Maine de Biran
Pierre Maine de Biran, de son nom complet Marie François Pierre Gontier de Biran ([2] à Bergerac – à Paris), est un philosophe, mathématicien et précurseur de la psychologie qui appartient au courant du spiritualisme français, après avoir rompu avec la philosophie de la société des idéologues.
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« Volo, ergo sum[1] » (la primauté de l'effort voulu) |
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Biographie
Fils de médecin, Maine de Biran est né dans une famille de notables. Son père est médecin, son grand-père et son arrière-grand-père ont été maires de sa ville natale, et, à partir de 1787, il signe « Maine de Biran », du nom d'une terre de son père[3], près de Mouleydier.
Après ses études secondaires au collège de Bergerac, d'où il sort bachelier, il s'inscrit à l’université de Poitiers. Il y obtient sa licence en droit civil et canon. À dix-huit ans, il est admis dans les gardes du corps et, en octobre 1789, participe à la défense du château de Versailles[4] ; à la fin de 1792, il juge prudent de se retirer dans ses terres du château de Grateloup[5], près de Bergerac. Suivent le départ pour la Hollande, puis une période de méditation, entièrement tournée vers la compréhension du monde. Il ne se cloître pas, néanmoins : amateur de sciences, curieux des lois de la physique, de l'optique, il ne cesse de voyager, de se déplacer dans toute l'Europe du Nord, mais dans la solitude et la discrétion. Résistant aux curieux, étranger aux tentations des cours qui pourtant le sollicitent, il arpente l'Europe en voyageur insatiable, toujours attentif à soumettre à l'épreuve de l’expérience les intuitions qui nourrissent sa pensée. Ses fonctions en tant qu’administrateur du département de la Dordogne après la chute de Robespierre, sa création de la Société médicale de Bergerac[6] et les Mémoires qu'il a soumis à ses séances sous le Premier Empire, sa participation à la Commission des cinq[7], font de Maine de Biran à la fois un personnage de l'histoire locale et une figure de l'histoire de la philosophie ; mais ce sont ses efforts pour donner un fondement aux sciences de l'homme qui le distinguent particulièrement.
Il se maria deux fois en 1795 et 1814 et aura un fils Félix en 1796 et deux filles Eliza 1797 et Adine 1800 qui portèrent tous trois le nouveau patronyme de Maine de Biran. Cette branche de la famille fut anoblie par Louis XVIII à la suite des succès des œuvres écrites par le philosophe.
Son fils Félix n'ayant eut que des filles le nom Maine de Biran s'éteignent en 1879 avant d'être relevé à la fin du XIXe par Alexandre de Biran, le fils naturel d'une lointaine nièce, Françoise Gontier de Biran, dite Nelly, avec un homme inconnu.
Philosophie
Homme du XVIIIe siècle français par sa date de naissance et le milieu culturel de sa formation, Maine de Biran se détache peu à peu d'un sensualisme inspiré de Condillac pour élaborer une psychologie de la subjectivité. Parti d'un agnosticisme discrètement teinté de religiosité sous l'influence de Rousseau, il aboutit à une métaphysique fondée sur l'expérience religieuse, selon une acception moderne, et sur la foi chrétienne. Maine de Biran entend rester le plus possible près des faits : ils lui sont donnés par les sciences de la vie et l'observation de soi. Nous lui devons le premier journal philosophique[8] qui annonce un siècle et demi plus tard le Journal Métaphysique de Gabriel Marcel.
C'est pour lui autour de l'effort et de sa répétition que se construisent la pensée et la personnalité humaines[9]. Merleau-Ponty distingue dans ses travaux un germe de ce qu'on nommera plus tard la phénoménologie. D'autres trouvent en lui un précurseur de Freud[10], et de l'école spiritualiste en France.
Å’uvres
Å’uvres de Maine de Biran, par ordre de parution
La plupart des œuvres de Maine de Biran sont parues après sa mort, ce qui explique en partie sa méconnaissance.
- Influence de l'habitude sur la faculté de penser sur Gallica, Paris, Henrichs, An XI (1802).Sous-titre : Ouvrage qui a remporté le prix sur cette question, proposée par la classe des sciences morales et politiques de l'Institut national : « Déterminer quelle est l'influence de l'habitude sur la faculté de penser ; ou, en d'autres termes, faire voir l'effet que produit sur chacune de nos facultés intellectuelles, la fréquente répétition des mêmes opérations »
- Essai sur les fondements de la psychologie et sur ses rapports avec l'étude de la nature, 1812
- Exposition de la doctrine philosophique de Leibnitz, Paris, Michaud, 1819
- Nouvelles considérations sur les rapports du physique et du moral de L'Homme. Ouvrage posthume publié par Victor Cousin, Paris, Ladrange, 1834
- Œuvres philosophiques de Maine de Biran, Ladrange, édition de Victor Cousin, 1841, 4 vol.
- Œuvres inédites, publiées par Ernest Naville, avec la collaboration de Marc Debrit, Paris, Dezobry, E. Magdeleine et Paris, 1859 (3 vol., ainsi qu'une Introduction aux œuvres inédites)
- Science et psychologie : nouvelles œuvres inédites de Maine de Biran sur Gallica, Alexis Bertrand (éd.), Paris, E. Leroux, 1887
- Mémoire sur les perceptions obscures ; suivi de la discussion avec Royer-Collard sur l'existence d'un état purement affectif, et de trois notes inédites sur la nature de l'influence de la volonté, sur la perception de la dureté, sur l'objet de la philosophie de l'esprit humain sur Gallica, Paris, Armand Colin, 1920Notices biographique et bibliographique par Pierre Tisserand
- Les discours philosophiques de Bergerac, Paris, Félix Alcan, 1925
- Journal intime (1792-1824), avant-propos, trad. et notes par A. de La Valette-Monbrun, Plon, 1927, 2 vol.
- Journal. Édition intégrale publiée par H. Gouhier, Éd. de la Baconnière, 1954–55
- Maine de Biran — La vie intérieure, présenté par Bruce Bégout, Paris, Payot, 1995
Sur papier
- Écrits de jeunesse(1792-1798)Influence de l'habitude sur la faculté de penser
- Mémoire sur la décomposition de la pensée
- De l'aperception immédiate
- Discours à la Société médicale de Bergerac
- Rapports du physique et du moral de l'homme
- Essai sur les fondements de la psychologie
- Rapports des sciences naturelles avec la psychologie
- Nouvelles considérations sur les rapports du physique et du moral de l'homme
- Dernière philosophie
- Morale et religion
- Existence et anthropologie
- Commentaires
- Commentaires sur les philosophies du XVIIe siècle
- Commentaires sur les philosophies du XVIIIe siècle
- Commentaires sur les philosophies du XIXe siècle
- L'homme public
- Au temps des « gouvernements illégitimes » (1789-1814)
- Au temps de « la » légitimité (1815-1824)
- Correspondance philosophique
CD-Rom
- Œuvres complètes, Paris, Vrin« [R]éunissant […] l'édition historico-critique des Œuvres de Maine de Biran, établie sous la direction de François Azouvi, le Journal édité par Henri Gouhier aux Éditions de la Baconnière et la Correspondance privée[12] »
Distinction et hommage
Notes et références
- John Alexander Gunn (en), chap. 1-1 de Modern French philosophy : A study of the development since Comte.
- « Marie » n'apparaît pas dans l'acte de naissance et de baptême sur Google Livres.
- Encyclopædia Universalis (1995) et Robert des noms propres (1974).
- Joseph Durieux, Le Périgord militaire. Gardes du corps du roi au XVIIIe siècle, 1921, p. 275-278 (lire en ligne).
- Commune de Saint-Sauveur ; il y repose maintenant, près de l'église, au centre du village.
- Paul Marx, « Maine de Biran (1766-1824) : fondateur de la Société Médicale de Bergerac », sur BIU Santé (consulté le ).
- « Chargée d'informer l'Empereur du vœu de la nation et de ses besoins » (Ne pas confondre avec la Commission des Cinq des États-Unis.) « Pierre, François, Marie Maine de Biran », sur www.assemblee-nationale.fr (consulté le ).
- Encyclopædia Universalis.
- Mémoire sur la décomposition de la pensée, p. 157.
- Serge Nicolas, Claude Mouchet et Laurent Fedi, Un débat sur l’inconscient avant Freud : la réception de Eduard von Hartmann chez les psychologues et philosophes français, Paris, L’Harmattan, , 364 p. (ISBN 978-2-296-19837-1, lire en ligne), p. 15.
- Ampère faisait partie du cercle qui se réunissait chez Cabanis, à Auteuil, et qui comprenait : de Biran, Cabanis, Ampère, Royer-Collard, Guizot et Cousin.
- Texte de Vrin, sur son site.
- « Maine de Biran, François Pierre », base Léonore, ministère français de la Culture.
Annexes
Iconographie
- Portrait fait en 1798 par Jean-Bernard Duvivier (Bruges 1762–Paris 1837) et publié par de La Valette Monbrun en 1914
Bibliographie
- Geneviève Barbillon, De l'idée de Dieu dans la philosophie de Maine de Biran, 1927.
- François Buhler, Maine de Biran in Les Grands Ecrivains bipolaires, pp. 71-86, Publibook, Paris, 2018.
- Ernest Naville, Notice historique et bibliographique sur les travaux de Maine de Biran, Paris, 1851 :
- L'histoire des manuscrits inédits de ce philosophe
- Le catalogue raisonné de ses ouvrages tant inédits que publiés
- Le catalogue des écrits relatifs à sa vie et à ses doctrines
- Auguste Nicolas, Étude sur Maine de Biran d'après le Journal intime de ses pensées, publié par Ernest Naville sur Google Livres, Paris, Auguste Vaton, 1858
- Jules Francisque Gérard, La Philosophie de Maine de Biran - Essai suivi de fragments inédits sur Google Livres, Paris, Germer Baillière, 1876, 519 p.
- A. Dujarric-Descombes, Acte de naissance de Maine de Biran, dans Bulletin de la Société historique et archéologique du Périgord, 1880, tome 7 , p. 405-407 (litr rn ligne)
- Jean-Amable de La Valette Monbrun, Essai de biographie historique et psychologique : Maine de Biran (1766-1824), d'après de nombreux documents inédits, Paris, Fontemoing, 1914.
- Georges Legrand, Maine de Biran et Descartes, dans Revue Philosophique de Louvain, 1914, no 81, p. 71-78 [lire en ligne]
- Victor Giraud, Moralistes français, Hachette, 1923.
- Victor Delbos, Maine de Biran et son Å“uvre philosophique, Librairie philosophique J. Vrin, Paris 1931
— publication posthume à la base de son cours à la Sorbonne, effectué dans l'année 1910 - 1911 [lire en ligne] - Gaston Fessard, « La méthode de réflexion chez Maine de Biran », dans Cahier de la Nouvelle Journée, no 39, Bloud et Gay, 1938Rédigé en 1923
- Henri Gouhier, Les conversions de Maine de Biran, Paris, Vrin, 1948
- Michel Henry, Philosophie et phénoménologie du corps. Essai sur l'ontologie biranienne, coll. « Epiméthée », PUF, 1965
- Gilbert Romeyer-Dherbey, Maine de Biran ou le Penseur de l'immanence radicale, Paris, Seghers,
- Lucien Even, Maine de Biran, critique de Locke, avant-propos de Henri Gouhier, coll. « Bibliothèque philosophique de Louvain », Louvain-la-Neuve, Peeters, 1983, 116 p. (ISBN 978-2-8017-0193-5)
- Su-Young Hwang, L'habitude dans le spiritualisme français : Maine de Biran, Ravaisson, Bergson, Lille, 1996
- Masaki Furukawa, Philosophie et religion chez Maine de Biran, Lille, Presses universitaires du Septentrion, 1998 (ISBN 2284014348 et 9782284014348)
- (it) Gustavo Gamna, Oltre l'esistenza : M. F. P. Maine de Biran, N. Berdjaev, D. Bonhoeffer e l'antropofenomenologia, Turin, Castalia, 1998, 152 p.
- Gabriel Tarde, Maine de Biran et l'évolutionnisme en psychologie, Paris, Institut d'édition Sanofi-Synthélabo, 2000.
- Laurent Giassi, « Psychologie, éclectisme et spiritualisme : Maine de Biran, Victor Cousin et Félix Ravaisson », sur www.philopsis.fr, (consulté le ).
Article connexe
Liens externes
- Ressource relative à la vie publique :
- Bibliothèque de Genève numérique, Pierre Maine de Biran (1766-1824)
- « Maine de Biran », article de l'encyclopédie Imago mundi
- Fondation Napoléon ; Maine de Biran, François-Pierre Gontier de Biran dit… (1766-1824), philosophe