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Noyau p

Un noyau p (p indiquant un nuclĂ©ide inhabituellement riche en protons), ou noyau dĂ©ficient en neutrons, est un noyau atomique correspondant Ă  un isotope d'un Ă©lĂ©ment chimique compris entre le sĂ©lĂ©nium 74Se et le mercure 196Hg produit naturellement au sein des Ă©toiles mais qui ne peut ĂȘtre issu ni d'un processus s par nuclĂ©osynthĂšse stellaire au sein de la branche asymptotique des gĂ©antes, ni d'un processus r par nuclĂ©osynthĂšse explosive au sein d'une supernova.

Classification des atomes en fonction de leur nombre de protons et de neutrons. Les noyaux p se situent entre les numéros 34 (sélénium) et 80 (mercure) de l'axe horizontal, dans une zone délimitée par la partie orange et l'« escalier noir » du graphique.

DĂ©finition

Partie de la carte des nucléides montrant quelques noyaux stables produits lors des processus s (vert), r (rouge) et p (jaune).

Les travaux de Burbidge, Burbidge, Fowler and Hoyle (1957)[1] et de A. G. W. Cameron (1957)[2] ont montrĂ© comment la majoritĂ© des nuclĂ©ides prĂ©sents naturellement au-delĂ  du fer peuvent ĂȘtre crĂ©Ă©s dans deux sortes de processus de capture neutronique, le processus s et le processus r. Certains noyaux dĂ©ficients en neutrons trouvĂ©s dans la nature ne sont pas atteints au cours de ces processus et donc au moins un processus supplĂ©mentaire est nĂ©cessaire pour les synthĂ©tiser. Ces noyaux sont appelĂ©s « noyaux p ».

Puisque la dĂ©finition des noyaux p dĂ©pend des connaissances actuelles sur les processus s et r (voir aussi nuclĂ©osynthĂšse), la liste originale des 35 noyaux p, proposĂ©e par Burbidge, Burbidge, Fowler et Hoyle[1], peut ĂȘtre modifiĂ©e avec le temps, comme indiquĂ© dans le tableau ci-dessous. Il est ainsi admis aujourd’hui que les abondances de 152Gd et de 164Er soient en partie dues aux fortes contributions du processus s[3]. Cela semble aussi ĂȘtre le cas pour celles de 113In et 115Sn qui pourraient ĂȘtre crĂ©Ă©s, de maniĂšre additionnelle, Ă  travers le processus r en petites quantitĂ©s[4].

Les radioisotopes de longues demi-vies 92Nb, 97Tc, 98Tc et 146Sm ne font pas partie des noyaux p dĂ©finis habituellement Ă©tant donnĂ© qu’ils ne sont pas naturellement prĂ©sents sur Terre. En s’appuyant sur la dĂ©finition donnĂ©e prĂ©cĂ©demment cependant, ce sont nĂ©anmoins des noyaux p puisqu’ils ne peuvent pas ĂȘtre crĂ©Ă©s par les processus s ou r. Depuis la dĂ©couverte de leur produits de dĂ©sintĂ©gration dans les grains prĂ©solaires (en), on peut supposer qu’au moins 92Nb et 146Sm Ă©taient prĂ©sents dans la nĂ©buleuse prĂ©-solaire. Cela permet notamment d’estimer le temps depuis la derniĂšre production de ces noyaux p avant la formation du SystĂšme solaire[5].

Les noyaux p sont trĂšs rares : de tels isotopes sont moins abondants typiquement d’un facteur 10 Ă  1 000 par rapport aux autres isotopes du mĂȘme Ă©lĂ©ment. Les abondances des noyaux p peuvent seulement ĂȘtre dĂ©terminĂ©es par des Ă©tudes gĂ©ochimique et par analyse des matĂ©riaux mĂ©tĂ©oritique et des grains prĂ©solaires. Ils ne peuvent pas ĂȘtre identifiĂ©s dans les spectres stellaires. Ainsi, la connaissance des abondances des noyaux p est-elle rĂ©duite Ă  ceux du systĂšme solaire et on ignore si les abondances des noyaux p du systĂšme solaire sont typiques pour la Voie lactĂ©e[6].

Liste des noyaux p
Nucléide Commentaire
74Se
78Kr
84Sr
92NbradionuclĂ©ide de longue demi-vie ; pas un noyau p classique mais ne peut pas ĂȘtre crĂ©Ă© lors des processus s et r
92Mo
94Mo
97TcradionuclĂ©ide de longue demi-vie ; pas un noyau p classique mais ne peut pas ĂȘtre crĂ©Ă© lors des processus s et r
98TcradionuclĂ©ide de longue demi-vie ; pas un noyau p classique mais ne peut pas ĂȘtre crĂ©Ă© lors des processus s et r
96Ru
98Ru
102Pd
106Cd
108Cd
113In(Partiellement) créé au cours du processus s ? Contributions depuis le processus r ?
112Sn
114Sn
115Sn(Partiellement) créé au cours du processus s ? Contributions depuis le processus r ?
120Te
124Xe
126Xe
130Ba
132Ba
138LacrĂ©Ă© dans le processus Îœ
136Ce
138Ce
144Sm
146SmradionuclĂ©ide de longue demi-vie ; pas un noyau p classique mais ne peut pas ĂȘtre crĂ©Ă© lors des processus s et r
152Gd(Partiellement) créé au cours du processus s ?
156Dy
158Dy
162Er
164Er(Partiellement) créé au cours du processus s ?
168Yb
174Hf
180Ta(Partiellement) crĂ©Ă© au cours du processus Îœ ; contributions depuis le processus s ?
180W
184Os
190Pt
196Hg

Origine des noyaux p

Selon les connaissances actuelles, les noyaux p formĂ©s par les supernovas Ă  effondrement de cƓur sont insuffisants pour expliquer l'abondance de ces derniers.

La production astrophysique des noyaux p n’est pas encore complĂštement comprise. Le processus Îł (voir ci-dessous) favorisĂ© dans les supernovas Ă  effondrement de cƓur ne peut pas produire tous les noyaux p en quantitĂ© suffisante, selon les simulations informatiques rĂ©centes. C’est pourquoi des mĂ©canismes de production supplĂ©mentaires et des sites astrophysiques sont Ă©tudiĂ©s, comme dĂ©crit ci-dessous. Il est aussi concevable qu’il n’y ait pas juste un seul processus responsable de tous les noyaux p mais que diffĂ©rents processus dans un certain nombre de sites astrophysiques produisent les noyaux p dans certaines rĂ©gions[7].

Dans la recherche de processus pertinents crĂ©ant des noyaux p, le moyen habituel est d’identifier les mĂ©canismes de productions possible (processus) et alors d’étudier leur rĂ©alisation possible dans divers sites astrophysiques. La mĂȘme logique est utilisĂ©e dans la discussion ci-dessous.

Base de la production de nucléide p

En principe, il existe plusieurs moyens de produire des nuclĂ©ides dĂ©ficients en neutrons : par ajouts successifs de protons aux noyaux impliquĂ©s (il existe des rĂ©actions nuclĂ©aires du type (p,Îł)) ou par retraits successifs de neutrons Ă  partir d’un noyau au travers de sĂ©quences de photodĂ©sintĂ©grations du type (Îł,n)[6] - [7].

Sous certaines conditions rencontrĂ©es dans des environnements astrophysiques, il est difficile d’obtenir des noyaux p via des captures de protons du fait que la barriĂšre coulombienne d’un noyau s’accroĂźt lorsque le numĂ©ro atomique augmente. Un proton nĂ©cessite plus d’énergie pour ĂȘtre incorporĂ© (capturĂ©) dans un noyau atomique lorsque la barriĂšre coulombienne est grande. L’énergie moyenne disponible des protons est dĂ©terminĂ©e par la tempĂ©rature du plasma stellaire. Cependant, augmenter la tempĂ©rature accĂ©lĂšre aussi les photodĂ©sintĂ©grations (Îł,p) qui empĂȘchent les captures (p,Îł). La seule alternative Ă©vitant cela serait d’avoir un trĂšs grand nombre de protons disponibles de sorte que le nombre effectif de captures par seconde soit important mĂȘme Ă  faible tempĂ©rature. Dans les cas extrĂȘmes (comme discutĂ© ci-dessous), cela conduit Ă  la synthĂšse de radionuclĂ©ides avec des demi-vies extrĂȘmement courtes qui dĂ©croissent vers des nuclĂ©ides stables une fois que les captures ont cessĂ©[6] - [7].

Des combinaisons appropriĂ©es de tempĂ©rature et de densitĂ© de protons dans le plasma stellaire doivent ĂȘtre Ă©tudiĂ©es dans la recherche de mĂ©canismes de production possible des noyaux p. D’autres paramĂštres tels que le temps disponible pour les processus nuclĂ©aires et le nombre et le type des nuclĂ©ides initialement prĂ©sents (noyaux pĂšres) sont aussi Ă  prendre en compte.

Le processus p

Dans le processus p, il est suggĂ©rĂ© que les noyaux p sont crĂ©Ă©s via quelques captures de protons sur des nuclĂ©ides stables, les noyaux-pĂšres tirant leur origine des processus s et r et Ă©tant dĂ©jĂ  prĂ©sents dans le plasma stellaire. Comme indiquĂ© prĂ©cĂ©demment, cette thĂ©orie initialement proposĂ©e selon laquelle tous les noyaux p sont produits par de tels processus s’est vue rĂ©futĂ©e[1] - [2] - [6]. Il a Ă©tĂ© montrĂ© plus tard que les conditions nĂ©cessaires ne sont pas satisfaites dans les Ă©toiles ou les explosions stellaires[8].

En s’appuyant sur sa signification historique, le terme « processus p » est parfois nĂ©gligemment utilisĂ© pour dĂ©signer n’importe quel processus synthĂ©tisant des noyaux p, mĂȘme lorsque aucune capture de protons n’a lieu.

Le processus Îł

Les noyaux p peuvent aussi ĂȘtre crĂ©Ă©s par photodĂ©sintĂ©gration des noyaux issus des processus s et r. À des tempĂ©ratures de l’ordre de 2-3 gigakelvins (GK) et des temps de processus de quelques secondes (cela nĂ©cessite un processus explosif), la photodĂ©sintĂ©gration des noyaux prĂ©existants restera faible, mais juste assez pour produire les faibles abondances requises des noyaux p[6] - [9]. On l’appelle le processus Îł dans la mesure oĂč la photodĂ©sintĂ©gration consiste en une rĂ©action nuclĂ©aire des types (Îł,n), (Îł,α) et (Îł,p), qui est provoquĂ©e par un photon de grande Ă©nergie (rayon Îł)[9].

Le processus Μ

Des rĂ©actions nuclĂ©aires dĂ©clenchĂ©es par des neutrinos peuvent aussi directement produire certains nuclĂ©ides, comme par exemple 7Li, 11B, 19F, 138La dans les supernovas Ă  effondrement de cƓur [10]. On l’appelle « processus Îœ » et il nĂ©cessite un flux suffisamment intense de neutrinos.

Les processus de capture rapide de protons

Dans le processus p, les protons sont ajoutĂ©s Ă  un noyau atomique stable ou faiblement radioactif. S’il y a une densitĂ© importante de protons dans le plasma stellaire, mĂȘme les radionuclĂ©ides de faible demi-vie peuvent capturer un ou plusieurs protons avant leur dĂ©sintĂ©gration ÎČ. Cela modifie rapidement la voie de la nuclĂ©osynthĂšse de la rĂ©gion des noyaux stables vers le cĂŽtĂ© trĂšs dĂ©ficient en neutrons de la carte des nuclĂ©ides. On l’appelle capture rapide de proton[7].

Ici, une sĂ©rie de rĂ©actions (p,Îł) a lieu jusqu’à que soit la dĂ©croissance du noyau par radioactivitĂ© ÎČ soit plus rapide que la capture de proton suivante ou que la drip line des protons soit atteinte. Les deux cas conduisent Ă  une ou plusieurs dĂ©croissances ÎČ sĂ©quentielles jusqu’à ce que le noyau qui est produit puisse de nouveau capturer des protons avant sa dĂ©croissance ÎČ. Ensuite, les sĂ©quences de capture de protons continuent.

Il est possible de couvrir la rĂ©gion des noyaux les plus lĂ©gers jusqu’au 56Ni dans l’intervalle d’une seconde car les captures de protons et les dĂ©croissances ÎČ sont rapides. En partant du 56Ni, cependant, un certain nombre de points d’attente sont rencontrĂ©s dans la voie de rĂ©action. Ils dĂ©signent les nuclĂ©ides qui ont des demi-vies relativement longues (comparĂ© Ă  l’échelle de temps du processus) et qui peuvent seulement ajouter un proton lentement (c’est-Ă -dire que leur section efficace pour les rĂ©actions (p,Îł) est petite). Des exemples de tels points d’attente sont : 56Ni, 60Zn, 64Ge et 68Se. D’autres points d’attente peuvent ĂȘtre importants, en fonction des conditions dĂ©taillĂ©es et de la voie de rĂ©action. Pour de tels points d’attente, il est typique de voir des demi-vies allant de la minute Ă  plusieurs jours. Ils augmentent ainsi considĂ©rablement le temps nĂ©cessaire pour continuer les sĂ©quences de rĂ©action. Si les conditions nĂ©cessaires pour cette capture rapide de protons sont seulement prĂ©sentes durant un court temps (l’échelle de temps des Ă©vĂ©nements astrophysiques explosifs est de l’ordre de la seconde), les points d’attente limitent ou gĂȘnent la continuitĂ© des rĂ©actions vers des noyaux plus lourds[11].

Afin de produire les noyaux p, le chemin du processus doit inclure les nuclĂ©ides disposant du mĂȘme nombre de masse (mais contenant habituellement plus de protons) que les noyaux p dĂ©sirĂ©s. Ces nuclĂ©ides sont alors convertis en noyaux p via des sĂ©quences de dĂ©croissances ÎČ aprĂšs que les captures rapides de protons aient cessĂ©.

Les variations de la catĂ©gorie principale de « captures rapide de protons » sont les processus rp, pn et Îœp qui sont briĂšvement discutĂ©s ci-dessous.

Le processus rp

Le processus rp (rp pour capture rapide de protons) est la forme la plus pure de processus de capture rapide de protons comme dĂ©crit ci-dessus. Pour des densitĂ©s de protons de plus de 1028 protons cm−3 et des tempĂ©ratures aux alentours de 2 GK, le chemin de rĂ©action est proche de la drip line des protons[11]. Les points d’attente peuvent ĂȘtre comblĂ©s Ă  condition que le temps du processus soit compris entre 10 et 600 s. Les nuclĂ©ides aux points d’attente sont produits avec des abondances plus grandes tandis que les noyaux « derriĂšre » chaque point d’attente sont de plus en plus supprimĂ©s.

Un point final est atteint aux alentours du 107Te parce que la voie de rĂ©action continue dans une rĂ©gion oĂč les nuclĂ©ides dĂ©croissent prĂ©fĂ©rentiellement par dĂ©croissance α et ainsi boucle le chemin sur lui-mĂȘme[12]. Un processus rp sera donc seulement capable de produire les noyaux p avec un nombre de masse infĂ©rieur ou Ă©gal Ă  107.

Le processus pn

Les points d’attente dans les processus de capture rapide de protons peuvent ĂȘtre Ă©vitĂ©s du fait des rĂ©actions (n,p) qui sont beaucoup plus rapides que les captures de protons sur les noyaux aux points d’attente ou que les dĂ©croissances ÎČ de ces noyaux. Cela rĂ©sulte en une rĂ©duction considĂ©rable du temps requis pour crĂ©er les Ă©lĂ©ments lourds et permet une production efficace en quelques secondes[6]. Cela nĂ©cessite cependant une (petite) rĂ©serve de neutrons libres qui ne sont habituellement pas prĂ©sents dans de tels plasmas riches en protons. Un moyen de les obtenir et de les produire au travers d’autres rĂ©actions ayant lieu simultanĂ©ment aux captures rapides de protons. On l’appelle capture rapide riche en neutrons de protons ou processus pn[13].

Le processus Îœp

Une autre possibilitĂ© pour obtenir les neutrons nĂ©cessaires afin d’accĂ©lĂ©rer les rĂ©actions (n,p) dans des environnements riches en protons est d’utiliser la capture d’anti-neutrinos sur les protons Μ̅e + p → e+ + n, transformant un proton et un anti-neutrino en un positron et un neutron. Puisque les (anti-)neutrinos interagissent trĂšs faiblement avec les protons, un trĂšs grand flux d’anti-neutrinos doit agir au sein du plasma avec une grande densitĂ© de protons. On l’appelle processus Îœp[14].

Supernova à effondrement de cƓur

ReprĂ©sentation de la structure en « oignon » du noyau d’une Ă©toile juste avant la supernova. Le schĂ©ma n’est pas Ă  l’échelle.

Les Ă©toiles massives terminent leur vie en supernova Ă  effondrement de cƓur. Dans une telle supernova, le front de choc d’une explosion se dĂ©place du centre de l’étoile vers les couches externes et s’éjecte. Lorsque le front de choc atteint les couches O/Ne de l’étoile (voir aussi Ă©volution stellaire), les conditions pour un processus Îł sont atteintes pendant 1-2 s.

Bien que la majoritĂ© des noyaux p puissent ĂȘtre crĂ©Ă©s de cette maniĂšre, certains noyaux p avec des nombres de masse particuliers entrent difficilement dans ce modĂšle. Il est connu que les noyaux p avec des nombres de masse A infĂ©rieurs Ă  100 ne peuvent pas ĂȘtre produits dans un processus Îł[6] - [9]. Des simulations modernes montrent Ă©galement des problĂšmes dans la gamme 150 ≀ A ≀ 165[7] - [15].

Le noyau p 138La n’est pas produit par le processus Îł mais il peut ĂȘtre crĂ©Ă© par un processus Îœ. Une Ă©toile Ă  neutrons chaude peut ĂȘtre constituĂ©e dans le centre de telle supernova Ă  effondrement de cƓur et rayonner des neutrinos avec une haute intensitĂ©. Les neutrinos interagissent aussi avec les couches externes de l’étoile en explosion et provoquent des rĂ©actions nuclĂ©aires qui crĂ©ent, entre autres noyaux p, le 138La[10] - [15]. Le 180Ta peut aussi ĂȘtre produit lors de tels processus Îœ.

Il a Ă©tĂ© suggĂ©rĂ©[14] de complĂ©ter le processus Îł dans les couches externes de l’étoile par un autre processus, ayant lui lieu dĂšs les couches les plus profondes de l’étoile, proche de l’étoile Ă  neutrons, mais dont le produit est toujours Ă©jectĂ© vers la surface plutĂŽt que de tomber dans l’étoile Ă  neutrons. À cause du flux initialement grand de neutrinos depuis l’étoile Ă  neutrons en formation, ces couches deviennent extrĂȘmement riches en protons du fait de la rĂ©action Îœe + n → e− + p. Bien que le flux d’anti-neutrinos soit initialement plus faible, quelques neutrons sont nĂ©anmoins aussi crĂ©Ă©s, du fait du grand nombre de protons. Cela permet un processus Îœp dans ces couches profondes. À cause de l’échelle de temps courte de l’explosion et de la grande barriĂšre coulombienne des noyaux plus lourds, un tel processus Îœp pourrait uniquement produire les noyaux p les plus lĂ©gers. La nature et le nombre de tels noyaux dĂ©pend sensiblement de plusieurs facteurs dans les simulations, mais aussi du vĂ©ritable mĂ©canisme d’explosion d’une supernova Ă  effondrement de cƓur, qui n’est toujours pas entiĂšrement compris[14] - [16].

Supernovas thermonucléaire

Une supernova thermonuclĂ©aire est l’explosion d’une naine blanche dans un systĂšme d’étoile binaire, dĂ©clenchĂ©e par des rĂ©actions thermonuclĂ©aires dans la matiĂšre accrĂ©tĂ©e de l’étoile compagnon sur la surface de la naine blanche. La matiĂšre accrĂ©tĂ©e est riche en hydrogĂšne (protons) et en hĂ©lium (particules α) et devient assez chaude pour permettre des rĂ©actions nuclĂ©aires.

De nombreux modĂšles pour de telles explosions sont discutĂ©s dans la littĂ©rature. Parmi eux, deux ont Ă©tĂ© Ă©tudiĂ©s quant Ă  la production des noyaux p. Aucune de ces explosions ne libĂšre des neutrinos, rendant donc impossible les processus Îœ et Îœp. Les conditions nĂ©cessaires pour le processus rp ne sont pas non plus remplies.

Les dĂ©tails sur la production possible de noyaux p dans de telles supernovas dĂ©pendent sensiblement de la composition de la matiĂšre accrĂ©tĂ©e depuis l’étoile compagnon (les noyaux pĂšres pour tous les processus suivants). Comme cela peut changer considĂ©rablement d’une Ă©toile Ă  une autre, toutes les affirmations et les modĂšles de production de noyaux p dans des telles supernovas thermonuclĂ©aires sont sujets Ă  caution[6].

Supernovas de type Ia

Le modĂšle qui fait consensus pour les supernovas thermonuclĂ©aires postule que les naines blanches explosent aprĂšs avoir dĂ©passĂ© la limite de Chandrasekhar par accrĂ©tion de matiĂšre car la contraction et l’augmentation de la tempĂ©rature initie la combustion explosive du carbone sous conditions dĂ©gĂ©nĂ©rĂ©es. Un front de fusion nuclĂ©aire parcourt la naine blanche de l'intĂ©rieur vers l'extĂ©rieur et dĂ©sagrĂšge entiĂšrement l'Ă©toile. Les couches les plus externes proches de la surface de la naine blanche (contenant 0,05 masse solaire de matiĂšre) prĂ©sentent alors les bonnes conditions pour un processus Îł[17].

Les noyaux p sont crĂ©Ă©s de la mĂȘme maniĂšre que dans le processus Îł dans les supernovas Ă  effondrement de cƓur, tandis que les mĂȘmes difficultĂ©s sont rencontrĂ©es. De plus, le 138La et le 180Ta ne sont pas produits. Une variation de l’abondance en sources, en supposant une augmentation en abondance des processus s permet seulement de reproduire les abondances des noyaux p rĂ©sultants, sans rĂ©soudre les problĂšmes de la sous-production relative de noyaux p prĂ©sentant une masse nuclĂ©aire particuliĂšre, dĂ©crite ci-dessus[6].

Supernovas sous-Chandrasekhar

Dans une sous-classe de supernovas de type Ia, appelĂ©e supernova sous-Chandrasekhar, la naine blanche peut exploser bien avant d’atteindre la limite de Chandrasekhar, parce que les rĂ©actions nuclĂ©aires dans la matiĂšre accrĂ©tĂ©e peuvent dĂ©jĂ  chauffer la naine blanche durant sa phase d’accrĂ©tion et dĂ©clencher prĂ©maturĂ©ment la combustion explosive du carbone. L’accrĂ©tion riche en hĂ©lium favorise ce type d’explosions. La combustion de l’hĂ©lium dĂ©marre dĂ©gĂ©nĂ©rativement sur le bas de la couche d’hĂ©lium accrĂ©tĂ©e et provoque deux fronts de choc. Le premier se dĂ©place vers l’intĂ©rieur et initie l’explosion du carbone. Celle se dĂ©plaçant vers l’extĂ©rieur chauffe les couches externes de la naine blanche et les Ă©jecte. Pour rappel, ces couches externes sont le site de processus Îł Ă  des tempĂ©ratures de 2-3 GK. Cependant, du fait de la prĂ©sence de particules α (noyaux d’hĂ©lium), des rĂ©actions nuclĂ©aires additionnelles deviennent possibles. Parmi celles-ci, certaines libĂšrent une grande quantitĂ© de neutrons, tels que les rĂ©actions 18O(α,n)21Ne, 22Ne(α,n)25Mg et 26Mg(α,n)29Si. Cela permet un processus pn dans cette partie des couches externes oĂč les tempĂ©ratures dĂ©passent les 3 GK[6] - [13].

Les noyaux p lĂ©gers qui sont sous-produits dans le processus Îł peuvent ĂȘtre crĂ©Ă©s en quantitĂ© suffisante dans le processus pn de maniĂšre si efficace que leur abondance est plus grande que les autres noyaux p. Pour obtenir les abondances relatives observĂ©es dans le systĂšme solaire, on doit supposer un processus s pĂšre trĂšs augmentĂ© (par un facteur 100-1 000 ou plus), ce qui augmente les rendements des noyaux p lourds Ă  partir du processus Îł[6] - [13].

Étoiles Ă  neutrons dans les systĂšmes d’étoile binaire

Une Ă©toile Ă  neutrons dans un systĂšme d’étoile binaire peut aussi accrĂ©ter de la matiĂšre depuis l’étoile compagnon sur sa surface. Les combustions combinĂ©es de l’hydrogĂšne et de l’hĂ©lium dĂ©butent lorsque la couche accrĂ©tĂ©e de matiĂšre dĂ©gĂ©nĂ©rĂ©e atteint une densitĂ© de 105 Ă  106 g/cm3 et une tempĂ©rature dĂ©passant 0,2 GK. Cela conduit Ă  une combustion thermonuclĂ©aire comparable Ă  ce qui se passe dans le front de choc extĂ©rieur mobile des supernovas sous-Chandrasekhar. L’étoile Ă  neutrons n’est pas affectĂ©e par l’explosion et les rĂ©actions nuclĂ©aires dans la couche accrĂ©tĂ©e peuvent donc se poursuivre plus longtemps que dans une explosion. Cela permet le dĂ©roulement d’un processus rp. Il continuera jusqu’à que tous les protons libres aient Ă©tĂ© utilisĂ©s, ou que la couche en combustion se soit Ă©tendue du fait de l’augmentation de la tempĂ©rature et que sa densitĂ© chute en dessous de celle nĂ©cessaire pour les rĂ©actions nuclĂ©aires[11].

Il a Ă©tĂ© montrĂ© que les propriĂ©tĂ©s des sursauts X dans la Voie lactĂ©e peuvent ĂȘtre expliquĂ©es par un processus rp Ă  la surface d’étoiles Ă  neutrons en accrĂ©tion[18]. Il n’est toujours pas clair cependant si de la matiĂšre (et si oui combien) peut ĂȘtre Ă©jectĂ©e et s’échapper du champ gravitationnel de l’étoile Ă  neutrons. Si c’est le cas, de tels objets pourraient ĂȘtre considĂ©rĂ©s comme des sources possibles de noyaux p. Cependant, mĂȘme si ce rĂ©sultat est corroborĂ©, le point final dĂ©montrĂ© du processus rp limite la production des noyaux p lĂ©gers (qui sont des sous-produits dans les supernovas Ă  effondrement de cƓur)[12].

Notes et références

Notes

    Références

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