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1984 (roman)

1984 (Nineteen Eighty-Four en anglais) est le plus célÚbre roman de George Orwell, publié en 1949.

1984
Image illustrative de l’article 1984 (roman)
Représentation du ministÚre de la Vérité (Miniver en novlangue).

Auteur George Orwell
Pays Drapeau du Royaume-Uni Royaume-Uni
Genre Roman dystopique
Version originale
Langue Anglais britannique
Titre Nineteen Eighty-Four
Éditeur Secker and Warburg
Date de parution
ISBN 0452284236
Version française
Traducteur Amélie Audiberti
Éditeur Gallimard
Collection Du monde entier
Date de parution 1950
Couverture Georges Rohner
Nombre de pages 376
ISBN 2-07-036822-X

Il dĂ©crit une Grande-Bretagne trente ans aprĂšs une guerre nuclĂ©aire entre l'Est et l'Ouest censĂ©e avoir eu lieu dans les annĂ©es 1950 et oĂč s'est instaurĂ© un rĂ©gime totalitaire fortement inspirĂ© Ă  la fois de certains Ă©lĂ©ments du stalinisme et du nazisme[1] - [2]. La libertĂ© d'expression n'existe plus ; tous les comportements sont minutieusement surveillĂ©s grĂące Ă  des machines appelĂ©es « tĂ©lĂ©crans » et d'immenses affiches reprĂ©sentant le visage de « Big Brother » sont placardĂ©es dans les rues, avec l'inscription « Big Brother vous regarde » (« Big Brother is watching you »).

1984 est communĂ©ment considĂ©rĂ© comme une rĂ©fĂ©rence du roman d'anticipation, de la dystopie, voire de la science-fiction en gĂ©nĂ©ral. Il a Ă©galement servi d'inspiration ou de base Ă  de trĂšs nombreuses Ɠuvres tel que V pour Vendetta. La principale figure du roman, Big Brother, est devenue une figure mĂ©taphorique du rĂ©gime policier et totalitaire, de la sociĂ©tĂ© de la surveillance, ainsi que de la rĂ©duction des libertĂ©s.

Il figure Ă  la treiziĂšme place dans la liste des cent meilleurs romans de langue anglaise du XXe siĂšcle Ă©tablie par la Modern Library en 1998[3]. En 2005, le magazine Time l'a Ă©galement classĂ© dans sa liste des cent meilleurs romans et nouvelles de langue anglaise de 1923 Ă  nos jours, liste oĂč se trouve La Ferme des animaux, autre fameux roman d'Orwell[4].

Résumé

Le monde en 1984 selon George Orwell[5]. Le territoire contrÎlé par l'Océania est représenté en rose, le territoire d'Eurasia est en mauve et celui d'Estasia en vert. Les territoires en jaune sont ceux qui sont revendiqués par les trois puissances.

Le résumé qui suit utilise les noms et expressions proposés par Amélie Audiberti, premiÚre traductrice en France du roman.

L’histoire se dĂ©roule Ă  Londres en 1984, comme l'indique le titre du roman. Le monde, depuis les grandes guerres nuclĂ©aires des annĂ©es 1950, est divisĂ© en trois grands blocs gĂ©opolitiques : l’OcĂ©ania (AmĂ©riques, Ăźles de l'Atlantique, comprenant notamment les Ăźles Britanniques, OcĂ©anie et Afrique australe), l’Eurasia (reste de l'Europe et URSS) et l’Estasia (Chine et ses contrĂ©es mĂ©ridionales, Ăźles du Japon, et une portion importante mais variable de la Mongolie, de la Mandchourie, de l'Inde et du Tibet[6]) qui sont en guerre perpĂ©tuelle les uns contre les autres. Ces trois grandes puissances sont dirigĂ©es par diffĂ©rents rĂ©gimes totalitaires revendiquĂ©s comme tels, et s'appuyant sur des idĂ©ologies nommĂ©es diffĂ©remment mais fondamentalement similaires : l’Angsoc (ou « socialisme anglais ») pour l'OcĂ©ania, le « nĂ©o-bolchĂ©visme » pour l'Eurasia et le « culte de la mort » (ou « oblitĂ©ration du moi ») pour l'Estasia. Tous ces partis sont prĂ©sentĂ©s comme communistes avant leur montĂ©e au pouvoir, jusqu'Ă  ce qu'ils deviennent des rĂ©gimes totalitaires et relĂšguent les prolĂ©taires qu'ils prĂ©tendaient dĂ©fendre au bas de la pyramide sociale. Les trois rĂ©gimes sont prĂ©sentĂ©s comme Ă©tant socialement, Ă©conomiquement et idĂ©ologiquement sensiblement les mĂȘmes.

À cĂŽtĂ© de ces trois blocs subsiste une sorte de « quart-monde », dont le territoire ressemble approximativement Ă  un parallĂ©logramme ayant pour sommets Tanger, Brazzaville, Darwin et Hong Kong. C'est le contrĂŽle de ce territoire, ainsi que celui de l'Antarctique, qui justifie officiellement la guerre perpĂ©tuelle entre les trois blocs[7].

Winston Smith

Winston Smith, 39 ans, habitant de Londres en OcĂ©ania, est un employĂ© du Parti extĂ©rieur, c'est-Ă -dire un membre de la « caste » intermĂ©diaire du rĂ©gime ocĂ©anien, l'Angsoc (mot novlangue pour « Socialisme anglais »). Winston officie au ministĂšre de la VĂ©ritĂ©, ou Miniver en novlangue. Son travail consiste Ă  remanier les archives historiques afin de faire correspondre le passĂ© Ă  la version officielle du Parti. Ainsi, lorsque l'OcĂ©ania dĂ©clare la guerre Ă  l'Estasia alors qu'elle Ă©tait en paix deux jours avant avec cet État, les autres membres du ministĂšre de la VĂ©ritĂ©, notamment ceux du commissariat des archives (« Commarch » en novlangue) oĂč travaille Winston, doivent veiller Ă  ce que plus aucune trace Ă©crite n'existe de l'ancienne alliance avec Estasia.

Toutefois, contrairement Ă  la majeure partie de la population, Winston ne rĂ©ussit point Ă  pratiquer cette amnĂ©sie sĂ©lective et ne peut donc adhĂ©rer aux mensonges du Parti. Il prend alors conscience qu'il n'a pas de pensĂ©es aussi orthodoxes qu’il devrait en avoir aux yeux du Parti. Susceptible d'ĂȘtre traquĂ© par la police de la PensĂ©e, une redoutable organisation de rĂ©pression, il dissimule ses opinions contestataires aux yeux de ses collĂšgues de travail. Le roman s'ouvre sur les projets d'Ă©criture de Winston ; il dĂ©sire en effet garder une trace Ă©crite et donc fixe du passĂ©, en opposition Ă  la propagande de l'OcĂ©ania. La tĂ©nuitĂ© des possibilitĂ©s de rĂ©bellion apparaĂźt rapidement ; la simple rĂ©daction de son journal n'est possible Ă  Winston que grĂące Ă  une singularitĂ© dans le plan de son appartement qui permet d'Ă©chapper au regard omniprĂ©sent du tĂ©lĂ©cran, sorte d'Ă©cran installĂ© dans chaque foyer qui sert Ă  la diffusion continue de la propagande du gouvernement et Ă  voir et entendre ce qui se passe chez les gens.

Winston Smith servira Ă©galement de prĂ©texte dans la suite du roman pour exposer la sociĂ©tĂ© totalitaire qui l'entoure, les hommes qui y collaborent et ses ressorts les plus impitoyables. On verra ainsi exposĂ©es au fur et Ă  mesure de ses rencontres le mĂ©pris de l'amour et de la sensualitĂ© par l'ensemble de la sociĂ©tĂ© — avec l'exemple notable de l'ex-femme de Winston, Catherine — ou encore une prĂ©sentation de la destruction de la langue par un des artisans enthousiastes de cette entreprise. La dĂ©lation dans la famille et mĂȘme le refoulement gĂ©nĂ©ralisĂ© des membres les plus dĂ©vouĂ©s Ă  la sociĂ©tĂ© qui finissent par prononcer dans leur sommeil ce qu'ils n'osent prononcer de jour seront abordĂ©s au cours du roman.

Rencontre avec Julia

Lors des Deux Minutes de la Haine, moment rituel de la journĂ©e pendant lequel le visage de l’« ennemi » de l’Angsoc, Emmanuel Goldstein, est diffusĂ© sur des Ă©crans, Winston croise Julia, une jeune femme du commissariat aux romans, membre de la « Ligue anti-sexe des juniors », d’apparence particuliĂšrement disciplinĂ©e. Il la hait, pensant qu’elle est une espionne de la police de la PensĂ©e. Plus tard, elle lui remet discrĂštement un papier oĂč est Ă©crit : « Je vous aime. »

Ils se frĂ©quentent, font l’amour clandestinement dans une mansarde louĂ©e dans le quartier des prolĂ©taires. Ils savent qu’ils seront condamnĂ©s, que tĂŽt ou tard ils devront payer le prix de tous ces crimes envers le Parti. Ils rĂȘvent cependant d’un soulĂšvement, croient au mythe d’une FraternitĂ© (en) clandestine qui unirait les rĂ©fractaires. C’est pourquoi ils prennent contact avec O’Brien, personnage intelligent et charismatique, membre du Parti intĂ©rieur, dont Winston a l’intime conviction qu’il est membre de la FraternitĂ©.

O’Brien leur fait parvenir « Le Livre » de Goldstein, l’ennemi du peuple et du Parti, objet de la haine et de la peur la plus intense en OcĂ©ania. Y sont expliquĂ©s tous les tenants et aboutissants du systĂšme et des manipulations psychologiques mises en place en OcĂ©ania.

« Le Livre » de Goldstein explique notamment qu’une rĂ©volution ne peut rĂ©ussir que si une classe moyenne peut remplacer la classe dirigeante. Cela explique que le Parti intĂ©rieur (classe dirigeante) surveille tout particuliĂšrement le Parti extĂ©rieur (classe moyenne). Prolongeant sa fable La Ferme des animaux, c’est une vĂ©ritable thĂ©orie des rĂ©volutions qu’Orwell expose, en prĂ©sentant dans 1984 son contraire et corollaire : les techniques utilisĂ©es pour empĂȘcher toute rĂ©volution[8].

Arrestation

Un aprĂšs midi, avant qu’ils passent Ă  l’acte, Winston et Julia sont arrĂȘtĂ©s par la police de la PensĂ©e et amenĂ©s au ministĂšre de l’Amour (M. Charrington, qui louait une chambre Ă  Winston et Julia, y avait cachĂ© un tĂ©lĂ©cran derriĂšre un tableau). Winston y retrouve O'Brien lui-mĂȘme, qui n’a en fait jamais Ă©tĂ© membre de la FraternitĂ© (en), bien au contraire, car il est justement chargĂ© de traquer les « criminels par la pensĂ©e ». O'Brien lui apprend que Winston Ă©tait repĂ©rĂ© comme peu fiable bien avant que lui-mĂȘme n’en prenne conscience (sept ans plus tĂŽt) [9].

Sa rĂ©intĂ©gration comporte trois stades : Ă©tudier, comprendre et accepter. Winston se fait torturer et humilier pendant des jours et des semaines, voire des mois (la notion du temps n’est pas trĂšs bien prĂ©cisĂ©e Ă  ce moment de l’histoire car Winston n’a aucun instrument auquel se fier pour mesurer le temps), jusqu’à ce qu’il perde toutes ses convictions morales et soit prĂȘt Ă  accepter sincĂšrement n’importe quelle vĂ©ritĂ©, aussi contradictoire soit-elle (2 et 2 font 5, Winston n’existe pas en rĂ©alité ), pourvu qu’elle Ă©mane du Parti[10].

Sa « rééducation » se finit lorsque confronté à sa phobie la plus forte (les rats), il trahit et renie Julia[11].

En effet, le but du Parti est d’épurer toutes les pensĂ©es qui lui sont gĂȘnantes avant d’exĂ©cuter ceux qui les ont Ă©mises afin d’éliminer ce que Winston appelle « la nature humaine ». La loyautĂ© de Winston envers Julia Ă©tait la derniĂšre chose qui allait contre les idĂ©es du Parti, c’était donc l’étape finale logique de sa « rĂ©Ă©ducation ».

On apprend enfin que le « Livre » de Goldstein est en vĂ©ritĂ© une crĂ©ation du Parti intĂ©rieur, qui est Ă  l’origine du rĂ©gime de l’OcĂ©ania, et qu'Emmanuel Goldstein est une figure allĂ©gorique au mĂȘme titre que Big Brother ; ce qui y est Ă©crit n’en reste pas moins vrai d’aprĂšs les paroles d’O'Brien, donnant une dimension terrifiante Ă  ce monde.

Échec de Winston

Relùché, Winston n'est plus qu'une épave vide de sentiments et de dignité, passant sa vie au bistrot. Il semble toutefois bénéficier d'un certain confort matériel et d'un travail nettement moins exigeant que celui qu'il avait avant son arrestation[12]. Par hasard, il revoit Julia qui, elle aussi, l'a renié sous la torture. Cette trahison mutuelle a rompu leur attachement[13].

Pendant la guerre nécessaire et incessante qui oppose les trois blocs totalitaires, la propagande prétend qu'une « nouvelle brillante victoire » aurait retourné magistralement une situation trÚs compromise. Il devient alors un admirateur béat de Big Brother. Il mourra probablement exécuté d'une balle dans la nuque, comme le sont tous les criminels de la pensée une fois leur « folie » expurgée[14], bien que ne soit pas explicitement dit dans le roman (on ne sait pas de quelle façon Winston Smith meurt à la fin).

Personnages

Relation entre les personnages


Inspiration

George Orwell a indiqué que 1984 s'inspirait d'un ouvrage de l'écrivain russe Evgueni Zamiatine intitulé Nous autres (ou Nous selon les traductions) et paru en 1920. Lui aussi donne la description d'une dystopie totalitaire. En 1946, George Orwell avait publié une critique de Nous autres dans la presse, estimant notamment que ce roman avait influencé Le Meilleur des mondes d'Aldous Huxley, influence qu'Huxley n'a pas reconnue[15] - [16].

1984 emprunte Ă  Nous autres son intrigue et ses personnages. Ainsi, dans Nous autres, un homme vivant dans une sociĂ©tĂ© totalitaire va se rĂ©volter. Il est soutenu dans cette rĂ©bellion par une femme ayant une libertĂ© politique et sexuelle identiques Ă  ce qui existait avant l'avĂšnement de l'ordre totalitaire. Les deux se font prendre et torturer, physiquement et psychologiquement. Finalement, l'homme devient aimant vis-Ă -vis de l’État oppresseur et dĂ©savoue son engagement rĂ©volutionnaire, trahissant ses compagnons de combat. Les diffĂ©rences sont minimes : dans Nous autres, les hĂ©ros sont nommĂ©s par des matricules, et les moyens de surveillance ne sont pas des Ă©crans : les immeubles sont en verre, ce qui permet de suivre ce qui s'y passe[16] - [17].

Paul Owen du Guardian estime que Nous autres gĂąche son intrigue avec des sauts confus dans le temps et l'espace, et que 1984 est une oeuvre supĂ©rieure. D'ailleurs, l'impact culturel de 1984 a Ă©tĂ© reconnu presque immĂ©diatement par l'attribution du prix « Partisan Review ». Et les idĂ©es de 1984 qui sont entrĂ©es dans la culture sont celles de George Orwell : la rĂ©Ă©criture de l'histoire, la novlangue, l'utilisation extrĂȘme de la propagande, de la censure et de la surveillance, les slogans qui signifient le contraire de ce qu'ils disent, la double pensĂ©e, le crime de la pensĂ©e, la police de la pensĂ©e, etc. L'adjectif « orwellien » est ainsi rentrĂ© dans le langage courant pour dĂ©noncer des dĂ©rives de ce type. Paul Owen note par ailleurs que le ton pessimiste de 1984 est aussi la marque de George Orwell. Paul Owen juge que le style de 1984 fait preuve d'une maĂźtrise experte, avec des rebondissements sophistiquĂ©s et convaincants, mais Owen rend Ă©galement hommage Ă  Nous autres : sa conclusion, la capitulation du hĂ©ros, est selon lui « puissante ». Elle est reprise par Orwell, qui change simplement le sort de l'hĂ©roĂŻne : celle-ci capitule Ă©galement, alors que l'hĂ©roĂŻne de Nous autres garde ses convictions[17].

L'Obs ajoute que Nous autres restreint sa critique Ă  la rĂ©volution russe, tandis que 1984 remet en cause tous les totalitarismes, « une parabole bien plus ambitieuse et profonde »[16]. Pierre Ropert de France culture estime que 1984 ne peut ĂȘtre considĂ©rĂ© comme un plagiat de Nous autres : le style littĂ©raire n'a « rien Ă  voir » et Orwell « pousse bien plus loin la rĂ©flexion »[15].

George Orwell s'est également inspiré de La Kallocaïne[18], dystopie de la Suédoise Karin Boye, publié en 1940, qui pose le problÚme de la confiance, de la délation et de la trahison des proches dans un régime totalitaire.

Contexte

Parabole du despotisme moderne, conte philosophique sur le pire XXe siÚcle, le totalitarisme orwellien est clairement inspiré du nazisme, du fascisme et du stalinisme, avec le parti unique, le chef tutélaire objet d'un culte de la personnalité, un régime d'assemblée, la confusion des pouvoirs, des plans de productions triennaux, un militarisme de patronage, des parades et manifestations « spontanées », des files d'attente, des slogans, des camps de rééducation, des confessions publiques « à la moscovite » et des affiches géantes[19].

Orwell a lui-mĂȘme prĂ©cisĂ© le sens de son message : « Faites en sorte que cela ne se produise pas. Cela dĂ©pend de vous. »[20]

Orwell Ă©tait et restait un homme de gauche d'une absolue sincĂ©ritĂ©. Avant 1984, il avait par exemple publiĂ© sur les foyers ouvriers misĂ©rables dans le Yorkshire ou les chĂŽmeurs de Middlesbrough (Le Quai de Wigan). Il avait Ă©galement Ă©tĂ© adhĂ©rent du Parti travailliste indĂ©pendant, parti « socialiste de gauche » et Ă©tait proche des marxistes (il combat dans les milices rĂ©volutionnaires du POUM pendant la guerre civile espagnole). Mais c'Ă©tait un socialiste « de terrain ». Si la droite conservatrice Ă©tait Ă©videmment son adversaire politique, il Ă©tait fort exigeant Ă  l'Ă©gard de la gauche. Il l'avait ainsi cruellement raillĂ© dans un de ses premiers romans (Et vive l'Aspidistra !, Ă  travers le personnage ridicule de Ravelston) une certaine « gauche » fort loin de la rĂ©alitĂ© sociale et matĂ©rielle du monde ouvrier. Il craignait autant la « gauche morale » satisfaite, qu'il soupçonnait de faire le lit du totalitarisme (Ă  travers le confĂ©rencier « anti-Hitler » ridicule de Un peu d'air frais) dĂšs 1938. Enfin, il dĂ©testait certains communistes, a fortiori « de salon », et mĂ©prisait par exemple Jean-Paul Sartre[21]. La misĂšre matĂ©rielle restait pour lui la misĂšre matĂ©rielle, que le « Parti » soit au pouvoir ou que ce soient les « capitalistes ». Il n'y a aucun doute donc, contrairement Ă  ce que l'on croit parfois, sur ses convictions socialistes trĂšs profondĂ©ment anti-autoritaires[22], et Orwell acceptait mal d'ĂȘtre rĂ©cupĂ©rĂ© par la droite, ce qui a Ă©tĂ© surtout le fait de l'accueil nord-amĂ©ricain de 1984.

Certaines autres particularitĂ©s de la dĂ©coupe du Monde dans 1984 sont Ă©galement un reflet des inquiĂ©tudes d'Orwell. Ainsi dans le roman, les États-Unis sont censĂ©s faire eux aussi partie de l'OcĂ©ania (qui regroupe en fait les pays anglo-saxons - voir carte). Orwell voyait dans les États-Unis, un peu Ă  la maniĂšre des Temps modernes de Chaplin, la quintessence du monde moderne techno-maniaque qui est aussi l'un des avertissements de 1984.

Enfin, la thÚse qu'Orwell expose à travers le manifeste du « traßtre » Emmanuel Goldstein (Théorie et pratique du collectivisme oligarchique) suppose que le pouvoir peut employer la misÚre à des fins politiques : Goldstein attribue les pénuries sévissant sous l'« Angsoc » à une stratégie délibérée du pouvoir plutÎt qu'à un échec économique.

Certains intellectuels ayant connu le rĂ©gime stalinien, comme Czeslaw Milosz, s'accordent pour saluer l'Ă©tonnante intuition orwellienne des mĂ©canismes politiques et psychologiques du totalitarisme quand bien mĂȘme Orwell ne l'a pas connu[23]. Cependant, Alexandre Zinoviev affirme qu'Orwell « s'est trompĂ© »[23] et que « le tableau dĂ©peint est faux »[24] : « en rĂ©alitĂ©, Orwell n’a pas prĂ©dit la sociĂ©tĂ© post-capitaliste future, mais simplement exprimĂ© comme nul ne l’avait fait auparavant la peur qu’a l’Occident du communisme. »[24]

ThĂšmes

Certains concepts inventés par Orwell (Big Brother, Police de la Pensée, novlangue) sont devenus des archétypes, qui font quasiment partie, désormais, de la nomenclature du jargon des sciences politiques.

Trucage de l’Histoire et propagande

Le Parti a la mainmise sur les archives et fait accepter sa propre vĂ©ritĂ© historique en la truquant. L'Histoire est donc rĂ©Ă©crite en fonction des fluctuations des intĂ©rĂȘts du Parti et en Ă©pouse parfaitement l'idĂ©ologie[25]. C'est le principe de la « mutabilitĂ© du passĂ© » car « qui dĂ©tient le passĂ© dĂ©tient l’avenir ». Le Parti pratique la dĂ©sinformation et le lavage de cerveau pour asseoir sa domination. Il fait aussi disparaĂźtre des personnes qui lui deviennent trop encombrantes et modifie leur passĂ©, ou les fait passer, faux tĂ©moignages des intĂ©ressĂ©s Ă  l'appui, pour des traĂźtres, des espions ou des saboteurs.

Un positionnement rĂ©ellement philosophique soutient l'action du Parti : la thĂ©orie du Parti est que le passĂ© n'existe pas en soi. Il n'est qu'un souvenir dans les esprits humains. Le monde n'existe qu'Ă  travers la pensĂ©e humaine et n'a pas de rĂ©alitĂ© absolue. Ainsi, si Winston est le seul homme Ă  se souvenir que l'OcĂ©ania a Ă©tĂ© une semaine plus tĂŽt en guerre contre l'Eurasia et non contre l'Estasia, c'est lui qui est fou et non les autres. MĂȘme si le fait est objectivement rĂ©el, il n'existe (dans le sens qu'il n'a de consĂ©quences) que dans la mĂ©moire de Winston.

Le Parti impose une gymnastique de l'esprit aux hommes (appelée « doublepensée » en novlangue) : il faut assimiler tous les faits que le Parti leur jette, et surtout oublier qu'il en a été autrement. Et de plus, il faut oublier le fait d'avoir oublié.

Pour le philosophe français Jean-Jacques Rosat, « la leçon philosophique et politique de 1984, c'est que la liberté et la démocratie sont incompatibles avec le relativisme et le constructivisme généralisés »[26].

Le camarade Ogilvy

Winston Smith, qui travaille au ministÚre de la Vérité d'Océania, doit supprimer de toute urgence un article du journal édité par le ministÚre et le remplacer par un autre article.

Pour créer son article, il invente alors de toutes piÚces un héros mythique, le camarade Ogilvy, homme du peuple censé avoir été, depuis son enfance et jusqu'à sa mort tragique à la guerre, le digne représentant du Parti intérieur, qui dirige la société. Winston lui attribue une vie exemplaire et le fait mourir en se sacrifiant héroïquement au combat.

Pour rédiger l'épisode de son roman, Orwell s'est inspiré des propagandes stalinienne et hitlérienne des années 1930, qui glorifiaient de maniÚre récurrente des « héros du peuple » donnés comme symboles idéologique et modÚles à suivre.

Orwell s'est notamment inspiré du roman Le Lieutenant Kijé de Iouri Tynianov (1927), racontant comment un homme qui n'existait pas, en l'occurrence le lieutenant Kijé, créé par suite d'une erreur de plume d'un bureaucrate du tsar, a eu une carriÚre fort honorable jusqu'à devenir général.

Big Brother et télécrans

Au domicile et sur les lieux de travail des membres du Parti, ainsi que dans les lieux publics, sont disposĂ©s des « tĂ©lĂ©crans », systĂšme de vidĂ©osurveillance et simultanĂ©ment de tĂ©lĂ©vision, qui diffusent en permanence les messages du Parti. Les tĂ©lĂ©crans permettent Ă  la police de la PensĂ©e d’entendre et de voir ce qui se fait dans chaque piĂšce ; seuls les membres du Parti intĂ©rieur peuvent arrĂȘter le tĂ©lĂ©cran qui se trouve Ă  leur domicile pendant une courte pĂ©riode. On peut rapprocher le tĂ©lĂ©cran des Ă©crans gĂ©ants de tĂ©lĂ©vision interactive qui peuplent les murs des maisons dans Fahrenheit 451 de Ray Bradbury (1953). AllumĂ©s en permanence, ils abrutissent la population par des Ă©missions en faveur du Parti (information, chants
). Les pompiers pyromanes sont d'ailleurs chargĂ©s de brĂ»ler les livres allant Ă  l'encontre des idĂ©es du Parti et de pourchasser les asociaux.

ReprĂ©sentation de Big Brother avec l'ƒil rouge symbolisant HAL9000.

Orwell a, si l'on peut dire, manifestement intĂ©grĂ© Ă  son rĂ©cit une innovation qui faisait dĂ©bat Ă  l'Ă©poque : la tĂ©lĂ©vision, dont le nom Ă©tait en lui-mĂȘme tout un programme. La confusion entre rĂ©cepteur et camĂ©ra Ă©tait, en outre, une inquiĂ©tude rĂ©pandue aux dĂ©buts de la tĂ©lĂ©vision, certaines des rares personnes Ă©quipĂ©es se croyant surveillĂ©es par l'appareil. Une trace de cette angoisse se voit dans Les Temps modernes de Charlie Chaplin : Charlot est rappelĂ© Ă  l'ordre par l'Ă©cran gĂ©ant oĂč apparaĂźt son patron, qui le « voit » Ă  travers et le suit des yeux. On peut encore dĂ©celer un Ă©cho de cette idĂ©e dans 2001 : l'OdyssĂ©e de l'espace, de Stanley Kubrick, oĂč l'ordinateur HAL 9000 surveille en permanence le vaisseau spatial et ses passagers par ses innombrables et inquiĂ©tants objectifs de camĂ©ra rougeĂątres. Les habitants de la terrifiante ville souterraine de THX 1138, de George Lucas, sont Ă©galement surveillĂ©s en permanence dans leurs moindres faits et gestes.

Par ailleurs, afin de pouvoir exercer un contrĂŽle continuel au sein des familles mĂȘmes, les enfants sont endoctrinĂ©s trĂšs jeunes et encouragĂ©s Ă  dĂ©noncer leurs parents au moindre symptĂŽme de « manque d'orthodoxie ». Ici, Orwell fait Ă©cho Ă  une pratique qui a existĂ© dans le systĂšme soviĂ©tique (il avait crĂ©Ă© un culte national autour du jeune mouchard Pavel Morozov), et anticipe avec une Ă©tonnante prescience sur la rĂ©volution culturelle maoĂŻste, oĂč les jeunes Gardes rouges Ă©taient dressĂ©s Ă  dĂ©noncer publiquement parents, voisins et enseignants[27].

Bouc Ă©missaire et manifestations de haine collective

L’ensemble des maux qui frappent la sociĂ©tĂ© est attribuĂ© Ă  un opposant, le « TraĂźtre Emmanuel Goldstein », dont le nom et la description physique ressemblent beaucoup Ă  Lev Davidovitch Bronstein alias LĂ©on Trotski. Ce traĂźtre est l'objet de sĂ©ances d'hystĂ©rie collective obligatoires, les « deux minutes de la haine » qui sont organisĂ©es quotidiennement.

Ce Goldstein peut aussi ĂȘtre considĂ©rĂ©, tout comme Big Brother, comme une allĂ©gorie immortelle. En l'occurrence une personnification du mal, de la dĂ©viation par rapport au Parti. On pense Ă©videmment Ă  l'« Ennemi du Peuple » dont se servait Staline, dont le rĂ©gime totalitaire aura largement inspirĂ© le roman dans son ensemble.

Dans le roman, il est Ă©galement considĂ©rĂ© comme l'auteur d'un livre subversif que les opposants au rĂ©gime se passent entre eux. Winston Smith arrive Ă  mettre la main sur ce livre, mais il apprend lors de son arrestation qu'il ne s'agit que d'un texte rĂ©digĂ© par le rĂ©gime lui-mĂȘme.

Destruction de la langue et de la logique

En plus de l'anglais classique, langue officielle de l'OcĂ©ania, l'Angsoc a crĂ©Ă© une langue, la novlangue[28] (newspeak en anglais). Cette langue est constituĂ©e principalement d'assemblages de mots et est soumise Ă  une politique de rĂ©duction du vocabulaire. Le nombre de mots en novlangue diminue sans arrĂȘt.

Au dĂ©but du roman, un membre du Parti extĂ©rieur rĂ©vĂšle que la version finale du dictionnaire novlangue Ă©tait en prĂ©paration afin d'Ă©liminer tout autre mode de pensĂ©e et idĂ©e hĂ©rĂ©tique. De plus, les mots novlangues comportant peu de syllabes afin d'ĂȘtre prononcĂ©s plus rapidement, sont conçus pour ĂȘtre prononcĂ©s sans rĂ©flexion et afin d'anĂ©antir l'affect et la connaissance intuitive des mots ainsi que de rendre impossible l’expression et la formulation de pensĂ©es subversives. Bien qu'il soit toujours possible de dire que les dĂ©cisions du Parti sont mauvaises, il sera impossible d'argumenter sur cela. À l’époque oĂč est censĂ© se passer le roman, le novlangue constitue encore une nouveautĂ©, qui coexiste tant bien que mal avec l’anglais classique. Le langage en est rĂ©duit Ă  une fonction informative.

La novlangue fait l’objet d’appauvrissements planifiĂ©s dont le but est d'hĂ©bĂ©ter le peuple pour mieux le contrĂŽler.

En outre, le « sens logique » des assujettis au rĂ©gime est lui-mĂȘme altĂ©rĂ©. En novlangue, par exemple, un mĂȘme mot comme « canelangue » peut avoir un sens laudatif s’il est appliquĂ© Ă  un membre du Parti, ou pĂ©joratif s’il est appliquĂ© Ă  un ennemi du Parti. Il devient donc impossible de l'utiliser pour dire du mal d'un membre du Parti. La population est abreuvĂ©e de slogans comme :

  • « La guerre, c'est la paix. »
  • « La libertĂ©, c'est l’esclavage. »
  • « L'ignorance, c'est la force. »
Situation géopolitique à la fin du roman. La flÚche noire représente les attaques d'Eurasia, tandis que la blanche représente celles d'Océania.

Ce slogan, répété à plusieurs reprises, est particuliÚrement significatif du point de vue du lecteur/spectateur. Il vient heurter la possibilité d'une liberté individuelle. Dans 1984, les individus qui se croient libres sont dominés par le Parti et son idéologie oppressive. Leur liberté, qui s'appuie sur l'obéissance aveugle et l'amour du Parti et non sur l'histoire ou la logique, est illusoire. C'est précisément sur ces points que portera la « rééducation"/"guérison » de Winston par O'Brien.

De plus, l'ignorance Ă©levĂ©e au rang de force remet en question toute la pertinence de l'Ă©ducation, de la philosophie (comme mode de pensĂ©e cherchant Ă  dĂ©noncer des pensĂ©es erronĂ©es ou insuffisantes), et mĂȘme des lieux de savoir universitaires (en tant qu'entreprises de savoir par l'homme et pour l'homme).

Pyramide sociale telle qu'elle apparaßt dans le roman. Big Brother est au sommet. En dessous, les membres du Parti intérieur (moins de 2 % de la population de l'Oceania) ; puis les membres du Parti extérieur, comme Winston Smith. Au bas de la pyramide, soit environ 85 % de la population de l'Océania : les prolétaires.

Angsoc

L’Angsoc, rĂ©gime de l’OcĂ©ania, divise le peuple en trois classes sociales : le Parti intĂ©rieur, classe dirigeante au pouvoir partagĂ©, le Parti extĂ©rieur, travailleurs moyens, et les « prolĂ©taires », sous-classe s’entassant dans les quartiers sales. Le chef suprĂȘme du Parti est Big Brother, visage immortel et adulĂ© placardĂ© sur les murs de la ville. Tous les membres du Parti sont constamment surveillĂ©s par la Police de la PensĂ©e et chaque geste, mot ou regard est analysĂ© au travers des « tĂ©lĂ©crans » (assemblage de deux mots comme on en trouve souvent en novlangue, ici de « tĂ©lĂ© » et de « Ă©cran ») qui balayent les moindres lieux. Winston Smith, membre du Parti extĂ©rieur, occupe un poste de rectification d’information au commissariat aux archives, dans le ministĂšre de la VĂ©ritĂ© (Miniver en novlangue). Son travail consiste Ă  supprimer toutes les traces historiques qui ne correspondent pas Ă  l'Histoire Officielle, qui doit toujours correspondre Ă  ce que prĂ©dit Big Brother.

Les Quatre MinistĂšres

Ces quatre ministÚres sont représentés comme quatre grands blocs qui « écrasaient complÚtement l'architecture environnante »[29], démesurément hautes et identiques. Elles constituent principalement l'appareil gouvernemental.

  • Le MinistĂšre de la VĂ©ritĂ© (Miniver) : s'occupe de « l'information, de l'Ă©ducation, des divertissements et des beaux-arts »
  • Le MinistĂšre de la Paix (Minipax) : s'occupe de la guerre
  • Le MinistĂšre de l'Amour (Miniamour) : s'occupe du respect de la loi et de l'ordre
  • Le MinistĂšre de l'Abondance (Miniplein) : est responsable des affaires Ă©conomiques

Cependant, il se trouve que ces termes sont contradictoires car le MinistĂšre de la VĂ©ritĂ© modifie les informations (historiques, actualitĂ©s
) Ă  la guise du Parti en changeant les vĂ©ritĂ©s qui ne leur plaisaient plus ; Le MinistĂšre de la Paix s'occupe de faire la guerre[30] ; le MinistĂšre de l'Amour anime les rĂ©Ă©ducations et les tortures de ceux qui sont considĂ©rĂ©s comme dangereux par le Parti[31] et coopĂšre avec la Police de la PensĂ©e, finalement le MinistĂšre de l'Abondance proclame que les marchandises « coulent Ă  flots » aux habitants ; ce n'est en rĂ©alitĂ© pas le cas[32].

Pourtant, la population ne s'en soucie pas grùce non seulement au novlangue (qui réduit la capacité de penser), mais aussi à la propagande et au procédé de la double pensée.

La mort de Winston Smith

AprÚs avoir été torturé par O'Brien et avoir trahi Julia (qui, de son cÎté, le trahit aussi, comme on l'apprend à la fin du roman), Winston Smith devient un fervent partisan du systÚme totalitaire et « amoureux » de Big Brother (« Il aimait Big Brother », sont les derniers mots du texte) par le lavage de cerveau qu'il a subi.

NĂ©anmoins, Ă  la fin du livre, on apprend qu'il va ĂȘtre exĂ©cutĂ© par la Police de la PensĂ©e - ce que O'Brien, pendant les interrogatoires, lui avait dĂ©jĂ  fait savoir, quoi qu'il arrive. Pourquoi supprimer un homme qui est devenu entiĂšrement favorable au rĂ©gime en place ?

La rĂ©ponse tient dans la nature mĂȘme du rĂ©gime totalitaire ; la mort de Smith peut signifier :

  • que le systĂšme tue non seulement ses opposants, comme dans les rĂ©gimes dictatoriaux « classiques », mais aussi ses plus fervents partisans : comme dans le phĂ©nomĂšne des Grandes purges staliniennes des annĂ©es 1930, nul n'est Ă  l'abri, et le fait d'ĂȘtre un partisan du rĂ©gime en place ne garantit en rien qu'on aura la vie sauve ; dans ce systĂšme la vie humaine ne vaut rien et n'a aucune signification ;
  • si le rĂ©gime veut anĂ©antir toute forme de libertĂ© en contraignant la libertĂ© d'aller et de venir, les corps, le langage, la sexualitĂ©, la pensĂ©e politique et la pensĂ©e privĂ©e, il veut, en quelque sorte, « empĂȘcher toute Ă©chappatoire » : non seulement les amis du rĂ©gime peuvent ĂȘtre exĂ©cutĂ©s, mais les ennemis sont d'abord convertis avant de subir le mĂȘme sort. Ainsi, quoi qu'on fasse, quoi qu'on pense, quoi qu'on dise, le Parti, de toute Ă©ternitĂ© et pour toujours, est « le plus fort », anĂ©antissant toute trace prĂ©sente, passĂ©e et future d'opposition, absolument rien ni personne ne pouvant lui rĂ©sister. La mort de Smith peut vouloir dire : « De toute façon, tout le monde sera exĂ©cutĂ© un jour ou l'autre ».
  • que le fait mĂȘme d'avoir rĂ©sistĂ© une seule fois implique une fragilitĂ© dans l'ordre de la loyautĂ© que le rĂ©gime ne peut tolĂ©rer.

ÉlĂ©ments rĂ©els dans le roman

La correspondance d’Orwell indique que son projet Ă©tait de lancer un avertissement contre les totalitarismes, particuliĂšrement Ă  une gauche britannique (dont il faisait partie) qu'il soupçonnait de complaisance envers Staline, du moins pour ce qui Ă©tait de certains intellectuels comme George Bernard Shaw ou H. G. Wells.

De nombreux éléments sont puisés dans la réalité de la fin des années 1940 qui a inspiré Orwell de maniÚre flagrante : la description d'un Londres décrépit, avec ses cratÚres dus à des « bombes fusées », ses files d'attente devant les magasins, ses maisons victoriennes en ruines, ses privations de toutes sortes. Tout cela évoque fortement le Londres de l'immédiat aprÚs-guerre et ses pénuries (les tickets de rationnement ont été une réalité jusqu'en 1953) sans compter les effets encore visibles des bombardements allemands (les V1 et V2). Le bùtiment qui aurait inspiré le « ministÚre de la Vérité » serait celui du ministÚre de l'Information dans le quartier Bloomsbury, Senate House, aujourd'hui propriété de l'université de Londres.

La répartition des trois « continents » dans le récit est réfléchie d'aprÚs Orwell. Il se fonde sur la géographie connue pour diviser le monde en trois parties : l'Estasia, l'Eurasia et l'Océania.

« L’Eurasia comprend toute la partie nord du continent europĂ©en et asiatique, du Portugal au dĂ©troit de Behring. L’OcĂ©ania comprend les AmĂ©riques, les Ăźles de l’Atlantique, y compris les Ăźles Britanniques, l’Australie et le Sud de l’Afrique. L’Estasia, plus petite que les autres, et avec une frontiĂšre occidentale moins nette, comprend la Chine et les contrĂ©es mĂ©ridionales de la Chine, les Ăźles du Japon et une portion importante, mais variable, de la Mandchourie, de la Mongolie et du Tibet. »

— George Orwell

Traductions en langue française

Nouvelles traductions

En 2018, une nouvelle traduction par JosĂ©e Kamoun est publiĂ©e par les Ă©ditions Gallimard, aprĂšs la premiĂšre traduction d'AmĂ©lie Audiberti. Le passĂ© est remplacĂ© par le prĂ©sent et beaucoup de termes sont modifiĂ©s. En 2019, les Éditions de la rue Dorion confient Ă  CĂ©lia Izoard une nouvelle traduction, gardant le passĂ© simple (traduction rĂ©Ă©ditĂ©e en 2021 par Agone, avec le titre en toutes lettres : Mille neuf cent quatre-vingt-quatre). En 2020, les Ă©ditions Gallimard publient une traduction par Philippe Jawroski d'abord en BibliothĂšque de la PlĂ©iade[36], puis dans une Ă©dition Folio Classique. En 2021, Ă  l'occasion de l'entrĂ©e du texte original dans le domaine public, une nouvelle traduction de Romain Vigier paraĂźt aux Éditions Renard Rebelle, publiĂ©e sous une licence Creative Commons en tĂ©lĂ©chargement libre. En 2021 Ă©galement, une nouvelle traduction de ClĂ©mentine Vacherie est publiĂ©e chez JDH Éditions.

Comparaison des huit traductions[37] - [38] - [39] - [40]
1949 1950 2018 2019 2020 2021
George Orwell Amélie Audiberti Josée Kamoun Celia Izoard Philippe Jaworski Romain Vigier Clémentine Vacherie Géraldine Guillier Etienne Leyris
Gallimard Gallimard Agone Gallimard R. Rebelle JDH Poche Larousse
Big Brother Big Brother Big Brother Big Brother Le Grand FrĂšre Tonton Big Brother Big Brother Big Brother
Newspeak Novlangue NĂ©oparler Novlangue NĂ©oparle Nouvelangue Novlang Nouvlang novlangue
Thought Police Police de la Pensée Mentopolice Police de la Pensée Police de la Pensée Police des Pensées Police de la Pensée Police de la Pensée Police de la Pensée
Crimethink Crimepensée Mentocrime Crimepensée Délit de pensée Crimepense Crime-pensée Crime de la Pensée
Doublethink Double-pensée Doublepenser Doublepensée Doublepense Doublepense Double-pensée double pensée doublepenser
Proles Prolétaires Prolos Proles Prolétos Prolos Prolétaires Prolos Prolo
Angsoc Angsoc Sociang Angsoc Socang Angsoc Angsoc Sociang Sociang
Controlled insanity Folie dirigée Démence maßtrisée Psychose administrée Folie contrÎlée Folie contrÎlée Folie contrÎlée Démence controlée
Minitrue Miniver Minivrai VĂ©rigouv Minivrai Minivrai Minivrai MiniVer Minivrai
Minipax Minipax Minipaix Pacigouv Minipax Minipaix Minipaix MiniPax Minipaix
Miniluv Miniamour Miniamour Lovagouv Minamour Minicoeur Minilove MiniAm Miniamour
Minipleinty Miniplein Miniplein Pleingouv Minabonde Miniplein Miniplein MiniPros Minabond
Océania Océania Océanie Océanie Océanie Océania Océania Océanie Océania
George Orwell War is peace Freedom is slavery Ignorance is strength
Amélie Audiberti La guerre, c'est la paix La liberté c'est l'esclavage L'ignorance c'est la force
Josée Kamoun Guerre est paix Liberté est servitude Ignorance est puissance
Celia Izoard La guerre, c'est la paix La liberté c'est l'esclavage L'ignorance c'est la force
Philippe Jaworski Guerre est paix Liberté est esclavage Ignorance est puissance
Romain Vigier La guerre c'est la paix La liberté c'est l'esclavage L'ignorance c'est la force
Clémentine Vacherie La guerre, c'est la paix La liberté, c'est l'esclavage L'ignorance, c'est la force
Géraldine Guillier La guerre, c'est la paix La liberté, c'est l'esclavage L'ignorance, c'est la force
Etienne Leyris La guerre c'est la paix La liberté c'est l'esclavage L'ignorance c'est la force

Droits d'auteurs

George Orwell Ă©tant dĂ©cĂ©dĂ© en 1950 et le roman publiĂ© en 1949, il est entrĂ© dans le domaine public, soit en 2020 pour les pays prenant en compte la date de publication de l'Ɠuvre, soit en 2021 pour les pays prenant en compte la mort de l'auteur (la majoritĂ© des pays)[41].

Adaptations et références

Adaptations cinématographiques ou télévisuelles

Adaptations théùtrales

  • En 2016, une adaptation de SĂ©bastien Jeannerot est prĂ©sentĂ©e au thĂ©Ăątre de MĂ©nilmontant Ă  Paris[44].
  • En 2017, une adaptation amĂ©ricaine sur Broadway est contestĂ©e par une partie du public du fait de sa violence[45].

Adaptations en bande dessinée

Big Brother par Frederic Guimont (inspiré d'une célÚbre affiche électorale d'Adolf Hitler de 1932)

Notes et références

  1. Jean Montenot (Lire), « George Orwell », L'Express,‎ (lire en ligne, consultĂ© le ).
  2. « Karl Kraus, George Orwell et Noam Chomsky » [livre], sur openedition.org, CollÚge de France, (consulté le ).
  3. (en) The Modern Library : 100 Best Novels
  4. (en) Top 100 des meilleurs romans en langue anglaise du Time magazine.
  5. La description du livre n'est pas aussi détaillée. La carte est donc fondée sur certaines spéculations. En outre, à la fin du livre, l'Océania a conquis toute l'Afrique, du moins si l'on en croit la propagande du Parti : voir la carte suivante.
  6. Il ne faut pas oublier qu'Orwell s'inspire de la situation géopolitique mondiale de 1948.
  7. 1984, Ă©ditions Gallimard, p. 247-249.
  8. ThĂšse soutenue Ă  l’universitĂ© d’Ottawa https://ruor.uottawa.ca/bitstream/10393/27298/1/MR18471.PDF
  9. « O’Brien entra. Winston se dressa sur ses pieds. Le choc de cette visite lui avait enlevĂ© toute prudence. Pour la premiĂšre fois, depuis de nombreuses annĂ©es, il oublia la prĂ©sence du tĂ©lĂ©cran.
    — Ils vous ont pris aussi ! cria-t-il.
    — Ils m’ont pris depuis longtemps ! dit O’Brien presque à regret, avec une douce ironie.
    Il s’écarta. DerriĂšre lui Ă©mergea un garde au large torse, muni d’une longue matraque noire.
    — Vous le saviez, Winston, dit O’Brien. Ne vous mentez pas Ă  vous-mĂȘme. Vous le saviez, vous l’avez toujours su.
    Oui, il le voyait maintenant, il l’avait toujours su »
    1984, George Orwell, 3e partie, chapitre 1.
  10. — Vous ĂȘtes un Ă©tudiant lent d’esprit, Winston, dit O’Brien gentiment.
    — Comment puis-je l’empĂȘcher ? dit-il en pleurnichant. Comment puis-je m’empĂȘcher de voir ce qui est devant mes yeux ? Deux et deux font quatre.
    — Parfois, Winston. Parfois ils font cinq. Parfois ils font trois. Parfois ils font tout Ă  la fois. Il faut essayer plus fort. Il n’est pas facile de devenir sensĂ©.
    1984, George Orwell, 3e partie, chapitre 3.
    « Mais il y avait eu un moment, il ne savait combien de temps, trente secondes, peut-ĂȘtre, de bienheureuse certitude, alors que chaque nouvelle suggestion de O’Brien comblait un espace vide et devenait une vĂ©ritĂ© absolue, alors que deux et deux auraient pu faire trois aussi bien que cinq si cela avait Ă©tĂ© nĂ©cessaire. »
    1984, George Orwell, 3e partie, chapitre 3.
  11. « Vous avez pleurniché en demandant grùce. Vous avez trahi tout le monde et avoué tout. Pouvez-vous penser à une seule dégradation qui ne vous ait pas été infligée ?
    Winston s’était arrĂȘtĂ© de pleurer, mais ses yeux Ă©taient encore mouillĂ©s. Il les leva vers O’Brien.
    — Je n’ai pas trahi Julia, dit-il. O’Brien le regarda pensivement.
    — Non, dit-il, non. C’est parfaitement vrai. Vous n’avez pas trahi Julia. »
    1984, George Orwell, 3e partie, chapitre 3.
    « Les rats savaient maintenant ce qui allait venir. [
]. Winston pouvait voir les moustaches et les dents jaunes. Une panique folle s’empara encore de lui. [
] Mais il avait soudain compris que, dans le monde entier, il n’y avait qu’une personne sur qui il pĂ»t transfĂ©rer sa punition, un seul corps qu’il pĂ»t jeter entre les rats et lui. Il cria frĂ©nĂ©tiquement, Ă  plusieurs reprises :
    — Faites-le Ă  Julia ! Faites-le Ă  Julia ! Pas Ă  moi ! Julia ! Ce que vous lui faites m’est Ă©gal. DĂ©chirez-lui le visage. Épluchez-la jusqu’aux os. Pas moi ! Julia ! Pas moi ! »
    1984, George Orwell, 3e partie, chapitre 5.
  12. https://inventin.lautre.net/livres/Orwell-1984.pdf, p. 360 et 361
  13. « Elle lui jeta un autre rapide regard de dĂ©goĂ»t. – Parfois, dit-elle, ils vous menacent de quelque chose, quelque chose qu’on ne peut supporter, Ă  quoi on ne peut mĂȘme penser. Alors on dit : « Ne me le faites pas, faites-le Ă  quelqu’un d’autre, faites-le Ă  un tel. » On pourrait peut-ĂȘtre prĂ©tendre ensuite que ce n’était qu’une ruse, qu’on ne l’a dit que pour faire cesser la torture et qu’on ne le pensait pas rĂ©ellement. Mais ce n’est pas vrai. Au moment oĂč ça se passe, on le pense. On se dit qu’il n’y a pas d’autre moyen de se sauver et l’on est absolument prĂȘt Ă  se sauver de cette façon. On veut que la chose arrive Ă  l’autre. On se moque pas mal de ce que l’autre souffre. On ne pense qu’à soi. – On ne pense qu’à soi, rĂ©pĂ©ta-t-il en Ă©cho. – AprĂšs, on n’est plus le mĂȘme envers l’autre. – Non, dit-il, on n’est plus le mĂȘme. Il n’y avait pas, semblait-il, autre chose Ă  dire. » 1984, George Orwell, 3e partie, chapitre 6.
  14. 1984, Ă©dition Gallimard, p. 390-391
  15. « "Nous autres", le roman qui a inspiré "1984" d'Orwell », sur France Culture, (consulté le )
  16. « Orwell plagiaire ? », sur Bibliobs, (consulté le )
  17. (en) « What George Orwell's Nineteen Eighty-Four owes Yevgeny Zamyatin's We », sur the Guardian, (consulté le )
  18. « Livre culte: 1984 de George Orwell », sur La Presse, (consulté le )
  19. Mais selon Philippe Jaworski, « les allusions prĂ©cises au rĂ©gime stalinien ne sont d'ailleurs pas si nombreuses dans Mil neuf cent quatre-vingt-quatre » (dans George Orwell, ƒuvres, BibliothĂšque de la PlĂ©iade, 2020, p. 1510
  20. CitĂ© dans George Orwell, ƒuvres, BibliothĂšque de la PlĂ©iade, 2020, p. 1496
  21. « Je pense que Sartre est une baudruche et je vais lui donner un bon coup de pied. » (Lettre non publiée à David Astor, cité dans George Orwell, Une Vie", de Francis Crick, p. 467).
  22. Convictions qu'il exprimera dix ans avant la rédaction de 1984 dans son ouvrage Hommage à la Catalogne.
  23. Henri Cohen. Orwell A-T-il Vu Juste ? : Une Analyse Sociopsychologique De 1984 (p. 257)
  24. Alexandre Zinviev (1991). Confessions d'un homme en trop (p. 669). Folio.
  25. « Orwell et "1984" », sur L'Echo,
  26. Jean-Jacques Rosat dans sa préface à Paul Boghossian, La peur du savoir. Sur le relativisme et le constructivisme de la connaissance, Agone, coll. « Banc d'essais », 2009, p. XXVII.
  27. Musée en Chine consacré à la révolution culturelle.
  28. Dans une nouvelle traduction récente, le traducteur propose le mot « Néoparler ».
  29. George Orwell, 1984, Editions Gallimard, (ISBN 978-2-07-036822-8), p.15.
  30. Sylvie Marion, « George Orwell, un roman visionnaire ou satirique ? », sur l'Ina.
  31. Extrait de 1984 de George Orwell, « Au MinistÚre de l'Amour », sur Contrepoints, .
  32. George Orwell, 1984, Éditions Gallimard, (ISBN 978-2-07-036822-8), p.59 : « À proprement parler il ne s'agit pas de falsification, pensa Wintson tandis qu'il rajustait les chiffres du ministĂšre de l'Abondance. Il ne s'agit lĂ  que de la substitution d'un non-sens Ă  un autre. La plus grande partie du matĂ©riel dans lequel on trafiquait n'avait aucun lien avec les donnĂ©s du monde rĂ©el, pas mĂȘme cette sorte de lien que contient le mensonge direct. Les statistiques Ă©taient aussi fantaisistes dans leur version originale que dans leur version rectifiĂ©e. On comptait au premier chef sur les statisticiens eux-mĂȘmes pour qu'ils ne s'en souvinssent plus. Ainsi, le ministĂšre de l'Abondance avait, dans ses prĂ©visions, estimĂ© le nombre de bottes fabriquĂ©s dans le trimestre Ă  cent quarante-cinq millions de paires. [...] TrĂšs probablement personne ne savait combien, dans l'ensemble, on en avait fabriquĂ©. Il se pouvait Ă©galement que pas une n'ait Ă©tĂ© fabriquĂ©e. ».
  33. Sylvano Santini, « Traduire 1984. Entretien avec Celia Izoard », Spirale (magazine),‎ (lire en ligne)
  34. « 1984 », sur www.renardrebelle.fr, (consulté le ).
  35. « 1984 », sur JDH Éditions (consultĂ© le )
  36. Nicolas Turcev, « Orwell en Pléiade et en BD », sur Livres Hebdo, .
  37. Jean-Jacques Rosat, « « 1984 » face à ses traducteurs », sur En attendant Nadeau,
  38. BérengÚre Viennot, « La retraduction de «1984» est une idée fabuleuse », sur Slate,
  39. « #angsoc », sur zinc.mondediplo.net (consulté le )
  40. Les correcteurs, « Big Brother chez Confo », sur Le Monde, .
  41. CNDP, « Quand une Ɠuvre tombe-t-elle dans le domaine public ? ».
  42. (ru) Argumenty i fakty, « ĐšŃ‚ĐŸ таĐșĐŸĐč АлДĐșŃĐ°ĐœĐŽŃ€ ĐžĐ±ĐŒĐ°ĐœĐŸĐČ, сыграĐČшОĐč глаĐČĐœŃƒŃŽ Ń€ĐŸĐ»ŃŒ ĐČ Ń„ĐžĐ»ŃŒĐŒĐ” «1984»? »,‎ (consultĂ© le )
  43. (ru) KomsomolskaĂŻa Pravda, « Đ’ĐŸĐ»ĐłĐŸĐłŃ€Đ°ĐŽĐ”Ń† АлДĐșŃĐ°ĐœĐŽŃ€ ĐžĐ±ĐŒĐ°ĐœĐŸĐČ ŃŃ‹ĐłŃ€Đ°Đ» глаĐČĐœŃƒŃŽ Ń€ĐŸĐ»ŃŒ ĐČ ŃĐșŃ€Đ°ĐœĐžĐ·Đ°Ń†ĐžĐž «1984» ĐžŃ€ŃƒŃĐ»Đ»Đ° »,‎ (consultĂ© le )
  44. Aurelie Brunet, « 1984 » au ThĂ©Ăątre de MĂ©nilmontant, l’angoisse et la lutte pour la libertĂ© humaine, la Critiquerie, 30 septembre 2016.
  45. Nelly Lesage, « Vomissements, évanouissements... : à Broadway, l'adaptation de 1984 trouble le public », sur Numerama, .
  46. (en) A. Galdon Rodriguez, George Orwell's Nineteen Eighty-Four As An Influence On Popular Culture Works–V For Vendetta And 2024, UCLM
  47. Yoann Debiais, Damien Canteau, « 1984 », sur Comixtrip,
  48. Anne Douhaire, « Bande dessinĂ©e : "1984", de George Orwell, trois regards sur une mĂȘme Ɠuvre », sur France Inter,
  49. Yoann Debiais, « 1984 de Frederic Pontarolo, George Orwell », sur Comixtrip,

Annexes

Bibliographie, Ă©tudes

Articles connexes

Liens externes

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