Cancer (constellation)
Le Cancer est une constellation située sur l'écliptique entre les constellations des Gémeaux et du Lion. Elle est traversée par le Soleil du 20 juillet au 10 août.
Cancer | |
Vue de la constellation. | |
Désignation | |
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Nom latin | Cancer |
Génitif | Cancri |
Abréviation | Cnc |
Observation | |
(Époque J2000.0) | |
Ascension droite | Entre 117,125° et 138,75° |
Déclinaison | Entre 7,0° et 33,5° |
Taille observable | 506 deg2 (31e) |
Visibilité | Entre 90° N et 60° S |
Méridien | 15 mars, 21h00 |
Étoiles | |
Brillantes (m≤3,0) | 0 |
À l’œil nu | 103 |
Bayer / Flamsteed | 73 |
Proches (d≤16 al) | 1 |
La plus brillante | β Cnc (3,53) |
La plus proche | DX Cancri (11,8 al) |
Objets | |
Objets de Messier | 2 (M44, M67) |
Essaims météoritiques | Delta cancrides |
Constellations limitrophes | Gémeaux Hydre Lion Lynx Petit Chien |
Elle est entourée par les constellations du Lynx, de l'Hydre et du Petit Chien.
Le Cancer est également un signe astrologique du zodiaque correspondant au secteur de 30° situé entre les Gémeaux et le Lion. L'astrologie classique associe cette partie du zodiaque à la période du 22 juin environ au 22 juillet environ (elle ne prend pas en compte l'Ayanamsa, soit le décalage de plus en plus important des constellations actuelles par rapport à celles de l'Antiquité (il est actuellement de 24° environ).
Historique
En Mésopotamie
Le Cancer est une création mésopotamienne. Nous savons par Série MUL.APIN, qui est le premier traité d'astronomie mésopotamienne, découvert à Ninive dans la bibliothèque d'Assurbanipal et datant au plus tard de 627 av. è. c., que : DIŠ mul.AL.LUL šubat d.a-nim, ce qui signifie que « l’étoile du Crabe et le siège du dieu Ea »[1]. Nous savons aussi, par des documents astrologiques de basse époque, que A.meš, « les Eaux, le Terrain irrigué », était le symbole astrologique du 4e mois de l’année dont le nom était précisément donné par cet animal[2]. Pour interpréter ces données, il faut avoir en tête que AL.LUL = alluttu et kušu, « le crabe », est un animal traditionnellement utilisé en Mésopotamie antique pour nettoyer les canaux et les berges des fleuves, dont le dieu tutélaire est ENKI = Ea, seigneur de la Sagesse et des Eaux.
Par la suite, c’est-à-dire au début du 1er millénaire è.c., le ciel est organisé en constellations, c’est-à-dire que les étoiles sont désormais nommées par leur situation dans les figures célestes, et comme cela est attesté dans les fameux éphémérides qui s’étalent de 652 av. é.c. à 61 de notre ère, ce sont quatre étoiles de la constellation dénommée d’ALLUL = Kušu, à savoir γ, δ, η et θ Cnc, qui servent d’étoile repères dans les éphémérides qui couvrent les événements astronomiques pratiquement sur le millénaire avant notre ère [3].
En Grèce
Les Grecs héritent de cette constellation sous le nom Καρκίνος, qui est plus exactement « l’Écrevisse » selon les dictionnaires du grec, attesté chez Euctémon[4]. Et il va de soi qu’ils l’adaptent à leur propre imaginaire. Ainsi, pour Ératosthène, le Crabe passe pour avoir été placé parmi les constellations par Héra, parce qu’il fut le seul à ne pas combattre aux côtés d’Héraclès, comme les autres animaux, lorsque ce dernier détruisit l'hydre, qui devient elle aussi une constellation. Dans la littérature, Jorge Luis Borges, écrasé par Héraclès lors du deuxième de ses travaux, le Crabe reprend vie grâce à Poséidon, qui le transforme en monstre géant destiné à servir son armée[5].
Chez les Arabes
Chez les Arabes, il faut distinguer le ciel traditionnel qui comprend les manāzil al-qamar ou « stations lunaires », et ciel gréco-arabe, c’est-à-dire celui que les astronomes classiques ont repris des Grecs au IXe siècle de notre ère.
Quand ils héritent de la figure Καρκίνος, les traducteurs de Ptolémée donnent tout naturellement السررطان al-Saraṭān, qui est un emprunt du syriaque Sarṭāna, « le Crabe », « le Crabe », nom qu'ils connaissaient déjà comme celui du 4e signe du zodiaque, attesté dans l’horoscope de fondation de la ville de Baghdad en 762, ainsi que nous rapporte l’érudit persan al-Bīrūnī[6].
Notons que l’espace du Cancer gréco-arabe contient deux manāzil al-qamar ou « stations lunaires ». D’abord Ar. النثرة al-Naṯra, aux significations divers, qui correspond au couple γ'ξ Gem', et qui constitue la VIIe station. Ensuite الطرف al-Ṭarf, « le Regard », qui correspond au couple κ Cnc + λ Leo. Dans un deuxième temps, ces astérismes ont été intégrés dans la figure du Superlion, le premier, النثرة al-Naṯra, interprété » comme « le Canal subnasal [du Lion] », le second, الطرف al-Ṭarf, comme عيننا الاسد ᶜAynā l-Asad, « les Yeux du Lion »[7]. Voir l'image des « Deux lions arabes », dans la Constellation du Lion.
Les noms d'étoiles courant empruntés aux Arabes dans les catalogues contemporains puisent à ces deux sources arabes.
Localisation
Le Cancer est situé à l'est de Castor et Pollux (constellation des Gémeaux) et à l'ouest de la tête du Lion reconnaissable à sa faucille.
Plus au sud, la constellation est limitée par le Petit Chien au sud-ouest, facilement reconnaissable avec Procyon ; la tête de l'Hydre plein sud ; et les pattes du Lion avec Régulus au sud-est.
Description
L'étoile la plus brillante, Al Tarf (β Cnc), est très excentrée par rapport au reste de la constellation. C'est l'étoile brillante située à peu près au croisement de l'axe défini par Castor et Pollux, et par les deux yeux de la tête de l'Hydre. C'est l'une des pinces du « crabe ».
La deuxième pince du « crabe », Acubens (α Cancri), est dans l'alignement entre Procyon et (β Cnc). Acubens dérive d'un terme signifiant La Pince en arabe, signifiant ainsi que cette étoile caractérise la constellation du Cancer. Elle porte d'ailleurs la désignation α, bien qu'elle ne soit que la 4e étoile la plus brillante de la constellation.
Au nord on trouve ι Cnc, étoile brillante entre la tête des Gémeaux et celle du Lion. cette étoile est à la tête d'un alignement d'étoiles faibles vers le sud-sud-est (ρ1 et ρ2, ν et ξ Cnc), qui marquent les pattes arrière est du « crabe ».
Côté ouest, les pattes sont plus désordonnées, et forment un éventail à partir de χ, ψ, μ et ζ Cnc.
Au centre, le corps du « crabe » est un petit carré formé par γ (nord-est), η (nord-ouest), θ (sud-ouest) et δ (sud-est), situé sensiblement dans l'alignement entre ι et α Cnc. C'est à l'intérieur de ce carré qu'est situé l'amas ouvert M44, Praesepe, appelé l'essaim du Crabe. Il apparaît à l'œil nu comme une tache floue, la nébuleuse du crabe, à peine visible (ses composants sont de mag 6 à 7), mais on peut facilement distinguer ses composants à la jumelle.
- Constellation du Cancer.
- Visibilité nocturne de la constellation.
Étoiles principales
Tarf (β Cancri)
L'étoile la plus brillante de la constellation du Crabe est Tarf (β Cancri), la Pointe en arabe[8], également nommée Al Tarf[9]. Il s'agit d'une étoile géante orange de classe K4[10], environ 52 fois plus grande que le Soleil et 680 fois plus lumineuse[11]. L'étoile possède une exoplanète d'une masse minimale qui est de 7,8 fois celle de Jupiter et découverte en 2014[12].
Tarf est une probable étoile binaire, son compagnon de magnitude apparente 14 est une naine rouge située à 26 000 ua. Le couple mettrait alors plus de 76 000 ans pour effectuer une orbite complète[9].
Acubens (α Cancri)
Acubens est une étoile de type spectral A5m, ce qui fait d'elle une étoile Am[13]. Son spectre est en effet enrichi en éléments métalliques, comme le zinc, le strontium, le baryum, etc.[14].
Acubens est en fait un système multiple, constitué de deux couples d'étoiles distincts. Le plus brillant est composé de deux étoiles identiques (des naines de classe Am), située à 5,3 ua l'une de l'autre et orbitant en 6,1 ans. Le deuxième couple est formée de deux étoiles naines de classe M, de magnitude 12, orbitant autour du premier couple à plus de 600 ua en plus de 6 300 ans[14].
Tegmine (ζ Cancri)
Tegmine est un système stellaire qui comprend cinq étoiles[15].
À la base ζ Cancri A et B sont deux étoiles de magnitude 5,7 et 6,1, orbitent l'une autour de l'autre en environ 60 ans, éloignées de 22 ua. La composante Ca est une étoile de classe spectrale G et la composante Cb est probablement constituée de deux étoiles de classe M[15]. Ca et Cb gravitent autour de A et B en 1 115 ans, à une distance moyenne de 197 ua[16].
Autres étoiles
La 3e étoile de la constellation est ι Cancri, qui brille à une magnitude apparente de 3,93. Il s'agit d'une étoile binaire dont les deux composantes sont très éloignées. ι Cancri A est une géante de classe G7,5 et ι Cancri B une étoile naine ordinaire de magnitude 6,58 et de classe A3V. Les deux étoiles sont éloignées de plus de 2 800 ua et tourneraient l'une autour de l'autre en plus de 65 000 ans[17].
Deux autres étoiles dans cette constellation portent un nom : Asellus Australis (δ Cancri) et Asellus Borealis (γ Cancri), Les Ânes du Sud et du Nord en latin, car ces deux étoiles sont proches de l'amas ouvert M44, ou Praesepe, dont le nom signifie la Crèche. Asellus Australis et Asellus Borealis seraient donc deux ânes s'abreuvant à la crèche. Il pourrait également s'agir des ânes qui portaient Dionysos et les Silènes à la bataille.
Asellus Australis est une géante rouge qui possède un compagnon de magnitude 11,9.
Asellus Borealis est un système quadruple. La primaire, γ Cancri A, est de magnitude 4,66 et la secondaire, γ Cancri B, est de magnitude 8,7. Ces deux étoiles sont à leur tour flanquées chacune d'un compagnon de magnitude 12.
55 Cancri possède un système planétaire avec quatre planètes confirmées. La dernière planète composant ce système solaire (55 Cnc e) fait environ 8.5 masses terrestres. Il s'agit d'une « super-Terre »[18].
Autres objets célestes
La constellation contient plusieurs objets célestes :
- l'amas ouvert M44 est visible à l'œil nu (magnitude 3,7). Il est éloigné de 577 années-lumière et contient plus de 300 étoiles. Son âge et son mouvement propre est le même que celui de l'amas des Hyades et certains astronomes ont émis l'hypothèse que les deux amas pouvaient avoir une origine commune.
- L'espace dans lequel il se trouve était appelé praecepia (neutre pluriel de praecepium) par les Romains (Pline, 18, 353) ; il était localisé entre les deux Aselli (ânes) de la constellation du Crabe[19].
- Le mot avait plusieurs sens : « lieu où l'on mange (animaux ou humains), mangeoire, crèche, ruche »[19] ; la dénomination anglaise de Praesepe est beehive. Ses étoiles font penser à une mangeoire dans laquelle deux ânes mangent, ou à un essaim d'abeilles, d'où ses noms ;
- l'amas ouvert M67 est à la limite du visible à l’œil nu (magnitude 6,90) mais peut être observé avec de simples jumelles ;
- la nébuleuse planétaire Abell 31.
Dans la culture
La constellation du Cancer est représentée au-dessus du mont Triglav sur la pièce de 50 centimes d'euro émise par la Slovénie[20].
Annexes
Articles connexes
Notes et références
Notes
Références
- Roland Laffitte, « Série MUL.APIN (BM 86378), Tab. I, i, l. 7, sur le site URANOS. »
- Roland Laffitte,, « L’héritage mésopotamien des Grecs en matière de noms astraux (planètes, étoiles et constellations, signes du zodiaque), in Lettre SELEFA n° 10 (décembre 2021), p. 20. »
- Roland Laffitte, « Les étoiles de comput dites 'normales' dans les Journaux astronomiques (652-61 av. J.-C.) site URANOS. »
- André Le Bœuffle, Les Noms latins d’astres et de constellations, éd. Paris : Les Belles Lettres, 1977, pp. 160-162.
- Jorge Luis Borges, Le livre des êtres imaginaires, p. 127-128 : L'Hydre de Lerne.
- Roland Laffitte, Héritages arabes. Des noms arabes pour les étoiles, Paris : Geuthner, 2005, p. 46.
- Roland Laffitte, « Les deux figures du Lion dans le ciel arabe », site URANOS, le 3 juin 2023. »
- « International Astronomical Union | IAU », sur www.iau.org (consulté le )
- (en) James B. Kaler, « Al Tarf », sur Stars
- (en) Philip C. Keenan et Raymond C. McNeil, « The Perkins catalog of revised MK types for the cooler stars », The Astrophysical Journal Supplement Series, vol. 71, , p. 245 (DOI 10.1086/191373, Bibcode 1989ApJS...71..245K)
- (en) Ellyn K. Baines et al., « Fundamental Parameters of 87 Stars from the Navy Precision Optical Interferometer », The Astronomical Journal, vol. 155, no 1, , p. 16, article no 30 (DOI 10.3847/1538-3881/aa9d8b, Bibcode 2018AJ....155...30B, arXiv 1712.08109)
- (en) beta Cnc b sur L'Encyclopédie des planètes extrasolaires de l'Observatoire de Paris.
- (en) A. Cowley et al., « A study of the bright A stars. I. A catalogue of spectral classifications. », Astronomical Journal, vol. 74, , p. 375-406 (DOI 10.1086/110819, Bibcode 1969AJ.....74..375C)
- (en) James B. Kaler, « Acubens », sur Stars
- (en) P. P. Eggleton et A. A. Tokovinin, « A catalogue of multiplicity among bright stellar systems », Monthly Notices of the Royal Astronomical Society, vol. 389, no 2, , p. 869–879 (DOI 10.1111/j.1365-2966.2008.13596.x, Bibcode 2008MNRAS.389..869E, arXiv 0806.2878, lire en ligne)
- (en) James B. Kaler, « Tegmine », sur Stars
- (en) James B. Kaler, « Iota Cancri », sur Stars
- « Une super-Terre mise en lumière », sur www.reflexions.uliege.be (consulté le )
- « Praesepe • Dictionnaire Gaffiot latin-français - page 1226 », sur lexilogos.com (consulté le ).
- « 50 cents d'euro, Slovénie », sur fr.numista.com (consulté le )