Houda Benyamina
Houda Benyamina, née le à Viry-Chùtillon (Essonne), est une réalisatrice et scénariste française.
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Elle obtient en au festival de Cannes la Caméra d'or pour son premier long métrage, Divines, qui remporte également trois César en , dont celui du meilleur premier film.
Elle est également fondatrice de l'association 1000 Visages, qui a pour but de démocratiser le cinéma.
Biographie
Houda Benyamina naĂźt dans une famille d'origine marocaine, grandit Ă Viry-ChĂątillon dans le quartier des Ărables. Elle est la sĆur de l'actrice Oulaya Amamra[1] et de l'acteur Mounir Amamra.
Elle se fait renvoyer de plusieurs Ă©tablissements scolaires : « On ne va pas se mentir, quand tu grandis dans un quartier oĂč les injustices et les inĂ©galitĂ©s sont Ă chaque coin de rue, ça crĂ©e une colĂšre »[2]. AprĂšs un CAP en coiffure, elle prend goĂ»t Ă la littĂ©rature et au cinĂ©ma, passe le baccalaurĂ©at L et est formĂ©e comme comĂ©dienne Ă l'Ă©cole rĂ©gionale d'acteurs de Cannes (ERAC)[3]. Elle poursuit ses Ă©tudes en BiĂ©lorussie et aux Ătats-Unis grĂące Ă des bourses : Ă lâAcadĂ©mie de Minsk, auprĂšs de l'association Demain le Printemps, Ă lâOntological Theater et Ă lâActors Studio. Mais le mĂ©tier d'actrice la laisse rapidement frustrĂ©e : « J'avais ma vision du monde et besoin de m'exprimer autrement, j'ai appris Ă Ă©crire et Ă rĂ©aliser[2] ». Elle rĂ©alise neuf courts-mĂ©trages en neuf mois, primĂ©s dans diffĂ©rents festivals et diffusĂ©s par des tĂ©lĂ©visions (Canal+, France 2, Direct 8, TV5 Monde), dont Ma poubelle gĂ©ante, une satire sociale sur la difficultĂ© de trouver un boulot quand on est multidiplĂŽmĂ© et de banlieue[2].
Elle s'immerge plusieurs mois dans un campement rom de banlieue, démantelé depuis, puis écrit avec Malik Rumeau et réalise le moyen-métrage Sur la route du paradis[4] - [2]. Il est primé en 2011 au Festival du court métrage méditerranéen de Tanger, et au Festival international du film de Dubaï, sélectionné en 2012 par le Festival international du court métrage de Clermont-Ferrand et par le Festival del Cinema Africano de Milan, et est présélectionné pour les César 2013.
Elle se fait remarquer avec son premier long-mĂ©trage, Ă©crit avec Malik Rumeau et Romain Compingt, Divines, sĂ©lectionnĂ© Ă la Quinzaine des rĂ©alisateurs au Festival de Cannes 2016 et bien accueilli par la critique[5] - [3]. Elle se voit dĂ©cerner la CamĂ©ra d'or pour cette premiĂšre prĂ©sence dans cette compĂ©tition, et prononce Ă la rĂ©ception de ce prix un discours pour mettre en avant la nĂ©cessitĂ© dâavoir plus de femmes au festival de Cannes et dans le monde du cinĂ©ma[6] - [7]. En , lors de la cĂ©rĂ©monie des CĂ©sar, Divines reçoit trois rĂ©compenses : celle du meilleur premier film[8], du meilleur espoir fĂ©minin et du meilleur second rĂŽle fĂ©minin. Le film est nommĂ© aux Golden Globes[9]. Son succĂšs se retrouve aussi en salles, oĂč il fait 330 000 entrĂ©es, « un score Ă©norme pour un film au budget serrĂ© de 2,4 MâŹ[10] », et est achetĂ© par Netflix[11].
Ce premier film trouve sa singularitĂ© dans l'incarnation d'une quĂȘte aussi bien spirituelle (elle considĂšre que son « travail est une priĂšre[12] » et qu'il symbolise sa quĂȘte de spiritualitĂ©[9]), que politique (elle dĂ©peint avant tout le portrait de gens « populaires », « dĂ©saxĂ©s », « au ban de la sociĂ©tĂ© » pour crĂ©er un cinĂ©ma oĂč la diversitĂ© n'est pas un Ă©vĂšnement, mais le reflet de la France[13] - [14]), dans des corps dont l'Ă©nergie, la sensualitĂ© et la force sont au cĆur de la dramaturgie : « la seule chose qui ne ment pas, pour moi, c'est le langage du corps[15] ». Elle inclut d'ailleurs cette idĂ©e dans le combat que les femmes ont Ă mener : « Aujourdâhui, nous sommes trop cĂ©rĂ©braux, pas assez connectĂ©s au ventre, Ă la crĂ©ation. (âŠ) Je crois que ce que nous ressentons est toujours juste. Il faut dâabord Ă©couter ses Ă©motions pour trouver la voie juste et ensuite passer par les mots[16] ».
En 2017, elle dĂ©veloppe son second long-mĂ©trage Pour Assia[17], histoire d'amour entre une combattante du FLN algĂ©rien et un reporter amĂ©ricain, tout en travaillant de l'autre cĂŽtĂ© de l'Atlantique en rĂ©alisant Deadlier than the Male, le pilote de la sĂ©rie amĂ©ricaine Tell Me Your Secrets pour la TNT[18], au sujet de trois personnages tourmentĂ©s : Emma, qui a frĂ©quentĂ© un criminel, John, tueur en sĂ©rie en quĂȘte de rĂ©demption et Mary, une mĂšre Ă la recherche dĂ©sespĂ©rĂ©e de sa fille disparue[18]. La rĂ©alisatrice apparait en premiĂšre place sur la liste The Alice initiative, Ă©numĂ©rant les rĂ©alisatrices les plus en vogue de l'annĂ©e 2018 d'aprĂšs les producteurs et les grands studios hollywoodiens[19].
Style, pensée et influences
Son discours enflammé au festival de Cannes 2016 situe le cinéma d'Houda Benyamina dans le sillon d'un combat pour l'égalité des sexes, notamment avec son expression adressée au délégué général de la Quinzaine des réalisateurs : « T'as du clito ![10] - [20] » Dans une interview, elle explique sa démarche : « C'est important de féminiser le courage par le verbe[21]. »
Elle est invitĂ©e au talk Women in motion aux cĂŽtĂ©s de Salma Hayek ou Juliette Binoche pour dĂ©fendre la place des femmes dans l'industrie du cinĂ©ma français et amĂ©ricain, oĂč seulement 23 % des rĂ©alisateurs sont aujourd'hui des femmes[22]. La rĂ©alisatrice ne se dit pas fĂ©ministe mais humaniste, c'est pour elle une maniĂšre d'inclure les hommes dans le combat de l'Ă©galitĂ© des sexes : « Chacun a sa place dans notre sociĂ©tĂ©, sans prendre la place de lâautre. Il nâest pas question dâamoindrir la place des hommes[16] - [21]. »
Dans ses références figurent Mohamed Ali, Malcolm X[12], Tariq Ramadan[12] aussi bien que Jésus[23] (« La spiritualité selon moi dépasse toutes les religions[23] »), et, au cinéma Martin Scorsese, Bertrand Blier, Henri Verneuil, Ettore Scola, Pier Paolo Pasolini[11]. Elle note que pour les jeunes Algériens les figures de Martin Luther King et de Nelson Mandela sont encore inspirantes[24].
Polémiques et critiques
Une caricature qu'elle publie sur sa page Facebook deux jours aprĂšs les attentats de dĂ©peint un terroriste de Daech en une marionnette dont les ficelles sont tirĂ©es par un AmĂ©ricain et un juif[25], ce qui retient l'attention de plusieurs Ă©ditorialistes[26] - [27] - [28]. Conspiracy Watch a Ă©galement notĂ© d'autres posts Ă tendance complotiste ou conspirationniste de la rĂ©alisatrice (l'un relayait la pseudo-information selon laquelle Stanley Kubrick avait mis en scĂšne lâalunissage de la Nasa, un autre qualifiait Michel Collon de « grand monsieur »)[25].
Ă la sortie de Salam, plusieurs critiques français de cinĂ©ma s'avouent gĂȘnĂ©s par la maniĂšre dont la rĂ©alisatrice y reprĂ©sente le corps de la femme â plongeant dans l'obscuritĂ© les cheveux et le corps des femmes interrogĂ©es face camĂ©ra, comme pour les « voiler » â ainsi que par une certaine Ă©dulcoration du salafisme, dont le nom n'est pas prononcĂ©[29].
Engagements
Houda Benyamina fait partie du collectif « Maintenant on agit » qui lance un appel, pendant la cérémonie des César de 2018, pour soutenir les associations d'aide aux victimes de violences sexuelles en avançant notamment l'idée d'instaurer des quotas dans le monde du cinéma pour permettre d'en finir avec la discrimination féminine[30].
Elle est membre du collectif 50/50 qui a pour but de promouvoir lâĂ©galitĂ© des femmes et des hommes et la diversitĂ© dans le cinĂ©ma et lâaudiovisuel[31] - [32].
Elle participe Ă la crĂ©ation, avec Eiji Ieno, de lâassociation 1000 visages, pour favoriser lâaccĂšs Ă la culture pour les personnes qui en sont les plus Ă©loignĂ©es pour des raisons sociales, Ă©conomiques et territoriales. L'association a pour ambition de « dĂ©velopper un cinĂ©ma porteur de respect, de tolĂ©rance, dâouverture et de dialogue interculturel, gage de comprĂ©hension entre les perceptions du monde propres Ă chacun, gage de paix, de sĂ©curitĂ© et de prospĂ©ritĂ© pour le futur[33] - [2] - [3] - [34]. »
Filmographie
- 2006 : Paris vs Banlieue (court métrage)
- 2006 : Taxiphone Francaoui (court métrage)
- 2006 : Le clou en chasse un autre (court métrage)
- 2008 : Ma poubelle géante (court métrage)
- 2011 : Sur la route du paradis[35] (moyen métrage)
- 2016 : Divines (CĂ©sar du meilleur premier film)
- 2020 : The Eddy, saison 1, épisodes 3 et 4 (Série télévisée)
- 2022 : Salam, documentaire co-réalisé avec Mélanie Diam's et Anne Cissé
Notes et références
- Marion Galy-Ramounot, « âDivinesâ : Oulaya Amamra, la rĂ©vĂ©lation », Le Figaro,â (lire en ligne).
- RĂ©daction LP 2013, Le Parisien.
- Gallot 2016, Libération.
- Barlet 2013, Africultures.
- Baronnet 2016, Allociné.
- Quillet 2016, Le Figaro.
- Oudrhiri 2016, Telquel.
- AFP 2017, Le Parisien.
- « Avec âDivinesâ aux Golden Globes, Houda Benyamina Ă la conquĂȘte de Hollywood », Le HuffPost,â (lire en ligne).
- Renaud Baronian, « Les hĂ©ros de 2016. Houda Benyamina : la divine surprise », Le Parisien,â (lire en ligne).
- (en-US) Elsa Keslassy, « âDivinesâ Director Houda Benyamina on a Journey to Break Glass Ceiling in France », Variety,â (lire en ligne).
- « Mehdi et Badrou du Bondy Blog : âLe grand remplacement, câest nousâ », sur M, le magazine du Monde, .
- Quillet 2016.
- Laurent Carpentier et Charles-Henry Groult, « Houda Benyamina : âJe suis une guerriĂšreâ », Le Monde,â (lire en ligne).
- Marine Chassagnon, « La rĂ©alisatrice de âDivinesâ explique comment tourner une scĂšne torride sans mĂȘme un baiser », Le HuffPost,â (lire en ligne).
- Houda Benyamina, « Houda Benyamina : âLâavenir est main dans la main avec les hommesâ », Madame Figaro,â (lire en ligne).
- Astrid Van Laer, « AprĂšs Divines, Houda Benyamina prĂ©pare For Assia, une histoire d'amour sur fond de guerre d'AlgĂ©rie », Konbini,â (lire en ligne).
- (en-US) Joe Otterson, « âDeadlier Than the Maleâ Starring Lily Rabe Ordered to Series at TNT », Variety,â (lire en ligne).
- (en) « The Alice Initiative », sur thealiceinitiative.com (consulté le ).
- (en) Steve Rose, « Divines director Houda Benyamina: âIt's better to make a film than a bombâ », The Guardian,â (lire en ligne).
- Fiona Ipert, « Houda Benyamina (Divines) : âOn ne me tiendra pas par les couilles que je n'ai pasâ », Le Journal des femmes,â (lire en ligne).
- « Deux réalisatrices françaises réaffirment le pouvoir des femmes », sur kering.com, (consulté le ).
- Marion Galy-Ramounot, « Houda Benyamina : âJ'ai montrĂ© la citĂ© comme je la vois, pas comme elle est fantasmĂ©eâ », Madame Figaro,â (lire en ligne).
- Laure Croiset, « Houda Benyamina prĂ©pare l'aprĂšs âDivinesâ », Challenges,â (lire en ligne).
- Samuel Blumenfeld, « Conspiracy Watch : les thĂ©ories du complot ne passeront pas par lui », Le Monde,â (lire en ligne).
- Gilles-William Goldnadel, « Les CĂ©sar : une morale Ă gĂ©omĂ©trie variable », Le Figaro,â (lire en ligne).
- Caroline Fourest, « Mehdi Meklat : divine comĂ©die », Marianne,â (lire en ligne).
- Jean-Marc Lalanne, « CinĂ©ma du rĂ©el et rĂ©alitĂ© du cinĂ©ma », Les Inrockuptibles,â (lire en ligne).
- « Salam, le documentaire de Diam's : qu'est-ce qui n'a pas marché selon le Masque ? » sur radiofrance.fr du 11 juillet 2022.
- « âMaintenant on agitâ : les femmes du cinĂ©ma français s'engagent », LibĂ©ration,â (lire en ligne).
- « Femmes dans le cinéma : "La parité n'est pas qu'un problÚme de nana !" », sur LExpress.fr, (consulté le ).
- « Le collectif 5050 », sur collectif5050.com (consulté le ).
- « Contact â 1 000 visages », sur 1000visages.fr (consultĂ© le ).
- Charnet 2016, Le Monde.
- Fabrice Marquat, « âSur la route du paradisâ de Houda Benyamina », Bref,â (lire en ligne).
Voir aussi
Bibliographie
- Olivier Barlet, « Apt 2012 : richesse du court mĂ©trage », Africultures,â (lire en ligne)
- Brigitte Baronnet, « Cannes 2016 - "Divines" fait sensation Ă la Quinzaine des rĂ©alisateurs ! », AllocinĂ©,â (lire en ligne)
- Brigitte Baronnet, « AprĂšs Divines, une histoire d'amour sur fond de guerre en AlgĂ©rie pour Houda Benyamina », AllocinĂ©,â (lire en ligne)
- AriĂšle Bonte, « Festival de Cannes : âLes femmes doivent mettre leur clitoris sur la table !â selon Houda Benyamina », Le Figaro,â (lire en ligne)
- Agathe Charnet, « Les grandes Ă©coles de thĂ©Ăątre Ă lâheure dâune plus grande diversitĂ© », Le Monde,â (lire en ligne)
- ClĂ©mentine Gallot, « Houda Benyamina, amazone urbaine », LibĂ©ration,â (lire en ligne)
- Kaouthar Oudrhiri, « La divine Houda Benyamina rafle la camĂ©ra dâOr au festival de Cannes », Telquel,â (lire en ligne)
- Lucile Quillet, « Festival de Cannes : 5 choses Ă savoir sur la tornade Houda Benyamina », Le Figaro,â (lire en ligne)
- AFP, « âDivinesâ, CĂ©sar du meilleur premier film », Le Parisien,â (lire en ligne)
- RĂ©daction LP, « CinĂ©ma : les 1 000 visages d'Uda Benyamina », Le Parisien,â (lire en ligne)