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Jason

Dans la mythologie grecque, Jason (en grec ancien áŒžÎŹÏƒÏ‰Îœ / IĂĄsƍn, /i.ǎː.sɔːn/, « le guĂ©risseur ») est un hĂ©ros grec de la lignĂ©e des Aeolides, fils d'Éson, roi d'Iolcos en Thessalie, petit fils de CrĂ©thĂ©e, fondateur d'Iolcos, et descendant d'Éole. Il est Ă©duquĂ© par le centaure Chiron. Il est principalement connu pour sa quĂȘte de la Toison d'or avec les Argonautes. Il est l'un des principaux hĂ©ros grecs et particuliĂšrement vĂ©nĂ©rĂ© Ă  AthĂšnes.

Jason
Athéna face au dragon gardien de la toison d'or, qui est en train de régurgiter Jason. Coupe de Douris (480-470 av. J.-C.)
Athéna face au dragon gardien de la toison d'or, qui est en train de régurgiter Jason. Coupe de Douris (480-470 av. J.-C.)

Nom original áŒžÎŹÏƒÏ‰Îœ / IĂĄsĂŽn
Sexe Masculin
Activité Héros grec
ƒuvres Argonautiques (Apollonios de Rhodes)
Argonautiques (Valerius Flaccus)
Argonautiques orphiques
Famille Éson (pùre)
Médée (femme)
Polymédé (mÚre)
Affiliation Argonautes

Il voit son pĂšre dĂ©possĂ©dĂ© du trĂŽne par son oncle PĂ©lias. SauvĂ© des vues homicides de PĂ©lias par sa mĂšre qui Ă  sa naissance le fait passer pour mort-nĂ©, il est exposĂ© sur le mont PĂ©lion et recueilli par le centaure Chiron qui l'Ă©lĂšve. Devenu adulte, il rĂ©clame le trĂŽne d'Iolcos. PĂ©lias promet de le lui rendre, Ă  condition qu'il rapporte de Colchide la Toison d'or. AprĂšs avoir pris la tĂȘte de l'expĂ©dition des Argonautes, Jason parvient auprĂšs du roi ÉétĂšs, gardien de la Toison d'or, qui le soumet Ă  diverses Ă©preuves dont le jeune hĂ©ros triomphe grĂące Ă  l'aide de la fille du roi, MĂ©dĂ©e, qui s'est Ă©prise de lui. À son retour, Jason dĂ©couvre que PĂ©lias s'est dĂ©barrassĂ© d'Éson. MĂ©dĂ©e, dĂ©sormais Ă©pouse de Jason, met au point une machination qui pousse les filles de PĂ©lias Ă  tuer leur propre pĂšre. ExilĂ© Ă  Corinthe, le couple vit heureux pendant dix ans et a deux fils. Cependant, Jason finit par dĂ©laisser sa femme et lui prĂ©fĂšre GlaucĂ© appelĂ©e aussi CrĂ©use, la fille du roi CrĂ©on. MĂ©dĂ©e tue cette derniĂšre, met Ă  mort ses propres enfants, MermĂ©ros et PhĂ©rĂšs, puis s'enfuit dans un char ailĂ©, prĂ©sent du Soleil. Jason rentre alors Ă  Iolcos et, avec l'aide de PĂ©lĂ©e et des Dioscures, monte sur le trĂŽne.

Étymologie

Larissa, 500-478 av. J.-C. Obole en argent avec Ă  gauche : la tĂȘte de Jason portant un pĂ©tase ; Ă  droite : la Toison d'or et un caducĂ©e.

Jason, en grec ancien IÎŹÌÌ„ÏƒÏ‰Îœ, ̓IÎźÏƒÏ‰Îœ, signifie « mĂ©decin » : c'est la forme masculine qui correspond Ă  ̓I៱σώ / Iāsáč“, fille d'AsclĂ©pios. Ce nom qui, Ă  premiĂšre vue, ne se rapporte Ă  rien dans la lĂ©gende renverrait Ă  une tradition antĂ©rieure aux rĂ©cits que nous connaissons.

Ce n'est que chez les commentateurs de la lĂ©gende de Jason que l'on retrouve l'Ă©tymologie de son nom associĂ©e Ă  ses aventures ; par exemple, chez le mĂ©decin-philosophe Michael Maier : « Jason qui, comme son nom l’indique, reprĂ©sente le mĂ©decin, rechercha trĂšs attentivement la mĂ©decine aurigĂšne, au prix de multiples efforts de l’esprit et du corps, jusqu’à ce qu’enfin il la trouvĂąt et la rapportĂąt chez lui[1]. » En d'autres mots, Jason incarnerait « l'idĂ©e du mĂ©decin parfait », et la Toison d'or « ne signifierait rien d'autre que la suprĂȘme mĂ©decine recherchĂ©e par Jason mĂ©decin »[2].

La mĂ©decine que Jason a apprise du centaure Chiron, et dont il tire son nom, mais qu'il n'exerce pas explicitement dans les lĂ©gendes que nous connaissons, est donc une donnĂ©e antĂ©rieure Ă  leur constitution. En revanche, le couple qu'il forme avec MĂ©dĂ©e dont le nom est issu de la racine indo-europĂ©enne *med-, *mēd-, qui s'applique Ă  la mĂ©decine, est vraisemblablement originel[3].

Mythe de Jason

Jason est le fils d'Éson, roi d'Iolcos. Le nom de sa mĂšre varie suivant les traditions : selon certains, il s'agit de PolymĂ©dĂ©, fille de Phylacos, selon d'autres, de PolymĂ©dĂ©[4], fille d'Autolycos, ce qui ferait de Jason un cousin d'Ulysse[5]. Jason voit son pĂšre dĂ©possĂ©dĂ© du trĂŽne par le demi-frĂšre de ce dernier, PĂ©lias. SauvĂ© des vues homicides de PĂ©lias par sa mĂšre, il est Ă©levĂ© par le centaure Chiron sur le mont PĂ©lion.

La quĂȘte de la Toison d'or

Jason apportant à Pélias la Toison d'or, cratÚre apulien à figures rouges du Peintre des Enfers, 340-330 av. J.-C., musée du Louvre.

Un oracle avait prédit à Pélias, usurpateur du trÎne d'Iolcos, qu'il serait détrÎné par un homme qui se présenterait à lui avec une seule sandale. Devenu adulte, Jason va réclamer le trÎne d'Iolcos. Sur le chemin, il aide une vieille femme à traverser un fleuve et il perd une sandale dans la traversée. Or la vieille femme n'est autre que la déesse Héra, déguisée. Par la suite, Héra ne cessera de favoriser Jason, faveur renforcée par le désir de la déesse de se venger de Pélias[6].

Pélias lui promet le trÎne pourvu qu'il lui rapporte la Toison d'or, qui se trouve alors en Colchide. Avec l'aide d'Athéna et d'Héra, Jason entreprend de faire construire un fabuleux navire, l'Argo (« le rapide »). Celui-ci terminé Jason s'embarque avec cinquante jeunes hommes héroïques, les Argonautes (il s'agit de la génération antérieure aux héros de la Guerre de Troie), qui ont partagé avec lui les enseignements du centaure Chiron. Parmi eux, on compte HéraclÚs, Thésée et les jumeaux Castor et Pollux. Benoßt de Sainte-Maure raconte que c'est Pélias qui demande à un constructeur grec talentueux nommé Argus, de construire une nef à cette occasion, la premiÚre nef à voile baptisée l'Argo.

Parti d'Iolcos, Jason débarque sur les terres de Laomédon, le roi de Troie. Celui-ci, craignant que Jason et ses hommes l'attaquent, envoie un messager les chasser sur le champ. Jason, raisonnable mais offensé, maudira le roi et la ville en affirmant qu'ils seront un jour punis de cette inhospitalité, puis repartira (d'aprÚs Le Roman de Troie, de Benoßt de Sainte-Maure).

Les Ă©preuves pour la Toison

Les Symplégades sont des roches qui vacillent constamment, écrasant les navires qui tentent de passer entre elles. Jason reçoit le conseil de laisser passer une colombe devant lui : si elle réussissait à passer, leur bateau le pourrait aussi. La colombe passa en y laissant les plumes de sa queue.

ÉétĂšs ne souhaite pas se dĂ©faire de la Toison d'or qui garantit la prospĂ©ritĂ© de son royaume. Aussi feint-il d'accepter de laisser la Toison d'or Ă  Jason, s'il parvient Ă  triompher d'Ă©preuves surhumaines. Ces Ă©preuves sont : labourer une terre aride en ayant attelĂ© un taureau aux sabots d'airain et crachant du feu, y semer les dents du dragon de Cadmos, desquelles germent des guerriers, les Spartes (les « semĂ©s »), qui l'attaquent. Heureusement, il est aidĂ© par la fille du roi, la magicienne MĂ©dĂ©e, tombĂ©e amoureuse de lui. Celle-ci lui fournit un baume protecteur contre les brĂ»lures et le fer des taureaux, ainsi qu'une pierre faisant en sorte que les guerriers s'entretuent. Mais le roi, de mauvaise foi, refuse de cĂ©der la Toison d'or. Jason et MĂ©dĂ©e dĂ©cident donc d'aller la chercher la nuit. MĂ©dĂ©e endort le dragon qui garde la Toison d'or et fuit avec Jason. Pour retarder son pĂšre qui est Ă  leur poursuite, elle va mĂȘme jusqu'Ă  tuer son propre frĂšre, Apsyrtos, Ă  dĂ©couper son cadavre en morceaux et Ă  les semer derriĂšre le bateau : le roi arrĂȘte sa poursuite pour recueillir les morceaux de son fils et leur donner une sĂ©pulture.

De retour Ă  Iolcos, Jason constate que PĂ©lias a profitĂ© de son absence pour tuer son pĂšre et se dĂ©barrasser de sa famille. MĂ©dĂ©e met alors au point une ruse pour le venger : elle rajeunit un bĂ©lier en le faisant bouillir dans un chaudron avec des herbes magiques. Elle convainc ainsi les filles de PĂ©lias d'en faire de mĂȘme avec leur pĂšre. Mais elle leur donne des herbes sans aucun pouvoir, et les filles de PĂ©lias causent malgrĂ© elles la mort de leur pĂšre. MĂ©dĂ©e est dĂ©noncĂ©e par les filles de PĂ©lias, Jason et elle sont bannis d'Iolcos par Acaste, le fils de PĂ©lias, qui a hĂ©ritĂ© du trĂŽne. Ils se rĂ©fugient alors Ă  Corinthe, oĂč ils sont accueillis par le roi CrĂ©on.

L'exil Ă  Corinthe

Pendant dix ans, ils mĂšnent une vie heureuse et Ă©lĂšvent leurs enfants, jusqu'au jour oĂč Jason dĂ©laisse MĂ©dĂ©e et finit par Ă©pouser une princesse locale, CrĂ©use, fille du roi CrĂ©on. MĂ©dĂ©e se venge en tuant CrĂ©use et sa famille, ainsi que ses propres enfants. Jason est banni de Corinthe et MĂ©dĂ©e s'enfuit sur un char ailĂ© emportant le corps de ses fils.

Mort du héros

Jason reçoit sur la tĂȘte la proue dĂ©tachĂ©e de l'Ă©pave du navire Argo Ă©chouĂ©, qui le tue. Les dieux emportent le navire dans les cieux et en font l'ancienne constellation nommĂ©e l'Argo Navis. Jason, sera honorĂ© en GrĂšce comme patron de la navigation.

Selon Diodore de Sicile, il se serait suicidé aprÚs la mort de ses enfants[7].

Sources et postérité littéraire

Jason et Médée joignant leurs mains droites, sarcophage romain de la fin du Ier siÚcle apr. J.-C., palais Altemps.

Le mythe de Jason et le cycle des Argonautes constitue le sujet d'un grand nombre d'Ɠuvres littĂ©raires. Il est traitĂ© notamment par Pindare, 4e Pythique et Apollonios de Rhodes, Argonautiques. Le personnage de Jason Ă©volue dans le temps : le Jason hĂ©roĂŻque de Pindare et des documents figurĂ©s qui le montrent affrontant le dragon et sur certains, sortant de sa gueule, devient chez Euripide, puis chez Apollonios une sorte d'« anti-hĂ©ros » qui se contente de dĂ©crocher la Toison de l'arbre aprĂšs que MĂ©dĂ©e a endormi le dragon[3].

Par la suite, la lĂ©gende est traitĂ©e dans une Ɠuvre latine de Caius Valerius Flaccus, les Argonautiques.

Elle est abordée par le poÚte Benoßt de Sainte-Maure dans son Roman de Troie, 1165.

Vers 1460, le prĂȘtre Raoul LefĂšvre rĂ©dige une Histoire de Jason, qu'il prĂ©sente comme une entreprise de rĂ©habilitation du personnage de Jason, dictĂ©e par le hĂ©ros lui-mĂȘme. En rĂ©alitĂ©, l'Ɠuvre est probablement rĂ©digĂ©e sur commande de Philippe le Bon, duc de Bourgogne, Ă  la suite des attaques subies par l'ordre de la Toison d'or : on reproche Ă  ce dernier d'ĂȘtre placĂ© sous le patronage d'un vil sĂ©ducteur et le chancelier du duc, Jehan Germain, a mĂȘme proposĂ© de remplacer Jason par le hĂ©ros biblique GĂ©dĂ©on[8].

Au XVIIIe siĂšcle, Jason et les Argonautes suscitent encore l'intĂ©rĂȘt. Dans The Chronology of Ancient Kingdoms Amended (1728), Isaac Newton dĂ©fend l'idĂ©e selon laquelle une bonne part des constellations dĂ©rivent de la geste argonautique[9] :

  • le BĂ©lier est celui de la Toison d'or ;
  • le Taureau reprĂ©sente ceux que Jason soumet au joug en Colchide ;
  • les GĂ©meaux sont les Dioscures, qui viennent en aide Ă  Jason, et le Cygne leur mĂšre LĂ©da ;
  • le Dragon est celui de Cadmos – le Corbeau perche sur son cadavre ;
  • le Navire Argo a droit Ă  sa propre constellation, divisĂ©e par Nicolas-Louis de Lacaille en trois constellations plus petites : la CarĂšne, la Poupe et les Voiles ;
  • la Coupe est celle de MĂ©dĂ©e ;
  • le Centaure est Chiron, auquel est associĂ© l'Autel ;
  • Hercule, l'un des Argonautes, est figurĂ© avec ses victimes, l'Hydre (de Lerne), le Cancer (un crabe envoyĂ© par HĂ©ra pour contrarier le hĂ©ros pendant son combat avec l'Hydre), le Lion (de NĂ©mĂ©e) et le Vautour (aujourd'hui la Lyre) abattue par la FlĂšche.

Culture populaire

Jason sur une fresque antique de Pompéi.

Musique

Cinéma

Télévision

  • Jason et les Argonautes (2000) : Mini-sĂ©rie s'inspirant librement du mythe des Argonautes et de leur quĂȘte de la Toison d'or. Jason est incarnĂ© par l'acteur amĂ©ricain Jason London[11].
  • Atlantis (2013) : SĂ©rie inspirĂ©e de la vie de Jason mais trĂšs librement adaptĂ©e. Jason est interprĂ©tĂ© par Jack Donnelly.

Références

Joseph Kuhn-Régnier, Jason et Médée, in Contes et légendes mythologiques, 1936.
  1. (la) Michael Maier, Septimana philosophica, Francfort, Hartmann Palthenius, (lire en ligne), Aenigma 232..
  2. (la) Michael Maier, Septimana philosophica, Francfort, Hartmann Palthenius, (lire en ligne), Aenigma 80 et Initium Libri III.
  3. Jean Haudry, Les origines de la lĂ©gende argonautique, in Nouveaux horizons sur l'espace antique et moderne, Marie-Ange Julia (dir.), Ausonius Éditions, p. 109-128, 2015
  4. Svetlana Janakieva, « Noces prolongĂ©es dans l’HadĂšs : d’EvadnĂ© aux veuves thraces », Revue de l’histoire des religions [En ligne], 1 | 2005, mis en ligne le 26 janvier 2010, consultĂ© le 30 juin 2023. URL : http://journals.openedition.org/rhr/4452 ; DOI : https://doi.org/10.4000/rhr.4452
  5. Grimal, p. 242.
  6. Jean Haudry, Sur les pas des Indos-Européens : Religion - Mythologie - Linguistique, Yoran Embanner, 2022, p.323
  7. « Jason », sur mythologica.fr (consulté le ).
  8. Morse, p. 35.
  9. Morse, p. 36, note 1.
  10. (en) « Jason et les Argonautes (1963) », sur Internet Movie Database (consulté le )
  11. (en) « Jason and the Argonauts », sur Internet Movie Database (consulté le )

Bibliographie

  • (en) Timothy Gantz, Early Greek Myth, Johns Hopkins University Press, [dĂ©tail de l’édition], tome I, p. 340-373.
  • article « Jason », Pierre Grimal, Dictionnaire de la mythologie grecque et romaine, Paris, Presses universitaires de France, coll. « Grands dictionnaires », (1re Ă©d. 1951) (ISBN 2-13-050359-4), p. 242-243.
  • Alain Moreau, Le Mythe de Jason et MĂ©dĂ©e. Le Va-nu-pied et la SorciĂšre, Les Belles Lettres, coll. « VĂ©ritĂ© des mythes », Paris, 1994 (ISBN 2-251-32420-8) ; ouvrage rĂ©Ă©ditĂ© en 2006 (ISBN 2-251-32440-2).
  • (en) Ruth Morse, « Problems of Early Fiction: Raoul LefĂšvre's Histoire de Jason », The Modern Language Review, vol. 78, no1 (janvier 1983), p. 34-45.
  • (en) Jason Colavito, Jason and the Argonauts Through the Ages, McFarland & Company, 2014.
  • Jason et la toison d'or, bande dessinĂ©e en trois tomes, scĂ©nario de Clothilde Bruneau, dessins d'Alexandre Jubran, (GlĂ©nat 2016-2019) collection « la sagesse des mythes » conçue et Ă©crite par Luc Ferry.

Voir aussi

Articles connexes

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