Politique en Ouzbékistan
LâOuzbĂ©kistan est une rĂ©publique prĂ©sidentielle oĂč le prĂ©sident est Ă la fois chef de l'Ătat et chef du gouvernement. Le pouvoir exĂ©cutif est exercĂ© par le gouvernement tandis que le pouvoir lĂ©gislatif est partagĂ© entre le gouvernement et les deux chambres du parlement. Le paysage politique est davantage façonnĂ© par les clans que par les partis. L'OuzbĂ©kistan en tant qu'entitĂ© existe depuis le , lorsque diverses entitĂ©s territoriales d'Asie centrale (une partie du Turkestan, de la rĂ©publique de Boukhara et de la rĂ©publique de Khorezm) furent regroupĂ©es dans la RSS d'OuzbĂ©kistan (1924-1991). Le , l'OuzbĂ©kistan intĂšgre l'URSS. L'OuzbĂ©kistan a dĂ©clarĂ© son indĂ©pendance le (cĂ©lĂ©brĂ©e le 1er septembre). La Constitution de l'OuzbĂ©kistan indĂ©pendant a Ă©tĂ© adoptĂ©e le .
Le pays est dirigé depuis 2016 par Shavkat Mirziyoyev.
Les collectivitĂ©s territoriales disposent de leurs propres organes de reprĂ©sentation (gouverneurs et assemblĂ©es territoriales), notamment la rĂ©publique autonome du Karakalpakistan (Qoraqalpogâiston Respublikasi).
165 Ătats ont reconnu l'OuzbĂ©kistan, dont 103 ont Ă©tabli des rapports diplomatiques avec lui. Plus de quarante missions diplomatiques exercent leurs fonctions Ă Tachkent. L'OuzbĂ©kistan dispose d'ambassades dans 25 pays.
Pouvoir exécutif
Fonction | Nom | Parti | Depuis |
---|---|---|---|
Président | Shavkat Mirziyoyev | PLDO | |
Premier ministre | Abdulla Oripov | PLDO |
Le président est élu pour cinq ans au suffrage universel direct. Il nomme le gouvernement, qui doit recevoir l'investiture du Parlement.
Islam Karimov fit prolonger son mandat par référendum par deux fois, en décembre 1995 (jusqu'en 2000) puis en janvier 2002 (jusqu'en 2007), afin de contourner la limite constitutionnelle de deux mandats consécutifs. La majorité des observateurs internationaux refusÚrent de prendre part au processus, considérant qu'il n'était pas conforme aux standards démocratiques de base.
Le Sénat de l'Ouzbékistan a approuvé le un amendement constitutionnel qui réduit le mandat présidentiel de sept à cinq ans. La Chambre basse du parlement, la Chambre législative, a approuvé le changement plus tÎt. Le changement a été initié par le président Islam Karimov. La Constitution de l'Ouzbékistan avait fixé le mandat présidentiel à cinq ans mais un référendum en 2002 avait étendu le mandat à sept ans.
Depuis le , Shavkat Mirziyoyev est le nouveau président de l'Ouzbékistan.
Pouvoir législatif
L'Assemblée nationale compte deux chambres depuis 2004:
- la chambre haute, le Sénat, est composée de 100 sénateurs dont 84 sont élus par les conseils régionaux et 16 sont nommés par le Président.
- la chambre basse, la Chambre législative, est composée de 150 députés dont 135 sont élus au suffrage universel direct au scrutin uninominal majoritaire à deux tours, dans le cadre de circonscriptions territoriales uninominales.
La durée du mandats de tous les parlementaires est de 5 ans.
Partis politiques et Ă©lections
- Parti démocrate populaire (CDP)
- Parti du renoncement personnel ou Parti national démocrate Fidokorlar (F)
- Parti du progrÚs de la nation (VT) (nota : F et VT ont fusionné)
- Adolat (Justice) (A)
- Parti de la renaissance démocrate nationale (MTP)
- Parti social-démocrate
Tous soutiennent la politique du président Karimov et leurs programmes diffÚrent peu de la ligne politique officielle. Les partis d'opposition Erk et Birlik sont interdits, accusés de soutenir les mouvances terroristes.
Ălections lĂ©gislatives du 26 dĂ©cembre 2004
Cinq cents candidats se sont présentés aux élections législatives du pour renouveler les 120 siÚges de la chambre basse du parlement (Oliy Majlis). Les partis d'opposition tels Erk ou Birlik ont été interdits de participation au scrutin et leurs dirigeants, la plupart en exil, ont appelé au boycott des élections.
Ces Ă©lections ont Ă©tĂ© critiquĂ©es par les 20 observateurs de l'OSCE, qui les jugent « loin des normes de l'OSCE et d'autres rĂšgles internationales pour des Ă©lections dĂ©mocratiques ». Les observateurs de la CommunautĂ© des Ătats indĂ©pendants (CEI) ont pour leur part jugĂ© que les Ă©lections se sont dĂ©roulĂ©es correctement et que les quelques irrĂ©gularitĂ©s n'ont pu fausser le rĂ©sultat final des Ă©lections. La diffĂ©rence de jugement entre les deux organisations s'explique aussi par diffĂ©rents degrĂ©s de comprĂ©hension des mĂ©canismes de fonctionnement politique de la sociĂ©tĂ© ouzbĂške. La sociĂ©tĂ© ouzbĂške n'est pas acquise Ă la dĂ©mocratie Ă l'occidentale et la structure du pouvoir reste basĂ©e sur les anciens plutĂŽt que sur les Ă©lus.
Le président Islam Karimov, a pour sa part déclaré : « les conclusions de l'OSCE ne sont pas trÚs importantes pour nous, et l'OSCE n'est pas la seule organisation ». Il a dénoncé l'implications des Occidentaux dans les actuelles révolutions touchant plusieurs pays de l'ancienne URSS, en faisant référence à la Géorgie et à l'Ukraine.
Les résultats des élections ont été communiqués par le gouvernement en janvier 2005.
Pouvoir judiciaire
La Cour suprĂȘme est la plus haute instance judiciaire ordinaire du pays. La Cour constitutionnelle veille Ă la conformitĂ© des lois avec la constitution, tandis que la Haute cour Ă©conomique rĂšgle les litiges d'ordre Ă©conomique et commercial.
Droits de l'homme
Les ONG présentes en Asie centrale ainsi que l'ONU dénoncent les tortures, le manque de démocratie, la répression contre l'opposition politique et religieuse, l'absence de liberté de la presse. Le chef du parti Erk, Muhammad Solih fut contraint à l'exil alors que son collÚgue Atanazar Oripov est en détention.
Le , le régime ouzbek réprime une insurrection populaire dans la vallée de la Ferghana, en faisant tirer sur les insurgés à la mitrailleuse lourde, provoquant 169 morts selon les sources officielles ouzbÚkes, 769 morts selon l'opposition, des ONG présentes sur place estimant qu'il y en aurait plus d'un millier.
En octobre 2004, l'ambassadeur du Royaume-Uni en Ouzbékistan, Craig Murray, est démis de ses fonctions, officiellement "pour raisons opérationnelles". Selon le diplomate[1], cette mesure répond en fait à la fuite d'une note interne de sa part, critiquant la politique de la CIA et de MI6 d'accepter volontiers des services de sécurité ouzbeks des informations obtenues par la torture.
En 2012, une enquĂȘte de la BBC affirme avoir dĂ©couvert l'existence d'un programme de stĂ©rilisation forcĂ©e qui serait utilisĂ© par le gouvernement dans un but de contrĂŽle dĂ©mographique[2], ce que les autoritĂ©s ouzbĂškes nient[3].
En 2017, une enquĂȘte de Cash Investigation met en Ă©vidence l'existence de travail forcĂ© et de travail des enfants dans l'industrie du coton dans le pays[4].
Relations internationales
Relations avec les Ătats-Unis
Peu aprĂšs les attentats du aux Ătats-Unis, le prĂ©sident Islam Karimov accepte de soutenir les Ătats-Unis dans leur « guerre contre le terrorisme », et que son pays serve de base arriĂšre aux opĂ©rations de la guerre d'Afghanistan. Des installations militaires, dont la base aĂ©rienne K2 Ă Khanabad y furent utilisĂ©es par la coalition. Les autoritĂ©s ouzbĂškes comptaient sur la coopĂ©ration Ă©conomique et militaire stratĂ©gique avec les Ătats-Unis pour aider Tachkent Ă rĂ©soudre ses problĂšmes Ă©conomiques et politiques.
Cependant, vers la fin de 2002, Tachkent commençait Ă mal supporter sa dĂ©pendance excessive dans diffĂ©rents domaines consĂ©cutive Ă l'implantation de sites militaires amĂ©ricains sur le sol ouzbek. Le , Ă la suite de la dĂ©gradation des relations et l'exfiltration de plus de 450 rĂ©fugiĂ©s ouzbeks par l'Organisation des Nations unies (ONU) Ă partir des bases amĂ©ricaines, le gouvernement ouzbek rompt l'entente sur l'utilisation des bases aĂ©riennes par les Ătats-Unis.
Au lendemain de l'Ă©crasement de la tentative d'insurrection Ă Andijan, les Ătats occidentaux et leurs organisations de dĂ©fense des droits de l'homme ont dĂ©clenchĂ© une guerre mĂ©diatique contre l'OuzbĂ©kistan en demandant le renforcement de la pression Ă©conomique et politique sur le rĂ©gime en place. Tachkent a rĂ©agi en fermant la base militaire amĂ©ricaine dĂ©ployĂ©e sur son territoire, en rĂ©orientant sa politique extĂ©rieure vers la Russie, qui s'est retenue de critiquer la rĂ©pression Ă Andijan, en adhĂ©rant Ă la CommunautĂ© Ă©conomique eurasiatique (CEE), organisation sous l'Ă©gide de Moscou. Cependant, le l'OuzbĂ©kistan suspend son affiliation Ă cette organisation, signe d'un certain volte-face vis-Ă -vis la Russie[5].
Relations avec la Russie
En , le prĂ©sident ouzbek a signĂ© une alliance avec la Russie portant sur la crĂ©ation des forces inter-Ă©tatiques de l'intervention rapide en cas de conflits internes, un gage supplĂ©mentaire du renforcement de son rĂ©gime. Un nouvel accord entre la Russie et lâOuzbĂ©kistan prĂ©voyant la possibilitĂ© dâintervenir militairement en cas dâagression par un tiers a Ă©tĂ© Ă©galement signĂ© le . L'OuzbĂ©kistan a par ailleurs intĂ©grĂ© le l'Organisation du traitĂ© de sĂ©curitĂ© collective, organisme qui regroupe six anciennes rĂ©publiques soviĂ©tiques sous l'Ă©gide de Moscou. Il a proposĂ© par ailleurs d'y incorporer les structures d'espionnage et de contre-espionnage communs, ainsi que les mĂ©canismes des garanties du maintien des rĂ©gimes en place contre les "rĂ©volutions de couleur".
Le réchauffement politique avec la Russie a eu pour résultat les investissements massifs des compagnies russes sur le sol ouzbek (dans le domaine de l'énergie, des télécommunications, de l'aviation civile ou encore de l'agro-alimentaire), ainsi que la hausse substantielle des échanges commerciaux bilatéraux (3 milliards de dollars en 2006, +42 % par rapport à 2005).
En visite officielle à Tachkent le , le président russe Dmitri Medvedev a fait part du passage des livraisons du gaz ouzbek aux prix du marché et du financement des nouveaux gazoducs. Le géant gazier russe Gazprom achÚtera le gaz ouzbek 340 dollars les mille mÚtres cubes à partir du premier semestre 2009 (contre 140 dollars en 2008). Tachkent livrera 31 mds de m3 à la Russie en 2009. Les liens économiques se renforceront également dans le domaine de l'aéronautique, le constructeur des Iliouchine-76 cargo ouzbek TAPOiTCh va probablement intégrer la nouvelle holding d'aviation russe[6].
Youri Korepanov, un colonel russe ĂągĂ© de la soixantaine, est arrĂȘtĂ© Ă la frontiĂšre ouzbĂške et condamnĂ© le Ă huis clos Ă 16 ans de prison ferme pour la "haute trahison" de l'OuzbĂ©kistan pour une raison qui serait relative au fait qu'il n'avait pas rempli correctement tous les papiers pour renoncer Ă sa nationalitĂ© ouzbĂške. DĂ©but , le colonel est relĂąchĂ© sous la pression des autoritĂ©s russes, ayant subi une crise cardiaque en prison[7] - [8].
Relations avec les Ătats voisins
Les relations avec les voisins centre-asiatiques restent tendues en raison de contentieux historiques, Ă©conomiques et politiques (question de la dĂ©marcation des frontiĂšres notamment dans la vallĂ©e de Ferghana). La rencontre, en novembre 2004, entre le prĂ©sident Karimov et son homologue turkmĂšne a permis de renouer un dialogue qui Ă©tait au point mort depuis 2002. Tachkent aspire comme son voisin kazakh au leadership rĂ©gional et connait des relations parfois tendues avec ses voisins tadjik et kirghize. Tachkent qui a toujours cultivĂ© des relations de proximitĂ© avec les Ouzbeks dâAfghanistan, sâest en revanche rapprochĂ© de Kaboul et participe avec TĂ©hĂ©ran Ă des projets de dĂ©senclavement par la route du pays (route Termez-Mazar-Bandar el Abbas).
Tachkent participe, par ailleurs, Ă lâOrganisation de coopĂ©ration de Shanghai (OCS), organisation Ă dominante sĂ©curitaire (coordination de la lutte anti-terroriste et de la surveillance aux frontiĂšres), qui rassemble les pays dâAsie centrale (Ă lâexclusion du TurkmĂ©nistan), la Russie et la Chine. Le centre rĂ©gional de lutte anti-terroriste a Ă©tĂ© inaugurĂ© Ă Tachkent en .
Relations avec la France
Dans le domaine de relations Ă©conomiques, le total des Ă©changes Ă©conomiques franco-ouzbeks est relativement marginal mais a tendance Ă augmenter : ils ont doublĂ© entre 2006 et 2007 pour atteindre 51,7 millions d'euros dâexportations françaises et 157,4 millions d'euros dâexportations ouzbĂšques[9]. La majeure partie des exportations ouzbĂšques concerne les produits Ă©nergĂ©tiques alors que les exportations françaises sont plus diversifiĂ©es (notamment des composants Ă©lectroniques et Ă©lectriques et des produits chimiques). 35 entreprises françaises ont investi en OuzbĂ©kistan mais seulement de maniĂšre significative : Geocoton (anciennement Dagris) depuis 2000 et JCDecaux depuis 2006.
Dans le domaine de relations culturelles, la France possÚde des Centres culturels français à Tachkent et à Samarcande. D'autre part, Tachkent accueille l'Institut français d'études sur l'Asie centrale (IFEAC)[10]. Par ailleurs, il existe une école française à Tachkent[11], homologuée par l'AEFE depuis 2001.
Le , Lola Karimova-Tillyaeva, fille cadette du président ouzbek, attaque le journal français Rue89 pour « diffamation » de son pÚre Islam Karimov, notamment pour l'avoir qualifié de « dictateur »[12]. Fin , la 17e chambre correctionnelle du Tribunal judiciaire de Paris relaxe Rue89.fr de toutes les accusations de la fille du président[13].
Participation internationale
La rĂ©publique d'OuzbĂ©kistan est membre de l'ONU, de l'OSCE, de l'UNESCO, de l'OMS, de l'Organisation mondiale du tourisme, etc. Le OuzbĂ©kistan devient membre adhĂ©rent Ă la CommunautĂ© des Ătats indĂ©pendants (traitĂ© d'Almaty), regroupant 12 des 15 anciennes rĂ©publiques de l'URSS. Le elle intĂšgre aussi la CommunautĂ© Ă©conomique eurasiatique, ainsi que l'Organisation du traitĂ© de sĂ©curitĂ© collective le , signe de rapprochement avec Moscou. Le , le gouvernement ouzbek a dĂ©cidĂ© d'adhĂ©rer Ă l'Accord de coopĂ©ration en matiĂšre d'exĂ©cution des peines pĂ©nales au sein de la CommunautĂ© Ă©conomique eurasienne. En , l'OuzbĂ©kistan suspend sa participation Ă la CEEA[14].
Notes et références
- Craig Murray
- Histoire du Monde : stérilisation forcée en Ouzbékistan, RTBF Info, 25 avril 2012
- L'Ouzbékistan nie contraindre des femmes à la stérilisation, LCI, 23 avril 2012
- Anna Breteau, « Cash Investigation : d'oĂč vient le coton de nos vĂȘtements ? », lepoint.fr, 28 novembre 2017.
- (ru)
- Russie-Ouzbékistan: Medvedev prÎne un élargissement de la coopération gaziÚre et Gaz: Tachkent livrera 31 mds de m3 à Moscou en 2009 RIA Novosti, le 23/01/2009
- (fr) Tachkent refuse de présenter à Moscou des informations sur Iouri Korepanov. Voix de Russie le 22.01.2011
- (ru) Agence de presse Ferghana.ru le 11.07.2011
- « Relations commerciales bilatérales »(Archive.org ⹠Wikiwix ⹠Archive.is ⹠Google ⹠Que faire ?) sur le site de l'Ambassade de France en Ouzbékistan (page consultée le 26 septembre 2008).
- Site de l'IFEAC
- Site de l'Ecole française de Tachkent
- Le procĂšs de Rue89 devient celui de la dictature ouzbek, Rue89, 20 mai 2011.
- ProcÚs : Rue89 relaxé face à la fille du dictateur ouzbek, Rue89, 1 juillet 2011.
- (en) UZBEKISTAN: EVALUATING TASHKENTâS REASON FOR LEAVING THE EURASIAN ECONOMIC COMMUNITY, eurasianet.org, 25 novembre 2008.
Voir aussi
Bibliographie
- Jacques Barrat, Coline Ferro et Charlotte Wang, Géopolitique de l'Ouzbékistan, SPM, Paris, 2011, 217 p. (ISBN 978-2-901952-77-0)
- (en) Dagikhudo Dagiev, Regime transition in Central Asia : stateness, nationalism and political change in Tajikistan and Uzbekistan, Routledge, Taylor & Francis Group, London, New York, 2014, 239 p. (ISBN 978-0-415-66310-6)