Non-ĂȘtre
Le non-ĂȘtre est un concept philosophique qui peut ĂȘtre dĂ©fini trĂšs simplement comme lâabsence dâĂȘtre, ou encore comme un dĂ©faut dâexistence et dâĂ©tat. La question du non-ĂȘtre est rĂ©solument ontologique et non vitaliste : sâinterroger sur la question du non-ĂȘtre ne revient pas seulement Ă se demander si le non-ĂȘtre est absence de vie, mais bien Ă tenter dâapprĂ©hender lâabsence dâĂȘtre. De plus, le non-ĂȘtre peut « ĂȘtre » en tant quâil est « autre chose » que lâĂȘtre en lui-mĂȘme, et on comprend cela au regard dâauteurs pour lesquels lâexistence ne constitue quâune rĂ©alitĂ© parmi dâautres, comme Leibniz par exemple[1]. La question de lâexistence â ou de lâinexistence â du non-ĂȘtre est intĂ©ressante en tant quâelle traverse absolument toute la philosophie occidentale, des penseurs prĂ©socratiques (on pense Ă ParmĂ©nide et Ă HĂ©raclite) jusquâaux penseurs contemporains (et parmi eux Martin Heidegger). Le non-ĂȘtre est souvent confondu, parfois Ă tort, avec le « nĂ©ant » lorsquâil est absence dâĂȘtre, et ainsi, parler de non-ĂȘtre reviendrait Ă disserter sur la question du nihilisme. Or comme dit prĂ©cĂ©demment, le non-ĂȘtre nâest pas seulement absence dâĂȘtre, il peut Ă©galement ĂȘtre « Ă©cart avec lâĂȘtre », et donc un « ĂȘtre-autre-chose ». Cependant, la question du non-ĂȘtre se rapproche indĂ©niablement de la question du nihilisme.
Antiquité
L'opposition ontologique entre Parménide et Héraclite
ParmĂ©nide dâĂlĂ©e, et par extension lâĂ©cole Ă©lĂ©atique, inaugurent la question ontologique de lâĂȘtre et du non-ĂȘtre. ParmĂ©nide affirme dans son TraitĂ© de la nature que lâĂȘtre « est » puisquâil accĂšde Ă la vĂ©ritĂ© et quâil est immobile. Comment comprendre cela ? Puisque lâĂȘtre est, et quâil accĂšde Ă lâintelligible, du domaine de la vĂ©ritĂ©, lâĂȘtre ne peut jamais ĂȘtre altĂ©rĂ© : donc il nâest pas engendrĂ© et nâest pas en mouvement. Puisque lâĂȘtre est immobile, il est un Ătant : donc un ĂȘtre qui est de tous temps. Ainsi, puisque l'ĂȘtre est, le non-ĂȘtre ne peut pas ĂȘtre.
En opposition Ă l'argument ontologique de ParmĂ©nide, HĂ©raclite dâĂphĂšse considĂšre l'ĂȘtre comme mouvant et absolument contingent. LâĂȘtre est changeant, lâĂ©tant nâest jamais fixĂ©. Dans son propre TraitĂ© de la nature, HĂ©raclite dĂ©veloppe l'idĂ©e selon laquelle le feu est le principe primordial de l'univers, et donc que notre univers est livrĂ© Ă un cycle ininterrompu de crĂ©ation et de destruction. En appliquant donc lâidĂ©e de fluctuation propre au feu Ă lâĂȘtre, il en rĂ©sulte que cet ĂȘtre devient changeant, perpĂ©tuellement en devenir. Puisque tout est soumis au changement, rien nâest fixĂ©, on ne peut rien opposer ni rien apparenter. Si rien n'est identifiable, alors on ne peut pas plus affirmer "l'ĂȘtre est" que "le non-ĂȘtre n'est pas".
L'opposition ontologique entre ParmĂ©nide et HĂ©raclite pose les bases de la question du non-ĂȘtre.
Le TraitĂ© du non-ĂȘtre de Gorgias
L'histoire se souvient bien plus de Gorgias de Leontinoi comme du titre de lâĆuvre de Platon[2] que de sa contribution philosophique. Dans le TraitĂ© sur le non-ĂȘtre rapportĂ© par Sextus Empiricus[3], Gorgias dit : « Il nâest rien. Dâailleurs si câest, câest inconnaissable. Dâailleurs si câest, et si câest connaissable, ce nâest pourtant pas montrable aux autres ». Ainsi, Gorgias dĂ©veloppe trois thĂšses qui justifient l'existence du non-ĂȘtre: premiĂšrement, rien n'existe. Comment le justifier? Puisque si quelque chose existe, on ne peut l'apprĂ©hender et donc il est impossible de le connaĂźtre. Et quand bien mĂȘme il serait possible de connaĂźtre la chose particuliĂšre, il serait impossible d'en tĂ©moigner. Ainsi, selon Gorgias, le non-ĂȘtre est, bien plus que l'ĂȘtre lui-mĂȘme.
La position de Platon dans le Parménide
L'essentiel de la position platonicienne sur la question ontologique est contenu dans le ParmĂ©nide, ouvrage intitulĂ© ainsi en l'honneur de l'initiateur de cette question ontologique. Dans ses dialogues, Platon dĂ©veloppe l'idĂ©e selon laquelle l'ĂȘtre est soit en mouvement soit au repos, donc que son Ă©tat est variable. Ainsi, si l'Ă©tat de l'ĂȘtre peut varier, alors la frontiĂšre entre ĂȘtre et non-ĂȘtre devient plus floue, et on peut affirmer que l'ĂȘtre est pĂ©nĂ©trĂ© de non-ĂȘtre. Si l'ĂȘtre est soit au repos soit en mouvement, alors la position particuliĂšre de l'ĂȘtre (repos ou mouvement) est nĂ©cessairement absence de l'autre position (repos ou mouvement): par exemple, lorsque l'ĂȘtre est en mouvement, son repos est "non-ĂȘtre" et donc n'est pas. L'ĂȘtre pour Platon implique donc toujours une part de non-ĂȘtre et inversement.
Le non-ĂȘtre comme nĂ©gation de l'ĂȘtre pour Aristote
La question ontologique traverse toute la MĂ©taphysique dâAristote, si bien que pour Martin Heidegger, il fut le premier Ă formuler clairement une image de lâĂȘtre en tant quâĂȘtre. On comprend aisĂ©ment ceci puisque pour Aristote, la mĂ©taphysique est la science de lâĂȘtre en tant quâĂȘtre[4]. Aristote rĂ©invente la question ontologique en complexifiant la dĂ©finition de lâĂȘtre : tout dâabord, « lâĂȘtre se dit en plusieurs sens »[5]. On peut trouver quatre sens Ă lâĂȘtre : lâĂȘtre selon la substance (qui est lâĂȘtre dĂ©fini par ParmĂ©nide), lâĂȘtre par lâaccident (en opposition Ă lâessence, cette dĂ©finition de lâĂȘtre est chĂšre aux sophistes[6]), lâĂȘtre selon les valeurs de vĂ©ritĂ© et de faussetĂ©, et enfin lâĂȘtre en acte et en puissance. En outre, Aristote apprĂ©hende lâĂȘtre selon des catĂ©gories[7] : la substance, la qualitĂ©, la quantitĂ©, la relation, le lieu, le temps, la position, la possession, lâaction et la passion. LâĂȘtre pour Aristote prend ainsi une dimension absolument inĂ©dite. Mais que faire du non-ĂȘtre ? On le retrouve bien chez Aristote, mais uniquement comme nĂ©gation de lâĂȘtre : si lâĂȘtre dâune chose est vrai, donc si la chose considĂ©rĂ©e est rĂ©elle, alors Ă lâinverse, la nĂ©gation de cette chose, donc son inexistence, laisse transparaĂźtre le non-ĂȘtre. Une chose existe, alors elle est, si elle nâest pas, alors elle « non-est ».
La reprise du Parménide par Plotin
La tradition nĂ©o-platonicienne reprend lâontologie dĂ©finie dans le ParmĂ©nide de Platon. Plotin dans ses EnnĂ©ades identifie le non-ĂȘtre Ă lâUn. LâUn est lâunitĂ© intelligible pure, il sâoppose Ă lâĂȘtre en tant que ce dernier sâidentifie au NoĂ»s (qui est la fonction intellective de lâĂȘtre) qui accĂšde aux IdĂ©es. Si le NoĂ»s, ou Intellect, accĂšde Ă la pluralitĂ© intelligible, donc aux IdĂ©es Ă©ternelles, alors le NoĂ»s, identifiĂ© Ă lâĂȘtre, devient multiple. Or si lâĂȘtre est multiple, alors lâUn sây oppose, et si lâUn sâoppose Ă lâĂȘtre, alors il sâidentifie au non-ĂȘtre.
Le Moyen Ăge
On observe un renouveau de la question ontologique au Moyen Ăge, celle-ci sâapparente Ă des concepts transcendantaux et/ou Ă©minemment mĂ©taphysiques : on sâinterroge par exemple sur le non-ĂȘtre du temps, sur le non-ĂȘtre de Dieu (câest le sujet du discours apophatique et du discours dâĂ©minence) ou encore sur le non-ĂȘtre comme fondement de lâhomme. En somme, la philosophie mĂ©diĂ©vale est intime du thĂšme ontologique du non-ĂȘtre.
Le non-ĂȘtre du temps chez Saint Augustin
La question ontologique du non-ĂȘtre est bien prĂ©sente chez Saint Augustin, lorsque celui-ci sâinterroge sur lâĂȘtre du temps dans ses Confessions : tout simplement, le temps nâexiste pas. Le passĂ© nâexiste pas au niveau ontologique : il nâexiste plus ; le futur nâexiste pas encore et enfin le prĂ©sent aussitĂŽt existant aussitĂŽt disparu. Pourtant nous mesurons le temps, mais subjectivement lâimage du temps (le vĂ©cu) est diffĂ©rente et changeante. Ce qui compte pour Augustin câest la notion de durĂ©e. Il faut Ă©tablir que câest notre mĂ©moire qui nous fait vivre cette durĂ©e purement objective. Le temps est une distensio animi, une distension de lâĂąme qui permet de relier mon passĂ©, mon prĂ©sent et mon futur. Ainsi donc, la question du non-ĂȘtre est bel et bien prĂ©sente chez Saint Augustin, et sâapparente au temps.
Les trois discours de Pseudo-Denys
Denys lâarĂ©opagite, ou Pseudo-Denys dĂ©termine dans son TraitĂ© des noms divins que Dieu est inconnaissable et incomprĂ©hensible en raison de sa transcendance. Or comment peut-on logiquement nommer Dieu sans sacrifier sa transcendance : donner un nom ou faire rentrer un nom dans une proposition et prĂ©diquer une qualitĂ© Ă un sujet, câest faire de celui-ci un Ă©gal atteignable et rendre Dieu disponible. Comment peut-on donc parler de Dieu, et le peut-on seulement ? Denys prĂ©sente trois discours possibles : premiĂšrement la via causalitatis ou discours cataphatique Ă travers lequel on peut parler de Dieu comme « cause de », par exemple dire que « Dieu est juste » signifie que « Dieu est cause de justice ». Le second discours est en lien direct avec la question ontologique du non-ĂȘtre : il sâagit de la via negationis, ou discours apophatique : si on ne peut parler de Dieu en tant que « Dieu est », alors on peut dire tout ce que Dieu nâest pas, et donc plonger plus en avant dans la question du non-ĂȘtre : ainsi dire que « Dieu nâest pas juste » signifie que « Dieu nâest dâaucune justice que je peux concevoir ». Enfin le dernier discours permet de nier tout Ă fait lâĂȘtre mĂȘme de Dieu, en tant que ce dernier dĂ©passe la conception humaine : il sâagit de la via eminentiae, ou discours dâĂ©minence. Ainsi, Ă travers le discours dâĂ©minence, on ne pourrait dire « Dieu est bon » ou « Dieu est mauvais », puisque lâĂȘtre mĂȘme de Dieu est au-delĂ de ces deux affirmations. Ainsi le non-ĂȘtre de Dieu sâexprime dans le rapport que les hommes entretiennent avec celui-ci et dans la façon dont ils en parlent.
Non-ĂȘtre et abĂźme dans la pensĂ©e de MaĂŻmonide
MoĂŻse MaĂŻmonide, penseur juif, dĂ©veloppe dans son Guide des Ă©garĂ©s la thĂ©orie selon laquelle on ne peut prĂ©diquer aucune qualitĂ© ni nomme Dieu puisque tout attribut ou tout nom entacherait lâunitĂ© absolue du divin. Pour exemple : dire Dieu est bon est incorrect puisque cela revient Ă affirmer que Dieu nâest que bon, et nâest que Dieu. Parler ainsi de Dieu est infiniment dĂ©prĂ©ciatif puisque toute qualitĂ© limite son infinitĂ©. MaĂŻmonide affirme ainsi dans son Guide des Ă©gares : « l'attribut positif indique toujours une partie de la chose qu'on dĂ©sire connaĂźtre »[8]. Donc, puisquâon ne peut parler de Dieu puisque parler (positivement) de Dieu revient Ă limiter son unitĂ©, alors il faut choisir le discours apophatique. Puisquâon ne peut parler positivement de Dieu, alors il faut nier ce qui nâest pas propre Ă Dieu afin de mieux cerner son unitĂ© et accepter lâabĂźme qui sĂ©pare Dieu et les hommes. Le non-ĂȘtre de Dieu sâexprime donc non seulement dans le discours apophatique mais Ă©galement dans lâĂ©cart entre divin et crĂ©ature.
La transcendance de l'apophase par MaĂźtre Eckhart
Le discours apophatique prend une dimension toute nouvelle avec MaĂźtre Eckhart qui affirme que le langage humain peut bel et bien parler de Dieu tant quâil le nie jusquâau nĂ©ant. La thĂ©ologie nĂ©gative que dĂ©veloppe Eckhart permet de saisir Dieu par le nĂ©ant. Selon le philosophe, lâhomme est « capable de Dieu » en lâhomme il y a une trace de la divinitĂ©. Pour ĂȘtre plus prĂ©cis, le fond (grĂŒnt) de lâhomme contient ce quâEckhart nomme le Gotheit, ou « dĂ©itĂ© » en français. Le grĂŒnt est antĂ©rieur Ă la crĂ©ation et est trace du Gotheit : comment donc accĂ©der au grĂŒnt en nous et donc prĂ©tendre saisir la dĂ©itĂ© ? En tendant Ă lâextrĂ©mitĂ© du discours apophatique, par la voie mystique de lâAbgrunt (« abĂźme ») : plonger dans cette nĂ©gativitĂ©, câest nier tout attribut et se nier soi-mĂȘme afin de se transcender et de ne faire quâun avec la divinitĂ©. MaĂźtre Eckhart affirme : « Toute crĂ©ature est de soi nĂ©ant car Dieu a crĂ©Ă© toute chose pour quâelle fusse, et avant toute chose, il nây a rien »[9]. Cette thĂ©ologie nĂ©gative repousse les limites du non-ĂȘtre jusquâĂ a-nĂ©antir toute trace de lâĂȘtre.
Philosophie moderne
Dieu est, Dieu n'est pas: le choix de Pascal
La position pascalienne sur la question ontologique est orientĂ©e, Ă la maniĂšre des penseurs mĂ©diĂ©vaux, vers Dieu. La particularitĂ© de la pensĂ©e de Pascal est de considĂ©rer lâĂȘtre et le non-ĂȘtre de Dieu Ă parts Ă©gales afin de les comparer. Câest par cette considĂ©ration que Pascal construit son pari : le croyant comme lâincroyant ont tout intĂ©rĂȘt Ă croire en Dieu, puisque si Dieu nâest pas, alors ni le croyant ni lâincroyant ne le saura, alors que si Dieu est, le croyant se trouvera avantagĂ©, tandis que lâincroyant devra souffrir lâĂ©ternitĂ© en enfer. La rĂ©flexion de Pascal est purement utilitariste : il ne se contente pas dâaffirmer ou dâinfirmer lâexistence de Dieu mais prĂ©sente les consĂ©quences de lâĂȘtre ou du non-ĂȘtre du divin.
ThĂ©odicĂ©e et non-ĂȘtre pour Leibniz
Gottfried Willhelm Leibniz affirme dans ses Essais de ThĂ©odicĂ©e que lâhomme Ă©volue dans « le meilleur des mondes possible ». Pour Leibniz, lâunivers dans lequel nous nous trouvons est nĂ©cessairement le meilleur univers imaginable et possible puisquâil est choisi et crĂ©Ă© par Dieu : or une telle affirmation entraĂźne de lourdes consĂ©quences sur la question ontologique du non-ĂȘtre. PremiĂšrement, affirmer que notre univers est le meilleur possible, entend que tout autre univers nâest pas : ainsi le non-ĂȘtre est multiple et possiblement infini puisqu'il s'applique Ă l'infinitĂ© d'univers possibles. DeuxiĂšmement, le non-ĂȘtre se corrĂšle au problĂšme du mal : si notre univers « est par Dieu », alors lâexistence du mal est impossible, puisque cela signifierait que la mal Ă©merge de Dieu. Les Essais de ThĂ©odicĂ©e de Leibniz permettent donc dâaffirmer deux choses : le non-ĂȘtre est infini, ou Ă tout le moins multiple, et le non-ĂȘtre du mal.
De Baumgarten et Wolff à la révolution kantienne
Le passage ontologique dans la Critique de la Raison pure dâEmmanuel Kant, « sans importance considĂ©rable » selon les mots de son auteur, est pourtant une vĂ©ritable rĂ©volution philosophique (comme lâĆuvre de Kant en gĂ©nĂ©ral). Mais pour comprendre la thĂ©orie ontologique de Kant, il faut comprendre lâorigine de sa pensĂ©e. Kant fut trĂšs influencĂ© par Alexander Baumgarten et par Christian Wolff qui ont chacun thĂ©orisĂ© le non-ĂȘtre Ă leur maniĂšre, et la thĂ©orie kantienne ne peut ĂȘtre comprise en dehors de cet hĂ©ritage. Ainsi, dans la Metaphysica, Baumgarten (comme Wolff) distingue deux sens du non-ĂȘtre : le nihil negativum et le nihil privativum. Il y a tout dâabord le non-ĂȘtre en tant que la chose considĂ©rĂ©e ne peut pas ĂȘtre dâelle-mĂȘme, comme par exemple un triangle dont la somme des angles nâest pas Ă©gale Ă 180°, câest impossible : câest le nihil negativum. Autrement, le non-ĂȘtre peut ĂȘtre nihil privativum, donc un Ă©tant concevable mais contradictoire : comme imaginer que CĂ©sar ne franchisse pas le Rubicon par exemple, câest un fait concevable mais qui nâest pas assimilable au rĂ©el.
Une fois cela compris, la thĂ©orie kantienne sâĂ©claire. Dans lâamphibologie des concepts de la rĂ©flexion (appendice), Kant prĂ©sente le non-ĂȘtre comme une « modalitĂ© » applicable au concept, Ă lâintuition et Ă lâobjet. Kant divise le non-ĂȘtre en quatre : le non-ĂȘtre comme concept vide sans objet, ou comme objet vide dâun concept, comme intuition vide sans objet, ou bien comme objet vide sans concept. Le non-ĂȘtre peut ĂȘtre un concept vide sans objet (exemple du noumĂšne, de la chose en soi), il peut ĂȘtre objet vide dâun concept (exemple d'une ombre), intuition vide sans objet (lâespace par exemple) ou le non-ĂȘtre comme objet vide sans concept (ce qui sâapparente au nihil negativum de Baumgarten).
Notes et références
- Dans la ThĂ©odicĂ©e, Leibniz examine la question de la crĂ©ation de l'univers par Dieu, et conclut que l'univers dans lequel nous nous trouvons fut choisi parmi une infinitĂ© d'autres, et donc que l'ĂȘtre s'oppose Ă une infinitĂ© de non-ĂȘtres alternatifs.
- Platon, Gorgias
- Sextus Empiricus, HypothĂšses pyrrhoniennes
- Aristote, MĂ©taphysique, Livre Î
- Aristote, MĂ©taphysique, livre Î, 1
- Notamment Ă Protagoras.
- Aristote, Catégories
- Moïse Maïmonide, Guide des égarés, I, 58.
- Maßtre Eckhart, Sermons et traités, Sermon 4.
Bibliographie
- RenĂ© GuĂ©non, Les Ătats multiples de l'ĂȘtre, Paris, Ădition Guy Tredaniel, Ă©dition VĂ©ga, coll. « L'anneau d'or », (rĂ©impr. 1947, 1957, 1984, 1988, 1998, 2009), 3e Ă©d. (1re Ă©d. 1932), 108 p. (ISBN 2-85707-143-4, lire en ligne).
- ParmĂ©nide, Le PoĂšme, fragments, Marcel Conche, ĂpimĂ©thĂ©e, PUF, Paris, 1996.
- Martin Heidegger, Parménide, Paris, Gallimard, 2011.
- Héraclite, Fragments, (trad. et notes Jean-François Pradeau), Flammarion, GF, coll. « Poche / essai », 2002.
- Jean-Paul Dumont, Les sophistes, Fragments et témoignages, PUF, coll. « Les Grands Textes », 1969.
- Platon, Parménide, traduction et présentation par Luc Brisson, GF, Paris, 2de édition, 1999.
- Aristote, MĂ©taphysique, (trad. Christian Rutten et Annick Stevens, prĂ©sentation et annotation : Annick Stevens) in Aristote, Ćuvres, tome I, Paris, Gallimard, La PlĂ©iade, 2014.
- Plotin, Ennéades, (trad. M.-N. Bouillet), 3 vol., Paris, Hachette, 1857-1861.
- Saint Augustin, Confessions, (trad. Joseph Trabucco), Paris, Garnier FrĂšres, 1964.
- Pseudo-Denys l'ArĂ©opagite, Ćuvres complĂštes, trad. Maurice de Gandillac, Aubier, 1943.
- Moïse Maïmonide. Le Guide des égarés, (trad. Salomon Munk), éd. Verdier, 2012.
- Maßtre Eckhart, Sermons-traités, collection Tel, Editions Gallimard, 1992.
- Blaise Pascal, Pensées, Paris, Folio classique, 2017.
- Gottfried Willhelm Leibniz, Essais de Théodicée, Paris, GF, 1999.