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Pierre Klossowski

Pierre Klossowski, né le à Paris et mort le dans la même ville[1], est un romancier, essayiste, philosophe, traducteur, scénariste et peintre français.

Pierre Klossowski
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Autres informations
Représenté par
Gladstone Gallery (d)
Distinction
Ĺ’uvres principales
  • Sade mon prochain (1947)
  • La Vocation suspendue (1950)
  • Les Lois de l'hospitalitĂ© dont
    • Roberte, ce soir (1953)
    • La RĂ©vocation de l'Ă©dit de Nantes (1959)
    • Le Souffleur ou le Théâtre de la sociĂ©tĂ© (1960)
  • Le Bain de Diane (1956)
  • Un si funeste dĂ©sir (1963)
  • Le Baphomet (1965)
  • Nietzsche et le cercle vicieux (1969)
  • La Monnaie vivante, photographies de Pierre Zucca (1970)
  • Les Derniers Travaux de Gulliver suivi de Sade et Fourier (1974)
  • La Ressemblance (1984)

Biographie

Issu d'une famille de lointaine origine polonaise, Pierre Klossowski est le frère aîné du peintre Balthus. Leur père, Erich Klossowski, est peintre et historien de l'art ; leur mère (Elisabeth Dorothea Spiro, connue sous le nom de Baladine Klossowska) fut une élève de Pierre Bonnard.

L'enfance et l'adolescence des deux frères se passent dans un milieu d'artistes et d'écrivains. Dans leur entourage immédiat, les rapports d'intimité avec Rainer Maria Rilke, qui devient l'amant de sa mère (alors qu'il a quinze ans et son jeune frère, onze), puis la fréquentation d'André Gide sont déterminants pour les orientations respectives des deux garçons — surtout pour Pierre, que Gide guidera le temps de ses études secondaires au lycée Janson-de-Sailly.

Le contact quotidien avec l'auteur de L'Immoraliste fait surgir en Pierre Klossowski un ensemble de dilemmes moraux qui vont l'absorber durant de longues années avant de pouvoir être résolus dans la création d'une œuvre.

En 1928, Klossowski collabore avec Pierre Jean Jouve à la traduction des Poèmes de la folie de Friedrich Hölderlin.

À partir de 1935, après avoir fréquenté les milieux de la Société psychanalytique de Paris, dont la revue a publié son premier texte sur Sade, il rencontre Georges Bataille avec lequel il se lie d'une amitié profonde qui durera jusqu'à la mort de celui-ci. C'est à l'instigation de Bataille que Klossowski prend contact avec André Breton et Maurice Heine, au sein du groupe Contre-Attaque (1935) ; il participe ensuite activement à la revue Acéphale (1936-1939), ainsi qu'à la société secrète du même nom, puis au Collège de Sociologie (1937-1939), et se lie avec le peintre André Masson.

Durant l'Occupation allemande, Klossowski entreprend des études de scolastique et de théologie à la faculté dominicaine de Saint-Maximin, puis à Lyon au théologat jésuite de Fourvière et, enfin, à Paris, à l'Institut catholique. Il se trouve en contact avec des réseaux de la Résistance. À la Libération, il collabore à la revue œcuménique Dieu vivant. Mais, revenu à la vie laïque en renonçant à son noviciat en 1942[2], il épouse en 1947 Denise Morin, veuve d'un résistant exécuté par les nazis et elle-même résistante rescapée du camp de Ravensbrück. Elle deviendra en quelque sorte sa « muse », lui inspirant le personnage de Roberte, son « signe unique » comme il le dit et le théorise lui-même, la « femme unique » au centre de son cycle romanesque intitulé Les Lois de l'hospitalité[3]. La même année, il publie un essai retentissant, Sade mon prochain.

En 1950, son premier roman, La Vocation suspendue, est une des transpositions des vicissitudes de sa crise religieuse. Mais le plus important de son œuvre romanesque est contenu, d'une part, dans la trilogie des Lois de l'hospitalité, réunissant La Révocation de l'Édit de Nantes (1959), Roberte, ce soir (1953) et Le Souffleur 1960) et, d'autre part, dans Le Baphomet, (1965 - prix des Critiques). Il se met à dessiner au début des années 1950.

Quittant peu à peu l'univers fictionnel, Pierre Klossowski écrit alors plusieurs essais philosophiques, dont Le Bain de Diane (1956 - mis en scène par Simone Benmussa au Théâtre du Rond-Point en 1986, avec la voix enregistrée de l'auteur), ou encore Un si funeste désir (1963). En 1963, par l'intermédiaire de Roland Barthes il rencontre Michel Foucault avec lequel il se lie d'amitié et à qui il dédie son roman Le Baphomet (1965)[4]. En 1970 Foucault, qui considère Klossowski comme l'un des écrivains vivants les plus importants, avec Bataille et Blanchot, écrit une lettre préface à son essai intitulé La Monnaie vivante (illustré de 65 photographies de Pierre Zucca et 11 dessins de Klossowski), texte sur les avatars du désir, de la valeur et du simulacre qu'il considère comme « le plus haut livre de notre époque »[5]. Écrit après Nietzsche et le cercle vicieux, Klossowski y reprend ses commentaires sur « la sémiotique pulsionnelle » de Nietzsche, et à la lumière de Sade, développe une sorte de « contre-utopie » sur l'échange des corps inéchangeables, les corps vivants pris dans une logique de l'échange[6].

Ă€ la mĂŞme Ă©poque, Klossowski travaille sur Nietzsche, notamment Ă  ses traductions du Gai Savoir, qui doit inaugurer l'Ă©dition des Ĺ’uvres complètes dirigĂ©e par Gilles Deleuze et Michel Foucault, et publie un essai intitulĂ© Nietzsche et le Cercle vicieux (Mercure de France, 1969), Ă©galement saluĂ© par Foucault en ces termes : « C’est le plus grand livre de philosophie que j’ai lu, avec Nietzsche lui-mĂŞme »[7].

En outre, au cinéma, Klossowski apparaît comme interprète dans le film de Robert Bresson, Au hasard Balthazar (1966), où il joue le rôle de l'avare concupiscent, ainsi que dans celui de Pierre Zucca, Roberte (1978, avec sa femme Denise dans le rôle éponyme) qui s'inspire de sa trilogie des Lois de l'hospitalité. Il collabore également à la conception de 2 films de Raul Ruiz, L'Hypothèse du tableau volé (1979) et La Vocation suspendue.

À partir des années 1980, il se consacre presque exclusivement au dessin. Le nu et le demi-nu féminins, mis en scène dans des fictions érotiques et sado-philosophiques, sont des motifs constants dans ses œuvres. Klossowski dessine des fantasmes qui ne se réalisent que sur le papier, centrés autour de la figure romanesque de Roberte, inspirée par son épouse Denise, qu'on reconnaît également derrière les portraits de garçons ou silhouettes androgynes. Les allusions littéraires sont également très nombreuses : à ses propres écrits, aux mythes antiques, à Sade, Dumas, Mirbeau, Apollinaire ou Bataille. Des expositions en France et à l'étranger montrent que sa réputation, dans ce domaine, n'a fait que grandir.

Il meurt à l'âge de 96 ans, six mois après son frère, le peintre Balthus et sa femme Denise meurt centenaire en 2019.

Distinction

Publications

RĂ©cits, romans et essais

  • Sade mon prochain, Paris, Éditions du Seuil, 1947
  • La Vocation suspendue, Paris, Gallimard, 1950
  • Roberte, ce soir, Paris, Éditions de Minuit, 1953
  • Le Bain de Diane, Paris, Jean-Jacques Pauvert, 1956
  • La RĂ©vocation de l'Édit de Nantes, Paris, Éditions de Minuit, 1959
  • Le Souffleur ou Un théâtre de sociĂ©tĂ©, Paris, Jean-Jacques Pauvert, 1960
  • Un si funeste dĂ©sir, recueil d'articles, Paris, Gallimard, 1963
  • Les Lois de l'hospitalitĂ© (La RĂ©vocation de l'Édit de Nantes, Roberte, ce soir, Le Souffleur), Ă©dition dĂ©finitive augmentĂ©e d'un avertissement et d'une postface, Paris, Gallimard, coll. « Le Chemin », 1965
  • Le Baphomet, Paris, Le Mercure de France, 1965
  • Sade mon prochain, nouvelle Ă©dition prĂ©cĂ©dĂ©e d'un avertissement et de Le Philosophe scĂ©lĂ©rat, Paris, Éditions du Seuil, 1967
  • Origines cultuelles et mythiques d'un certain comportement des Dames Romaines, Montpellier, Fata Morgana, 1968 - nouvelle Ă©dition, 2010
  • Nietzsche et le cercle vicieux, Paris, Mercure de France, 1969
  • Les derniers travaux de Gulliver suivi de Sade et Fourier, Montpellier, Fata morgana, 1974
  • La Ressemblance, recueil d'articles suivi d'un entretien avec Alain Arnaud, Marseille, AndrĂ© Dimanche, 1984
  • Le Mage du Nord, essai sur Hamann et traduction des Lettres de J. G. Hamann et Golgotha et Scheblimini, Montpellier, Fata Morgana, 1988
  • La Monnaie vivante, prĂ©cĂ©dĂ© d'une lettre de Michel Foucault Ă  l'auteur sur La Monnaie vivante, illustrĂ© de 65 photographies de Pierre Zucca et de 11 dessins par Pierre Klossowski, Paris, Éric Losfeld, 1970 ; rĂ©Ă©d. Paris, JoĂ«lle Losfeld, 1994 ; rĂ©Ă©d. en poche, Paris, Rivages, coll. « Rivages poche. Petite bibliothèque », 1997
  • L'Adolescent immortel, Paris, Gallimard, coll. « Le Cabinet des lettrĂ©s », 2001
  • Écrits d'un monomane. Essais 1933-1939, Paris, Gallimard, coll. « Le Promeneur », 2001
  • Tableaux vivants. Essais critiques, 1936-1983, Paris, Gallimard, coll. « Le Promeneur », 2001
  • Du signe unique : Feuillets inĂ©dits, prĂ©face de Guillaume Perrier, Paris, Les petits matins, coll. « Les grands soirs », 2018
  • Sur Proust, Ă©ditĂ© et prĂ©facĂ© par Luc Lagarde, Paris, Serge Safran Éditeur, 2019 (inĂ©dit)
  • Les Doublures. Manuscrits du Souffleur et autres documents, Ă©dition de Guillaume Perrier, Paris, Éditions Ismael, 2021

Quelques articles

  • « Qui est mon prochain ? », dans Esprit, dĂ©cembre 1938, dossier sur le « prĂ©fascisme français », p. 402-423 (lire en ligne), article prĂ©sentĂ© par MichaĂ«l Foessel dans le podcast de la revue en septembre 2022[8] ;
  • « Fragments d'une lettre Ă  Michel Butor », dans Les Cahiers du Chemin, no 1, , p. 90 ;
  • « L'Indiscernable », dans La NRF, no 306, , p. 20–29 ;
  • « Le plus grave malentendu », dans Les Cahiers du Chemin, no 5, , p. 104 ;
  • « Premier entretien sur l'idĂ©e du porte-malheur », dans Les Cahiers du Chemin, no 16, , p. 10 ;
  • « La dĂ©cadence du Nu », dans Les Cahiers du Chemin, no 27, , p. 108 ;
  • « Aux limites de l'indiscrĂ©tion », entretien avec J.-M. Monnoyer, dans La NRF, no 325, , p. 70–86 ;
  • « Jean-NoĂ«l Vuarnet », dans La NRF, no 338, , p. 82–93.

Traductions

  • Poèmes de la folie de Hölderlin, traduction de Pierre Jean Jouve avec la collaboration de Pierre Klossowski, avant-propos de Bernard Groethuysen, Paris, Fourcade, 1930 ; rĂ©Ă©d. Gallimard, 1963
  • Friedrich Sieburg, DĂ©fense du nationalisme allemand, Paris, Grasset, 1933
  • Friedrich Sieburg, Robespierre, Paris, Ernest Flammarion, 1936
  • Max Scheler, Le sens de la souffrance suivi de deux autres essais : Repentir et renaissance, Amour et connaissance, Paris, Aubier, 1936
  • Franz Kafka, Journal intime, suivi de Esquisse d'une autobiographie, de ConsidĂ©rations sur le pĂ©chĂ© et de MĂ©ditations, Paris, Grasset, 1945
  • Johann Georg Hamann, MĂ©ditations bibliques, Paris, Éditions de Minuit, 1948. RĂ©Ă©dition critique, Éditions Ionas, 2016.
  • Friedrich Nietzsche, Le Gai Savoir, Paris, Club français du livre, 1954 ; repris dans l'Ă©dition des Ĺ’uvres complètes, sous la direction de Gilles Deleuze et Michel Foucault, Paris, Gallimard, 1967
  • SuĂ©tone, Vie des douze CĂ©sar, Paris, Club français du livre, 1959
  • Paul Klee, Journal, Paris, Grasset, 1959
  • Ludwig Wittgenstein, Tractatus logico-philosophicus, suivi des Investigations philosophiques, Paris, Gallimard, coll. Bibliothèque des idĂ©es, 1961
  • Li-Yu, La Chair comme tapis de prière, Paris, Jean-Jacques Pauvert, 1962
  • Virgile, L'ÉnĂ©ide, Paris, Gallimard, 1964
  • Martin Heidegger, Nietzsche, traduit de l'allemand par Pierre Klossowski, Paris, Gallimard, 1971

Notes et références

  1. Relevé des fichiers de l'Insee
  2. Notice dans le Dictionnaire biographique des frères prêcheurs (lire en ligne).
  3. Denise Klossowski (Denise Marie Roberte Morin-Sinclaire) est décédée le 2 février 2019 à l'âge de 100 ans. Décès de Denise Klossowski
  4. Didier Eribon, Michel Foucault, 1926-1984, nouvelle édition, revue et augmentée, Flammarion, coll. « Champs : biographie », 2011, p. 180.
  5. La Monnaie vivante, lettre de Michel Foucault à l'auteur, Éric Losfeld, 1970, p. 9.
  6. « L’échange du bien inéchangeable. Variations sur une utopie de Pierre Klossowski », dans La Cause freudienne, par Hervé Castanet, n° 69, février 2008, p. 72-79
  7. Nietzsche et le Cercle vicieux, précédé d'une lettre de Foucault à Klossowski, Mercure de France, 1969, p. 11.
  8. Michaël Foessel, « La tentation fasciste selon Pierre Klossowski », écriture et préparation par Anne Dujin et Rémi Baille [audio], Esprit, (consulté le )

Voir aussi

Bibliographie

  • Giulia Agostini: Der Riss im Text. Schein und Wahrheit im Werk Pierre Klossowskis, Munich, Wilhelm Fink Verlag, 2012, (ISBN 978-3-7705-5323-5).
  • Alain Arnaud, Pierre Klossowski, Paris, Éditions du Seuil, coll. « Les Contemporains », 1990 (ISBN 978-2-02-011495-0)
  • Jean-Paul Curnier, Ă€ vif. Artaud, Nietzsche, Bataille, Pasolini, Sade, Klossowski, Paris, Éditions Lignes-Manifestes, 2006
  • Jean Decottignies, Klossowski, notre prochain, Paris, Henri Veyrier, 1985 (ISBN 978-2-85199-377-9)
  • Jean Decottignies, Pierre Klossowski. Biographie d’un monomane, Villeneuve-d'Ascq, Presses universitaires du Septentrion, 1997 (ISBN 978-2-85939-523-0)
  • Gilles Deleuze, « Pierre Klossowski ou les corps-langage », in Critique, n° 214, 1965 ; repris, remaniĂ©, dans Logique du sens, Paris, Éditions de Minuit, coll. « Critique », 1969
  • Jacques Henric, Pierre Klossowski, Paris, Adam Biro, 1989
  • Anne-Marie Lugan-Dardigna, Klossowski, l'homme aux simulacres, Paris, Navarin, 1986 (ISBN 2-86827-044-1)
  • Jean-Paul Madou, DĂ©mons et simulacres dans l’œuvre de Pierre Klossowski, Paris, MĂ©ridiens Klincksieck, 1987 (ISBN 978-2-86563-182-7)
  • Michel Surya, « L’ImprĂ©cation littĂ©raire : Antelme, Artaud, Bataille, Chestov, Debord, Klossowski, Salman Rushdie, Sade », in MatĂ©riologies, I, Paris, Farrago, 1999
  • Thierry Tremblay, Anamnèses. Essai sur l'Ĺ“uvre de Pierre Klossowski, Paris, Hermann, coll. « Fictions pensantes », 2012 (ISBN 978-2-70568-277-4)
  • Slaven Waelti, Klossowski, l'incommunicable : Lectures complices de Gide, Bataille et Nietzsche, Paris, Droz, 2015
  • Collectif Pierre Klossowski, dir. Thierry Tremblay, Europe, Paris, n° 1034-1035, juin- (ISBN 9782351500736)
  • Collectif Leçon d’économie gĂ©nĂ©rale : l’expĂ©rience-limite chez Bataille-Blanchot-Klossowski, dir. Alain Milon, Paris, Presses universitaires de Paris Nanterre, coll. « RĂ©sonances de Maurice Blanchot », 2018
  • Laurence Sylvain, Pierre Klossowski. ExpĂ©riences sensibles et suprasensibles Ă  travers Le bain de Diane, Paris, L’Harmattan, 2021
  • Patrick ThĂ©riault, « Le simulacre au seuil de l’autobiographie : La vocation suspendue de Pierre Klossowski », Études françaises, vol. 42, n° 1, 2006, p. 171-192 (lire en ligne).

Documentaires

  • Pierre Klossowski, portrait de l'artiste en souffleur, Alain Fleischer, 1982
  • Pierre Klossowski, un Ă©crivain en images, Alain Fleischer, 1996, 47 minutes, production Les films d'ici ; « TĂ«nk », sur tenk.fr (consultĂ© le )

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