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Union militaire espagnole

L’Union militaire espagnole (en castillan UniĂłn Militar Española, en abrĂ©gĂ© UME) Ă©tait une association clandestine de hauts gradĂ©s et d’officiers de rang intermĂ©diaire de l’armĂ©e espagnole, fondĂ©e Ă  Madrid en (c’est-Ă -dire au commencement du deuxiĂšme biennat de la Seconde RĂ©publique espagnole) par un groupe de militaires opposĂ©s Ă  la rĂ©forme militaire de Manuel Azaña, et dont les Juntas de Defensa, surgies en 1917 lors de la crise de la Restauration, Ă©taient la prĂ©figuration.

Union militaire espagnole
Unión Militar Española (UME)
Idéologie Nationalisme espagnol ;
Anti-républicanisme ;
Anticommunisme
Objectifs Renversement de la
IIe RĂ©publique espagnole
Fondation
Date de formation
Pays d'origine Drapeau de l'Espagne Espagne
Fondé par Emilio Rodríguez Tarduchy
Actions
Mode opératoire Activités conspiratrices, infiltration des organismes publics
Période d'activité 1933-1936
Organisation
Chefs principaux Emilio Rodríguez Tarduchy, José Sanjurjo, Bartolomé Barba Hernåndez
Membres Plus de 7 000 membres (selon les chiffres de l’organisation elle-mĂȘme)
Groupe relié Conspiration monarchiste, Requeté
Coup d’État militaire de juillet 1936 en Espagne ;
Guerre civile

Si, hormis une commune hostilitĂ© aux mouvements de gauche, les objectifs des affiliĂ©s Ă  la UME vacillaient Ă  ses dĂ©buts entre revendications purement catĂ©gorielles, dĂ©fense de la rĂ©publique contre une Ă©ventuelle rĂ©volution de gauche, et renversement du rĂ©gime rĂ©publicain dĂ©mocratique, c’est cette derniĂšre option, c’est-Ă -dire la subversion, qui finit par s’imposer, sans prĂ©juger encore de ce qui devait remplacer ensuite ce rĂ©gime : monarchie, rĂ©gime fasciste, ou dictature militaire.

Ses membres s’étaient du reste montrĂ©s en majoritĂ© solidaires avec les militaires condamnĂ©s pour avoir pris part au coup d’État du gĂ©nĂ©ral Sanjurjo le 10 aoĂ»t 1932. Dans le premier tract de l’UME peu aprĂšs la rĂ©volution d’octobre 1934, les militaires Ă©taient exhortĂ©s Ă  « livrer bataille contre la partie anti-espagnole de l’armĂ©e, criminellement impliquĂ©e dans l’attentat contre la Patrie, [et composĂ©e de] franc-maçons engagĂ©s » ; on pouvait y lire que l’Espagne Ă©tait l’objet de l’« appĂ©tit d’étrangers et de sectes insatiables, vindicatives » et ciblĂ© par un ennemi qui « fait l’apologie du sĂ©paratisme, des nationalismes rĂ©gionaux, de la ruine du sentiment religieux et de la ruine de la famille espagnole [...]. ».

AprĂšs l’arrivĂ©e en de Gil-Robles au ministĂšre de la Guerre, des militaires appartenant Ă  l’UME furent placĂ©s en grand nombre Ă  des postes clef, ce qui dĂ©termina un vĂ©ritable noyautage de l’administration centrale. L’UME n’acceptait le statu quo institutionnel prĂ©sent que sous rĂ©serve que le pouvoir politique ne penche pas vers la gauche et ne permette pas l’accession au pouvoir de l’un quelconque des partis protagonistes de la rĂ©volution d’ ; dans le cas contraire, la consigne portait d’intervenir violemment.

DĂšs avant les Ă©lections de , remportĂ©es par le Front populaire, l’UME s’était mis en contact avec les autres groupes conspirateurs, notamment monarchistes. L’UMI, qui avait connu dans les semaines suivant ledit scrutin une croissance considĂ©rable chez les militaires de droite, s’associa au complot militaire Ă  l’origine du coup d’État de juillet 1936.

GenĂšse

L’UME fut fondĂ©e en , c’est-Ă -dire au dĂ©but du deuxiĂšme biennat de la Seconde RĂ©publique espagnole, par le commandant Emilio RodrĂ­guez Tarduchy, ancien instructeur du SomatĂ©n sous la dictature de Primo de Rivera et ancien directeur du journal anti-rĂ©publicain La Correspondencia Militar, Ă©paulĂ© par un groupe de militaires mĂ©contents de la rĂ©forme militaire de Manuel Azaña. Si l’organisation vit le jour comme une entitĂ© « apolitique », le commandement suprĂȘme en fut offert nominalement au gĂ©nĂ©ral Sanjurjo, qui Ă  ce moment-lĂ  purgeait une peine de prison pour avoir Ă©tĂ© l’instigateur du soulĂšvement militaire contre la RĂ©publique d’aoĂ»t 1932[1]. Certains historiens ont dĂ©fini l’UME comme « une association semi-secrĂšte constituĂ©e en 1933 par des officiers d’extrĂȘme droite, surtout monarchistes, mais aussi phalangistes, qui s’étaient donnĂ© pour but d’abattre la rĂ©publique dĂ©mocratique »[2]. Les Juntas de Defensa, surgies en 1917 lors de la crise de la Restauration, en avaient Ă©tĂ© la prĂ©figuration[1].

Pourtant, dans le premier tract de l’UME diffusĂ© parmi les militaires vers la fin de 1934, au lendemain de la rĂ©volution d’octobre dans les Asturies, il Ă©tait indiquĂ© que l’UME avait Ă©tĂ© crĂ©Ă© en par des « militaires anonymes », qui « Ă©coutĂšrent la voix de la Patrie angoissĂ©e, virent la proximitĂ© du danger et agirent... Quelqu’un leur fit savoir au mois de mai que les rĂ©volutionnaires allaient dĂšs le premier jour se rendre maĂźtres des Asturies, que des armes Ă©taient distribuĂ©es par tonnes, que les milices marxistes s’entraĂźnaient et s’organisaient militairement, que des franc-maçons engagĂ©s s’inflitraient aux postes de commandement de l’armĂ©e et de la police, que la trahison sĂ©paratiste Ă©tait certaine... Et ces militaires espagnols, alors que les politiciens inconscients s’en allaient pour de joyeuses vacances, forgeaient en silence l’UNIÓN MILITAR ESPAÑOLA. De cette union devant le pĂ©ril et devant la trahison contre l’Espagne naquit l’UniĂłn Militar Española, U.M.E. »[3].

L’adhĂ©sion ultĂ©rieure de RodrĂ­guez Tarduchy Ă  la Phalange nouvellement fondĂ©e eut pour effet de dĂ©piter tant les monarchistes que les rĂ©publicains de l’UME, et il fut contraint de se dĂ©mettre. Il fut remplacĂ© par le capitaine d’état-major BartolomĂ© Barba HernĂĄndez, qui s’était dĂ©jĂ  signalĂ© en accusant fallacieusement le prĂ©sident du gouvernement Manuel Azaña d’avoir Ă©tĂ© impliquĂ© directement dans la tuerie connue sous la dĂ©nomination de massacre de Casas Viejas[1]. Le capitaine Barba s’appuyait sur les membres du ComitĂ© central, le plus haut organe de direction de l’UME, lesquels membres Ă©taient radicalement anti-rĂ©publicains ; il s’agit nommĂ©ment du commandant Luis Arredondo (engagĂ© dans des missions d’entraĂźnement des milices de la Phalange), du lieutenant-colonel Ricardo Rada (Ă©galement instructeur de milices de droite), et de Nazario Cebrerios (qui avait collaborĂ© Ă  la revue La Correspondencia Militar). Cependant, il existait face Ă  eux une importante faction rĂ©publicaine plus ou moins proche du Parti rĂ©publicain radical et composĂ©e du capitaine Rafael SĂĄnchez SacristĂĄn (responsable de la 1re division organique), du capitaine Gumersindo de la GĂĄndara (affectĂ© dans la Garde d'assaut) et d’Eduardo Pardo Reina, secrĂ©taire Ă  la prĂ©sidence de la RĂ©publique sous AlcalĂĄ-Zamora et ami du gĂ©nĂ©ral Goded. Pardo Reina rĂ©digea une Ă©bauche de programme politique, sous la supervision du gĂ©nĂ©ral Mola, dans lequel Ă©taient proposĂ©es aux gouvernements radical-cĂ©distes du deuxiĂšme biennat un ensemble de dispositions lĂ©gislatives nĂ©cessaires Ă  empĂȘcher Ă  l’avenir la « subversion de gauche »[4].

Dans chacun des chefs-lieux de rĂ©gion militaire, il y avait un reprĂ©sentant ou un dĂ©lĂ©guĂ© de l’UME, lequel Ă  son tour nommait le ComitĂ© rĂ©gional, tandis que le ComitĂ© national, avec siĂšge Ă  Madrid, Ă©tait le vĂ©ritable cerveau de l’organisation[5].

Idéologie

Ce qui unissait les militaires membres de l’UME Ă©tait leur opposition aux rĂ©formes militaires d’Azaña et leur lutte contre la « subversion de gauche ». Le premier tract de l’UME fut distribuĂ© aux militaires espagnols peu aprĂšs la rĂ©volution d’octobre 1934, dont l’UME attribua l’échec Ă  « une poignĂ©e de hauts commandants, d’officiers, de sous-officiers et de soldats espagnols, qui eut l’hĂ©roĂŻsme de s’unir et de livrer bataille contre l’autre partie, celle anti-espagnole, de l’armĂ©e, criminellement impliquĂ©e dans l’attentat contre la Patrie » et composĂ©e de « franc-maçons engagĂ©s ». Ladite poignĂ©e de militaires constituait l’« authentique armĂ©e espagnole », « l’armĂ©e espagnole qui sauva l’Espagne de la RĂ©volution communiste et franc-maçonne d’octobre ! », pendant que l’État se trouvait « aux mains de couards et de traĂźtres ». Cette « authentique armĂ©e espagnole » incarnait l’« Espagne Ă©ternelle » face Ă  l'« Ă©ternelle anti-Espagne ». L’UME dĂ©nonçait que l’Espagne Ă©tait l’objet de l’« appĂ©tit d’étrangers et de sectes insatiables, vindicatives », d’un « ennemi » qui « fait la promotion du sĂ©paratisme, des nationalismes rĂ©gionaux, de la ruine du sentiment religieux et de la ruine de la famille espagnole, du capital et du travail, du mĂ©pris pour la langue espagnole, et de la perte de prestige et de la zizanie au sein de nos forces armĂ©es et de tout ce qui en Espagne a signifiĂ© UNITÉ, UNION ». Cet « ennemi implacable », poursuivait le tract, fut vaincu par l’armĂ©e en octobre, mais « cherche la revanche », « prĂ©pare une nouvelle attaque », et s’était « infiltrĂ© dans les plus hauts pouvoirs de la rĂ©publique, dans les sphĂšres les plus dĂ©cisives du commandement et de la propagande ». « Il ne vous Ă©chappe pas, Espagnols, comment aucun coupable authentique de crime contre la Patrie n’est fusillĂ© ! Ni PĂ©rez FarrĂĄs, ni Largo, ni Prieto, ni Azaña, ni Teodomiro, ni Peña. Seul l'est le pauvre rĂ©volutionnaire bernĂ©, sans dĂ©fense et anonyme ! ». Le libelle se terminait par un appel Ă  « une armĂ©e sans traĂźtres ! Une armĂ©e d’Espagnols hĂ©roĂŻques et inoubliables ! »[6].

Le ComitĂ© national de l’UME publia un manifeste en pour avertir que face Ă  une concertation « subversive » des groupes ouvriers (la rumeur circulait d’une rĂ©union qui se tenait dans les environs de Madrid entre des dirigeants du PSOE, du PCE, de la FAI et de la CNT), l’armĂ©e « dresserait une barriĂšre d’acier » pour empĂȘcher que les gauches puissent gouverner[7]. Ceci contredit la vision que l’historiographie franquiste a vĂ©hiculĂ©e pendant longtemps sur l’UME et selon laquelle celle-ci ne poursuivait aucune « finalitĂ© politique dĂ©terminĂ©e », ainsi que l’affirme JoaquĂ­n ArrarĂĄs, encore que le mĂȘme auteur reconnaisse que la mission de l’association Ă©tait de prĂ©parer ses affiliĂ©s « Ă  une meilleure dĂ©fense des principes essentiels de la patrie », affiliĂ©s qui n’auraient Ă  se sentir engagĂ©s que par « leurs propres sentiments patriotiques, sans se sentir obligĂ©s par des votes ou des serments »[5].

À partir d’une commune attitude anti-gauche, les objectifs des affiliĂ©s Ă  la UME, qui Ă©taient en rĂšgle gĂ©nĂ©rale des officiers de bas rang ou de rang intermĂ©diaire (comme cela avait Ă©tĂ© le cas des Juntas de Defensa de 1917), oscillaient au dĂ©but entre la simple dĂ©fense de droits catĂ©goriels, la protection de la rĂ©publique contre une Ă©ventuelle rĂ©volution de gauche[8], ou le renversement du rĂ©gime rĂ©publicain dĂ©mocratique, quoiqu’il n’y ait eu entre eux aucune entente, moins encore d’unanimitĂ© quant Ă  ce qui devrait remplacer ledit rĂ©gime — monarchie, rĂ©gime fasciste, dictature militaire — ; cependant, c’est cette derniĂšre option qui finit par s’imposer, et les revendications catĂ©gorielles furent dĂšs lors relĂ©guĂ©es au second plan par les partisans de la subversion. Ceux-ci se mirent en contact avec les groupes monarchistes qui conspiraient de leur cĂŽtĂ© pour renverser la rĂ©publique, rapprochement dans lequel eurent un rĂŽle essentiel le colonel Varela, converti au carlisme Ă  la suite de la Sanjurjada, le colonel ValentĂ­n Galarza, qui agissait en liaison avec les conspirateurs monarchistes, et le gĂ©nĂ©ral Goded, qui rejoignit l’UME dĂ©but 1935 et la mit en relation avec les gĂ©nĂ©raux qui avaient de quelque maniĂšre pris part ou donnĂ© leur appui Ă  la Sanjurjada, Ă  savoir : Mola, Villegas, Orgaz, Barrera, Fanjul et FernĂĄndez PĂ©rez[9].

Positionnement anti-républicain et expansion

AprĂšs qu’en JosĂ© MarĂ­a Gil-Robles eut Ă©tĂ© nommĂ© Ă  la tĂȘte du ministĂšre de la Guerre du gouvernement radical-cĂ©diste, un grand nombre de militaires appartenant Ă  l’UME furent placĂ©s Ă  des postes importants, tels que p. ex. le capitaine Luis LĂłpez Varela, dĂ©signĂ© Ă  la tĂȘte du Service intĂ©rieur des corps (service secret militaire crĂ©Ă© par le gĂ©nĂ©ral Franco pour lutter contre l’« infiltration communiste »)[10] - [11]. Dans un mĂ©morandum secret remis Ă  Mussolini par Antonio Goicoechea, dirigeant de RĂ©novation espagnole, lors de la rĂ©union qu’ils eurent Ă  Rome le , et Ă  la rĂ©daction duquel avait participĂ© l’UME, il Ă©tait fait Ă©tat de ce que, depuis l’arrivĂ©e de Gil-Robles au ministĂšre de la Guerre, avait Ă©tĂ© favorisĂ© « le placement de personnel issu de l’Organisation Ă  des postes de commandement, dans des fonctions et Ă  des affectations importances voire capitales pour l’action. [...] Dans l’administration centrale, on peut affirmer qu’elle est entiĂšrement noyautĂ©e [que estĂĄ toda ella intervenida]. À l’initiative de l’Organisation, des commandants d’importance vĂ©ritable ont Ă©tĂ© Ă©vincĂ©s et remplacĂ©s par du personnel lige, et l’on continue d’Ɠuvrer en ce sens. [...] [Il y a lieu de signaler] la difficultĂ© de changer les commandants des divisions, vu qu’une grande part des gĂ©nĂ©raux, sans lien avec l’Organisation et affiliĂ©s Ă  la franc-maçonnerie, ont Ă©tĂ© largement rĂ©intĂ©grĂ©s par la RĂ©publique, [par quoi leur substitution] s’est heurtĂ©e Ă  de grandes difficultĂ©s en raison de l’absence de personnel dĂ©sireux de les remplacer. Il a fallu couper dans le vif au moyen de projets de loi abaissant les Ăąges [de la retraite]. De cette maniĂšre, huit gĂ©nĂ©raux de division passeront Ă  la rĂ©serve et seront remplacĂ©s par des adeptes, Ă  la faveur de la dĂ©congĂ©lation des avancements pour mĂ©rites de guerre, qui a facilitĂ© leur montĂ©e en grade. [...] La position de dĂ©part s’est renforcĂ©e de plus en plus et peut aujourd’hui ĂȘtre considĂ©rĂ©e comme suffisamment solide pour pouvoir agir si besoin est. Pas le moindre pas en arriĂšre dans ce qui a Ă©tĂ© conquis : voilĂ  la consigne. [...] Si le pouvoir politique devait obliger Ă  rĂ©trocĂ©der, l’Organisation se dĂ©lierait de celui-ci et agirait pour son compte propre »[12]. Dans le mĂȘme mĂ©morandum, l’engagement et la disposition de l’UME Ă  en finir avec la RĂ©publique si les gauches devaient revenir au pouvoir se trouvaient clairement exprimĂ©s :

« L’UME accepte le statu quo prĂ©sent et toute Ă©ventuelle Ă©volution vers la droite, mais avec la consigne d’intervenir violemment au moment oĂč le pouvoir politique pencherait vers la gauche en permettant la participation au pouvoir de quelques-uns des partis coalisĂ©s lors de la rĂ©volution d’octobre.
Par sa tendance populiste, il est certain que Gil-Robles ne s’enhardira pas Ă  prendre la tĂȘte d’un mouvement de ce type Ă  partir du ministĂšre de la Guerre, mais l’UME le fera au moment oĂč il quitterait le ministĂšre par suite du changement de politique indiquĂ©[13]. »

Franco lui-mĂȘme, sans en ĂȘtre membre dĂ©clarĂ©, entretenait des relations avec l’organisation Ă  travers l’un des officiers de son Ă©quipe, le lieutenant-colonel Galarza Morante[14] - [15].

Conspirations

L’historien Gabriel Jackson affirme que plusieurs militaires qui allaient ultĂ©rieurement faire partie de l’UME s’étaient impliquĂ©s, d’une maniĂšre non encore Ă©lucidĂ©e, dans le coup d’État avortĂ© du gĂ©nĂ©ral Sanjurjo de 1932[16].

Deux ans aprĂšs la fondation de l’UME, un groupe d’officiers rĂ©publicains et de gauche emmenĂ© par Eleuterio DĂ­az-Tendero mit sur pied l’Union militaire rĂ©publicaine antifasciste (UMRA) pour contrebalancer la propagande diffusĂ©e dans l’armĂ©e par l’UME de droite[17].

DĂšs avant les Ă©lections de fĂ©vrier 1936, le ComitĂ© central de l’UME tint au logis du gĂ©nĂ©ral Barrera une rĂ©union avec le ComitĂ© officieux des gĂ©nĂ©raux, lequel, dirigĂ© d’abord par le gĂ©nĂ©ral Goded, puis par RodrĂ­guez del Barrio, prĂ©parait un coup de force contre la RĂ©publique, rĂ©union Ă  laquelle assistĂšrent plusieurs dĂ©lĂ©guĂ©s de divisions organiques. Au lendemain des Ă©lections, le nouveau gouvernement de Manuel Azaña dĂ©cida d’assigner au capitaine Barba un poste Ă  Valence pour l’éloigner du noyau de la conjuration, Ă  la suite de quoi la direction de l’UME fut confiĂ©e au colonel JoaquĂ­n Ortiz de ZĂĄrate, avec comme autres membres les lieutenants-colonels Alberto Álvarez RementerĂ­a (IngĂ©nieurs), AgustĂ­n Muñoz Grandes (Garde d'assaut, et futur homme fort de la dictature du gĂ©nĂ©ral Franco) et JosĂ© UngrĂ­a (futur chef du service d’information SIPM — Servicio de InformaciĂłn y PolicĂ­a Militar — dans le camp insurgĂ© pendant la Guerre civile)[18].

Dans les semaines suivant les Ă©lections de , remportĂ©es par le Front populaire, l’UMI connut une croissance notable chez les militaires de droite, en particulier chez les officiers jeunes déçus par l’action de JosĂ© MarĂ­a Gil-Robles au ministĂšre de la Guerre. Ainsi l’Organisation connut-elle une expansion considĂ©rable, de Madrid vers Barcelone, Pampelune, Saragosse, SĂ©ville, San SebastiĂĄn, vers la Galice et le protectorat du Maroc. En , une circulaire de l’Organisation assurait que 3 436 officiers avaient adhĂ©rĂ©, de mĂȘme que 2 131 sous-officiers et hommes de troupe, et 1 843 officiers retraitĂ©s ou rĂ©servistes ; cependant, selon des donnĂ©es plus fiables, elle ne regrouperait sans doute que 10 % environ du corps d’officiers. « En rĂ©alitĂ© », tient Ă  prĂ©ciser l’historien Eduardo GonzĂĄlez Calleja, « on dĂ©cidait de s’affilier davantage par solidaritĂ© de corps et par camaraderie que par vĂ©ritable vocation subversive, et seule une petite minoritĂ© Ă©tait disposĂ©e Ă  passer de la revendication purement corporatiste Ă  l’engagement rĂ©solu dans un complot anti-rĂ©publicain »[19].

L’UME se rallia Ă  la conspiration militaire qui dĂ©boucha sur le coup d’État de juillet 1936, Ă  l’origine de la Guerre civile. Ses reprĂ©sentants s’étaient rendus Ă  la rĂ©union du , la premiĂšre en date aprĂšs le scrutin de fĂ©vrier, convoquĂ©e par le gĂ©nĂ©ral Mola au domicile de l’officier de rĂ©serve et agent de change cĂ©diste JosĂ© Delgado y HernĂĄndez de Tejada, et Ă  laquelle avaient assistĂ© les gĂ©nĂ©raux Franco, Villegas, RodrĂ­guez del Barrio, Fanjul, Orgaz, Saliquet, GarcĂ­a de la HerrĂĄn et GonzĂĄlez Carrasco, ainsi que le lieutenant-colonel ValentĂ­n Galarza, dirigeant de l’UME, qui fut chargĂ© de centraliser les services d’information[19] - [20].

Il apparaĂźt donc qu’un bon nombre des militaires qui appuyĂšrent le coup d’État de Ă©taient issus de l’UME. Le conspirateur Emilio Mola Ă©tablit le contact avec l’UME par l’entremise du ComitĂ© de Barcelone prĂ©sidĂ© par le lieutenant-colonel Isarre BescĂłs. Dans la correspondance Ă©tait Ă©voquĂ©es les mesures de nature politique Ă  prendre une fois la rĂ©bellion victorieuse[21]. Ricardo Rada Ă©tait membre du Conseil exĂ©cutif de l’UME et, ayant pris en charge l’organisation militaire du RequetĂ© (milices carlistes), il fut amenĂ© Ă  ce titre Ă  encadrer plus de 30 000 hommes[22].

Le , Antonio Goicoechea, de RĂ©novation espagnole, informa le dirigeant fasciste italien Benito Mussolini des prĂ©paratifs du coup d’État et souligna que l’un des atouts des conjurĂ©s Ă©tait de pouvoir s’adosser Ă  l’UME[23] :

« Il existe dans l’armĂ©e une vaste organisation de caractĂšre patriotique et nationaliste, qui a Ă©tĂ© formĂ©e, orientĂ©e politiquement dans le sens antidĂ©mocratique et financĂ©e par nous ces derniĂšres annĂ©es. Pour l’exĂ©cution urgente d’un coup d’État avec les meilleures garanties de succĂšs, il nous faudrait une aide rapide d’un million de pesetas au minimum[24]. »

Notes et références

  1. E. GonzĂĄlez Calleja (2011), p. 290-291.
  2. G. Ranzato (2014), p. 147.
  3. Á. Viñas (2019), p. 417-419.
  4. E. GonzĂĄlez Calleja (2011), p. 291.
  5. (es) JoaquĂ­n ArrarĂĄs, Historia de la Segunda RepĂșblica Española, vol. IV, Madrid, Editora Nacional, , 525 p. (ISBN 978-8427600843), p. 301 (note de bas de page).
  6. Á. Viñas (2019), p. 417-420.
  7. E. GonzĂĄlez Calleja (2011), p. 295.
  8. (es) « Hoja clandestina de la Unión Militar Española haciendo un llamamiento a los militares tras la Revolución de Octubre de 1934 », Fundación Sancho el Sabio, (consulté le )
  9. E. GonzĂĄlez Calleja (2011), p. 291-293.
  10. Á. Viñas (2019), p. 121.
  11. E. GonzĂĄlez Calleja (2011), p. 294-295.
  12. Á. Viñas (2019), p. 423-425.
  13. Á. Viñas (2019), p. 423.
  14. (es) Stanley G. Payne et JesĂșs Palacios, Franco. Una biografĂ­a personal y polĂ­tica, Barcelone, Espasa, , 813 p. (ISBN 978-84-670-0992-7), p. 125.
  15. Andrée Bachoud, Franco, ou la réussite d'un homme ordinaire, Paris, Fayard, , 530 p. (ISBN 978-2213027838), p. 112.
  16. (es) Gabriel Jackson, La Republica Española y la Guerra Civil, Barcelone, Mundo Actual, , 494 p. (ISBN 978-8474540109), p. 206.
  17. (es) César Vidal, « La reforma militar de Azaña (Breve historia de la España para inmigrantes, nuevos Españoles y víctimas de la LOGSE) », sur LibertadDigital.com, (consulté le ).
  18. E. GonzĂĄlez Calleja (2011), p. 340-341.
  19. E. GonzĂĄlez Calleja (2011), p. 341.
  20. (es) Paul Preston, Franco : caudillo de España, Barcelone, Grijalbo, , 1040 p. (ISBN 978-84-253-2498-7), p. 160
  21. (es) José del Castillo et Santiago Álvarez, Barcelona, objetivo cubierto, Barcelone, Editorial Timón, , 280 p..
  22. (es) José Martín Brocos Fernåndez, « Inspector general de Requetés. In memoriam Teniente General Ricardo de Rada y Peral, Primer General Jefe de la Acorazada Brunete », sur Requetés.com.
  23. E. GonzĂĄlez Calleja (2011), p. 355.
  24. Rapport de Goicoechea Ă  Mussolini du 14 juin 1936, dans : ASMAE, Spagna, Fondo di Guerra, carton 5, fascicule 1, citĂ© par (it) Massimo Mazzetti, « I contatti del governo italiano con i cospiratori militari spagnoli prima luglio 1936 », Storia Contemporanea,‎ , p. 1191-1194 et par (es) Ismael Saz Campos, « De la conspiraciĂłn a la intervenciĂłn. Mussolini y el Alzamiento Nacional », Cuadernos de Trabajos, Escuela Española de Historia y ArqueologĂ­a en Roma, no 15,‎ , p. 336-339.

Bibliographie

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  • (es) Julio Busquets i Bragulat, « Conservadurismo, republicanismo y antirrepublicanismo en las Fuerzas Armadas », Anales de Historia ContemporĂĄnea, Murcie, universitĂ© de Murcie / dĂ©partement d’histoire moderne, contemporaine et de l’AmĂ©rique, vol. 7,‎ , p. 73-91 (ISSN 0212-6559, lire en ligne).
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  • Ángel Viñas, ÂżQuiĂ©n quiso la guerra civil? Historia de una conspiraciĂłn, Barcelona, CrĂ­tica, , 504 p. (ISBN 978-84-9199-090-1).
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