait débuter le mois suivant.
Biographie
Famille
Aaron Swartz naĂźt le Ă Chicago dans une famille juive. Il est lâaĂźnĂ© de trois frĂšres et grandit Ă Highland Park, Illinois, dans la banlieue de Chicago. Sa mĂšre Susan est femme au foyer et son pĂšre Robert Swartz, Ă©tait le fondateur d'une entreprise Ă©ditant des logiciels informatiques.
Son grand-pĂšre, William Swartz, prĂ©sidait une entreprise dâenseignes et s'Ă©tait engagĂ© dans l'organisme Pugwashi, prĂŽnant le dĂ©sarmement, et qui remporta le prix Nobel de la Paix en 1995[6] - [7].
Sa famille pratiquante fréquenta une communauté religieuse juive axée sur le courant du judaïsme réformé puis le mouvement Habad-Loubavitch. N'étant ni croyant ni pratiquant, Aaron Swartz fréquenta briÚvement les cours religieux[8].
Enfant précoce, Aaron Swartz fréquenta une école pour enfants surdoués dÚs son plus jeune ùge, mais connut une scolarité difficile. Son pÚre, Robert Swartz le décrit « comme un enfant trÚs sensible et trÚs fragile, ce qui amplifiait ses difficultés »[9].
Concernant son Ă©ducation, Robert Swartz raconte : « LâidĂ©e dâessayer de faire le bien et de rendre le monde meilleur imprĂ©gnait notre maniĂšre dâenvisager les choses », [âŠ] « LâidĂ©e de ne pas nous intĂ©resser aux objets, Ă lâargent, aux acquisitions Ă©tait notre façon de voir le monde »[6].
Informaticien et entrepreneur précoce
TrÚs tÎt, Swartz s'intéresse à l'informatique, à Internet avec une sensibilité aux projets open source et collaboratifs.
Il multiplie de nombreux projets en tant que programmeur informatique :
à 12 ans, il crée The Info Network, une encyclopédie éditée par les internautes, qui repose sur un principe de collaboration ouvert aux internautes comme Wikipédia[10].
Ă 13 ans, il reçoit lâArsDigita Prize, qui rĂ©compense les jeunes gens ayant crĂ©Ă© des sites non commerciaux « utiles, Ă©ducatifs et collaboratifs »[11]. Le titre lui donne droit Ă un voyage au MIT, oĂč il rencontre des personnalitĂ©s importantes du web. Cette mĂȘme annĂ©e, sa rencontre avec le juriste et thĂ©oricien du droit de l'internet Lawrence Lessig, lors d'une confĂ©rence TED, fut le point de dĂ©part d'une longue collaboration.
à 14 ans, il participe à l'élaboration de la spécification 1.0 du format RSS, une technologie permettant de recevoir en direct les mises à jour de sites web.
à 15 ans, il contribue au développement informatique de la licence Creative Commons[12], alternative aux licences du droit d'auteur standard. Dans cette perspective de l'accÚs libre du droit d'auteur, Aaron Swartz était particuliÚrement admiratif de Tim Berners-Lee, l'un des principaux créateurs du World Wide Web, du fait de son initiative de laisser sa création libre et gratuite pour qu'elle puisse profiter à un large public[13].
MalgrĂ© son jeune Ăąge et bien qu'il n'ait pas les diplĂŽmes requis, Lawrence Lessig le nomme chercheur dans le centre de recherche le « Safra Center for Ethics »[14] axĂ© sur la corruption institutionnelle de l'universitĂ© Harvard[15] - [16]. Au dĂ©but de leur relation, le juriste Ă©tait comme un professeur pour Aaron, « mais Ă la fin, câĂ©tait lui mon mentor et moi son Ă©lĂšve⊠». Lawrence Lessig le prĂ©sente de la maniĂšre suivante[17] : « Aaron a appris plus de choses que la plupart d'entre nous n'en apprendront jamais et il a Ă©laborĂ© plus de choses que la plupart d'entre nous n'en Ă©laboreront jamais. [âŠ] Peu d'entre nous auront jamais une influence, ne serait-ce que vaguement comparable, Ă celle qu'a eue ce garçon ». Il le dĂ©crit Ă©galement comme une personnalitĂ© dĂ©sintĂ©ressĂ©e dans son engagement militant[18].
Ă l'Ăąge de 16 ans, il quitte Highland Park pour entrer Ă l'universitĂ© de Stanford[2]. Il obtient un poste au sein de l'incubateur d'entreprise Y Combinator dirigĂ© par Paul Graham[19] oĂč il crĂ©e sa start-up Infogami, un systĂšme de gestion de contenu pour crĂ©er des sites web[20].
En 2005, Infogami fusionne avec Reddit, cofondĂ© par Alexis Ohanian et Steve Huffman. Les deux sociĂ©tĂ©s Ă©tant en difficultĂ©, la fusion a pour objectif de crĂ©er une nouvelle sociĂ©tĂ© pour de soutenir le dĂ©veloppement des deux produits : Not a Bug[21]. Il devient alors copropriĂ©taire et membre de lâĂ©quipe de Reddit. Ohanian et Huffman le nomment cofondateur de Reddit[22]. Par la suite ces deux derniers refuseront de reconnaĂźtre Swartz comme un cofondateur, affirmant quâils avaient commencĂ© Ă travailler sur Reddit six mois avant la fusion avec Infogami[23]. Swartz dĂ©veloppe au sein de Reddit un framework Python qu'il nomme "web.py"[24]. Lorsque Reddit est achetĂ© par CondĂ© Nast, une incompatibilitĂ© de principes ou de visions le force Ă vendre ses parts et Ă quitter son poste[25].
En 2007, il crée le site Jottit[26], un site permettant de créer une page Web le plus simplement possible (entrer un titre, un texte, et cliquer sur publier)[27]. Il devient par la suite membre du W3C et du RDF Core Working Group et élabore, avec John Gruber, le langage de balisage léger Markdown, pour générer du HTML.
En 2008[28], il travaille avec Virgil Griffith sur Tor2web (en), un proxy HTTP pour des services cachés Tor.
Il a participé à la création de l'Open Library, à la suite de la demande de Brewster Kahle, fondateur de l'Internet Archive[29].
Contributeur Wikipédia
Aaron Swartz Ă©tait un wikipĂ©dien actif[30] dĂšs 2003[31] et avait dâailleurs crĂ©Ă© avant l'heure The Info Network, sorte de « WikipĂ©dia » n'ayant pas attirĂ© de public (Swartz, 2017, p. 16). En 2006, il s'est prĂ©sentĂ© Ă l'Ă©lection du conseil d'administration de la Wikimedia Foundation et a publiĂ© sur son blog un texte intitulĂ© Qui Ă©crit WikipĂ©dia[32] ?, dont la conclusion rĂ©sumait en quelque sorte sa profession de foi. RĂ©futant rigoureusement l'analyse de Jimmy Wales selon laquelle l'essentiel de l'encyclopĂ©die est Ă©crit par une minoritĂ© d'experts trĂšs productifs, les « insiders », tandis que la majoritĂ© des autres intervenants n'effectuent que des modifications mineures et ponctuelles, Aaron Swartz plaidait pour un Ă©largissement de la base de ces « outsiders » minoritaires. Encourager et faciliter le travail des contributeurs ponctuels devrait mĂȘme, selon lui, constituer un objectif pour les « insiders », afin de garantir que l'encyclopĂ©die en ligne reste Ă la fois experte, de qualitĂ©.
« If Wikipedia is written by occasional contributors, then growing it requires making it easier and more rewarding to contribute occasionally. Instead of trying to squeeze more work out of those who spend their life on Wikipedia, we need to broaden the base of those who contribute just a little bit. »
« Si Wikipédia est écrite par des contributeurs occasionnels, alors pour la développer, il faut rendre plus facile et plus gratifiant le fait de contribuer occasionnellement. Au lieu d'essayer de faire travailler davantage ceux qui passent leur vie sur Wikipédia, nous devons élargir la base de ceux qui contribuent juste un peu. »
Durant son jeune Ăąge, il expĂ©rimente ce principe de libertĂ© dâaccĂšs des contenus encyclopĂ©diques en utilisant les collections numĂ©riques de la Library of Congress (bibliothĂšque du CongrĂšs amĂ©ricain). Utilisant une partie de ses Ă©conomies pour acquĂ©rir les droits des collections numĂ©riques, il organise la publication sur le Web des archives des millions de documents sur lâhistoire et la culture amĂ©ricaine pour les rendre disponibles en ligne, gratuitement[33].
La photo de Aaron Swartz fut reproduite en premiÚre page du Boston Globe à titre de wikipédien type (Swartz, 2017, p. 45).
Watchdog.net
En 2008, Aaron Swartz crée Watchdog.net une organisation visant à renforcer la transparence gouvernementale en diffusant plus largement les données officielles (Swartz, 2017, p. 16).
Le libre accĂšs aux publications scientifiques
En 2008, il Ă©crit et publie sur son blog le Guerilla Open Access Manifesto (en), plaidoyer en faveur de lâOpen Access[34] (traduction en français). Aaron Swartz, Ă©tait convaincu que l'accĂšs Ă la connaissance constitue le meilleur outil d'Ă©mancipation et de justice. Par consĂ©quent, il Ă©tait favorable au libre accĂšs aux publications scientifiques, dans un contexte oĂč les grands Ă©diteurs de revues comme Elsevier dominent lâĂ©conomie de la publication scientifique, en restreignant ainsi lâaccĂšs aux Ă©tudes et rĂ©sultats d'expĂ©rimentations[35] - [36].
PACER
En 2008, Aaron Swartz tĂ©lĂ©charge 2,7 millions de documents du SystĂšme judiciaire fĂ©dĂ©ral amĂ©ricain, tous hĂ©bergĂ©s au sein du PACER (Public Access to Court Electronic Records), une base de donnĂ©es administrĂ©e par lâAdministrative Office of the United States Courts[37].
Le Huffington Post relate que « Swartz a tĂ©lĂ©chargĂ© les documents du SystĂšme judiciaire fĂ©dĂ©ral amĂ©ricain depuis le systĂšme PACER dans le but de les rendre disponibles en sâaffranchissant du systĂšme payant. Le transfert a attirĂ© lâattention du FBI, qui a finalement dĂ©cidĂ© de ne pas le poursuivre, en raison du caractĂšre public des documents »[38].
Il est alors nĂ©cessaire de dĂ©bourser 8 cents pour accĂ©der Ă une page hĂ©bergĂ©e sur le systĂšme PACER. Carl Malamud, le fondateur de lâorganisation Ă but non lucratif Public.Ressources.Org, dĂ©nonce la monĂ©tisation du service en rappelant que les documents fĂ©dĂ©raux ne sont pas couverts par le copyright[39] - [40].
Les frais sont « réinvestis par la cour dans la maintenance du systÚme informatique, mais elle réalise un bénéfice de 150 millions de dollars, selon les rapports de la cour », rapporte le New York Times[39].
Carl Malamud a lancĂ© un appel aux activistes, leur demandant de se rendre dans lâune des 17 bibliothĂšques ayant contractĂ© un essai gratuit avec le systĂšme PACER afin de tĂ©lĂ©charger des documents produits par la cour et de les mettre en ligne publiquement[39].
AprĂšs avoir lu lâappel de Malamud, Aaron Swartz a utilisĂ© un programme informatique Ă©crit en Perl et fonctionnant sur des serveurs cloud dâAmazon pour tĂ©lĂ©charger les documents, en utilisant des identifiants appartenant Ă la bibliothĂšque de Sacramento[37]. Du 4 au , il a eu accĂšs aux documents et il les a tĂ©lĂ©chargĂ©s sur un service de cloud[40]. Il a ensuite divulguĂ© les documents Ă lâorganisation de Malamud.
Le [39], le GPO a suspendu l'essai gratuit, « dans l'attente d'une Ă©valuation » du programme[39] - [40]. Les actions d'Aaron Swartz ont ensuite Ă©tĂ© examinĂ©es par le FBI. L'affaire a Ă©tĂ© classĂ©e aprĂšs deux mois sans qu'aucune charge ait Ă©tĂ© retenue[40]. Aaron Swartz a appris les dĂ©tails de l'enquĂȘte aprĂšs avoir dĂ©posĂ© une demande dans le cadre du Freedom of Information Act auprĂšs du FBI et a dĂ©crit leur rĂ©ponse comme « le dĂ©sordre habituel qui rĂ©vĂšle le manque d'humour du FBI »[40]. Les clients utilisant Firefox ont la possibilitĂ© d'enregistrer les documents pour un accĂšs public gratuit avec un plug-in appelĂ© RECAP[41].
En 2013, à la mémoire d'Aaron Swartz, Malamud a rappelé leur travail avec PACER. Ils ont réussi à faire franchir le paywall à des millions de disques de tribunaux de district américains, a-t-il déclaré, et les ont trouvés pleins d'atteintes à la vie privée, divulguant notamment des dossiers médicaux et les noms d'enfants mineurs et d'informateurs confidentiels.
Malamud a rédigé un compte-rendu plus détaillé de sa collaboration avec Aaron Swartz sur le projet Pacer dans un essai publié sur son site Web[42].
Dans Ars Technica, Timothy Lee[43], qui utilisa plus tard les documents obtenus par Aaron Swartz en tant que co-créateur de RECAP, donna un aperçu des divergences dans le rapport sur le volume de données qu'il avait téléchargé. Selon le New York Times, Aaron Swartz avait déjà téléchargé environ 25 % des documents stockés dans le PACER quelques jours avant que l'analyse externe ne soit fermée, ce qui aurait permis de télécharger « environ 20 % de l'ensemble de la base de données ». Sur la base des faits selon lesquels Aaron Swartz a téléchargé 2,7 millions de documents alors que PACER en contenait 500 millions, Timothy Lee a conclu que Swartz avait téléchargé moins de 1 % de la base de données[37].
Mouvement Demand Progress
En 2009, il fonde le mouvement Demand Progress avec David Segal. Le collectif s'implique dans plusieurs campagnes : refus de la mise hors-la-loi de WikiLeaks, soutien de l'action des lanceurs d'alerte, demande d'abrogation du Patriot Act, appel à réduire les nouvelles et vastes prérogatives de l'exécutif américain sur Internet, opposition à la censure sur Facebook et contre le projet de loi SOPA[44]. Dans le documentaire The Internet's Own Boy, il déclare : « Les libertés garanties par notre Constitution, sur lesquelles s'est construit notre pays seraient soudainement supprimées. Au lieu de nous rendre plus libres, la technologie nous priverait de droits fondamentaux qu'on a toujours tenus pour acquis ». La plate-forme mise en place par Aaron Swartz permet à des millions de gens de contacter le CongrÚs et de signer des pétitions. La mobilisation aboutit et le projet de loi est retiré en [19].
Au début des années 2010, il y rencontre la militante Taren Stinebrickner-Kauffman, qui sera sa compagne jusqu'à son décÚs en 2013[45].
Affaire JSTOR
Le , il est accusĂ© d'avoir tĂ©lĂ©chargĂ© 4,8 millions d'articles scientifiques disponibles sur le site de JSTOR[46] - [47] (soit la quasi-totalitĂ© du catalogue). L'organisation JSTOR n'a pas pris l'initiative d'une telle dĂ©marche judiciaire, c'est la procureure des Ătats-Unis Carmen Ortiz[48] qui a engagĂ© des poursuites contre Aaron Swartz dans le but de le faire arrĂȘter[49].
D'aprĂšs la plainte[50], c'est entre le et le qu'Aaron Swartz utilise plusieurs mĂ©thodes pour rĂ©cupĂ©rer les documents. Il entre notamment dans la salle de cĂąblage informatique du MIT et y branche un disque dur externe directement sur les serveurs. La quantitĂ© de tĂ©lĂ©chargements aurait fait s'effondrer plusieurs serveurs de JSTOR, conduisant Ă un blocage de l'accĂšs des utilisateurs du MIT au rĂ©seau. Son matĂ©riel sera dĂ©couvert quelque temps plus tard et une camĂ©ra de surveillance spĂ©cialement installĂ©e pour la circonstance permettra de le confondre puis de l'arrĂȘter.
Alex Stamos, témoin expert engagé aux cÎtés d'Aaron Swartz dans l'affaire, révÚle sur son blog[51] les circonstances et les modalités de l'action de l'homme :
- Le réseau du MIT (Massachussets Institute of Technology) offrait aux étudiants (au moment des faits) une adresse IP routable fournie par un serveur DHCP non identifié, sans contrÎle des abus. Chacun pouvait donc s'identifier sur le réseau et se voir confier une adresse IP, ce qui est trÚs rare pour un réseau de campus.
- Cette organisation était le résultat d'une politique explicite de l'établissement, ce que le directeur de la sécurité des réseaux de l'université a admis face aux représentants d'Aaron Swartz au cours du procÚs en décembre. L'université avait choisi de ne pas protéger le réseau d'abus éventuels, comme le téléchargement d'un grand nombre de fichiers simultanément.
- Toujours au moment des faits, JSTOR autorisait un nombre illimitĂ© de tĂ©lĂ©chargements par les membres du rĂ©seau du MIT. Le site n'avait mis en place aucun outil pour empĂȘcher les tĂ©lĂ©chargements abusifs (comme la mise en place de CAPTCHA, l'enregistrement pour le tĂ©lĂ©chargement de plusieurs fichiers, ou encore un avertissement pour l'utilisateur). Techniquement, Aaron Swartz n'a donc pas piratĂ© le site JSTOR : il a seulement mis en place un script Python qui listait les adresses des articles de revues, puis en envoyait la requĂȘte au serveur.
- Aaron Swartz n'a rien fait pour dissimuler son identitĂ©, n'a usĂ© d'aucun systĂšme de chiffrement et n'a mĂȘme pas effacĂ© son historique de navigation. Il a cependant changĂ© son adresse MAC et fourni une fausse adresse de courriel (via Mailinator), se dĂ©clarant comme « Gary Host » (abrĂ©gĂ© en « Ghost » - « fantĂŽme » en anglais).
AprĂšs la rĂ©vĂ©lation de ses agissements, Aaron Swartz retourne les disques durs contenant les articles, en promettant de ne pas les diffuser. JSTOR dĂ©cide alors de ne pas entamer de poursuites judiciaires. NĂ©anmoins, le bureau du procureur maintient ses poursuites[52], le menaçant de 35 ans de prison. Le MIT, traditionnel soutien de l'internet libre, choisit de ne pas soutenir Aaron Swartz[53]. MalgrĂ© l'acquittement d'Aaron Swartz d'une amende Ă l'Ă©diteur, Flore Vasseur, dans son ouvrage Ce qu'il reste de nos rĂȘves, analyse le maintien des treize chefs d'inculpation comme Ă©tant une forme de persĂ©cution et l'impuissance ressentie liĂ©e Ă l'absurditĂ© du systĂšme judiciaire amĂ©ricain[54].
SecureDrop
Son dernier projet de dĂ©veloppement est la plate-forme SecureDrop permettant aux lanceurs dâalerte de fournir informations et documents aux journalistes de façon sĂ©curisĂ©e, utilisĂ©e par des mĂ©dias comme le New Yorker, le Washington Post ou encore le Guardian[55].
Il collaborait sur le code informatique avec Kevin Poulsen. AprĂšs sa disparition, c'est la FPF (Free Press Foundation) qui a repris le projet avec l'aide de James Dolan, rebaptisant le projet initial Deaddrop en projet SecureDrop[56].
La premiÚre instance de SecureDrop est mise en ligne par The New Yorker en octobre 2013, aprÚs son décÚs[57].
Personnalité
Aaron Swartz est décrit par son entourage comme une personne « idéaliste et désintéressée » dans ses engagements et un « travailleur acharné »[58].
Il souffrait de troubles alimentaires, notamment le syndrome de dysoralitĂ© sensorielle (« Sensory Processing Disorder » familiĂšrement appelĂ© en amĂ©ricain « supertasting »), une pathologie oĂč le sujet a une sensibilitĂ© gustative surdĂ©veloppĂ©e. Il privilĂ©giait les aliments tels que le riz et la mie de pain : « Seule la nourriture de couleur blanche me convient Ă peu prĂšs lorsque je suis dans un Ă©tat dâagacement avancĂ© ou dĂ©pressif », Ă©crit-il sur son blog.
Il Ă©tait atteint dâune maladie chronique intestinale (colite ulcĂ©reuse) qui lui causait de nombreux maux de ventre et des pĂ©riodes de dĂ©pression Ă rĂ©pĂ©tition[59]. NĂ©anmoins, sa compagne Taren Stinebrickner-Kauffman rĂ©fute que la dĂ©pression soit la cause de son suicide et dĂ©nonce la « vindicte » du systĂšme de justice criminelle[60].
DĂ©cĂšs
Le [61] - [62], Aaron Swartz sâest pendu[1] dans son appartement de Brooklyn. Son procĂšs fĂ©dĂ©ral en lien avec ces accusations de fraude Ă©lectronique devait dĂ©buter le mois suivant. En cas de condamnation, il encourait une peine d'emprisonnement pouvant atteindre 35 ans[63] et une amende s'Ă©levant jusqu'Ă 1 million de dollars[63].
Le mĂȘme jour, la famille et les proches de Swartz mettent en place un site web Ă sa mĂ©moire, sur lequel ils dĂ©clarent notamment[64] :
« Aaronâs death is not simply a personal tragedy. It is the product of a criminal justice system rife with intimidation and prosecutorial overreach. Decisions made by officials in the Massachusetts U.S. Attorneyâs office and at MIT contributed to his death. The US Attorneyâs office pursued an exceptionally harsh array of charges, carrying potentially over 30 years in prison, to punish an alleged crime that had no victims. Meanwhile, unlike JSTOR, MIT refused to stand up for Aaron and its own communityâs most cherished principles. »
« La mort d'Aaron n'est pas seulement une tragĂ©die personnelle. C'est le rĂ©sultat d'un systĂšme judiciaire criminel oĂč l'intimidation et les poursuites excessives abondent. Les dĂ©cisions prises par le bureau du procureur du Massachusetts et le MIT ont contribuĂ© Ă sa mort. Le procureur des Ătats-Unis l'a poursuivi sous un ensemble de chefs d'accusation particuliĂšrement sĂ©vĂšres, le menaçant de plus de 30 ans de prison, pour punir un crime allĂ©guĂ©, sans victime. De plus, contrairement au JSTOR, le MIT a refusĂ© de dĂ©fendre Aaron et les principes les plus chers de sa propre communautĂ©. »
Soupçon de pression psychologique
Le lendemain de son dĂ©cĂšs, le MIT annonce l'ouverture d'une enquĂȘte interne pour dĂ©terminer le rĂŽle jouĂ© par l'institution, notamment le juge Holder, dans le suicide du jeune homme « depuis le moment oĂč des activitĂ©s inhabituelles ont Ă©tĂ© dĂ©tectĂ©es sur le rĂ©seau Ă l'automne 2010 jusqu'Ă aujourd'hui ». Elle sera menĂ©e par Hal Abelson, cofondateur de Creative Commons et Ă©galement directeur au sein de l'universitĂ©[65].
En , l'hacktiviste Jeremy Hammond, emprisonné pour avoir hacké l'entreprise Stratfor et transmis les informations à WikiLeaks, écrit une lettre ouverte dans laquelle il condamne le gouvernement américain pour sa responsabilité dans la mort d'Aaron Swartz[66] - [67].
Le , Hal Abelson remet au prĂ©sident du MIT le rapport de l'enquĂȘte interne initiĂ©e aprĂšs le suicide d'Aaron Swartz. Celui-ci conclut que le MIT a eu une attitude neutre pendant la pĂ©riode qui a suivi l'arrestation d'Aaron Swartz, ne cherchant ni Ă ce qu'une procĂ©dure criminelle soit lancĂ©e contre lui ni Ă le dĂ©fendre. Les rapporteurs notent que, par sa position de neutralitĂ© dans cette affaire, le MIT n'a sans doute pas Ă©tĂ© Ă la hauteur de son rĂŽle de leader dans la technologie de l'information[68]. Elliot Peters, son avocat, considĂšre que le MIT n'a jamais pris la dĂ©fense d'Aaron Swartz en demandant au gouvernement de cesser les poursuites avant d'y avoir Ă©tĂ© poussĂ©[19].
Hommages
Plusieurs initiatives voient le jour à la suite de son décÚs : sur Twitter, plusieurs chercheurs publient notamment leurs travaux en accÚs libre en forme d'hommage à son engagement[69], le collectif Anonymous hacke deux sites web du MIT[70] ainsi que le site de la United States Sentencing Commission[71].
Tim Berners-Lee, principal inventeur du World Wide Web, a tweeté le lendemain « Aaron est mort. Vagabonds dans ce monde de fous, nous avons perdu un mentor, un aßné plein de sagesse. Hackers défendant le droit, nous sommes un de moins, nous avons perdu l'un des nÎtres. Tous ceux qui élÚvent, qui soignent, qui sont à l'écoute, qui nourrissent, parents, tous, nous avons perdu un enfant. Pleurons. »[72]
Une pétition est également mise en place sur le site de la Maison-Blanche pour réclamer la démission de la procureure à l'initiative de l'affaire[73], signée par plus de 10 000 personnes au lendemain du décÚs. Le site du MIT subit des barbouillages de quelques heures affichant un message de soutien d'Anonymous, qui dénonce les pressions du gouvernement américain et appelle à une réforme du systÚme du copyright et de la propriété intellectuelle[74]. Le , WikiLeaks indique qu'Aaron Swartz faisait partie de ses sources, sans toutefois pouvoir le prouver[75].
En hommage Ă Aaron, une semaine avant le premier anniversaire de son dĂ©cĂšs un hacker exploite un bug du site Springer Link pour tĂ©lĂ©charger plusieurs centaines de milliers dâarticles scientifiques et les publier sur un site[76].
Publications
- (en) Swartz, Aaron. « MusicBrainz: A Semantic Web Service », IEEE Intelligent Systems, vol. 17, no 1, p. 76â77, janvier-.
- (en) Swartz, A. et Hendler, J. « The Semantic Web: A Network of Content for the Digital City », Proceedings of the Second Annual Digital Cities Workshop, Kyoto, Japon, .
- (en) « Who writes Wikipedia », essai pour appuyer sa candidature au board of directors de la Fondation Wikimedia, 2006.
- (en) « How to Get a Job Like Mine », article autobiographique qui raconte son parcours jusqu'en 2007 (traduction « Comment dégoter un boulot comme le mien » sur le blog de Framasoft).
- (en) « Guerilla Open Access Manifesto », sur Internet Archive (traduction « Manifeste de la guérilla pour le libre accÚs » sur le blog de Framasoft).
- (en) Swartz, Aaron. A Programmable Web : An Unfinished Work, 2009 (traduction Un Web programmable : Ćuvre inachevĂ©e).
- Swartz, Aaron, « Celui qui pourrait changer le monde », Paris, Ăditions B42, 2017, 392 p. (ISBN 978-2-917855-77-5).
Hommages et distinctions
En 2000, ùgé de 13 ans, il reçoit le prix Ars Digital Prize pour la création de The Info Network[77].
En 2013, il obtient Ă titre posthume plusieurs distinctionsâŻ:
- James Madison Award de lâAmerican Library Association (ALA)[78]
- Pioneer Awards de lâElectronic Fronteer Foundation (EFF)[79]
- Admission au temple de la renommée d'Internet, dans la catégorie des innovateurs[80].
Références
- Associated Press, « Aaron Swartz, un des créateurs du RSS, s'est suicidé », La Presse, .
- Damien Leloup, « Aaron Swartz, itinĂ©raire d'un enfant du Net », Le Monde,â (lire en ligne).
- (en) Lawrence Lessig, « Remembering Aaron Swartz », Creative Commons, : « Aaron was one of the early architects of Creative Commons. As a teenager, he helped design the code layer to our licenses⊠»
- Aaron Swartz, « Sociology or Anthropology », Raw Thought (consulté le )
- (en) Aaron Swartz, « Simplistic Sociological Functionalism », Raw Thought, (consulté le ).
- « Aaron Swartz, les mystÚres d'un idéaliste », sur slate.fr, (consulté le ).
- (en) « William Swartz, Peace Agency Founder », sur chicagotribune.com, (consulté le ).
- (en) Larissa MacFarquhar, « Requiem for a Dream », sur www.newyorker.com, (consultĂ© le ) : « When he was very small, his family was part of a Reform congregation, but when he was six or seven his father came to feel that Reform theology didnât make sense to him, and moved the family to a Chabad Lubavitch synagogue. Swartz attended services there when he was young, but when he grew older he decided he didnât believe in God and stopped going. »
- (en) Larissa MacFarquhar, « Requiem for a Dream », sur newyorker.com, (consultĂ© le ) : « He hated high school, and wanted to drop out after ninth grade. His father had hated high school, too, had found it excruciatingly dull, so he wasnât going to force his son to go through it. âAaron was very, very fragile and very sensitive, and that amplified his difficulties,â his father says. So he dropped out of high school and spent his time taking classes at a local college and studying on his own. »
- The Internet's own boy: The Story of Aaron Swartz, de Brian Knappenberger, sur un scénario de w:fr:Brian Knappenberger, Participant Media, 2014 [présentation en ligne], 6:29 - 7:31 min
- (en) « ArsDigita Prize », sur lâInternet Archive.
- « Lawrence Lessig (1/2) : âDans le Net, oĂč l'argent est roi, l'attitude dĂ©sintĂ©ressĂ©e d'Aaron Swartz tranchaitâ », sur http://www.telerama.fr, (consultĂ© le ) : « Jâavais remarquĂ© Aaron lors dâune confĂ©rence TED que je donnais. Il avait 13 ans, Ă©tait assis au premier rang, accompagnĂ© par ses parents qui ne le laissaient pas encore voyager seul⊠»
- « Aaron Swartz, itinéraire d'un enfant du Net », sur lemonde.fr, (consulté le ) : « Son idole est Tim Berners-Lee, l'un des principaux créateurs du World Wide Web, qui a choisi de laisser sa création libre et gratuite pour qu'elle puisse bénéficier à tous. »
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Annexes
Bibliographie
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- Aaron Swartz (trad. de l'anglais), Celui qui pourrait changer le monde : Ăcrits, Paris, Ăditions B42, , 392 p. (ISBN 978-2-917855-77-5, prĂ©sentation en ligne).
- Flore Vasseur, Ce qu'il reste de nos rĂȘves, Ăd. des Ăquateurs, , 341 p. (ISBN 978-2-84990-522-7 et 2-84990-522-4)
Documentaires
- The Internet's Own Boy: The Story of Aaron Swartz, film documentaire américain réalisé par Brian Knappenberger en 2014 - [vidéo] Aaron Swartz, le docubiographie - The Internet's Own Boy sur l'instance de PeerTube, www.orion-hub.fr (VOSTF : sous-titré en français).
Articles connexes
- Alexandra Elbakyan, fondatrice de Sci-Hub, poursuivant les mĂȘmes objectifs.
Liens externes
- Ressources relatives Ă la musique :
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- Notices dans des dictionnaires ou encyclopédies généralistes :
- (en) Site personnel
- (en) Site d'hommages posthumes Ă Aaron Swartz sur rememberaaronsw.com