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Julius Sabinus

Julius Sabinus († 78 apr. J.-C.) est un chef lingon qui participa aux cĂŽtĂ©s de Caius Julius Civilis Ă  la RĂ©volte de 69-70. Il sera dĂ©fait par les lĂ©gions d'Appius Annius Gallus et les SĂ©quanes. AprĂšs 9 ans de clandestinitĂ© passĂ©s Ă  vivre cachĂ© dans une grotte, Sabinus est trahi et dĂ©couvert. Il sera mis Ă  mort malgrĂ© les supplications d'Éponine, sa femme avec qui il avait eu deux enfants.

Julius Sabinus
Biographie
DĂ©cĂšs
78 apr. J.-C.
Rome
Nom de naissance
Marcus Aurelius Iuliannus Sabinnus
Époque
Conjoint
Gens

Cadre historique

L'allégeance des Lingons au pouvoir central de Rome[1] s'affirme lors de la Révolte de Sacrovir en 21 sous TibÚre et de la rébellion de Vindex contre Néron en 68[2], les Lingons prenant part avec les Trévires et RÚmes à la Bataille de Vesontio aux cÎtés des légions de Lucius Verginius Rufus[3].

La Guerre civile met un terme au lĂ©gitimisme des Lingons qui ne reconnaissent pas le pouvoir de Galba aprĂšs le suicide de NĂ©ron. Cette prise de position entraĂźne la rupture du fƓdus par Galba, la Civitas des Lingons devenant alors une colonie romaine[4]. AprĂšs l'assassinat de ce dernier, Othon octroie la citoyennetĂ© romaine aux Lingons pour s'assurer de leur soutien politique[5], lesquels prennent le parti de Vitellius en dĂ©pit de cette faveur[6]. Les Lingons laissent alors la Ve lĂ©gion - emmenĂ©e par Fabius Valens depuis la Germanie infĂ©rieure pour tenter de porter Vitellius au pouvoir Ă  Rome[7] - traverser librement leur territoire et s'adjoindre les huit cohortes Bataves y Ă©tant stationnĂ©es[8] - [note 1].

Biographie

Le récit de la vie de Julius Sabinus nous est fait par trois auteurs antiques : Plutarque[9], Tacite[10] et Dion Cassius[11]. Leurs récits divergent cependant sur certains points.

La dĂ©sorganisation politique Ă  la tĂȘte de l'Empire conduit les Lingons menĂ©s par Julius Sabinus Ă  se joindre au SoulĂšvement des Bataves fomentĂ© par Caius Julius Civilis en 69[12]. La coalition formĂ©e par Civilis et Sabinus ainsi que les trĂ©vires Julius Tutor et Julius Classicus remporte plusieurs victoires avant que cette rĂ©volte soit rĂ©primĂ©e par Petilius Cerialis[13]. Sabinus, qui se dit descendre de Jules CĂ©sar en personne, s’autoproclame « CĂ©sar » quand sa tentative de crĂ©er un Imperium Galliarum tourne court[14].

AprĂšs la dĂ©faite des Lingons de Sabinus devant les SĂ©quanes et les lĂ©gions d'Appius Annius Gallus (Legio I Germanica, Legio VIII Augusta[note 2] et Legio XI Claudia)[15], Vespasien retire la citoyennetĂ© romaine aux Lingons qui doivent livrer 70 000 guerriers Ă  Frontin[16]; il les place en outre sous la surveillance directe de la VIIIe-lĂ©gion Augusta[17]cantonnĂ©e Ă  Mirebellum (qu'elle quittera pour Argentoratum vers 90)[18], vraisemblablement sous l'autoritĂ© de Frontin[19] - [20].

Sabinus quant à lui prend la fuite, simule un suicide et brûle sa maison. Il se cache ensuite dans une grotte que la tradition situe aux sources de la Marne.

La grotte de Sabinus (gravure de 1922).

La nature de sa cachette diverge selon les auteurs : Plutarque Ă©voque un souterrain et une caverne, alors que Dion Cassius parle plutĂŽt d’un tombeau. Sa femme Éponine fait semblant de porter le deuil le jour, mais rejoint la nuit son mari. De l’union de Sabinus et Éponine naissent bientĂŽt deux enfants.

AprĂšs avoir passĂ© neuf annĂ©es Ă  se cacher (selon Tacite), Sabinus finit par ĂȘtre dĂ©couvert et conduit devant Vespasien. Éponine plaide alors pour obtenir la grĂące de son mari ; elle finit par demander Ă  mourir avec lui si l’on en croit Plutarque. Ce dernier nous renseigne Ă©galement sur le sort de leurs deux enfants : l’un sera tuĂ© en Égypte ; le second, portant le mĂȘme cognomen que son pĂšre, serait passĂ© par Delphes.

Sabinus faisait partie des personnages les plus importants de Gaule de cette Ă©poque, aussi bien par sa rĂ©putation que par sa fortune, comme les autres commanditaires de l’insurrection. Tout comme eux, il Ă©tait Ă©galement citoyen romain : comme son gentilice l’indique, il fait partie de la gens Julia ; un de ses ancĂȘtres avait dĂ» obtenir la citoyennetĂ© de Caius Julius CĂ©sar ou de son fils adoptif Auguste.

Postérité dans les arts

Eponine et Sabinus, de Nicolas-André Monsiau

Depuis la Renaissance, l’histoire d’Éponine et Sabinus a connu un grand succĂšs en tant que sujet de nombreuses Ɠuvres d’art : poĂšmes, nouvelles, romans, piĂšces, peintures, sculptures ou gravures[21]. Une vingtaine de piĂšces de thĂ©Ăątre ont Ă©tĂ© consacrĂ©es Ă  Sabinus et Ă  sa femme, ainsi qu'une trentaine de tableaux, et environ huit opĂ©ras. Mais Ă  partir du XIXe siĂšcle, on ne trouve presque plus de reprĂ©sentations de cette histoire, les artistes leur prĂ©fĂ©rant les figures d’autres Gaulois. C’est paradoxalement la celtomanie Ă©mergeant au XIXe siĂšcle qui va presque faire tomber dans l’oubli l’histoire d’Éponine et Sabinus. De nouvelles figures, Ă©mergeant des nombreuses Ă©tudes historiographiques de cette Ă©poque, vont supplanter la figure de Sabinus : Brennus, Ambiorix, CamulogĂšne et surtout VercingĂ©torix. Sabinus s’efface ainsi peu Ă  peu de la mĂ©moire populaire : c’est la figure du chef arverne qui le remplace dans Le Tour de la France par deux enfants de G. Bruno, alors que Sabinus apparaissait encore en 1876 dans l’Histoire de France de Guizot.

Articles connexes

Notes et références

  1. J.-J.Hatt, « Sacrum Augusto : tĂ©moignage de loyalisme Ă  l’égard de l’empereur romain chez les Éduens-Lingons-SĂ©quanes dans les formules de dĂ©dicaces aux divinitĂ©s », R.A.E., t. XXXIX, 1988, p. 144-145
  2. Suétone, Vie de Néron, XL
  3. Henri Troisgros, Bourbonne-les-Bains et sa région, Dominique Guéniot à Langres, 1994, p.35
  4. Suétone, Vie de Galba, XII
  5. Tacite, Histoires-I / Galba et Othon
  6. Tacite, Histoires-II / Othon et Vitellius
  7. Tacite, Histoire, livre-I/64 lire en ligne
  8. Amédée Thierry, Histoire des Gaulois depuis les temps les plus reculés jusqu'à l'entiÚre soumission de la Gaule à la domination romaine, A.Sautelet à Paris, 1828, tome-III, partie-3, chapitres 3, pp.374-406 lire en ligne
  9. Plutarque, De l’amour, 25
  10. Tacite, Histoires, IV, 67
  11. Dion Cassius, Histoire Romaine, LXVI, 16
  12. Tacite, Histoires-IV, 13 et suiv.
  13. Charles-Marie Ternes, « Le discours de Cérialis aux Trévires et aux Lingons (Tac., Hist., 4, 73 sqq.). Une charte de la romanisation ? », Revue des études latines à Paris), vol.68, 1990, pp.112-122
  14. Tacite, Histoire, IV-67
  15. L.Homo - Vespasien, l'empereur du bon sens - Paris / 1949, p.239-240
  16. Suétone, Vie de Vespasien / VII
  17. Serge Février & Yann Le-Bohec, « La VIIIe légion Auguste et Langres », ArchÀologisches Korrespondenzblatt - 1999, 29 fasc. 2/2, p.257-259
  18. R. Goguey, Légionnaires romains chez les Lingons : la VIIIÚme Avgvsta à Mirebeau, Revue archéologique de l'Est (n°58) / 2008 lire en ligne
  19. Frontin, StratagĂšmes, Livre IV, III-14.
  20. René Goguey et Michel Redde, Le camp légionnaire de Mirebeau, RGSM 36, Mayence, 1995.
  21. Catalogue des Ɠuvres recensĂ©es dans l'ouvrage de Jacques-Remi Dahan, Éponine & Sabinus, Dominique GuĂ©niot, 2011, 67 p.
  1. Le 2 janvier 69, le lĂ©gat de lĂ©gion Fabius Valens entre Ă  Cologne oĂč sa cavalerie salue Vitellius. Ce dernier le charge de traverser la Gaule avec Alienus Caecina et de fondre sur Rome pour renverser Galba. La nouvelle de l'assassinat de Galba et de l'Ă©lĂ©vation d'Othon parvient Ă  Valens alors sur le territoire des Leuques, Ă  la tĂȘte de troupes d'Ă©lite de la Germanie infĂ©rieure : Ve lĂ©gion augmentĂ©e de forces auxiliaires, soit environ 40000 hommes. Tacite dĂ©crit l'expĂ©dition de Fabius Valens comme Ă©maillĂ©e d'exactions contre les populations locales : Metz en particulier eut Ă  dĂ©plorer le massacre d'environ 4 000 personnes. AprĂšs avoir traversĂ© le territoire des Leuques, le corps expĂ©ditionnaire se rend en territoire lingon.
  2. La Legion VIII Augusta « de la Mésie à Argentorate »

Bibliographie

  • Antoine-François Callet, Éponine et Sabinus condamnĂ©s par Vespasien, huile sur toile, 1764, Paris, École nationale supĂ©rieure des Beaux-arts.
  • Michel Paul Guy de Chabanon, Sabinus, tragĂ©die lyrique en quatre actes, reprĂ©sentĂ©e devant Sa MajestĂ©Ì Ă  Versailles, le , et pour la premiĂšre fois par l’AcadĂ©mie royale de musique, le mardi , France : impr. de Delormel, 1774, 47 p.
  • Dion Cassius, Histoire romaine, trad. E. Gros et V. BoissĂ©e, France : Firmin Didot, 1870-1845, 10 vol.
  • François Guizot, L’histoire de France depuis 1789 jusqu’en 1848: racontĂ©e Ă  mes petits-enfants, France : Hachette et Cie, 1878, 789 p.
  • Pierre-Yves Lambert, La langue gauloise: description linguistique, commentaire d’inscriptions choisies, France : Éd. Errance (« collection des HespĂ©rides »), 1997, 239 p.
  • Plutarque, ƒuvres mĂȘlĂ©es de Plutarque, trad. de Jacques Amyot, France : Janet et Cotelle, 1820, 508 p.
  • Quiret Julien et Combret Pierre, « Eponina ». L’Arbre celtique, URL : http://www.arbre-celtique.com/encyclopedie/eponina-3305.htm . ConsultĂ© le .
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