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Monotrope uniflore

Monotropa uniflora

Le Monotrope uniflore (Monotropa uniflora) est une plante herbacĂ©e parasite de la famille des ÉricacĂ©es. Au QuĂ©bec, on la surnomme pipe indienne.

Groupe de Monotropa uniflora
Fleur de Monotropa uniflora

Contrairement à la plupart des plantes, elle est blanche et ne contient pas de chlorophylle. Au lieu de produire son énergie par la photosynthÚse, elle vit en parasite. Plus précisément, elle parasite la relation symbiotique mutualiste entre une mycorhize et son hÎte, un conifÚre. Les sucres sont produits par le conifÚre qui les partage avec le champignon pour obtenir certains minéraux. De son cÎté, le monotrope parvient à obtenir ces sucres du champignon. Par conséquent, (dans un cas simplifié) si l'arbre meurt le monotrope succombe aussi, car il parasite indirectement un arbre.

Les relations complexes qui permettent la croissance de cette plante rendent difficile sa propagation. Comme elle ne dĂ©pend pas du rayonnement solaire, elle peut croĂźtre dans des environnements trĂšs sombres, lĂ  oĂč des plantes photosynthĂ©tiques seraient incapables de pousser.

Caractéristiques

Toutes les parties de la plante sont d'un blanc pur. La tige, qui peut atteindre de 10 Ă  30 cm de haut, est revĂȘtue de feuilles rĂ©duites Ă  de petites Ă©cailles de 5 Ă  10 mm de long. Comme le suggĂšre son nom scientifique, et au contraire du monotrope du pin (Monotropa hypopitys), la tige ne porte qu'une seule fleur de 10 Ă  15 mm de long avec 3 Ă  8 pĂ©tales. La floraison est estivale. Le fruit est une capsule dressĂ©e[1]. La plante se lignifie aprĂšs la floraison ce qui fait qu'elle est observable sous sa forme sĂ©chĂ©e Ă  l'automne.

Écologie

En AmĂ©rique du Nord, on trouve le monotrope uniflore dans les forĂȘts de conifĂšres. Sa prĂ©sence est gĂ©nĂ©ralisĂ©e au QuĂ©bec. On le trouve Ă©galement au Japon, en CorĂ©e et dans l'Himalaya[1].

La mycohétérotrophie et ses contraintes

Racines symbiotiques de Monotropa uniflora

Tous les mycohĂ©tĂ©rotrophes non photosynthĂ©tiques sont les descendants d’ancĂȘtres photosynthĂ©tiques[2] - [3] - [4] - [5]. Ils sont maintenant libĂ©rĂ©s de certaines contraintes qu’ont les plantes photosynthĂ©tiques, par exemple des structures vĂ©gĂ©tatives complexes et de la machinerie photosynthĂ©tique coĂ»teuse en Ă©nergie[4]. Toutefois, ce mode d'acquisition du carbone implique plusieurs autres contraintes. En effet, une association obligatoire avec des champignons et un habitat spĂ©cialisĂ© nĂ©cessaire Ă  la survie et Ă  la propagation de ces espĂšces[4] - [6] - [7] - [8] ont contribuĂ© Ă  leur raretĂ©.

Nous croyions, avant que des Ă©tudes soient rĂ©alisĂ©es sur ce sujet, que le monotrope uniflore serait dĂ©savantagĂ© par une relation avec un pollinisateur spĂ©cialiste, c’est-Ă -dire avec un insecte qui a co-Ă©voluĂ© avec le monotrope uniflore et qui est presqu’exclusif Ă  cette espĂšce vĂ©gĂ©tale pour la pollinisation. En effet, le monotrope Ă©tant dĂ©jĂ  limitĂ© par la relation symbiotique obligatoire qu’il entretient avec des mycorhizes, nous pensions que ce serait une stratĂ©gie Ă©volutivement instable que de se munir d’autres relations spĂ©cialistes. Nous pensions Ă©galement qu’il serait avantageux de faire de l’autofĂ©condation (gamĂšte femelle d’une fleur fĂ©condĂ© par un gamĂšte mĂąle provenant du mĂȘme individu) lorsque nĂ©cessaire afin d’assurer sa reproduction[2]. Ces deux hypothĂšses ont Ă©tĂ© rejetĂ©es.

Stratégies de reproduction

Les principales espĂšces d’insectes visitant les fleurs du monotrope uniflore se regroupent dans le genre Bombus et dans les familles Syrphidae et Halictidae. La plupart des insectes consomment le nectar offert par la plante et seulement quelques espĂšces servent de vecteurs pour le pollen en touchant les organes sexuels mĂąles et femelles de fleurs produites par diffĂ©rents individus de la mĂȘme espĂšce. Les visiteurs avec de courtes piĂšces buccales (famille des Syrphidae) recherchent de la nourriture sur les exsudats collants du stigmate. Ils ne sont donc ni des consommateurs de nectar, ni des pollinisateurs[9].

Des populations de monotrope uniflore observĂ©es dans l’Est des États-Unis ont montrĂ© que les insectes du genre Bombus sont les visiteurs floraux les plus abondants Ă  cet endroit. Ils rĂ©coltent Ă  la fois du nectar et du pollen. En effet, ils ont un effet de vibration lorsqu’ils volent, ce qui permet aux sacs polliniques prĂ©sents sur les anthĂšres des fleurs de relĂącher les grains de pollen qu’ils contiennent[10]. Ces insectes sont donc les principaux vecteurs assurant le transport du pollen d’un monotrope uniflore Ă  l’autre[9].

Ces mĂȘmes populations de monotrope uniflore ont dĂ©montrĂ© une compatibilitĂ© avec l’autofĂ©condation dans 20 % des cas. Comme cette espĂšce a une dispersion trĂšs limitĂ©e par les relations obligatoires et spĂ©cialistes qu’elle entretien, c’est un taux infĂ©rieur Ă  ce qu’on a pu prĂ©dire. De plus, on retrouve de l’herkogamie dans l’organisation de ses piĂšces florales; l’extrĂ©mitĂ© du stigmate est supĂ©rieure aux anthĂšres, ce qui rĂ©duit les possibilitĂ©s d’autofĂ©condation. Cependant, aucun signe de dichogamie n’a Ă©tĂ© observĂ© dans ces populations; les organes sexuels mĂąles et femelles sont matures au mĂȘme moment, ce qui permet quelques Ă©vĂ©nements d’autofĂ©condation. De plus, les individus Ă  l’intĂ©rieur d’une population ne dĂ©montrent pas un effort de reproduction constant au fil des annĂ©es. À chaque annĂ©e, certains individus produisent beaucoup de tiges pourtant une fleur. Cette grande production est gĂ©nĂ©ralement suivie par une ou plusieurs annĂ©es de dormance pour ces mĂȘmes individus. De plus, l’effort de reproduction peut ĂȘtre affectĂ© par les fluctuations climatiques (niveau d’humiditĂ© et tempĂ©rature). Si ces conditions ne sont pas optimales pour cette espĂšce, l’effort de reproduction sera rĂ©duit ainsi que la fĂ©conditĂ© des fleurs, il y aura donc beaucoup moins de fruits matures produits[9].

Morphologie de la graine

Fruits secs de Monotropa uniflora

Les graines matures du monotrope uniflore ont entre 0,6 et 0,8 mm de longueur et 0,12 et 0,15 mm de largeur. À chaque extrĂ©mitĂ© d’une graine, on retrouve une structure tĂ©gumentaire en forme de petites ailes. Les graines contiennent une quantitĂ© de rĂ©serves alimentaires limitĂ©e et leur embryon a une diffĂ©renciation tardive[11].

Herbivorie

L’observation de populations de monotrope uniflore dans l’Est des États-Unis a Ă©galement montrĂ© que le monotrope uniflore produit un petit nombre de fruits matures par plante lorsqu’on le compare avec les autres taxons de plantes mycohĂ©tĂ©rotrophes. De plus, il perd un fort ratio de fleurs et de fruits par herbivorie. En effet, cette espĂšce est trĂšs susceptible Ă  la prĂ©dation de graines une fois les fleurs fĂ©condĂ©es. Lorsque les tissus viables commencent Ă  se dĂ©shydrater, on retrouve rĂ©guliĂšrement des larves de lĂ©pidoptĂšres se nourrissant des graines presque matures[9].

Interaction spécialiste avec certaines espÚces de mycorhizes

Tous les mycorhizes parasités par le monotrope uniflore font partie de la famille Russulaceae. La plupart de ces mycorhizes sont de genre Russula et quelques-uns sont de genre Lactarius. Chaque plant est habituellement colonisé par une seule espÚce de mycorhize[12].

Les plantules de monotrope uniflore se dĂ©veloppent mieux lorsqu’elles forment une association avec la mĂȘme espĂšce de mycorhize que la plante mĂšre. Par consĂ©quent, il a Ă©tĂ© suggĂ©rĂ© que les signaux dĂ©clenchant la germination de la graine sont hĂ©ritables[12].

Notes et références

  1. Marie-Victorin, frĂšre, F.É.C., 1885-1944. et Goulet, Isabelle, 1967-, Flore laurentienne, Presses de l'UniversitĂ© de MontrĂ©al, (ISBN 2-7606-1650-9 et 978-2-7606-1650-9, OCLC 35881567, lire en ligne)
  2. BIDARTONDO, M. I. 2005 . The evolutionary ecology of myco-heterotrophy. New Phytologist 167 : 335 – 352 .
  3. CULLINGS, K. W. , T. M. SZARO, AND T. D. BRUNS. 1996 . Evolution of extreme specialization within a lineage of ectomycorrhizal epiparasites. Nature 379 : 63 – 66 .
  4. LEAKE, J. R. 1994 . The biology of myco-heterotrophic (‘ saprophytic ’) plants. New Phytologist 127 : 171 – 216.
  5. WALLACE, G. D. 1975 . Studies of the Monotropoideae (Ericaceae): Taxonomy and distribution. Wasmann Journal of Biology 33 : 1-88.
  6. MOOLA, F. M. , & L. VASSEUR. 2004 . Recovery of late-seral vascular plants in a chronosequence of post-clearcut forest stands in coastal Nova Scotia, Canada. Plant Ecology 172 : 183 – 197 .
  7. TAYLOR, D. L. , AND T. D. BRUNS. 1999 . Population, habitat and genetic correlates of mycorrhizal specialization in the ‘ cheating ’ orchids Corallorhiza maculate and C. mertensiana. Molecular Ecology 8 :1719 – 1732 .
  8. LUOMA, D. L. 1987 . Synecology of the Monotropoideae within Limpy Rock Research Natural Area, Umpqua National Forest, Oregon. M.S. thesis. Oregon State University, Corvallis, Oregon, USA.
  9. KLOOSTER M.R. AND CULLEY T.M. 2009. Comparative analysis of the reproductive ecology of Monotropa and Monotropsis: Two mycoheteretrophic genera in the Monotropoideae (Ericaceae). American Journal of Botany 96(7): 1337–1347. 2009.
  10. HERMANN, P. M. , AND B. F. PALSER. 2000 . Stamen development in the Ericaceae. I. Anther wall, microsporogenesis, inversion, and appendages. American Journal of Botany 87 : 934 – 957 .
  11. RANDALL OLSON A. 1980. Seed morphology of Monotropa uniflora L. (Ericaceae). American Journal of Botany 67(6): 968-974.
  12. YANG S. AND PFISTER D.H. 2006. Monotropa uniflora plants of eastern Massachusetts form mycorrhizae with a diversity of russulacean fungi. Mycologia 98(4): 535-540.

Voir aussi

Références taxinomiques

Liens externes

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