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Ligue de la jeune RĂ©publique

La Ligue de la Jeune République était un parti politique français créé en 1912 par Marc Sangnier, dans le prolongement du Sillon après que ce dernier fut désavoué par le pape Pie X.

Ligue de la Jeune RĂ©publique
Présentation
Fondation
(mouvement politique)


(parti politique)

Disparition
Fondateur Marc Sangnier
Positionnement Centre gauche Ă  gauche
Idéologie Christianisme social
Démocratie chrétienne
Pacifisme
Solidarisme

La Jeune République représentait un courant catholique social opposé, avant guerre, à celui du Parti démocrate populaire orienté au centre-droit. Elle s'est ralliée au socialisme « personnaliste » prôné par Emmanuel Mounier. La Jeune République ne dépassa jamais 2 à 3 % des voix lors des élections législatives. En 1936, elle soutint le Front populaire, et après un court regain à la Libération de la France, déclina jusqu'aux années 1980, après avoir refusé de fusionner avec le Parti socialiste.

Le Sillon

Dans la brèche ouverte par la politique de ralliement de l’Église Ă  la RĂ©publique naĂ®t, en 1894, le journal Le Sillon, un journal crĂ©Ă© par Paul Renaudin, puis dirigĂ©e par Marc Sangnier. D'abord journal philosophique, Le Sillon devient Ă  partir de 1899 un mouvement visant Ă  rĂ©concilier les ouvriers et le christianisme. Le succès est inespĂ©rĂ©. Le Sillon compte 500 000 membres. En 1906, on compte 46 % d’ouvriers, 27 % d’employĂ©s, 12 % de professions libĂ©rales, 9 % d’ecclĂ©siastiques et 3 % de patrons. En 1909, Marc Sangnier crĂ©e un quotidien, La DĂ©mocratie, qui paraĂ®tra jusqu'en 1914, puis de 1919 Ă  1921 et en 1924. L'annĂ©e suivante celui-ci devient mensuel jusqu'en 1933. Le , Marc Sangnier est sommĂ© par le pape Pie X de placer le Sillon dans la soumission Ă  l'Ă©piscopat. En fait, depuis 1906 Le Sillon n'est plus en odeur de saintetĂ©, acceptant l'adhĂ©sion des protestants et des juifs, dialoguant avec les non-croyants, approuvant la sĂ©paration des Églises et de l’État.

La Ligue de la Jeune RĂ©publique

Marc Sangnier en 1919.

Refusant la démarche cléricale qui lui serait imposée, le , Marc Sangnier se déplace sur le plan proprement politique et crée la Ligue de la Jeune République (JR). Dans le cercle dirigeant du Conseil national figurent Henry du Roure, Léonard Constant et Georges Hoog, mais aussi une femme, ce qui était rarissime à cette époque : Germaine Malaterre-Sellier, féministe émérite, croix de guerre avec palmes en 1915[1], qui lutte sans relâche pour le vote des femmes. La Ligue se lance dans des combats alors d'avant-garde contre les taudis, le travail de nuit des femmes, l'alcoolisme, pour la journée de huit heures, le repos hebdomadaire, le droit à la retraite, et un code du travail, baptisé "Charte du salariat". La JR est favorable à la représentation proportionnelle et à la suppression du Sénat qui serait remplacé par une Chambre des intérêts économiques et sociaux. La JR combat toute forme de racisme, y compris l'antisémitisme pourtant prégnant dans les milieux catholiques, et soutient les mouvements de revendication dans les colonies.

L'organisation de la Ligue de la jeune RĂ©publique en 1929.

En 1914, la JR se dote d'une revue qui aura une longue vie, d'abord hebdomadaire puis mensuelle. Sa parution sera seulement interrompue durant les deux guerres. En 1919, le mouvement compte 15 000 membres. Il participe au Bloc national lors des Ă©lections de et obtient cinq Ă©lus : Marc Sangnier, Édouard Soulier, Marcel Leger, Joseph Pouzin et Joseph Defos du Rau. Déçue par le conservatisme et le chauvinisme du Bloc, la JR tente de regrouper les militants catholiques sociaux, notamment bretons, et promeut la crĂ©ation de la Ligue nationale de la dĂ©mocratie (LND)[2]. Marc Sangnier en est le prĂ©sident. En , lors du Congrès de la LND, Marc Sangnier et la majoritĂ© des militants de la JR se retirent, laissant cependant les autres dĂ©putĂ©s du mouvement y demeurer. En , la rupture est consommĂ©e et la JR reprend officiellement son indĂ©pendance. En 1924, Francisque Gay qui sera plusieurs fois ministre MRP en 1945-1946, quitte la JR pour se consacrer au journalisme et crĂ©er La Vie catholique. En 1932, il fonde le quotidien L'Aube. Ă€ cette date, le parti compte 5 000 membres.

La JR organise des Congrès internationaux de la Paix avec des personnalitĂ©s diverses, tel Ferdinand Buisson, prĂ©sident franc-maçon de la Ligue des droits de l'homme, l'abbĂ© allemand Franz Stock et le jeune Pierre Mendès-France. Celui de 1926 rĂ©unira plus de 5 000 personnes Ă  Bierville. En , le mouvement obtient un Ă©lu aux Ă©lections lĂ©gislatives, Louis Rolland. En 1929, Marc Sangnier fonde la Ligue française des Auberges de Jeunesse. En , la Ligue compte deux Ă©lus aux Ă©lections lĂ©gislatives, Louis Rolland et Guy Menant (IG), deux dĂ©putĂ©s le rejoignant Ă  la faveur de partielles, Philippe Serre en 1933 et Albert Blanchoin en 1935. En 1932, Georges Hoog devient secrĂ©taire gĂ©nĂ©ral de la JR, en remplacement de Marc Sangnier, qui se consacre dĂ©sormais aux mouvements pacifistes et Ă  son hebdomadaire L’Éveil des Peuples, consacrĂ© Ă  la politique internationale et qui paraĂ®t jusqu'en 1939. En 1935, invitĂ© par Philippe Serre, sĂ©duit par ses analyses militaires, le colonel de Gaulle, sans ĂŞtre membre, assiste Ă  des rĂ©unions de la JR, et s'abonnera Ă  la grande revue catholique de gauche Temps PrĂ©sent dès sa crĂ©ation en 1937.

Le Parti de la Jeune RĂ©publique

Le , la Ligue de la Jeune RĂ©publique se transforme en parti politique (Parti de la Jeune RĂ©publique)[3]. En , quatre dĂ©putĂ©s sont Ă©lus : Paul Boulet Ă  Montpellier, Jean Leroy Ă  Mirecourt, Philippe Serre Ă  Briey et Albert Blanchoin en Maine-et-Loire. Le nouveau parti, qui compte 15 000 membres, participe au Front populaire. De Ă  , Philippe Serre est nommĂ© sous-secrĂ©taire d'État au Travail dans le troisième gouvernement Chautemps. Il devient sous-secrĂ©taire d'État Ă  la prĂ©sidence du Conseil, chargĂ© des services de l'immigration, dans le gouvernement Chautemps remaniĂ© de janvier Ă  . Puis en mars et , il reprend son portefeuille de sous-secrĂ©taire d'État au travail dans le deuxième gouvernement Blum. Deux Ă©lus adhèrent au parti en cours de lĂ©gislature : Maurice Montel et Maurice Delom-SorbĂ©. De janvier Ă  , ce dernier est promu sous-secrĂ©taire d'État Ă  la Marine militaire dans le quatrième cabinet Chautemps. Fin 1938, les accords de Munich divisent le parti. Philippe Serre est très antimunichois  En revanche, les dĂ©putĂ©s de la Jeune RĂ©publique votèrent pour, persuadĂ©s de prĂ©server la paix.

Le , les quatre députés JR présents votent contre les pleins pouvoirs à Pétain. Le parti est le seul à avoir voté unanimement contre. L'imprimerie de La Démocratie, le journal de Marc Sangnier, se met clandestinement à la disposition de la Résistance et publie Défense de la France et Témoignage chrétien. Maurice Schumann, membre depuis 1935, est la principale voix à la radio londonienne de la France libre. Dès le , Alcide Morel fonde le Réseau Valmy avec Marcel Renet (Destrée) et Raymond Burgard, tous militants de la JR. Dès 1941, Emilien Amaury, anime le Groupe de la rue de Lille, abrité dans les locaux de l'Office de publicité générale, luttant contre la propagande et l'occupant. Le groupe, lui aussi, met ses imprimeries au service des mouvements de résistance. Le mouvement Résistance est fondé à l'été 1942 par Marcel Renet (Destrée) et Maurice Lacroix.

Quant à Eugène Claudius-Petit et Antoine Avinin, ils représentent le mouvement Francs-Tireurs au Conseil national de la Résistance. Les héritiers spirituels de Marc Sangnier représenteront un bon quart des membres du CNR.

À la Libération en 1944, Maurice Lacroix, helléniste distingué, devient président du parti. En 1945, Le député savoyard Lucien Rose, grand résistant, et futur maire adjoint socialiste de Rennes, devient secrétaire général jusqu'en 1949. En , plusieurs membres adhèrent au nouveau Mouvement républicain populaire (MRP), plus « centriste », dont Marc Sangnier et Maurice Schumann. En , la JR participe à la fondation de l'Union démocratique et socialiste de la Résistance qui rassemble la sensibilité centre-gauche (y compris catholique) des Résistants (notamment François Mitterrand). En , aux élections de la première Assemblée nationale constituante la JR a cinq élus sous drapeau UDSR : Maurice Lacroix, Lucien Rose, Antoine Avinin, Maurice Delom-Sorbé et Eugène Claudius-Petit. En , s'ajoute le député Pierre Bourdan, tout nouvel adhérent. Cependant, en , plusieurs membres (Antoine Avinin, Maurice Delom-Sorbé, Eugène Claudius-Petit, Lucien Rose) restent à l'UDSR quand celle-ci devient un parti à part entière et refuse la double appartenance. En , seul Pierre Bourdan est élu aux élections de la seconde Assemblée nationale constituante. En , il est réélu aux élections législatives et sera, sous étiquette UDSR, de janvier à , ministre de la Jeunesse, des Arts et des Lettres dans le gouvernement Ramadier et participera à la création du festival d'Avignon.

En , la JR est simple observatrice au ComitĂ© d'entente des mouvements progressistes (CEMP)[4] qui regroupe des progressistes et socialistes dissidents, et qui fait long feu. En , essorĂ©e par les dĂ©parts vers le MRP et l'UDSR, la JR ne compte plus que 730 membres. En 1950, la JR accueille d'anciens MRP déçus, dont LĂ©o Hamon, Charles d'Aragon et le dĂ©putĂ© Henri Grouès, mieux connu sous le nom d'AbbĂ© Pierre. La mĂŞme annĂ©e Jean BauchĂ© devient secrĂ©taire gĂ©nĂ©ral. En , toujours Ă  la recherche de partenaires, la JR participe Ă  la crĂ©ation du Centre d'action des gauches indĂ©pendantes (CAGI), dont son militant Jacques Nantet est secrĂ©taire gĂ©nĂ©ral. C'est cette annĂ©e que Jacques Delors, cadre de la Banque de France, syndicaliste CFTC puis co-crĂ©ateur de la CFDT, adhère Ă  la JR, après un bref passage au MRP. En 1955, le dĂ©putĂ© LĂ©o Hamon rejoint le parti avec Claude-Roland Souchet[5], Georges Montaron, directeur de TĂ©moignage chrĂ©tien, et le jeune Anicet Le Pors, futur ministre communiste en 1981. Cette mĂŞme annĂ©e, le mouvement est remontĂ© Ă  2 000 adhĂ©rents et son journal tire entre 7 000 et 10 000 exemplaires, dont 3 000 servis en abonnements. En 1955, Ă©choue une tentative de regroupement aux cĂ´tĂ©s de l'UDSR, l'Union dĂ©mocratique du travail, avec des gaullistes de gauche et divers progressistes sans parti.

En 1956, la JR participe au Front républicain et sera un des principaux promoteurs du « mendèsisme ». En 1957, Bertrand Schneider est élu au secrétariat général en remplacement du fraîchement élu à ce poste l'avocat François Sarda qui rallie le gaullisme de gauche. En 1957, guidée par le secrétaire général Maurice Lacroix, la majorité de la Jeune République (dont Jacques Delors) fusionne avec le Mouvement de libération du peuple (MLP) et le Mouvement Uni de la Nouvelle Gauche[6], formant ainsi l'Union de la gauche socialiste (UGS)[7] - [8]. L'UGS sera plus tard une des composantes du Parti socialiste unifié.

En 1960, Claude-Roland Souchet devient secrétaire général. Né Hirschfeld en 1925, baptisé en 1953, il adhère au MRP en 1953 puis à la JR en 1955. En , se tient le 51e Congrès qui vote le nouveau préambule aux statuts qui désormais donne toute son importance au « socialisme personnaliste ». En 1972, la JR souscrit au Programme commun de la gauche. En 1975, est publié le manifeste de Bierville dont l'objectif est de rassembler les grandes idées qui sous-tendent l'action du parti. Les signataires sont Gérard Brissé, Monique Burat, Jean Chappet, Thérèse Cleuset, Cécile Dieudonné, René Fiévet, Daniel Jeanpierre, Marcelle Leconte-Souchet, Paul Maureille, Marguerite Merklen, Alcide More, Louis Perrin, Marie-Thérèse Postel, Jean Pralong, Claude-Roland Souchet, Roger Thévin, Roger Vinel.

En 1981, François Mitterrand rencontre les dirigeants de la JR en vue de l'entrée de celle-ci au sein du Parti socialiste sous forme de courant, ce qui est refusé. Cette période connaît de nombreux départs d'adhérents vers le P.S. Autour de Claude-Roland Souchet et Gérard Brissé, un petit groupe maintient tout de même l'activité du parti jusqu'en 1985.

En 1985, l'hedomadaire La Jeune-République, fondé en 1920, devient trimestriel, puis cesse de paraître en 1989. La JR cesse toute activité, sans se dissoudre formellement[9].

RĂ©sultats Ă©lectoraux

Élections législatives

Année 1er tour Sièges Rang[10] Gouvernement
Voix %
1919
4 / 613
Bloc national
1924
1 / 581
1928
1 / 604
1932
2 / 607
1936
4 / 610
Front populaire
1945
5 / 586
Dans l'UDSR
Juin 1946
1 / 586
Dans l'UDSR

Bibliographie

Références

  1. Anne Mathieu, « MALATERRE-SELLIER Germaine », dans née SELLIER Germaine Renée Suzanne, Maitron/Editions de l'Atelier, (lire en ligne)
  2. Laurent de Boissieu, « Ligue Nationale de la Démocratie (LND) », France Politique,‎ (lire en ligne)
  3. Marie-Anne Kraft, « Il y a cent ans, la Jeune République ouvrait un chemin », Club de Mediapart,‎ (lire en ligne, consulté le )
  4. Laurent de Boissieu, « Comité d'Entente des Mouvements Progressistes (CEMP) », France Politique,‎ (lire en ligne)
  5. « Le socialisme personnaliste », sur jeunerepublique.free.fr (consulté le )
  6. Laurent de Boissieu, « Mouvement Uni de la Nouvelle Gauche (MUNG) », France Politique,‎ (lire en ligne)
  7. « L'histoire du Parti socialiste » Blog Archive » Le PSU », archive.fo,‎ (lire en ligne [archive du ], consulté le )
  8. « Le PSU et la deuxième gauche - ReSo - Réformistes et Solidaires », archive.fo,‎ (lire en ligne [archive du ], consulté le )
  9. Boudon 2017.
  10. En nombre de voix, et non en nombre de sièges.
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