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Noyau de la chaleur

En mathématiques, le noyau de la chaleur est une fonction de Green (également appelée solution élémentaire) de l'équation de la chaleur sur un domaine spécifié, avec éventuellement des conditions aux limites appropriées. C'est aussi un des outils principaux de l'étude du spectre du laplacien. Le noyau de la chaleur représente l'évolution de la température égale à une unité de chaleur en un point au temps initial.

Noyau de la chaleur dans l'espace

Le noyau de la chaleur dans l'espace libre Rd a pour expression

et est solution de l'Ă©quation de la chaleur

pour tout t > 0 et x,y âˆˆ Rd, avec la condition initiale

oĂč ÎŽ est la distribution de Dirac et la limite est prise au sens des distributions, c'est-Ă -dire que pour toute fonction test φ

Théorie spectrale

Définitions générales

Soit un domaine compact de Ă  bord . Sur ce domaine, on considĂšre l'opĂ©rateur positif , oĂč est le Laplacien, muni de conditions aux limites sur le bord du domaine (Dirichlet, Neumann, mixtes) qui fixent complĂštement le problĂšme.

L'opérateur positif est le générateur d'un semi-groupe continu dans . On peut alors écrire pour toute fonction f de carré sommable :

La fonction K(x, y, t) est appelée le « noyau de la chaleur ». En effet, la fonction :

est clairement une solution de l'Ă©quation de la chaleur :

De plus, le semi-groupe tend vers l'identité lorsque le temps t tend vers zéro :

de telle sorte que le noyau de la chaleur K doit avoir le comportement asymptotique :

oĂč est la distribution de Dirac. Ainsi, le noyau de la chaleur K(x, y, t) apparait comme Ă©tant une fonction de Green, ou solution Ă©lĂ©mentaire, de l'Ă©quation de la chaleur.

Théorie spectrale

Lorsque le domaine est compact, l'opérateur positif possÚde un spectre discret de valeurs propres auquel est associée une base hilbertienne de vecteurs propres (on utilise ici les notations de Dirac) :

On peut alors Ă©crire en introduisant deux fois la relation de fermeture :

qui devient :

Trace du noyau de la chaleur

La trace du noyau de la chaleur est définie par[1] :

Les états propres étant orthonormés, on remarque que l'on peut écrire :

On a donc la relation fondamentale :

Cette relation est liée à de nombreuses « formules des traces » comme celle de Selberg en géométrie hyperbolique, ou celle de Gutzwiller à l'approximation semi-classique.

Fonctions spectrales

On définit la fonction de comptage des valeurs propres :

oĂč est la distribution de Heaviside. La fonction de comptage est une fonction en escalier positive croissante qui donne le nombre total de valeurs propres infĂ©rieures ou Ă©gales Ă  . Sa dĂ©rivĂ©e est la densitĂ© spectrale de valeurs propres :

La trace du noyau de la chaleur est reliée à ces fonctions par une transformation de Laplace :

Fonction zeta spectrale

On suppose ici que le fondamental . Par analogie avec la fonction zĂȘta de Riemann, on introduit la fonction zĂȘta spectrale par la sĂ©rie de type Dirichlet :

qui converge pour suffisamment grand. Cette fonction zĂȘta est reliĂ©e Ă  la trace du noyau de la chaleur par une transformĂ©e de type Mellin :

La fonction zĂȘta est notamment utilisĂ©e pour rĂ©gulariser les dĂ©terminants d'opĂ©rateurs qui apparaissent lors de calculs d'intĂ©grales de chemins en thĂ©orie quantique des champs. En effet, le dĂ©terminant de l'opĂ©rateur H est dĂ©fini par :

Avec l'identité :

on démontre facilement la relation formelle :

oĂč la dĂ©rivĂ©e de la fonction zĂȘta est Ă©valuĂ©e en s = 0.

Extension aux variétés riemanniennes compactes

Toutes les définitions précédentes s'étendent assez naturellement au cas de l'opérateur de Laplace-Beltrami sur une variété riemannienne compacte, qui possÚde alors également un spectre discret. Sur une variété compacte, la fonction constante est normalisable à l'unité, de telle sorte que l'état fondamental est associé à la valeur propre nulle, qui est non dégénérée.

Il est alors commode de poser : , et on a :

On peut Ă©galement associer Ă  ce spectre une fonction zĂȘta Ă  la condition de supprimer la valeur propre nulle « Ă  la main ».

DĂ©veloppement asymptotique du noyau de la chaleur

Le terme diagonal du noyau de la chaleur admet un développement asymptotique en temps petit.

Variété riemannienne compacte sans bord

Pour une variété riemannienne M compacte de dimension d sans bord, on a le développement de Minakshisundaram-Pleijel[2] (1949) :

oĂč les coefficients sont des fonctions lisses sur M, qui dĂ©pendent de la mĂ©trique et de ses dĂ©rivĂ©es en x. Par intĂ©gration sur tous les points x, on en dĂ©duit que la trace du noyau de la chaleur admet Ă©galement un dĂ©veloppement asymptotique en temps petit :

oĂč les constantes sont dĂ©finis par :

pour le mesure induite par la mĂ©trique. Ces constantes font apparaitre certaines caractĂ©ristiques gĂ©omĂ©triques globales de M ; par exemple, la constante est proportionnelle Ă  l'hypervolume de la variĂ©tĂ© : , oĂč :

Variétés à bord

L'existence d'un tel dĂ©veloppement asymptotique peut ĂȘtre Ă©tendu aux variĂ©tĂ©s Ă  bord suffisamment rĂ©guliers. L'opĂ©rateur de Laplace-Beltrami doit alors ĂȘtre muni de conditions aux limites appropriĂ©es.

Spectre et géométrie

Le développement de la trace du noyau de la chaleur est relié à celui de la fonction de comptage des valeurs propres (ou sa dérivée, la densité spectrale).

Articles liés

Bibliographie

Ouvrages de références

  • Marcel Berger, Paul Gauduchon & Edmond Mazet ; Le spectre d'une variĂ©tĂ© Riemanienne, Lecture Notes in Mathematics 194, Springer-Verlag (1971).
  • Isaac Chavel ; Eigenvalues in Riemannian Geometry, Pure and Applied Mathematics 115, Academic Press (2e Ă©dition-1984), (ISBN 0121706400).

Quelques articles

  • S Minakshisundaram & A Pleijel ; Some properties of the eigenfunctions of the Laplace-operator on Riemannian manifolds, Canadian Journal of Mathematics 1 (1949), 242--256.
  • H. P. McKean & I. M. Singer ; Curvature and the eigenvalues of the Laplacian, Journal of Differential Geometry 1 (1) (1967), 43-69.
  • Peter B. Gilkey ; The spectral geometry of a Riemannian manifold, Journal of Differential Geometry 10(4) (1975), 601-618.
  • Yves Colin de VerdiĂšre ; PropriĂ©tĂ©s asymptotiques de l'Ă©quation de la chaleur sur une variĂ©tĂ© compacte, d'aprĂšs P. Gilkey, SĂ©minaire Bourbaki ().
  • Yves Colin de VerdiĂšre ; Spectre du laplacien et longueurs des gĂ©odĂ©siques pĂ©riodiques (I), Compositio Mathematica 27 (1) (1973), p. 83-106. Numdam.
  • Yves Colin de VerdiĂšre ; Spectre du laplacien et longueurs des gĂ©odĂ©siques pĂ©riodiques (II), Compositio Mathematica, 27 (2) (1973), p. 159-184. Numdam.
  • Maria Teresa Arede ; GĂ©omĂ©trie du noyau de la chaleur sur les variĂ©tĂ©s, ThĂšse de troisiĂšme cycle, UniversitĂ© de Marseille (1983).
  • Teresa Arede ; Manifolds for which the heat kernel is given in terms of geodesic lengths, Letters in Mathematical Physics 9 (2) (1985), 121-131.
  • Peter B Gilkey ; Heat Equation Asymptotics, Proc. Symp. Pure and Applied Math. V54 (1993), 317-336.
  • Klaus Kirsten ; Spectral functions in mathematics and physics, Chapman & Hall/CRC, Boca Raton, FL (2002), (ISBN 1-58488-259-X).
  • Peter B. Gilkey ; Asymptotic formulae in spectral geometry, Studies in Advanced Mathematics, vol. 43, Chapman & Hall/CRC, Boca Raton, FL (2004), (ISBN 1-58488-358-8)

BibliothĂšque virtuelle

  • Claude Bardos & Olivier Laffite ; Une synthĂšse de rĂ©sultats anciens et rĂ©cents sur le comportement asymptotique des valeurs propres du Laplacien sur une variĂ©tĂ© riemannienne, (1998). PostScript.
  • M. van den Berg, S. Desjardins & P B Gilkey ; Heat content asymptotics of Riemannian manifolds, dans : Differential Geometry and its Applications, O. Kowalski & D. Krupka (Ă©diteurs), proceedings of 5th international conference 1992 on differential geometry and its applications at Silesian University (1993), (ISBN 80-901581-0-2), p. 61-64. PostScript.
  • D. V. Vassilevich ; Heat kernel expansion: user's manual, Physics Report 388 (2003), 279-360. ArXiv : hep-th/0306138.
  • Arlo Caine ; The heat kernel on a Riemannian manifold, pdf.
  • Daniel Grieser ; Notes on the heat kernel on manifolds with boundary, pdf.

Notes

  1. En physique statistique, c'est la fonction de partition canonique Z(t) du systÚme pour la « température inverse » t.
  2. Subbaramiah Minakshisundaram & Åke Pleijel ; Some properties of the eigenfunctions of the Laplace-operator on Riemannian manifolds, Canadian Journal of Mathematics 1 (1949), 242--256.
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