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Joseph Roth

Moses Joseph Roth ([1], Brody, Galicie - , Paris) est un écrivain et journaliste austro-hongrois, né en Galicie, aux confins de l'Empire autrichien (aujourd'hui en Ukraine), sous le rÚgne de François-Joseph, dans une famille juive ashkénaze.

Joseph Roth
Description de cette image, également commentée ci-aprÚs
Joseph Roth en 1926.
Nom de naissance Moses Joseph Roth
Naissance
Brody, Galicie, Drapeau de l'Autriche-Hongrie Autriche-Hongrie
DĂ©cĂšs
15e arrondissement de Paris
Activité principale
Auteur
Langue d’écriture allemand
Genres

ƒuvres principales

ÂgĂ© de 20 ans au dĂ©but du premier conflit mondial, il participe Ă  l'effort de guerre dans des unitĂ©s non combattantes, principalement le service de presse des armĂ©es impĂ©riales. Il publie sa premiĂšre nouvelle avant mĂȘme la fin de la guerre, et ses premiers romans (tout d'abord en feuilleton dans des journaux et revues) peu aprĂšs la chute de l'Empire austro-hongrois, notamment HĂŽtel Savoy (Hotel Savoy. Ein Roman, 1924). Il devient journaliste Ă  Vienne puis Ă  Berlin.

Son Ɠuvre porte un regard aigu sur les vestiges de la Mitteleuropa[2], qui ne survivra pas Ă  l'avĂšnement du XXe siĂšcle, tels les villages du Yiddishland ou l'ordre ancien de la monarchie austro-hongroise. Son roman le plus connu, La Marche de Radetzky, requiem sur l'empire des Habsbourg (Radetzkymarsch, einem Requiem auf das Habsburgerreich), publiĂ© en 1932, Ă©voque le crĂ©puscule d'une famille autrichienne sur trois gĂ©nĂ©rations.

DÚs leur arrivée au pouvoir, les nazis détruisent les livres de celui qui se définissait comme « patriote et citoyen du monde »[3].

En 1933, Joseph Roth s'exile Ă  Paris, oĂč, malade, alcoolique et sans argent, il meurt Ă  l'Ăąge de 44 ans.

Biographie

Origines

Joseph Roth est nĂ© dans un shtetl de Brody en Galicie, Ă  la fin de l'Ăšre de l'Empire austro-hongrois, actuellement en Ukraine. Brody Ă©tait alors une ville-frontiĂšre avec l’oblast de Volhynie en Russie.

Roth Ă©voque une enfance et une adolescence marquĂ©es par des conditions modestes voire prĂ©caires. En revanche, les photographies d'Ă©poque et les tĂ©moignages de ses proches tĂ©moignent de conditions de vie bourgeoises sans ĂȘtre opulentes: sa mĂšre avait une bonne, Joseph prenait des cours de violon et frĂ©quentait le lycĂ©e. La vision de Roth est en effet marquĂ©e par la disparition prĂ©coce de son pĂšre durant son enfance.

Sa mĂšre Maria GrĂŒbel (Myriam) Ă©tait issue d'une famille de commerçants juifs de Brody. Son grand-pĂšre, drapier de son Ă©tat, Ă©tait rabbin ; quatre de ses oncles Ă©taient cultivateurs et nĂ©gociants de houblon, le cinquiĂšme Ă©tait tailleur. Son pĂšre, Nahum Roth, Ă©tait issu d'un milieu hassidique orthodoxe. À l'Ă©poque du mariage en 1892, il Ă©tait reprĂ©sentant d'un courtier en cĂ©rĂ©ales de la Ville hansĂ©atique de Hambourg.

Son pÚre disparait dans des circonstances demeurées assez imprécises et meurt en Russie.

Parmi les nombreuses versions de la disparition de son pÚre, il est documenté que des marchandises stockées à Katowice sous sa responsabilité ayant disparu, probablement détournées, il dut se rendre à Hambourg pour répondre de cette affaire. Sur le trajet de retour, dans le train, il se fait remarquer par un comportement étrange, à tel point qu'il est d'abord interné dans un établissement pour malades mentaux. Il est ensuite remis à sa famille, qui le confie aux soins d'un « rabbin miraculeux » (Wunderrabbis) russo-polonais. Des années plus tard, un de ses oncles, qui lui aurait rendu visite, l'aurait décrit comme « trÚs beau, tout le temps hilare et complÚtement irresponsable »[4].

Le statut social de sa mÚre sera profondément bouleversé par cette disparition, empreint d'un aspect précaire : elle n'était pas reconnue comme veuve puisque son mari vivait encore. Elle n'était plus véritablement son épouse puisqu'il était interné. Elle ne pouvait pas divorcer car cela aurait nécessité une lettre de séparation émanant de son mari, or il aurait fallu pour cela qu'il ait tous ses esprits. De surcroit, dans le judaïsme orthodoxe de Galicie, la démence était considérée comme une malédiction divine qui frappait toute la famille. En conséquence, les perspectives de reconnaissance sociale et de mariage des enfants s'en trouvaient fortement compromises. C'est pourquoi la famille passa sous silence le destin du pÚre, préférant adhérer à la rumeur selon laquelle Nahum Roth se serait pendu.

La mÚre vécut repliée, élevant son fils et s'occupant de l'entretien de la maison du grand-pÚre drapier jusqu'à la mort de celui-ci en 1907.

À partir de 1901 (soit Ă  sept ans), Joseph Roth frĂ©quente l'Ă©cole du baron de Hirsch Ă  Brody. Ces Ă©coles Ă©taient des Ă©tablissements publics fondĂ©s par le magnat et philanthrope juif Maurice de Hirsch (proche de l'archiduc Rodolphe). À la diffĂ©rence des Ă©coles juives traditionnelles, elles ne dispensait pas d'enseignement axĂ© autour des traditions et de la religion. Au-delĂ  de l'hĂ©breu et de la Torah, on y enseignait aussi l'allemand, le polonais et des matiĂšres pratiques. La langue d'enseignement Ă©tait l'allemand. Joseph Roth grandit ainsi protĂ©gĂ© et pas exactement au sein de la communautĂ© juive.

Les relations entre mĂšre et fils semblent avoir Ă©tĂ© difficiles aprĂšs la mort du grand-pĂšre. En 1922, la mĂšre tomba malade, probablement d'un cancer du col de l'utĂ©rus et fut opĂ©rĂ©e Ă  Lemberg, oĂč son fils la vit une derniĂšre fois avant sa mort.

Ce pĂšre absent hantera sa vie durant l'Ă©crivain et, sous une forme figurĂ©e, la perte de la patrie, Ă  savoir la monarchie autrichienne, traverse comme un fil rouge l'Ɠuvre de Roth.

Joseph Roth a fait de ses origines le sujet mystĂ©rieux et objet de mutations fulgurantes : il se dira fils illĂ©gitime d'un officier autrichien, d'un comte polonais, d'un fabricant de munitions viennois. Roth affirmera Ă©galement ĂȘtre nĂ© Ă  Szwaby, un autre quartier de Brody. Effectivement, la maison natale[5] de Roth Ă©tait proche de la gare de Brody et du quartier de « Szwaby », surnommĂ©e « Schwabendorf » puisqu'y vivait la communautĂ© souabe contrairement Ă  la majoritĂ© juive de Brody. La perte prĂ©coce d'un pĂšre

Jeunesse Ă  Brody

Le collĂšge de Brody oĂč Ă©tudia Joseph Roth.

De 1905 Ă  1913, J. Roth frĂ©quente le lycĂ©e Kronprinz-Rudolf-Gymnasium Ă  Brody. On ne sait pas trĂšs bien si les frais scolaires, 15 florins par semestre (somme considĂ©rable Ă  l'Ă©poque), Ă©taient payĂ©s par son tuteur et oncle Siegmund GrĂŒbel, ou provenaient d'une bourse.

J. Roth était bon élÚve : en tant qu'unique élÚve juif de sa promotion, il obtint au baccalauréat la mention sub auspiciis imperatoris. Sur ses camarades de lycée, il fait l'effet de quelqu'un de réservé, voire arrogant, une impression qu'il laisse derriÚre lui aussi plus tard sur ses camarades d'étude à l'Université de Vienne. C'est à cette période qu'apparaissent ses premiers travaux d'écrivain : des poÚmes.

Études à Lemberg et Vienne

Photo de Joseph Roth sur sa carte d'Ă©tudiant.

AprĂšs son baccalaurĂ©at en , Roth s'Ă©tablit Ă  Lemberg (Lviv, Ukraine actuelle), oĂč il s'inscrit Ă  l'UniversitĂ©. Il trouve Ă  se loger chez son oncle Siegmund GrĂŒbel, mais il semble qu'entre le sobre commerçant et le poĂšte dĂ©butant, les relations soient bientĂŽt devenues tendues. Il trouve une amie maternelle pour plusieurs annĂ©es en la personne de HĂ©lĂšne von Szajnoda-Schenk, ĂągĂ©e Ă  l'Ă©poque de cinquante-neuf ans, une dame infirme mais spirituelle, trĂšs vivante et d'une grande culture, qui avait louĂ© un appartement dans la maison de l'oncle. Il se lie aussi d'amitiĂ© avec ses cousines Resia et Paula.

De façon gĂ©nĂ©rale, l'atmosphĂšre de Lemberg Ă©tait marquĂ©e par des tensions qui s'aggravaient, non seulement entre nationalitĂ©s (Ă  l'UniversitĂ©, il y avait Ă  l'Ă©poque des luttes entre les Ă©tudiants polonais et ruthĂšnes), mais aussi au sein de la jeunesse, les discussions Ă©taient agitĂ©es entre le Hassidisme, le Haskala (issu des LumiĂšres) et le Mouvement Sioniste qui devenait de plus en plus puissant. La derniĂšre annĂ©e Ă  Brody est pour Roth la derniĂšre annĂ©e oĂč l'allemand est la langue d'enseignement ; Ă  l'UniversitĂ© de Lemberg, depuis 1871, le polonais est la langue d'enseignement. Roth a manifestement trouvĂ© sa patrie littĂ©raire dans la littĂ©rature allemande, et c'est peut-ĂȘtre une des raisons pour lesquelles il quitte Lemberg et s'inscrit Ă  l'universitĂ© de Vienne pour le semestre de l'Ă©tĂ© 1914. On ne sait pas dans quelle mesure Roth a effectivement Ă©tudiĂ© Ă  Lemberg. Il a en tous cas sĂ©journĂ© Ă©pisodiquement Ă  Vienne dĂšs l'automne 1913, oĂč il participe au OnziĂšme CongrĂšs sioniste du 2 au .

À Vienne, Roth prend une petite chambre dans la Leopoldstadt ; au semestre suivant, il s'installe avec sa mĂšre, qui face aux dĂ©sordres de la guerre qui venait d'Ă©clater, a fui vers Vienne, dans un petit appartement du XXe arrondissement (14/16 rue Wallenstein). Roth et sa mĂšre, chez qui vint aussi s'installer la tante Rebecca (Riebke), vivent Ă  cette Ă©poque dans une situation trĂšs misĂ©rable : Roth Ă©tait sans revenus, sa mĂšre percevait la maigre aide aux rĂ©fugiĂ©s et, pendant l'occupation russe de la Galicie, il ne pouvait bien sĂ»r que rarement arriver des subsides de l'oncle Siegmund.

Roth semble pourtant optimiste et se lance avec enthousiasme dans l'Ă©tude de la germanistique. Il fait grand cas de la rĂ©ussite aux examens et de l'acquisition des connaissances grĂące aux professeurs. Par la suite, Ă  vrai dire, il porta un jugement nĂ©gatif sur les Ă©tudes et ses camarades d'universitĂ© — comme tant de jeunes Ă©crivains qui, Ă  l'universitĂ©, recherchaient la poĂ©sie et trouvaient la germanistique. Walther Brecht constitue une exception, titulaire de la chaire de la Nouvelle littĂ©rature allemande. Heinz Kindermann, l'assistant de Brecht, devint sans doute une sorte de rival. Dans les premiers rĂ©cits parus en 1916, dont L'Étudiant privilĂ©giĂ© (Der VorzugsschĂŒler), Kindermann est le modĂšle du personnage principal Anton Wanzl, un caractĂšre dĂ©peint avec quelque haine et quelque expĂ©rience[6].

BientĂŽt la situation matĂ©rielle des Roth s'amĂ©liore. Des bourses et quelques places de prĂ©cepteur (notamment chez la comtesse Trautmannsdorff) permettent Ă  Joseph de s'acheter de bons costumes. Les tĂ©moins de l'Ă©poque le dĂ©crivent avec pli au pantalon, canne et monocle, l'image mĂȘme du dandy viennois.

PremiĂšre Guerre mondiale

La PremiĂšre Guerre mondiale et la dĂ©composition de l’Autriche-Hongrie qui s’ensuit se transforme pour Roth en expĂ©rience cauchemardesque. Contrairement Ă  de nombreux autres qui, lorsque la guerre Ă©clata, furent saisis d’un enthousiasme national dont ils ne connurent jamais d’équivalent par la suite, Roth dĂ©fend d’abord une position pacifiste et rĂ©agit avec une sorte de dĂ©sespoir Ă©pouvantĂ©. Pourtant, le temps passant, il lui apparaĂźt — Ă  lui qui avait Ă©tĂ© classĂ© inapte Ă  la guerre — que sa propre attitude est humiliante et pĂ©nible :

« Lorsque la guerre Ă©clata, je perdis les leçons que je donnais, progressivement, l’une aprĂšs l’autre. Les avocats entrĂšrent en scĂšne, les femmes devinrent d’humeur maussade, patriotique, elles se mirent Ă  tĂ©moigner d’une vĂ©ritable prĂ©dilection pour les blessĂ©s. Je me prĂ©sentai finalement comme volontaire au 21e bataillon de chasseurs[7]. »

Le , Roth se prĂ©sente au service militaire et dĂ©bute le sa formation en tant que Volontaire-Un-An (EinjĂ€hrig-Freiwilliger) dans l’armĂ©e impĂ©riale et royale (KuK). Lui et son ami JĂłzef Wittlin optent pour le bataillon de chasseurs Ă  pied, dont l’école de formation en un an se trouvait dans le IIIe arrondissement de Vienne (originellement, il Ă©tait prĂ©vu d’étudier pendant le temps libre). C’est pendant la pĂ©riode de formation que meurt l’Empereur François-Joseph, le . Roth suit, en tant que membre de la chaĂźne de soldats, tout le parcours du cortĂšge d’enterrement :

« L’ébranlement moral, provoquĂ© par la prise de conscience qu’une JournĂ©e historique venait de s’achever, se joignait Ă  l’affliction paradoxale pour le dĂ©clin d’une patrie qui avait elle-mĂȘme enseignĂ© l’opposition Ă  ses fils[8]. »

La mort de l’empereur de 86 ans apparaĂźt Ă  plusieurs reprises dans l’Ɠuvre de Roth comme une mĂ©taphore centrale du dĂ©clin de l’Empire des Habsbourg et de la perte de la terre natale et de la patrie, notamment dans les romans La Marche de Radetzky et La Crypte des capucins.

Au lieu de pouvoir servir dans le 21e rĂ©giment de chasseurs Ă  pied avec ses amis, Roth est bientĂŽt transfĂ©rĂ© vers la Galicie, Ă  la 32e division de troupes d’infanterie. En 1917, et manifestement jusqu’à la fin de la guerre, il est affectĂ© au service de presse au local de Lemberg.

Selon les dires de Roth, il aurait été officier, et aurait été fait prisonnier par les Russes ; en fait, il ne semble pas avoir fait partie des unités combattantes.

AprĂšs la fin de la guerre, Joseph Roth doit arrĂȘter ses Ă©tudes et se consacrer Ă  gagner sa vie. De retour vers Vienne, il trouve d’abord Ă  se loger chez Leopold Weiss, le beau-frĂšre de son oncle Norbert GrĂŒbel. Peu de temps aprĂšs, il veut rentrer Ă  Brody, mais sur le chemin du retour, il tombe dans des dĂ©mĂȘlĂ©s entre troupes polonaises, tchĂ©coslovaques et ukrainiennes, dont il ne peut se sortir qu’à grand peine pour atteindre Vienne.

DĂ©jĂ , pendant son service militaire, il a commencĂ© Ă  Ă©crire des comptes rendus et des feuilletons pour les journaux Der Abend et Der Friede, et dans le journal Österreichs Illustrierter Zeitung sont parus des poĂšmes et des textes en prose. À partir d’, il devient rĂ©dacteur Ă  Der Neue Tag, un quotidien qui compte aussi parmi ses collaborateurs Alfred Polgar, Anton Kuh et Egon Erwin Kisch. Dans ce milieu professionnel, il faisait vite partie des devoirs de service que d’ĂȘtre un habituĂ© du CafĂ© Herrenhof, oĂč Roth, Ă  l’automne 1919, fait la connaissance de sa future Ă©pouse Friedrike (Friedl) Reichler.

Journaliste Ă  Vienne et Berlin

À la fin du mois d‘, Der Neue Tag cesse sa parution. Roth s’installe Ă  Berlin. LĂ , il connaĂźt d’abord des difficultĂ©s avec son permis de sĂ©jour, car la confusion et le cĂŽtĂ© fantasque de ses papiers font presque rire en Autriche, mais Ă  Berlin, tout d’un coup, elles sont prises au sĂ©rieux[9]. BientĂŽt paraissent ses premiĂšres contributions dans diffĂ©rents journaux, parmi lesquels la Neuen Berliner Zeitung ; Ă  partir de , il travaille principalement pour le Berliner Börsen-Courier.

À l’automne 1922, il rompt sa collaboration avec le Börsen-Courier. Il Ă©crit :

« Je ne peux plus partager les Ă©gards pour un public bourgeois et rester son causeur du dimanche, si je ne veux pas renier chaque jour mon socialisme. Peut-ĂȘtre aurais-je malgrĂ© tout Ă©tĂ© suffisamment faible pour rĂ©primer mes convictions afin d’obtenir des appointements supĂ©rieurs ou pour des louanges plus frĂ©quentes de mon travail[10]. »

Certes, Roth signait des contributions au journal socialiste VorwĂ€rts sous le nom de Joseph le Rouge, mais il n’était certainement pas socialiste, ses convictions reposaient sur des fondements thĂ©oriques. Il apparaĂźt surtout dans ses reportages et feuilletons comme un observateur prĂ©cis, qui tire des fragments de vie qu’il perçoit et des manifestations immĂ©diates du malheur humain des conclusions importantes (et souvent clairvoyantes) en ce qui concerne les malaises sociaux et les circonstances politiques. Pour ce qui est de la force de ses convictions face aux attraits financiers, il en donna lui-mĂȘme un exemple (violemment critiquĂ© par ses amis et collĂšgues), lorsqu’en 1929, il se fait payer trĂšs cher par le MĂŒnchner Neuesten Nachrichten, une feuille nationaliste, pour Ă©crire trĂšs peu[11].

À partir de , il travaille comme chroniqueur pour le renommĂ© Frankfurter Zeitung dans lequel une bonne partie de ses travaux journalistiques devaient paraĂźtre au cours des annĂ©es suivantes. Selon la situation Ă©conomique qui, du fait de l’inflation, s’aggrave alternativement en Allemagne ou en Autriche, Roth fait la navette Ă  plusieurs reprises entre Vienne et Berlin Ă  cette Ă©poque, et il Ă©crit en dehors du Frankfurter Zeitung, des articles pour le Wiener Sonn-und Montagszeitung (Vienne), pour le Neues 8-Uhr-Blatt (Vienne), pour Der Tag (Vienne) et pour Prager Tageblatt (Prague). Pendant cette pĂ©riode, il travaille Ă  son propre roman La Toile d’araignĂ©e (Das Spinnennetz) qui paraĂźt Ă  l’automne 1923 en feuilleton dans le journal viennois Arbeiter-Zeitung, mais reste inachevĂ©.

Ses rapports avec le Frankfurter Zeitung et avec Benno Reifenberg alors chargĂ© des chroniques ne sont pas sans heurts. Roth se sent insuffisamment estimĂ© et cherche Ă  compenser cela par des exigences sous forme d’honoraires. Lorsqu’il cherche Ă  quitter le journal, on le prie de continuer Ă  travailler pour le FZ comme correspondant Ă  Paris. Roth accepte, dĂ©mĂ©nage dans la capitale française en et, dans ses premiĂšres lettres, se montre enthousiaste pour la ville. Mais un an aprĂšs, quand il est remplacĂ© comme correspondant par Friedrich Sieburg : il en est trĂšs déçu. En compensation, il obtient d’ĂȘtre mandatĂ© par le FZ pour des sĂ©ries de grands reportages. De septembre Ă  , il parcourt Ă  ce titre l’Union soviĂ©tique ; de mai Ă  , l’Albanie et la Yougoslavie ; Ă  l’automne 1927, le territoire de la Sarre ; de mai Ă  , la Pologne et, en octobre-, l’Italie.

Mariage et tragédie matrimoniale

Joseph et Friedl Roth en promenade avec un ami, aux environs de 1925.

Le , Roth Ă©pouse Ă  Vienne Friederike (Friedl) Reichler. Friedl Ă©tait certes une femme sĂ©duisante et intelligente, mais ce n’était pas une intellectuelle et la vie mondaine, sans repos, aux cĂŽtĂ©s d’un journaliste vedette sans cesse en dĂ©placement, ne correspondait pas non plus Ă  ses attentes. En outre, Roth faisait preuve d’une jalousie presque pathologique. DĂ©jĂ  en 1926, les premiers symptĂŽmes d’une maladie mentale s’étaient manifestĂ©s chez Friedl et, en 1928, la schizophrĂ©nie devient Ă©vidente.

Friedl est d’abord traitĂ©e Ă  la clinique psychiatrique Westend, puis elle habite un temps chez un ami de Roth – soignĂ©e par une infirmiĂšre. La maladie de son Ă©pouse le prĂ©cipite dans une dĂ©pression profonde. Il n’était pas prĂȘt Ă  accepter l’incurabilitĂ© de la maladie, espĂ©rait un miracle, se rendait coupable de la maladie – la dĂ©mence Ă©tant considĂ©rĂ©e chez les Juifs pieux comme une punition divine. L’éventualitĂ© d’une possession par un dibbuk le pousse Ă  consulter (sans succĂšs) un rabbin miraculeux hassidique. À cette Ă©poque, il se met sĂ©rieusement Ă  boire. Sa situation financiĂšre elle-mĂȘme se dĂ©grade.

MĂȘme le placement chez les parents de Friedl n’apporte pas la moindre amĂ©lioration et la malade tombe dans une apathie qui s’accroĂźt ; on l’amĂšne alors en au sanatorium de Rekawinkel, Ă  cĂŽtĂ© de Vienne ; en , elle arrive Ă  l’asile de soins de santĂ© du Land « Am Steinhof » toujours Ă  cĂŽtĂ© de Vienne ; enfin Ă  l’étĂ© 1935 dans la clinique du Land Mostviertel Amstetten-Mauer. Les parents de Friedl Ă©migrent en 1935 en Palestine et Roth demande la sĂ©paration.

En 1940, Friedl Roth est expĂ©diĂ©e en direction de Linz, mais il n’y a aucun document attestant de son arrivĂ©e lĂ -bas. Elle fut une des victimes du programme d’euthanasie des Nazis (action T4). Son acte de dĂ©cĂšs porte la date du .

Sybil Rares

MĂȘme si dans les annĂ©es qui suivirent, la maladie de son Ă©pouse demeure une source de culpabilitĂ© et de dĂ©pression, sur un autre plan, Joseph Roth prend relativement tĂŽt ses distances par rapport Ă  une situation devenue dĂ©sespĂ©rĂ©e. En 1929, il fait la connaissance de Sylbil Rares, une comĂ©dienne juive de Bucovine qui, Ă  cette Ă©poque, avait Ă©tĂ© engagĂ©e au ThĂ©Ăątre de Francfort. La relation ne dure cependant que peu de temps.

Andrea Manga Bell

Les relations se prĂ©sentent tout autrement avec Andrea Manga Bell, dont il fait la connaissance en et qui devait, pendant les six annĂ©es suivantes, partager son destin et le suivre dans l’émigration. Andrea Manga Bell Ă©tait nĂ©e Ă  Hambourg, fille d’une huguenote hambourgeoise et d’un Cubain de couleur. Elle Ă©tait mariĂ©e avec Alexandre Douala Manga Bell, Prince de Douala et Bonanjo, de l’ancienne colonie allemande du Cameroun, fils du roi douala Rudolf Douala Manga Bell exĂ©cutĂ© en 1914 par les Allemands, mais il l’avait quittĂ©e et Ă©tait retournĂ© au Cameroun. Quand Roth fait sa connaissance, elle est rĂ©dactrice au magazine du groupe Ullstein Gebrauchsgraphik et assure ainsi la subsistance des deux enfants issus de son mariage malheureux avec le « prince NĂšgre ». Roth est aussitĂŽt fascinĂ© par la belle exotique sĂ»re d’elle et indĂ©pendante, et l’intĂ©rĂȘt est rĂ©ciproque. BientĂŽt, ils partagent tous deux un appartement commun avec les enfants Manga Bell[12].

Lorsque Roth est obligĂ© d’émigrer, Andrea Manga Bell le suit avec ses enfants. Au fil du temps, il y eut des frictions que Roth attribuait aux problĂšmes financiers dus Ă  la prise en charge de la famille Manga Bell (« Je suis obligĂ© de nourrir une tribu nĂšgre de neuf personnes[13] ! ») Toutefois, la cause probable des diffĂ©rends et de la brouille dĂ©finitive fin 1938 est sans doute la jalousie extrĂȘme de Roth, prĂ©sente aussi dans sa vie matrimoniale comme dans ses autres relations.

Irmgard Keun

Au dĂ©but , Roth se rend, Ă  l’invitation de Stefan Zweig, Ă  Ostende, oĂč il rencontre la femme de lettres Irmgard Keun, qui vivait depuis peu en exil. Tous deux s’intĂ©ressent immĂ©diatement l’un Ă  l’autre. Irmgard Keun Ă©crit :

« J’eus alors la sensation de voir un ĂȘtre humain qui pouvait mourir de tristesse dans les heures qui venaient. Ses yeux ronds et bleus fixaient le vide presque sans regard, de dĂ©sespoir, et sa voix semblait comme ensevelie sous le poids du chagrin[14]. »

Irmgard Keun et Roth ne se rencontrent pas seulement sur ce point mais aussi dans leur tendance Ă  se prĂȘter Ă  des excĂšs d’alcool. « Tous deux picolent comme des trous », dit du couple Egon Erwin Kisch[15].

De 1936 Ă  1938, ils habitent ensemble Ă  Paris. Keun accompagne aussi Roth dans ses voyages, entre autres lors de sa visite Ă  Lemberg Ă  NoĂ«l 1936, oĂč il lui prĂ©sente son ancienne amie Helene von Szajnoda-Schenk.

Mais cette relation finit par se briser, au dire d’Irmgard Keun, et la cause en est redevable à nouveau à la jalousie de Roth :

« Pas une fois je ne pus sortir sans qu’il soit inquiet. M’endormais-je, il enfouissait alors ses doigts dans mes cheveux, et ils y Ă©taient encore quand je m’éveillais.
 Du fait de sa jalousie dĂ©mentielle, je me sentais toujours poussĂ©e dans mes derniers retranchements, jusqu’à ce que je ne le supporte plus, jusqu’à ce que je sois absolument obligĂ©e de rompre. À Paris, je le quittai avec un profond soupir de soulagement et je partis avec un officier de marine français pour Nice[16]. »

L’émigration

Le , jour de la nomination de Hitler comme chancelier du Reich, Roth quitte l’Allemagne. Dans une lettre Ă  Stefan Zweig, il fait preuve d’une Ă©tonnante clairvoyance :

« À prĂ©sent il vous sera Ă©vident que nous allons vers de grandes catastrophes. Abstraction faite du privĂ© – notre existence littĂ©raire et matĂ©rielle est dĂ©jĂ  anĂ©antie – l’ensemble conduit Ă  une nouvelle guerre. Je ne donne pas cher de notre vie. On a rĂ©ussi Ă  laisser la Barbarie prendre le pouvoir. Ne vous faites pas d’illusions. C’est l’Enfer qui prend le pouvoir[17]. »

BientĂŽt, ses livres aussi sont brĂ»lĂ©s. Roth choisit d’abord Paris comme lieu d'exil, mais au cours des annĂ©es suivantes, il ne sĂ©journe pas souvent en France. Il entreprend diffĂ©rents voyages, certains de plusieurs mois comme aux Pays-Bas, en Autriche et en Pologne. Le voyage en Pologne a lieu en fĂ©vrier-, oĂč il donne une sĂ©rie de confĂ©rences, Ă  l’invitation des PEN Clubs polonais. Il fait Ă  cette occasion un dĂ©tour par Lemberg pour rendre visite aux membres de sa famille qui y vivaient encore[18]. De Ă  , Roth sĂ©journe, comme de nombreux autres Ă©migrants sur la Riviera française. Avec Hermann Kesten et Heinrich Mann, Roth et Manga Bell ont louĂ© une maison Ă  Nice.

À la diffĂ©rence de nombreux Ă©crivains Ă©migrĂ©s, Roth rĂ©ussit non seulement Ă  rester productif, mais aussi Ă  se faire publier. Ses Ɠuvres paraissent chez les Ă©diteurs nĂ©erlandais de l'Exilliteratur, Querido Verlag et Allert de Lange Verlag, comme dans la maison d’édition chrĂ©tienne De Gemeenschap. C’est une des raisons pour lesquelles il sĂ©journe Ă  plusieurs reprises aux Pays-Bas et en Belgique pendant son exil (en Ă  Amsterdam et en 1936 des sĂ©jours plus longs Ă  Amsterdam et Ostende). En outre, il rĂ©dige des articles pour le magazine d’exil publiĂ© par Leopold Schwarzschild, Das neue Tage-Buch.

DerniÚres années

Plaque commémorative au 18, rue de Tournon à Paris.

Dans les derniĂšres annĂ©es, la situation des finances et de la santĂ© de Roth se dĂ©tĂ©riore rapidement, mais il bĂ©nĂ©ficie d'aprĂšs Dominique Bona d'un appui financier consĂ©quent de la part de Stefan Zweig. En , on dĂ©molit l’hĂŽtel Foyot, 33 rue de Tournon, Ă  cause de sa vĂ©tustĂ©. Roth a rĂ©sidĂ© dix annĂ©es durant dans cet hĂŽtel au cours de ses sĂ©jours Ă  Paris. Il vit donc cela une derniĂšre fois comme une perte de sa patrie. Il prend en face une petite chambre Ă  l’hĂŽtel de la Poste, 18 rue de Tournon, au-dessus de son cafĂ© habituel.

Le , Roth est conduit Ă  l’hospice pour indigents de l’hĂŽpital Necker aprĂšs qu’il s'est effondrĂ© devant le CafĂ© Tournon (apparemment en recevant la nouvelle du suicide d’Ernst Toller). Le , il meurt d’une double inflammation des poumons. L’évolution fatale de la maladie fut favorisĂ©e par le sevrage alcoolique abrupt (dĂ©lirium alcoolique). Auparavant, il semble qu'Otto de Habsbourg, lors d’une rencontre, lui ait interdit de boire.

Le , il est inhumĂ© au cimetiĂšre parisien de Thiais. L’enterrement a lieu suivant le rite « catholique-modĂ©rĂ© » car aucun justificatif de baptĂȘme de Roth ne put ĂȘtre fourni. À l’occasion de l’enterrement, des groupes hĂ©tĂ©rogĂšnes entrĂšrent en conflit : les lĂ©gitimistes autrichiens, les communistes et les Juifs rĂ©clamĂšrent le dĂ©funt comme l'un des leurs.

La tombe se trouve dans la section du cimetiĂšre (septiĂšme division[19]). L’inscription sur la pierre tombale dit : « Ă©crivain autrichien – mort Ă  Paris en exil ».

Dans sa ville d’origine de Brody, une petite plaque commĂ©morative, rĂ©digĂ©e en ukrainien et en allemand, perpĂ©tue son souvenir.

ThĂšmes de l'Ă©crivain

La perte de la patrie

Dans plusieurs livres de Roth, le dĂ©clin de l’Autriche est purement et simplement une mĂ©taphore de la perte de la patrie. En font partie les grands romans La Marche de Radetzky (1932) et La Crypte des capucins(1938) (dont le rĂ©cit s’enchaĂźne avec le premier), tout comme la nouvelle Le Buste de l’Empereur (1934). Dans son avant-propos Ă  la premiĂšre Ă©dition de La Marche de Radetzky dans le Frankfurter Zeitung, Roth Ă©crit :

« Une volontĂ© cruelle de l’Histoire a rĂ©duit en morceaux ma vieille patrie, la monarchie austro-hongroise. Je l’ai aimĂ©e, cette patrie, qui me permettait d’ĂȘtre en mĂȘme temps un patriote et un citoyen du monde, un Autrichien et un Allemand parmi tous les peuples autrichiens. J’ai aimĂ© les vertus et les avantages de cette patrie, et j’aime encore aujourd’hui, alors qu’elle est dĂ©funte et perdue, ses erreurs et ses faiblesses. Elle en avait beaucoup. Elle les a expiĂ©es par sa mort. Elle est passĂ©e presque directement de la reprĂ©sentation d’opĂ©rette au thĂ©Ăątre Ă©pouvantable de la guerre mondiale[3]. »

Le dĂ©clin de l’Autriche comme perte de la patrie et sa rĂ©interprĂ©tation par Roth renvoie Ă  la perte prĂ©coce du pĂšre. Mais ce sentiment d’égarement et de dĂ©racinement est aussi reprĂ©sentĂ© ailleurs, en l’occurrence comme sentiment dominant dans la vie des Juifs galiciens, et des Juifs en gĂ©nĂ©ral, par exemple dans l’essai Juifs en errance.

Sa fin dĂ©jĂ  proche, Roth a la nostalgie d’un retour au pays, dans le sentiment de sĂ©curitĂ© (Ă©galement religieux) de la culture juive des « Schtetl », transformĂ©e miraculeusement en culture catholique dans La LĂ©gende du saint buveur, oĂč le buveur sans abri Andreas Kartak, directement frappĂ© par des miracles et la GrĂące divine, trouve dans la mort la dĂ©livrance et le retour au pays. Encore Ă  propos de l'exil, en 1933, il Ă©crit :

« Comme si le passeport et le document qui garantissent Ă  l’écrivain sa nationalitĂ© avaient beaucoup plus de valeur que le livre qu’il a Ă©crit ; pis encore, comme si le passeport Ă©tait une distinction toute particuliĂšre que l’État dĂ©cerne Ă  son poĂšte bien qu’il ne l’ait pas mĂ©rite ! Comme si l’industrie, l’armĂ©e, les ministĂšres, la police, les compagnies de SA Ă©taient l’État : eux tous mais pas le poĂšte !!
 Aussi vrai qu’un Ă©crivain dont la vie physique est mise en danger et Ă©migre pour cette raison
 ne cesse pas pour autant d’ĂȘtre un Ă©crivain allemand, de mĂȘme la littĂ©rature allemande ne connaĂźt pas de frontiĂšres territoriales
 Ah ! Quelle ironie[20] ! »

Parmi les Ɠuvres explicitement juives ou plus prĂ©cisĂ©ment qui Ă©tudient la thĂ©matique juive, on peut citer la nouvelle Le LĂ©viathan et le roman Job (Le Poids de la grĂące)[21].

Mythologies de Joseph Roth

Joseph Roth relatait des injustices subies pendant sa captivitĂ© jusqu’à ce que Kisch fasse des recherches sur son passĂ© et prouve que J. Roth n’avait jamais Ă©tĂ© prisonnier. Mais Franz Tunda dans La Fuite sans fin avait Ă©tĂ© en captivitĂ© et J. Roth s’identifiait avec son personnage de roman. J. Roth disait :

« Cela ne dépend pas de la véracité, mais de la vérité intérieure[22]. »

Toutefois, la « vérité intérieure » de son autoportrait se heurtait souvent à la véracité :

  • Il n’était pas nĂ© dans le Banat, en Hongrie, mais Ă  Brody en Galicie et racontait des lĂ©gendes sur son pĂšre.
  • Il ne fut pas officier autrichien, mais volontaire un an. AprĂšs la guerre, il se transforma d’abord en porte-drapeau, puis en lieutenant. Au fil du temps, par le langage et le vĂȘtement, il s’adapta au stĂ©rĂ©otype de l’officier impĂ©rial et royal. Son attitude paraissait convaincante Ă  son entourage, y compris Ă  d’anciens officiers autrichiens[23].
  • Il n’était pas catholique — religion de l’officier autrichien. Lors de son enterrement, on ne put fournir aucune preuve effective d’une Ă©ventuelle conversion. J. Roth s’est aussi reconnu alternativement comme juif ou comme catholique. Cependant, il Ă©crivit Ă  Stefan Zweig, le : « Je ne vois pas d'autre voie que le mont du Calvaire qui mĂšne au Christ et Ă  aucun juif plus grand. Je vais mĂȘme peut-ĂȘtre aller plus loin si j'en ai la force et entrer dans un ordre[24]. »

Toutefois, on ne trouve pas la moindre trace oĂč J. Roth ait tirĂ© de ses mystifications un avantage personnel. Il Ă©tait plutĂŽt connu comme Ă©tant quelqu’un de dĂ©sintĂ©ressĂ© qui aidait, avec ses propres deniers, ceux qui Ă©taient tombĂ©s dans la misĂšre.

« Joseph le rouge » et le légitimiste autrichien

De maniĂšre gĂ©nĂ©rale, on note chez Roth pour l’annĂ©e 1925-1926 une mutation du socialisme vers le monarchisme. Que Roth ait Ă©tĂ© auparavant un Ă©crivain « socialiste » ou en tous cas « de gauche », en attestent ses articles socialement critiques et socialement engagĂ©s des premiĂšres annĂ©es. Il apparaĂźt clairement dans ces Ă©crits que le malaise social n’était pas pour lui un point de dĂ©part pour Ă©laborer des thĂ©ories, ou la preuve d’une thĂ©orie dĂ©jĂ  formulĂ©e ; Roth reste dans le concret et se rĂ©vĂšle lĂ  comme un observateur trĂšs prĂ©cis.

MĂȘme le fait que quelques articles de Roth soient parus dans le journal social-dĂ©mocrate VorwĂ€rts sous le pseudonyme de « Joseph le Rouge »[25], ne justifie pas la caractĂ©risation absolue du Roth des dĂ©buts comme socialiste.

LĂ  oĂč, dans les Ă©tudes littĂ©raires, il est pris au mot comme « Joseph le Rouge »[26], on le dĂ©masque d’abord comme un social-romantique ; son supposĂ© abandon du socialisme est ensuite considĂ©rĂ© comme typique d’un intellectuel bourgeois dont la thĂ©orie socialiste est insuffisamment consolidĂ©e.

MĂȘme son appartenance au Groupe 1925, une association d’écrivains de gauche, ne prouve rien : Roth apparaĂźt comme signataire des rĂ©solutions du Groupe, mais il ne prit pas part aux rencontres de l’association. NĂ©anmoins, il semble avoir suivi avec intĂ©rĂȘt les activitĂ©s du Groupe pendant la courte pĂ©riode de l’existence de celui-ci.

En ce qui concerne le Roth monarchiste : dans ses premiers travaux journalistiques, Roth s’était montrĂ© vraiment critique Ă  l’égard de la monarchie. Cette position se transforma en une idĂ©alisation de la Monarchie des Habsbourg, qui certes ne mĂ©connaissait pas ni n’ignorait les erreurs et les nĂ©gligences de l’État corporatif autrichien qui avait rĂ©ellement existĂ© (mais n’existait plus), mais qui peignait l’Utopie d’une Autriche dans une transfiguration romantique, telle qu’elle aurait pu ĂȘtre ou dĂ» ĂȘtre. Roth n’était ici pas le seul reprĂ©sentant de cette nostalgie spĂ©cifique royale et impĂ©riale : de Fritz von Herzmanovsky-Orlando (Tarockanie) Ă  Robert Musil (Kakanie), quelques poĂštes travaillaient au transfert de l’Autriche vers le Mythe et l’Utopie.

Pour Roth, cela changea avec l’ascension du National-socialisme. Il voyait dans la Monarchie et l’Église catholique les seules forces qu’il croyait capables d’opposer une rĂ©sistance suffisante Ă  la « peste noire » - si elles pouvaient s’y dĂ©cider. En consĂ©quence, non seulement il renforça sa propre stylisation en tant qu’officier autrichien (catholique, naturellement), mais il soutint aussi concrĂštement la cause monarchiste par des articles et un travail politique[27].

Dans ses derniĂšres annĂ©es, il cherchait le contact avec les cercles lĂ©gitimistes autour du prĂ©tendant au trĂŽne Otto de Habsbourg ; dans cette perspective il partit pour Vienne le (quelques jours avant l’Anschluss de l’Autriche) avec l’objectif de convaincre le chancelier fĂ©dĂ©ral autrichien Kurt Schuschnigg d’abdiquer en faveur d’Otto de Habsbourg. Le projet n’était peut-ĂȘtre pas aussi illusoire qu’il apparaĂźt rĂ©trospectivement; quoi qu’il en soit, Roth Ă©choua : il ne rĂ©ussit pas Ă  parler Ă  Schuschnigg et le prĂ©sident de la Police de Vienne Michael Skubl lui conseilla de retourner au plus vite Ă  Paris.

Une Ɠuvre inclassable

Il semble difficile de ranger l’Ɠuvre de Roth dans une tendance prĂ©cise ou un groupe de la littĂ©rature contemporaine. En premier lieu, on l’associe Ă  la Nouvelle ObjectivitĂ©, et ce classement peut avant tout ĂȘtre pertinent pour ses premiĂšres Ɠuvres. Ainsi, La Fuite sans fin porte non seulement le sous-titre Un compte-rendu, mais dans la prĂ©face, l’auteur assure : « Je n’ai rien inventĂ©, rien composĂ©. Il ne s’agit plus de “faire des vers”. Le plus important est ce qui est observĂ©. »

Toutefois, c’est ce mĂȘme Roth qui dans En finir avec la Nouvelle ObjectivitĂ© rejette cette tendance[28]. Il critique avec un point de vue de journaliste l’absence de forme d’une littĂ©rature qui veut s’appuyer sur des « faits bruts », en mettant en parallĂšle avec les tĂ©moignages le compte-rendu journalistique (mis en forme) :

« Le Fait et le DĂ©tail sont le contenu du tĂ©moignage. Ils sont le matĂ©riau brut du compte-rendu journalistique. “Restituer” l’évĂ©nement rend d’abord possible une expression mise en forme, donc artistique, dans laquelle le matĂ©riau brut contenu est comme le minerai dans l’acier, comme le mercure dans le miroir[28]. »

Et il reproche à la Nouvelle Objectivité de faire sienne la position du lecteur naïf :

« Le lecteur primitif soit restera tout entier dans la réalité, soit la fuira tout entier[28]. »

D’oĂč sa prĂ©fĂ©rence pour la prĂ©tendue authenticitĂ© des rapports non mis en forme des tĂ©moins oculaires. Roth, en tant que journaliste, connait le travail pour former un article Ă  partir d’une simple dĂ©position, et comme poĂšte, il sait :

« 
 en premier lieu est “l’Ɠuvre d’art”, vraie comme la vie[28]. »

Un programme direct pour son Ɠuvre, la phrase :

« Le narrateur est un observateur et quelqu’un qui comprend les choses. Son Ɠuvre ne rompt jamais avec la rĂ©alitĂ©, mais elle est en vĂ©ritĂ© (par la mĂ©diation de la langue) la rĂ©alitĂ© transformĂ©e[28]. »

Roth dĂ©fendait ici la position de l’"artisan" journaliste. Il Ă©tait connu de ses contemporains en premier lieu comme journaliste, et les travaux journalistiques reprĂ©sentaient bien la moitiĂ© de son Ɠuvre. L’appartenance de Roth Ă  la Nouvelle ObjectivitĂ© – qui Ă©tait dĂ©jĂ  un mouvement de rĂ©action Ă  l’Expressionnisme qui dominait la littĂ©rature de la pĂ©riode de Weimar – dĂ©rive peut-ĂȘtre justement du fait que Roth n’était pas un expressionniste. Roth ne prit pas part Ă  l’expĂ©rience linguistique de l’Expressionnisme, il resta au contraire conservateur dans les moyens linguistiques qu’il utilisait le plus souvent.

ƒuvre

DĂ©tail du tombeau de Charles VI de Habsbourg dans la crypte des Capucins, Ă  Vienne.

Son Ɠuvre la plus cĂ©lĂšbre est son roman La Marche de Radetzky, qui retrace la chute de l'Empire austro-hongrois et la dĂ©sintĂ©gration de la sociĂ©tĂ© autrichienne Ă  travers les trois derniĂšres gĂ©nĂ©rations de la famille von Trotta.

Liste (non exhaustive) par ordre chronologique de parution :

Romans, nouvelles

  • Der VorzugsschĂŒler, Vienne, 1916
  • Barbara, Vienne, 1918
  • Das Spinnennetz, Vienne, 1923
    PubliĂ© en français sous le titre La Toile d'araignĂ©e, traduit par Marie-France Charrasse, Paris, Gallimard, coll. « Du monde entier », 1970 (ISBN 2-07-027339-3) ; rĂ©Ă©dition, Paris, Gallimard, coll. « L'ÉtrangĂšre », 1991 (ISBN 2-07-071473-X) ; rĂ©Ă©dition, Paris, Gallimard, coll. « L'Imaginaire » no 498, 2004 (ISBN 978-2-07-077084-7)
  • Hotel Savoy. Ein Roman, Berlin, 1924
    Publié en français sous le titre HÎtel Savoy, traduit par Françoise Bresson, Paris, Gallimard, coll. « Du monde entier », 1969 (BNF 33159409) ; réédition, Paris, Gallimard, coll. « L'Imaginaire » no 183, 1993 (ISBN 2-07-070905-1)
  • Die Rebellion, Berlin, 1924
    PubliĂ© en français sous le titre La RĂ©bellion, traduit par Dominique Dubuy et Claude Riehl, Paris, Éditions du Seuil, coll. « Le don des langues », 1988 (ISBN 2-02-010185-8) ; rĂ©Ă©dition, Paris, Seuil, coll. « Points. Roman » no 444, 1991 (ISBN 2-02-013112-9)
  • April, Die Geschichte einer Liebe, Berlin, 1925
  • Der Blinde Spiegel, ein kleiner Roman, Berlin, 1925
    Publié en français sous le titre Le miroir aveugle, traduit et préfacé par Nicolas Waquet, Paris, Payot & Rivages, coll. « Rivages poche / Petite BibliothÚque », 2023, 100 p. (ISBN 978-2-7436-5916-5)
  • Juden auf Wanderschaft, Berlin, 1927
    Publié en français sous le titre Juifs en errance, suivi de L'Antéchrist, traduits par Michel-François Demet, Paris, Seuil, coll. « Le don des langues », 1986 (ISBN 2-02-009341-3)
  • Die Fluch ohne Ende - Ein Bericht, Munich, 1927
    Publié en français sous le titre La Fuite sans fin, traduit par Romana Altdorf et René Jouglet, Paris, Gallimard, 1929 (BNF 31251017) ; réédition, Paris, Gallimard, coll. « L'Imaginaire » no 155, 1988 (ISBN 2-07-070428-9)
  • Zipper und sein Vater, Munich, 1928
    Publié en français sous le titre Zipper et son pÚre, traduit par Jean Ruffet, Paris, Seuil, coll. « Le don des langues », 2004 (ISBN 2-02-023605-2)
  • Rechts und links, Berlin, 1929
    Publié en français sous le titre Gauche et Droite, traduit par Jean Ruffet, Paris, Seuil, coll. « Le don des langues », 2000 (ISBN 2-02-023604-4) ; réédition, Paris, Les Belles Lettres, coll. « Domaine étranger » no 32, 2017 (ISBN 978-2-251-44684-4)
  • Der stumme Prophet (extraits), Berlin, 1929 ; premiĂšre Ă©dition posthume avec une prĂ©face de Walter Lenning, Köln, Kiepenheuer & Witsch, 1966
    Publié en français sous le titre Le ProphÚte muet, traduit par Werner Lengning, Paris, Gallimard, 1972 (ISBN 2-07-028218-X)
  • Briefe aus Deutschland, Hambourg, 1929
  • Perlefter. PubliĂ© en français sous le titre Perlefter, Histoire d'un bourgeois, traduit par Pierre Deshusses, Paris, Robert Laffont, 2020. (ISBN
    2221249925)
  • Hiob, Roman eines einfachen Mannes, Berlin, 1930
    Publié en français sous le titre Job, roman d'un simple juif, traduit par Charles Reber, Paris, Valois, 1931
    Publié en français sous le titre Le Poids de la grùce, traduit par Paule Hofer-Bury, Paris, Calmann-Lévy, 1965 ; réédition, Paris, LGF, coll. « Le Livre de poche. Biblio » no 3052, 1984 (ISBN 2-253-03556-4) ; réédition, Paris, Presses-pocket no 3285, 1989 (ISBN 2-266-02884-7)
    Publié en français sous le titre Job, roman d'un homme simple, traduit par Silke Hass et Jean-Pierre Boyer, Tours, éditions Panoptikum, 2011 (ISBN 978-2-9540676-0-5), réédition, GenÚve, Héros-Limite, 2018 (ISBN 978-2-889550-00-5).
    Publié en français sous le titre Job, roman d'un homme simple, traduit par Stéphane Pesnel, Paris, Seuil, coll. « Le don des langues », 2012 (ISBN 978-2-02-102414-2) ; réédition, Paris, éditions Points, coll. « Grands Romans » no P3017, 2013 (ISBN 978-2-7578-3376-6)
  • Panoptikum. Gestalten und Kulissen, Munich, 1930
    Publié de façon partielle en français sous le titre Cabinet des figures de cire précédé de Images viennoises : esquisses et portraits, traduit par Stéphane Pesnel, Paris, Seuil, coll. « Le don des langues », 2009 (ISBN 978-2-02-096166-0)
  • Radetzkymarsch, Berlin, 1932
    PubliĂ© en français sous le titre La Marche de Radetzky, traduit par Blanche Gidon, Paris, Plon et Nourrit, coll. « Feux croisĂ©s. Âmes et Terres Ă©trangĂšres », 1934 (BNF 31251022) ; rĂ©Ă©dition dans la traduction française par Blanche Gidon, revue par Alain Huriot, Paris, Seuil, 1982 (ISBN 2-02-006270-4) ; rĂ©Ă©dition, Paris, Seuil, coll. « Points. Roman » no 125, 1983 (ISBN 2-02-006617-3) ; rĂ©Ă©dition avec une prĂ©sentation de StĂ©phane Pesnel, Paris, Ă©ditions Points, coll. « Grands Romans » no P8, 2008 (ISBN 978-2-7578-0823-8) ; rĂ©Ă©dition avec l'avant-propos de 1932 traduit par StĂ©phane Pesnel, Paris, Seuil, 2013 (ISBN 978-2-02-111426-3)
  • Stationschef Fallmerayer, Amsterdam, 1933
  • Tarabas, ein Gast auf dieser Erde, Amsterdam, 1934
    Publié en français sous le titre Tarabas : un hÎte sur cette terre, traduit par Michel-François Demet, Paris, Seuil, 1985 (ISBN 2-02-008729-4) ; réédition, Paris, Seuil, coll. « Points. Roman » no 389, 1990 (ISBN 2-02-011574-3) ; réédition, Paris, éditions Points, coll. « Grands Romans » no P2285, 2009 (ISBN 978-2-7578-1489-5)
  • Triumph des Schönheit, Paris, 1934
    Publié en français sous le titre Le Triomphe de la beauté, dans le recueil Le Buste de l'empereur, traduit par Blanche Gidon, Toulouse, éditions Ombres, coll. « Petite BibliothÚque Ombres » no 190, 2014 (ISBN 978-2-84142-202-9)
  • Die BĂŒste des Kaisers, Paris, 1934
    PubliĂ© en français sous le titre Le Buste de l'empereur, dans le recueil du mĂȘme titre, traduit par Blanche Gidon, Toulouse, Ă©ditions Ombres, coll. « Petite BibliothĂšque Ombres » no 190, 2014 (ISBN 978-2-84142-202-9)
  • Der Antichrist , Amsterdam, 1934
    Publié en français sous le titre Juifs en errance, suivi de L'Antéchrist, traduits par Michel-François Demet, Paris, Seuil, coll. « Le don des langues », 1986 (ISBN 2-02-009341-3)
  • Der Leviathan, Amsterdam, 1940
    PubliĂ© en français sous le titre LĂ©viathan, traduit par Brice Germain, Paris, Éditions Sillage, 2011 (ISBN 978-2-916266-81-7)
  • Die hundert Tage, Amsterdam, 1935
    Publié en français sous le titre Le Roman des Cent-Jours, traduit par Blanche Gidon, Paris, Grasset, 1937 (BNF 34189050) ; réédition, Paris, Seuil, coll. « Le don des langues », 2004 (ISBN 2-02-018266-1)
  • Beichte eines Mörders, erzĂ€hlt in einer Nacht, Amsterdam, 1936
    Publié en français sous le titre Notre assassin, traduit par Blanche Gidon, Paris, Robert Laffont, coll. « Pavillon », 1947 (BNF 32586361) ; réédition, Paris, C. Bourgois, 1994 (ISBN 2-267-00936-6) ; réédition, Paris, 10/18, coll. « Domaine étranger » no 2793, 1993 (ISBN 2-264-02266-3) ; réédition, Montreuil, éditions Folies d'encre, 2008 (ISBN 978-2-907337-43-4)
    Publié en français sous le titre Confession d'un assassin racontée en une nuit, traduit par Pierre Deshusses, Paris, Payot & Rivages, coll. « Rivage poche. Petite bibliothÚque » no 826, 2014 (ISBN 978-2-7436-2910-6)
  • Das falsche Gewicht. Die Geschichte eines Eichmeisters, Amsterdam, 1937
    Publié en français sous le titre Les Fausses Mesures, traduit par Blanche Gidon, Paris, éditions du Bateau ivre, coll. « Climats », 1946 (BNF 32586364) ; réédition, Paris, Seuil, coll. « Le don des langues », 1989 (ISBN 2-02-011388-0)
    Publié en français sous le titre Les Fausses Mesures, traduit par Brice Germain, Paris, éditions Sillage, 2009 (ISBN 978-2-916266-51-0)
  • Die Kapuzinergruft, Bilhoven, 1938
    Publié en français sous le titre La Crypte des capucins [29], traduit par Blanche Gidon, Paris, Pion, coll. « Feux croisés », 1940 (BNF 32586363) ; réédition, Paris, Seuil, 1983 (ISBN 2-02-006609-2) ; réédition, Paris, coll. « Points. Roman » no 257, 1986 (ISBN 2-02-009305-7) ; réédition avec une préface de Dominique Fernandez, Paris, Seuil, coll. « Points » no 196, 1996 (ISBN 2-02-026418-8) ; réédition, Paris, éditions Points, coll. « Grands Romans » no 196, 2010 (ISBN 978-2-7578-1795-7)
  • Die Geschichte von der 1002. Nacht, Bilthoven, 1939
    Publié en français sous le titre Conte de la 1002ee nuit, traduit par Françoise Bresson, Paris, Gallimard, 1973 (BNF 35226000) ; réédition, Paris, Gallimard, coll. « L'Imaginaire » no 479, 2003 (ISBN 2-07-076811-2)
  • Die Legende vom heiligen Trinker, Amsterdam, 1939
    Publié en français sous le titre La Légende du saint buveur, traduit par Dominique Dubuy et Claude Riehl, Paris, Seuil, coll. « Le don des langues », 1986 (ISBN 2-02-009340-5)
    Publié en français sous le titre La Légende du saint buveur, Paris, éditions Sillage, 2016 (ISBN 979-10-91896-56-6)

Recueils de nouvelles

  • Le Marchand de corail, traduit par Blanche Gidon et StĂ©phane Pesnel, Paris, Seuil, 1996 (ISBN 2-02-021233-1)
  • Viens Ă  Vienne, je t'attends, par Alexis Tautou, Paris, L'Herne, coll. « Carnets », 2015 (ISBN 978-2-85197-293-4)
  • Fraises, suivi de deux fragments, traduit par Alexis Tautou, Paris, L'Herne, coll. « Carnets », 2016 (ISBN 978-2-85197-294-1)
  • Nouvelles inĂ©dites (CarriĂšre ; À propos de l'endroit dont je veux parler maintenant ; HumanitĂ© malade ; Elles sont de plus en plus rares en ce monde ; Le Cartel ; La Riche Demeure d'en face ; Ce matin est arrivĂ©e une lettre ; Jeunesse) in Perlefter, roman et nouvelles, traduit par Pierre Deshusses, Paris, Robert Laffont, 2020 (ISBN 978-2-221-24992-5)

Recueils de chroniques et lettres

  • PoĂšmes des livres disparus & autres textes, traduit par Jean-Pierre Boyer et Silke Hass, GenĂšve, HĂ©ros-Limite, 2017 (ISBN 978-2-940517-73-2).
  • Une heure avant la fin du monde, traduit par Nicole Casanova, Paris, Liana Levi, 2003 (ISBN 2-86746-346-7) ; rĂ©Ă©dition, Paris, Liana Levi, coll. « Piccolo » no 65, 2009 (ISBN 978-2-86746-527-7)
  • À Berlin, traduit par Pierre Gallissaires, Monaco, Éditions du Rocher, coll. « Anatolia », 2003 (ISBN 2-268-04863-2) ; rĂ©Ă©dition, Paris, Les Belles lettres, coll. « Domaine Ă©tranger », 2013 (ISBN 978-2-251-21013-1)
  • La Filiale de l'enfer : Ă©crits de l'Ă©migration, traduit par Claire de Oliveira, Paris, Seuil, coll. « Le don des langues », 2005 (ISBN 2-02-067931-0)
  • Le Genre fĂ©minin, traduit par Nicole Casanova, Paris, Liana Levi, 2006 (ISBN 2-86746-406-4)
  • SymptĂŽmes viennois, traduit par Nicole Casanova, Paris, Liana Levi, 2004 (ISBN 2-86746-372-6)
  • Le DeuxiĂšme Amour : histoires et portraits, traduit par Jean Ruffet, Monaco, Éditions du Rocher, coll. « Anatolia », 2005 (ISBN 2-268-05556-6)
  • Lettres choisies : 1911-1939, traduit par StĂ©phane Pesnel, Paris, Seuil, coll. « Le don des langues », 2007 (ISBN 978-2-02-029700-4)
  • Croquis de voyage, traduit par Jean Ruffet, Paris, Seuil, coll. « Le don des langues », 1994 (ISBN 2-02-020689-7)
  • L'AutodafĂ© de l'esprit, publiĂ© en français en 1933 dans les Cahiers juifs no 5/6. RĂ©Ă©ditĂ© le aux Ă©ditions ALLIA

Adaptations

Cinéma

Télévision

Notes et références

Sources

Notes

  1. Fiche Ă©diteur.
  2. entité géopolitique et multiculturelle cohérente constituée par certains états d'Europe centrale
  3. Frankfurter Zeitung, , in Bronsen, op. cit., p. 400.
  4. cf Niels Bokhove : Nieuwe glimp van Nachum Roth. Een ooggetuige herinnert zich de vader van Joseph Roth .. Dans : De Parelduiker 14 (2009), no 4, p. 37-44
  5. La maison natale de Roth a été détruite lors de la guerre soviéto-ukrainienne de 1919/1920
  6. Que Kindermann fut le modÚle d'Anton Wanzl est affirmé par Józef Wittlin dans ses souvenirs de Joseph Roth (GedÀchnisbuch, p. 52)
  7. « A Gustave Kiepenheuer pour son 50e anniversaire ». Werke in drei BÀnden (1956), p. 835.
  8. Sa Majesté apostolique K. et K, in Werke in drei BÀnden (1956) p. 328-329.
  9. À titre d’exemple, un curĂ© de ses amis lui avait Ă©tabli un extrait de baptĂȘme, dans lequel son lieu de naissance n’était pas Szwaby prĂšs de Brody (ce qui Ă©tait dĂ©jĂ  imaginaire), mais Schwaben en Hongrie.
  10. Lettre Ă  Herbert Ihering du 17 septembre 1922.
  11. En , sa collaboration au Frankfurter Zeitung avait cessĂ©. Du au , il rĂ©dige une trentaine de contributions pour le MĂŒnchner Neuesten Nachrichten. Son contrat y prĂ©voit 2 000 marks mensuels pour la livraison d’au moins deux contributions. Voir David Bronsen, Joseph Roth. Eine Biographie, Cologne, Kiepenheuer & Wisch, 1974.
  12. Andrea Manga Bell fut peut-ĂȘtre le modĂšle du personnage de Juliette Martens dans le roman Ă  clĂ© de Klaus Mann Mephisto.
  13. Andrea Rebuffé, cité dans Bronsen, p. 466.
  14. Irmgard Keun : Wenn wir alle gut wĂ€ren. Erinnerungen und Geschichten. Progress Verlag, DĂŒsseldorf 1954, p. 146.
  15. Egon Erwin Kisch : Briefe an den Bruder Paul und an die Mutter. Berlin 1987, p. 297
  16. Bronsen, op. cit., p. 502.
  17. Briefe 1911-1939, Cologne, 1970, p. 249
  18. Tous les membres de la famille de Roth Ă  Lemberg furent victimes de la Shoah.
  19. Collectif Sarka-SPIP, « THIAIS (94) : cimetiÚre parisien - CimetiÚres de France et d'ailleurs », sur www.landrucimetieres.fr (consulté le )
  20. Joseph Roth : Une heure avant la fin du monde(1933), Ed. Liana Levi, coll. « Piccolo », 2009 (ISBN 2867465273)
  21. Almuth Hammer : ErwĂ€hlung erinnern. Literatur als Medium jĂŒdischen SelbstverstĂ€ndnisses, Vandenhiesck & Ruprecht, 2004, p. 103.
  22. Cité in Geza von Cziffra, Der heilige Trinker, Berlin, 2006, p. 53.
  23. Voir Bronsen, Joseph Roth p. 175
  24. S. Zweig/J. Roth, Correspondance 1927-1938, trad. Pierre Deshusses, BibliothĂšque Rivages, 2013, p. 239.
  25. Un simple jeu de mots sur son nom : « Joseph Roth (rouge) » devient « Joseph le rouge ». À d’autres endroits, il signe « Josephus », ce qui n’en fait pas non plus un membre des historiographes juifs.
  26. Notamment par Uwe Schweikert : Der rote Joseph in : Heinz Ludwig Arnold (dir) : Joseph Roth Text + Kritik Sonderband. Munich 1982, p. 40-55.
  27. Référence???
  28. SchluÎČ mit der « Neuen Sachlichkeit », in Literarische Welt, 17 et .
  29. (oĂč le dernier des von Trotta cherche en vain refuge dans la Crypte des Capucins oĂč gisent ses empereurs)

Voir aussi

En allemand

  • Michael Amon, Joseph Roth packt seine Koffer, verlĂ€ĂŸt Berlin und lĂ€ĂŸt ein Manuskript unvollendet zurĂŒck, Essai, Wiener Monat (mensuel devenu plus tard supplĂ©ment du Wiener Zeitung, ;
  • Heinz Arnold (dir.), Text + Kritik. Sonderband Joseph Roth, Munich,
  • Michael Bienert (dir.), Joseph Roth in Berlin, Cologne, Kiepenheuer & Wisch,
  • David Bronsen, « Joseph Roths lebenslange Auseinandersetzung mit dem Zionismus », dans Zeitschrift fĂŒr die Geschichte der Juden, vol. 1, Tel Aviv, Olamenu, , p. 1-4
  • David Bronsen, Joseph Roth. Eine Biographie, Cologne, Kiepenheuer & Wisch, (nouvelle Ă©d. revue, 1993)
  • GĂ©za von Cziffra, Der heilige Trinker. Erinnerungen an Joseph Roth, Berenberg Verlag,
  • Eleonore Fronk et Werner Andreas, "Besoffen, aber gescheit". Joseph Roths Alkoholismis in Leben und Werk, Athena, Oberhausen 2002 ;
  • Sebastian Kiefer, Braver Junge - gefĂŒllt mit Gift. Joseph Roth und die Ambivalenz, thĂšse, Metzler, Stuttgart und Weimar, 2001 ;
  • Bernd M. Kraske (dir), Joseph Roth - Werk und Wirkung, Bonn, 1988 ;
  • Heinz Lunzer et Victoria Lunzer-Talos, Joseph Roth - Leben und Werk in Bildern, Cologne, 1994, nelle Ă©d revue 2009 ;
  • Dietmar Mehrens, Vom göttlichen Auftrag der Literatur. Die Romane Hoseph Roths. Ein Kommentar (thĂšse), Halbourgn, 2000 ;
  • Soma Morgenstern, Josep Roths Flucht und Ende. Erinnerungen, LĂŒnegurg, zu Klampen,
  • Helmuth NĂŒrnberger, Joseph Roth mit Selbstzeugnissen und Bilddokumenten, Reinbek bei Hamburg,
  • StĂ©phane Pesnel, "Joseph Roth als Reporter in Europas Osten", in Jahrbuch der Österreich-Bibliothek in St. Petersburg, vol. 6, 2003/2004, p. 139-156 ;
  • StĂ©phane Pesnel, "Die Fratze der Großen Zeit. Der Erste Weltkrieg in Joseph Roths feuilletonistischem und erzĂ€hlerischem Schreiben", in Claude Conter, Oliver Jahraus, Christian Kirchmeier (dir.), Der Erste Weltkrieg als Katastrophe. Deutungsmuster, Diskurs, Ereignis, WĂŒrzburg, Königshausen und Neumann, 2014 ;
  • StĂ©phane Pesnel, Erika Tunner, Heinz Lunzer et Victoria Lunzer-Talos (dir.), Joseph Roth - StĂ€dtebilder. Zur Poetik, Philologie und Interpretation von Stadtdarstellungen aus den 1920er und 1930er Jahren, Berlin, Frank und Timme, 2015 ;
  • Eva Rafferl, Vertraute Fremde. Das östliche Judentum im Werk von Joseph Roth und Arnold Zweig, ThĂšse, Narr. TĂŒbingen, 2002 ;
  • Rainer-Joachim Siegel, Joseph Roth - Bibliographie, Cicero-Press, Morsum, 1994 ;
  • Wilhelm von Sternburg, Joseph Roth. Eine Biographie. Kiepenheuer & Wisch, Cologne, 2009 ;
  • Volker Weidermann, Die Hölle regiert ! Stefan Zweig und Joseph Roth - eine Freundschaft in Briefen. in Das Buch der verbrannten BĂŒcher, Cologne, Kiepenheuer & Wich, 2008, p. 232-240.

En français

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  • David Bronsen, Joseph Roth, Ă©d. rev. et abrĂ©gĂ©e par Katharina Ochse, trad. de l'allemand par RenĂ© Wintzen, Paris, Seuil, 1994, 372 p.
  • Philippe Chardin, Le roman de la conscience malheureuse, GenĂšve, Droz, 1982.
  • GĂ©za von Cziffra, Joseph Roth, le saint buveur : souvenirs, trad. de l'allemand par Jean Ruffet, Paris, Éditions du Rocher, 2003, 163 p.
  • Jacques Le Rider et Heinz Raschel (dir.), La Galicie au temps des Habsbourg (1772-1918). Histoire, sociĂ©tĂ©, cultures en contact, Tours, Presses Universitaires François-Rabelais, 2010.
  • StĂ©phane Pesnel, TotalitĂ© et fragmentaritĂ© dans l’Ɠuvre romanesque de Joseph Roth, Bern, Peter Lang, 2000.
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  • StĂ©phane Pesnel, "De Mendel Singer (Le Poids de la grĂące) Ă  Nissen Piczenik (Le Marchand de corail) : la radicalisation de la figure du marginal dans l’Ɠuvre de Joseph Roth", in Figures du marginal dans les littĂ©ratures centre-europĂ©ennes / Cultures d’Europe centrale no 1, 2001, p. 33-47.
  • StĂ©phane Pesnel, "Der Schauder der Heimatlosigkeit, der ĂŒber das Feld des Exils weht. W.G. Sebald lecteur de Joseph Roth : affinitĂ©s littĂ©raires et intĂ©gration crĂ©atrice de la rĂ©fĂ©rence rothienne", in W.G. Sebald. MĂ©moire, Transferts, Images [= numĂ©ro hors-sĂ©rie de la revue Recherches germaniques (2005)], p. 65-86.
  • StĂ©phane Pesnel, "Une fragile recrĂ©ation. Les espaces multiculturels dans l’Ɠuvre romanesque de Joseph Roth", in Espaces multiculturels, Ă©tudes rĂ©unies par StĂ©phane Pesnel, [= Études Germaniques, 2007/1], p. 89-106.
  • StĂ©phane Pesnel, "La sĂ©dimentation symbolique du texte narratif : le motif du cabinet des figures de cire dans l’Ɠuvre de Joseph Roth", in Françoise Lartillot et Alfred Pfabigan (dir.), Image, Reproduction, Texte / Bild, Abbild, Text, Bern, Peter Lang, 2012, p. 107-120.
  • StĂ©phane Pesnel (dir.), Lectures de "La Marche de Radetzky", revue Austriaca (no 77) Ă©ditĂ©e par les PURH, 2014.
  • RĂ©gine Robin, « La politique imaginaire de Joseph Roth », Études françaises, vol. 31, no 3,‎ , p. 19–42 (lire en ligne)
  • Carole Ksiazenicer-Matheron et StĂ©phane Pesnel (dir.), Cahier de L'Herne Joseph Roth, L'Herne, 2015.
  • Joseph Roth journaliste : une anthologie, Paris, Nouveau Monde Ă©ditions, 2016.
  • Philippe Forget/StĂ©phane Pesnel (dir.), Joseph Roth, l’exil Ă  Paris, PURH (Presses Universitaires de Rouen et du Havre), 2017.
  • Joseph Roth / Adalbert Stifter, Europe, no 1087-1088, novembre-.

En néerlandais

  • Els Snick, Waar het me slecht gaat is mijn vaderland. Joseph Roth in Nederland en BelgiĂ«, Amsterdam, Bas Lubberhuizen, 2013.
En anglais
  • Martin Mauthner: German Writers in French Exile, 1933-1940, Vallentine Mitchell, Londres, 2007 (ISBN 978 0 85303 540 4).
  • (en) Henry Garland et Mary Garland, The Oxford Companion to German Literature, Oxford University Press, (ISBN 9780191727412, lire en ligne)

Liens externes

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