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AZERTY

AZERTY est un arrangement des lettres de l’alphabet latin et de divers caractĂšres typographiques sur les claviers des machines Ă  Ă©crire et ordinateurs. Elle est nommĂ©e d’aprĂšs les six premiĂšres lettres de sa premiĂšre rangĂ©e alphabĂ©tique et dĂ©rive, tout comme le QWERTZ germanique, de la disposition QWERTY amĂ©ricaine. UtilisĂ©e principalement en France et en Belgique, elle s’y dĂ©cline en variantes nationales.

Distribution géographique des différentes dispositions de clavier en Europe :
  • QWERTY
  • QWERTZ
  • AZERTY
  • Dispositions nationales (notamment turque FGĞIOD, lettonne ĆȘGJRMV et lituanienne Ä„ĆœERTY)
  • Écritures non latines

À l’instar du QWERTY, la disposition AZERTY est frĂ©quemment critiquĂ©e pour ses lacunes et son manque d’ergonomie, ce qui mĂšne au dĂ©veloppement d’AZERTY Ă©tendus et de dispositions alternatives telles que le BÉPO.

Histoire

Les premiers essais de dispositions de clavier ont Ă©tĂ© rĂ©alisĂ©s avec des secrĂ©taires en 1865. La disposition QWERTY, brevetĂ©e en 1878, a Ă©tĂ© spĂ©cifiquement Ă©tudiĂ©e pour Ă©viter les risques de blocage des premiĂšres machines Ă  Ă©crire mĂ©caniques produites massivement par l’armurier Remington. Sur ces premiĂšres machines Ă  Ă©crire, les tiges des touches voisines se coinçaient frĂ©quemment l’une avec l’autre. Pour limiter ce risque, la disposition QWERTY a donc Ă©tĂ© conçue afin que les paires de lettres les plus frĂ©quemment contiguĂ«s dans la langue anglaise correspondent Ă  des « barres Ă  caractĂšres » (les marteaux frappant le papier) les plus Ă©cartĂ©es possibles[1]. Les touches correspondant Ă  ces paires de lettres se retrouvent par consĂ©quent Ă©loignĂ©es les unes des autres sur le clavier. Cet Ă©cartement permet une frappe plus rapide sur une machine Ă  Ă©crire comportant des barres qui risqueraient de se coincer, mais la ralentit sur un systĂšme affranchi de cette contrainte (comme l'ont Ă©tĂ© les machines Ă  Ă©crire ultĂ©rieures).

Disposition ZHJAY, proposée en 1907.

La disposition AZERTY apparaĂźt en France au cours de la derniĂšre dĂ©cennie du XIXe siĂšcle comme dĂ©clinaison de certaines machines Ă  Ă©crire amĂ©ricaines QWERTY. Son origine exacte semble inconnue des « historiens, pionniers et propagandistes » de la machine Ă  Ă©crire. AprĂšs 1907, la disposition française ZHJAY d’Albert Navarre ne trouve pas son public : les secrĂ©taires sont dĂ©jĂ  habituĂ©es au QWERTY et Ă  l’AZERTY[2] - [3]. La disposition AZERTY a dĂšs cette Ă©poque constituĂ© un standard de fait en France.

En 1976 cependant, l’AFNOR proposait dans une norme expĂ©rimentale d’adapter QWERTY pour le français (NF XP E55-060). Cette norme prĂ©voyait une pĂ©riode transitoire d’adaptation durant laquelle les lettres A, Q, Z, W — mais pas M — pouvaient ĂȘtre situĂ©es comme dans la disposition AZERTY traditionnelle.

Disposition rationnelle du clavier AZERTY selon Yves Neuville.

Un rapport de 1985 rĂ©digĂ© par Yves Neuville[4] a eu au contraire pour objectif de conserver les standards nationaux, tout en regroupant des symboles par blocs logiques : alphabĂ©tique, diacritique, lettres accentuĂ©es, ponctuation, numĂ©rique, mathĂ©matique, informatique. Compte tenu du poids du passĂ©, il s’agissait de mĂ©nager la transition depuis les claviers antĂ©rieurs vers un clavier finalement plus rationnel. Ce rapport est restĂ© lettre morte.

Finalement, en 2019, l’AFNOR normalise une nouvelle disposition AZERTY (conjointement Ă  une version de la disposition BÉPO)[5]. Ce nouvel AZERTY diffĂšre substantiellement du standard de fait. Il offre une gamme Ă©largie de symboles et cherche Ă  en rationaliser la position — de façon similaire au rapport Neuville — et Ă  en optimiser la saisie, selon les frĂ©quences respectives des symboles. La diffusion de ce clavier reste pour l’heure confidentielle.

  • Machine Ă  Ă©crire Royal 290 avec clavier AZERTY (annĂ©es 1980).
    Machine à écrire Royal 290 avec clavier AZERTY (années 1980).
  • Le Minitel disposait d’un clavier AZERTY (le modĂšle TĂ©lic Ă©tait alphabĂ©tique).
    Le Minitel disposait d’un clavier AZERTY (le modĂšle TĂ©lic Ă©tait alphabĂ©tique).

Variantes

Le trait constitutif de la disposition AZERTY est l’arrangement suivant des 26 lettres latines :

AZERTYUIOP
QSDFGHJKLM
WXCVBN

Au-delĂ  de cet alphabet latin de base, il existe de nombreuses variantes d’AZERTY qui se distinguent par les symboles supplĂ©mentaires qu’elles offrent et leur placement. Cependant, certains symboles sont communs Ă  tous les AZERTY modernes (figurĂ©s par exemple sur les claviers modernes dits « PC 105 touches » vendus dans le commerce) :

  • cinq lettres diacritĂ©es : « Ă© Ăš Ă  Ăč ç » ;
  • des symboles typographiques : « _ - ' . , ; : ! ? @ & § ~ ^ ` š ° | ( ) { } [ ] / \ < > " # » et l'espace ;
  • des chiffres ou opĂ©rateurs mathĂ©matiques : « 0 1 2 3 4 5 6 7 8 9 ÂČ * + = % ” » ;
  • des unitĂ©s monĂ©taires : « € $ ÂŁ € ».

Le symbole de l'euro est ajoutĂ© sur les claviers AZERTY vers l'an 2000, avec la crĂ©ation de cette monnaie europĂ©enne. Windows et Linux le rendent accessible avec la combinaison Alt Gr + E tandis que Mac le place sur ⌄ + $.

Les AZERTY français comme belge possĂšdent des touches mortes : ^ pour l’accent circonflexe et š pour le trĂ©ma, qui donnent accĂšs aux voyelles accentuĂ©es « ñ ÀÄ ĂȘÊ Ă«Ă‹ üÎ ïÏ îÔ öÖ ûÛ ĂŒĂœ Ăż » au moins[note 1]. Sur l’AZERTY belge et sur certains AZERTY français, l’accent grave ` et le tilde ~ sont Ă©galement des touches mortes et donnent accĂšs Ă  des lettres diacritĂ©es inutiles pour Ă©crire en français mais qui apparaissent dans d’autres langues latines : « àÀ ÚÈ ìÌ ĂČÒ ĂčÙ » et « ãà ÔÕ ñÑ » au moins[note 2].

Les dispositions AZERTY belges possĂšdent quelques caractĂšres supplĂ©mentaires, comme le chiffre trois en exposant, « Âł », ainsi qu’une touche morte accent aigu ÂŽ qui donne accĂšs aux lettres « åÁ éÉ íÍ óÓ ĂșÚ ĂœĂ ». En effet, l’accent aigu est Ă©galement utilisĂ© en nĂ©erlandais sur des voyelles autres que « e ».

La plupart des systĂšmes modernes permettent de saisir certains symboles supplĂ©mentaires, utiles voire nĂ©cessaires au français mais qui ne sont pas indiquĂ©s sur l’imprimĂ© des claviers. Les mĂ©thodes de saisie et les caractĂšres disponibles varient selon les systĂšmes d’exploitation et pilotes de claviers.

AZERTY français

La France est l'un des principaux pays utilisant des claviers AZERTY. La disposition AZERTY la plus courante en France est celle fournie par Windows. Elle correspond, sans aucun ajout, aux symboles imprimés sur la plupart des claviers physiques.

Sa prise en charge de la langue française est lacunaire. Il lui manque de nombreux symboles comme des ligatures (« éÆ Ɠƒ »), des lettres capitales diacritĂ©es (« À ÉÈ Ù Ç ») et des symboles typographiques (par exemple les points de suspension « 
 », l’apostrophe courbe « ’ » et les guillemets français “«»”). Pourtant, l’évolution des systĂšmes d’information permet de gĂ©rer un nombre largement accru de symboles[note 3].

Une disposition plus complĂšte (dite « français variante ») a vu le jour sous Linux et permet de saisir l’ensemble des caractĂšres accentuĂ©s de la langue française et de la plupart des langues europĂ©ennes Ă  alphabet latin.

  • Disposition AZERTY sous Windows, et habillage de la plupart des claviers français.
    Disposition AZERTY sous Windows, et habillage de la plupart des claviers français.
  • Disposition AZERTY sous Mac
    Disposition AZERTY sous Mac, avec en bleu trÚs clair, les principaux caractÚres (non affichés sur le clavier), obtenus grùce à la touche "Option"
  • Disposition AZERTY sous Linux, dite « français variante ».
    Disposition AZERTY sous Linux, dite « français variante ».
  • Exemple de pilote tiers pour Windows : disposition « LiĂ©geois ».
    Exemple de pilote tiers pour Windows : disposition « Liégeois »[6].
  • Exemple de pilote tiers pour Windows : disposition « GalĂ©ron ».
    Exemple de pilote tiers pour Windows : disposition « Galéron »[7].
  • Exemple de pilote tiers pour Windows : disposition « Campi ».
    Exemple de pilote tiers pour Windows : disposition « Campi »[8].

Sous Windows, le pilote de clavier donne accĂšs Ă  des symboles supplĂ©mentaires via une mĂ©thode de saisie par numĂ©ro de caractĂšre : par exemple, la sĂ©quence de touches Alt + 0201 produit la lettre « É » dont le code est 201. Il n’est pas possible avec le pilote officiel d’obtenir autrement cette majuscule accentuĂ©e. En outre le comportement du verrouillage des majuscules est quelque peu surprenant puisque, lorsque les majuscules sont verrouillĂ©es, la touche Ă© ne produit pas « É » mais « 2 », ce qui est une source frĂ©quente de coquilles. Enfin, certaines combinaisons avec des touches mortes ne fonctionnent pas.

Mac et Linux ont un support plus complet des touches mortes, un comportement plus naturel pour le verrouillage des majuscules, et un accĂšs direct Ă  des symboles supplĂ©mentaires via des combinaisons de touches avec la touche Alt Gr. De plus, Linux au moins donne un accĂšs facile Ă  un nombre considĂ©rable de symboles grĂące Ă  une touche de composition (par exemple, presser successivement ⎄ Composeoe saisit « Ɠ », ⎄ Compose<< saisit le guillemet ouvrant “«”, ⎄ Compose<= saisit le symbole mathĂ©matique « ≀ »).

Pour Windows, de nombreux pilotes tiers, téléchargeables gratuitement, offrent tout ou partie de ces fonctionnalités[9] - [8] - [7] - [6] - [10] - [11].

À dĂ©faut d’un clavier suffisamment complet, certains logiciels de traitement de texte pallient les lacunes par leurs propres combinaisons de touches (par exemple Ctrl + , C pour entrer la lettre « Ç ») et par un mĂ©canisme d’autocorrection (par exemple « coeur » sera remplacĂ© par « cƓur » et « Etat » par « État »). Une autre astuce consiste Ă  utiliser les suggestions d’un correcteur orthographique pour insĂ©rer les caractĂšres difficiles Ă  saisir.

AZERTY de la norme AFNOR (2019)

Disposition AZERTY selon la norme NF Z71-300[5].
Clavier filaire 105 touches « AZERTY+ » du constructeur LDLC.

En 2019, l’Association française de normalisation (AFNOR) publie la norme NF Z71-300 qui dĂ©crit une nouvelle disposition AZERTY[12]. Celle-ci fait suite Ă  une suggestion du gouvernement français (dĂ©lĂ©gation gĂ©nĂ©rale Ă  la langue française et aux langues de France), qui envisageait alors de rendre la future norme obligatoire dans les marchĂ©s publics de l’administration[13] - [14].

Constatant les carences du clavier AZERTY communĂ©ment utilisĂ© en France (voir la section Critiques) et l’absence d’une norme officielle, les trois objectifs de cette norme sont :

  1. lutter contre la multiplication des variations d’AZERTY ;
  2. amĂ©liorer l’ergonomie de la saisie du français, par un placement plus judicieux des caractĂšres selon leur frĂ©quence ;
  3. complĂ©ter la prise en charge non seulement de la langue française, mais aussi des langues rĂ©gionales de France (occitan, catalan, breton, polynĂ©sien) et des autres langues europĂ©ennes Ă  alphabet latin (en premier lieu celles des pays les plus proches de la France : portugais, castillan, allemand, danois
) ; offrir (puisqu’il reste de la place) quelques symboles mathĂ©matiques supplĂ©mentaires[14] - [15].

La norme dĂ©crit deux dispositions pour claviers bureautiques (105 ou 72 touches) : une nouvelle variante d’AZERTY, et une version de la disposition ergonomique BÉPO[15]. Elle prĂ©cise l’ensemble des caractĂšres pris en charge, leur agencement et les symboles qui doivent figurer sur les touches physiques. Elle concerne donc tant les claviers physiques que leurs pilotes logiciels.

La nouvelle disposition AZERTY diffĂšre substantiellement du standard de fait en France : elle n’en conserve grosso modo que la disposition des 26 lettres latines de base. Les autres caractĂšres ont Ă©tĂ© placĂ©s sur le clavier par un algorithme d'optimisation prenant en compte la facilitĂ© d’accĂšs de chaque touche et la frĂ©quence de chaque caractĂšre, tout en s’efforçant de regrouper les caractĂšres graphiquement ou thĂ©matiquement proches[5]. C’est l’omniprĂ©sence d’AZERTY en France qui a motivĂ© de conserver son agencement de base, afin de garantir un certain degrĂ© de familiaritĂ© pour les utilisateurs et de faciliter la transition[15].

Des pilotes existent pour Windows, Linux et Mac[5].

AZERTY belge

En Belgique, l’AZERTY est la disposition de clavier la plus rĂ©pandue : le placement alphabĂ©tique est identique Ă  l’AZERTY français avec quelques variantes pour les caractĂšres typographiques :

  • premiĂšre rangĂ©e : § au lieu de - ; ! au lieu de _ ; _ au lieu de + et - au lieu de = ;
  • seconde rangĂ©e : * au lieu de ÂŁ ;
  • troisiĂšme rangĂ©e : ÂŁ au lieu de ” et ” au lieu de * ;
  • quatriĂšme rangĂ©e : + au lieu de § et = au lieu de !.

Le clavier AZERTY de disposition belge est utilisĂ© le plus couramment pour Ă©crire tant en français qu'en nĂ©erlandais. Sur la variante belge, l'accent aigu est directement accessible via AltGr + Ăč. Il est trĂšs occasionnellement utilisĂ© sur d'autres voyelles que le « e » en nĂ©erlandais (par exemple dans vóór).

  • Disposition AZERTY utilisĂ©e en Belgique - version Windows.
    Disposition AZERTY utilisée en Belgique - version Windows.
  • Disposition AZERTY utilisĂ©e en Belgique - version Linux (Ubuntu 9.10).
    Disposition AZERTY utilisée en Belgique - version Linux (Ubuntu 9.10).

Contrairement à la majorité des claviers sur le marché français, ceux vendus en Belgique ont leurs touches de contrÎle (« Entrée », « Majuscule », etc.) le plus souvent libellées en anglais ou avec des symboles, du fait du contexte bilingue.

Dispositions non-AZERTY employées dans les autres pays francophones

En Suisse romande, on utilise une disposition de touches germanique QWERTZ qui est une variante de la disposition allemande complétée des caractÚres accentués français. La disposition AZERTY y est exceptionnelle.

Au Luxembourg, la disposition QWERTZ suisse romande est aussi le clavier standard du Grand-Duché de Luxembourg sous Microsoft Windows, et est utilisée ubiquitairement dans le secteur public. Pourtant, les dispositions AZERTY belge et française sont également disponibles auprÚs de nombreux commerçants luxembourgeois et sont partiellement utilisées dans le secteur privé.

Le gouvernement provincial du QuĂ©bec et le gouvernement fĂ©dĂ©ral du Canada exigent l’utilisation du clavier CSA[note 4] (anciennement : ACNOR), c’est une disposition de clavier QWERTY modifiĂ©e pour la langue française[16] - [17] - [18]. Cependant, comparativement Ă  un clavier AZERTY europĂ©en, les claviers dits canadiens-français et canadiens-multilingues (il y a au moins 3 dispositions d’usage courant, dont celle de l’ACNOR) sont tous beaucoup plus proches du QWERTY amĂ©ricain : en effet, les lettres non accentuĂ©es, les chiffres et certains signes de ponctuation sont aux mĂȘmes emplacements que sur le QWERTY.

Dispositions apparentées

Machine Ă  Ă©crire Olympia pour le ViĂȘt Nam.

L’AZERTY a inspirĂ© la disposition lituanienne Ä„ĆœERTY (1992) et l’ancien clavier AĐERTY utilisĂ© sur des machines Ă  Ă©crire destinĂ©es au marchĂ© vietnamien. Cette disposition Ă©tait une adaptation de l’AZERTY utilisĂ©e par les Français. De nos jours, les ordinateurs vietnamiens sont commercialisĂ©s avec un clavier QWERTY.

Critiques

AZERTY et ses variantes, particuliĂšrement la variante de Windows pour la France, essuient de nombreuses critiques.

Ergonomie

AZERTY agence les symboles d’une façon peu Ă©tudiĂ©e pour l’ergonomie de la saisie en français. Ainsi, des emplacements faciles d’accĂšs sont attribuĂ©s Ă  des lettres rares en français, comme « Q », « K », « Ăč » (qui n’apparaĂźt que dans un seul mot de la langue française, « oĂč ») et mĂȘme la lettre grecque « ” » (qui ne sert essentiellement que pour noter le prĂ©fixe d’unitĂ©s micro). Au contraire, le point « . » n'est accessible qu’avec une combinaison de touches. Les parenthĂšses et crochets ouvrants sont (curieusement) trĂšs Ă©loignĂ©s de leurs pendants fermants.

L’absence d’ergonomie vient du fait que l’arrangement AZERTY dĂ©rive du QWERTY, qui lui-mĂȘme est conçu non pas pour optimiser la saisie de la langue anglaise — française encore moins — mais pour pallier les contraintes mĂ©caniques des premiĂšres machines Ă  Ă©crire. L’histoire de la mise au point de l’AZERTY est obscure mais il est clair qu’il n’a pas Ă©tĂ© pensĂ© pour la langue française. La longue succession alphabĂ©tique de consonnes dans la rangĂ©e centrale (« 
DFGHJKLM ») indique que le placement des lettres n’a pas fait l’objet d’une optimisation globale et que seules certaines lettres ont Ă©tĂ© placĂ©es de façon rĂ©flĂ©chie.

Alors que la rangĂ©e de repos, la rangĂ©e centrale du clavier, est la plus facile d’accĂšs et constitue donc la clĂ© d’une frappe efficace (Ă  l’aveugle, Ă  dix doigts), cette rangĂ©e n’est utilisĂ©e en français que pour un quart des frappes, contre plus des deux tiers dans le cas d’une disposition de type Dvorak telle que le BÉPO[19]. De plus, AZERTY n’encourage pas l'alternance des mains puisque, sur un texte en langue française, 32 % des frappes sont suivies par une frappe avec la mĂȘme main, quand BÉPO ramĂšne ce taux Ă  19 %[19]. Enfin, AZERTY mobilise les deux mains de façon inĂ©gale : prĂšs de 59 % des frappes sont faites de la main gauche et 41 % de la main droite, lĂ  oĂč BÉPO rĂ©alise une rĂ©partition proche de 50 % / 50 %[19].

Cela s’explique par l’observation que l’écriture du français — et de nombreuses autres langues — alterne consonnes et voyelles tandis que la rangĂ©e de repos AZERTY ne contient que des consonnes, et pas des plus courantes. La rangĂ©e centrale ne permet donc guĂšre plus que saisir des abrĂ©viations de deux lettres (par exemple kg, km, dl). Au contraire, les dispositions inspirĂ©es des idĂ©es d’August Dvorak placent les voyelles sur un cĂŽtĂ© de la rangĂ©e de repos et les consonnes frĂ©quentes sur l’autre cĂŽtĂ©, ce qui permet la saisie de nombreux mots longs sans dĂ©placer les mains (confort) et favorise l’alternance des mains (vitesse).

À ces dĂ©fauts fondamentaux s’ajoutent des dĂ©fauts plus pratiques. Les lettres diacritĂ©es du français n’ayant pas Ă©tĂ© intĂ©grĂ©es dĂšs le dĂ©but dans la conception d’AZERTY, leur prise en charge est moins qu’idĂ©ale, en particulier concernant les majuscules diacritĂ©es. Par exemple, sous Windows, la touche de verrouillage des majuscules Verr Maj est peu commode car elle verrouille toutes les touches et pas seulement les touches alphabĂ©tiques ; ainsi, lorsqu’elle est activĂ©e, presser Ă© produit « 2 » et non « É ».

Lacunes

Pire, certains caractĂšres indispensables au français sont difficiles ou impossibles Ă  saisir sous Windows, comme les capitales diacritĂ©es « À É È Ù Ćž Ç » (toutefois « À É È Ù » peuvent ĂȘtre saisis avec l’AZERTY belge, le QWERTZ suisse ou le QWERTY canadien), les ligatures « éÆ Ɠƒ », ainsi que les guillemets français “«»”. De mĂȘme, il manque des caractĂšres nĂ©cessaires Ă  plusieurs langues parlĂ©es en France (occitan, catalan, breton, polynĂ©sien) et en Europe (portugais, castillan, allemand, nĂ©erlandais, espĂ©ranto
). Des extensions d’AZERTY comme celle de Linux ajoutent ces caractĂšres dans les emplacements libres, via la touche Alt Gr, ce qui n’est pas idĂ©al.

Alternatives

Plusieurs dispositions concurrentes ont vu le jour pour tenter de remplacer la disposition AZERTY, et sont conçues spécifiquement pour la saisie de la langue française (étude de corpus, analyse fréquentielle, accessibilité des touches, etc.) :

  • la disposition ZHJAY, proposĂ©e en 1907 ;
  • la disposition de Claude Marsan, en 1976 ;
  • le Dvorak-fr, en 2002 ;
  • le bĂ©po, depuis 2005, qui dispose maintenant d’une reconnaissance commerciale et a Ă©tĂ© normalisĂ© par l’AFNOR en 2019 en mĂȘme temps qu’un « AZERTY amĂ©liorĂ© ».

Ces dispositions restent cependant marginales : les habitudes liĂ©es Ă  l’utilisation massive des claviers AZERTY sont en majoritĂ© la cause de ces Ă©checs.

Notes et références

Notes

  1. Certains pilotes comme ceux de Linux permettent les combinaisons « Ʒƶ Ćž », ce n’est pas le cas du pilote Windows car ces symboles sont absents du jeu de caractĂšres latin-1.
  2. LĂ  encore, des combinaisons supplĂ©mentaires sont possibles mais ne sont pas supportĂ©es par Windows : « áșœáșŒ Ä©Äš Ć©Ćš ỳá»Č á»čỞ ».
  3. D’une part grĂące au dĂ©veloppement de jeux de caractĂšres de plus en complets, aboutissant Ă  Unicode ; d’autre part car l’emploi de touches modificatrices et de touches mortes dĂ©cuple les combinaisons possibles.
  4. Ou clavier multilingue normalisé CAN/CSA Z243.200-92.

Références

  1. (en) Darryl Rehr, « Why QWERTY was Invented », 1998 (consulté le ).
  2. (en) Henri-Jean Martin, The history and power of writing, University of Chicago Press, 1995, 608 pages (ISBN 978-0-226-50836-8).
  3. Delphine Gardey, « La standardisation d’une pratique technique : La dactylographie (1883-1930) », RĂ©seaux, CNET, vol. 16, no 87 « Les claviers »,‎ , p. 80-85 (ISSN 0751-7971, lire en ligne).
  4. Le clavier bureautique et informatique, rapport remis au ministĂšre du RedĂ©ploiement industriel et du commerce extĂ©rieur et Ă  l’Agence nationale pour l’amĂ©lioration des conditions de travail, Cedic, 1985.
  5. Anna Maria Feit, Mathieu Nancel, Maximilian John, Andreas Karrenbauer, Daryl Weir et Antti Oulasvirta, « Le nouvel AZERTY : La science derriÚre la nouvelle norme de clavier français » (consulté le ).
  6. Denis LiĂ©geois, « Pilote de clavier français enrichi pour Microsoft Windows »(Archive.org ‱ Wikiwix ‱ Archive.is ‱ Google ‱ Que faire ?), (consultĂ© le ).
  7. Gilbert Galéron, « Clavier Galéron », (consulté le ).
  8. Pierre Campiglia, « Clavier étendu « fr-campi » » (consulté le ).
  9. Sam Hocevar, « WinCompose », sur GitHub (consulté le ).
  10. elrick1964, « Clavier français enrichi pour Windows », sur SourceForge.net (consulté le ).
  11. Skrol29, « MAEL 2.2 : Majuscules Accentuées Et Ligatures » (consulté le ).
  12. AFNOR, « Norme NF Z71-300 : Interfaces utilisateurs - Dispositions de clavier bureautique français », (consulté le ).
  13. DGLFLF, « Rapport au Parlement sur l’emploi de la langue française » [PDF], sur MinistĂšre de la Culture, (consultĂ© le ), p. 52 (chapitre « II. Vers une norme française pour les claviers informatiques »).
  14. DGLFLF, « Vers une norme française pour les claviers informatiques » [PDF], sur MinistÚre de la Culture, (consulté le ).
  15. AFNOR, « Une norme volontaire pour faciliter l’écriture du français » [PDF] (communiquĂ© de presse), (consultĂ© le ).
  16. Office québécois de la langue française, Le clavier de votre ordinateur est-il normalisé?.
  17. Services gouvernementaux du Québec, Standard sur le clavier québécois.
  18. Alain LaBonté, 2001, FAQ. La démystification du clavier québécois (norme CAN/CSA Z243.200-92).
  19. les contributeurs du projet BÉPO, « Dossier de presse normalisation », sur bepo.fr, (consultĂ© le ).

Voir aussi

Articles connexes

Liens externes

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