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Hirondelle des Mascareignes

Phedina borbonica

L'Hirondelle des Mascareignes (Phedina borbonica) est une espèce de passereaux appartenant à la famille des Hirundinidae. Elle vit à Madagascar et dans l'archipel des Mascareignes. La sous-espèce nominale se rencontre à l'île Maurice et La Réunion et n'a jamais été retrouvée ailleurs que dans l'archipel des Mascareignes, tandis que la sous-espèce de Madagascar, P. b. madagascariensis, plus petite, est un oiseau migrateur qui a été vu pendant l'hiver dans l'Est de l'Afrique ou dans d'autres îles de l'océan Indien.

L'Hirondelle des Mascareignes est une petite hirondelle qui a les parties inférieures gris-brun devenant blanc sur la gorge et le bas-ventre, marquées de vagues tries noires. Les parties supérieures sont gris-brun foncé et la queue est légèrement fourchue. Elle niche en petites colonies partout où elle peut trouver des sites convenablement protégés pour construire son nid, comme sur des corniches, des bâtiments, des tunnels, des grottes ou parmi les rochers. Le nid est une coupe peu profonde faite de brindilles et d'autres matières végétales, et la femelle pond généralement de deux ou trois œufs blancs tachetés de brun. Les temps d'incubation et d'envol sont inconnus. L'Hirondelle des Mascareignes a un vol lourd avec des battements d'ailes lents entrecoupés de périodes durant lesquelles elle plane. Elle se perche souvent sur les fils. Elle se nourrit d'insectes en vol, chassant souvent près du sol ou de la végétation. En Afrique orientale, les habitats ouverts tels que les zones déboisées sont fréquemment utilisés pour la chasse. Un certain nombre de parasites internes et externes ont été détectés chez cette espèce.

Les cyclones tropicaux peuvent affecter les populations sur les petites îles, mais l'Hirondelle des Mascareignes est un oiseau commun avec une population apparemment stable et est donc classée comme une espèce de préoccupation mineure par l'Union internationale pour la conservation de la nature (UICN). Elle n'est pas protégée juridiquement sur le département français d'outre-mer de La Réunion, et sur l'île Maurice elle est considérée comme une « espèce de la faune pour laquelle des peines sévères sont prévues ».

Description

Anatomie et morphologie

Sous-espèce malgache à Bagamoyo, en Tanzanie

Les Hirondelles des Mascareignes adultes de la sous-espèce nominale mesurent 15 cm de long avec des ailes d'en moyenne 117 mm[1] et un poids de 23,9 g[2]. Cette petite hirondelle a les parties supĂ©rieures gris-brun foncĂ© avec de faibles stries. Les parties infĂ©rieures sont gris-brun, devenant blanches sur la gorge et le bas ventre, avec de nombreuses stries noires. La queue lĂ©gèrement fourchue mesure en moyenne 54,6 mm de long et les plumes sous-caudales sont brunes avec des bords blancs[3]. Les ailes sont brun-noirâtre et le bec et les pattes sont noirs. Les yeux sont brun foncĂ© et le bec mesure 11,3 mm de long. Les lores sont noirâtres et les couvertures auriculaires sont brunes, marquĂ©es de stries sĂ©pia[3]. Les sexes sont semblables, mais les oiseaux juvĂ©niles ont des stries plus diffuses sur la poitrine et les plumes couvrant les ailes ont des extrĂ©mitĂ©s blanches. La sous-espèce malgache est plus pâle globalement avec un bec plus large que la forme nominale. Elle a des stries plus denses sur la poitrine, mais seulement des lignes très fines sur le bas-ventre et sur le dessous de la queue blanc[1]. Elle est nettement plus petite que la sous-espèce nominale, avec 12 Ă  14 cm[4] de long pour un poids moyen de 20,6 g[2]. Cette hirondelle mue en dĂ©cembre et janvier sur l'Ă®le Maurice, et les animaux malgaches qui hivernent en Afrique muent en juin et juillet[1] - [3].

L'Hirondelle des Mascareignes est un oiseau relativement calme, qui gazouille un siri-liri siri-liri quand il est en vol ou perchĂ©[1]. Le chant des oiseaux perchĂ©s se termine par un glissando[5]. D'autres types de chants sont utilisĂ©s pendant les accouplements ou lorsque l'oiseau fait face Ă  une agression. Un « chip Â» est utilisĂ© comme cri de contact[1], et les jeunes oiseaux gazouillent rapidement quand ils mendient de la nourriture[5]. Les oiseaux qui hivernent en Afrique continentale sont gĂ©nĂ©ralement silencieux[4].

Ressemblance avec d'autres espèces

Aucune autre espèce d'hirondelle striée ne vit dans les îles où se reproduisent les Hirondelles des Mascareignes, et en Afrique l'Hirondelle striée est nettement plus grande, a une queue profondément fourchue et un plumage très différent, avec les parties supérieures bleu foncé, une culotte rouge et une tête brune[6]. L'Hirondelle paludicole a un plumage et une morphologie globale similaire à l'Hirondelle des Mascareignes, mais présente des parties inférieures non striées[1]. La petite Salangane des Mascareignes a des ailes plus étroites que l'Hirondelle des Mascareignes et un vol beaucoup plus léger[7]. L'Hirondelle de Brazza est plus petite, a un dos uni et des striures plus fines sur la gorge et la poitrine[8], mais les aires de répartition de ces deux espèces ne se chevauchent pas[9].

Biologie et Ă©cologie

Comportement

Sous-espèce malgache par Claude W. Wyatt, 1894

L'Hirondelle des Mascareignes a un vol lourd avec des battements d'ailes lents entrecoupés de périodes où elle plane[10]. Les oiseaux peuvent retourner à plusieurs reprises sur un perchoir qui leur convient[11]. On la voit souvent perchée sur des fils[12], et elle se repose parfois sur des plages de sable fin[11]. Cette hirondelle se perche en petits groupes dans les buissons, sur les bâtiments ou sur les falaises. Parfois, d'autres oiseaux se joignent à elle, comme les Guêpiers de Perse aux Seychelles[1].

Reproduction

L'Hirondelle des Mascareignes se reproduit durant la saison des pluies, d'aoĂ»t Ă  novembre Ă  Madagascar et de septembre Ă  dĂ©but janvier sur l'Ă®le Maurice et La RĂ©union. Elle se reproduit parmi des groupes comprenant typiquement quelques couples, mais une colonie d'environ 20 couples a Ă©tĂ© enregistrĂ©e sur l'Ă®le Maurice. Le nid est une coupe peu profonde de brindilles et de matĂ©riel vĂ©gĂ©tal grossier comme de l'herbe et de la Casuarina avec un intĂ©rieur revĂŞtu de plumes douces et de vĂ©gĂ©tation plus fine. Il peut ĂŞtre construit n'importe oĂą sur un site convenablement plat et inaccessible aux prĂ©dateurs, y compris Ă  des emplacements 3 Ă  m au-dessus de l'eau ou dans des passages souterrains[1]. Parmi les sites de nidification insolites observĂ©s on peut citer un petit bateau amarrĂ© Ă  20 m de la cĂ´te[13]. La couvĂ©e comprend normalement deux Ĺ“ufs Ă  Madagascar et sur l'Ă®le Maurice, et deux ou trois Ă  la RĂ©union. Les Ĺ“ufs sont blancs avec des taches brunes et mesurent en moyenne 21,6 x 15 mm pour un poids de 2,5 g et sont couvĂ©s uniquement par la femelle. La durĂ©e d'incubation et le temps avant l'envol sont inconnus[1], mais comme la plupart des hirondelles, les poussins sont nidicoles, et ils Ă©closent nus et aveugles[14]. Le mâle aide Ă  nourrir les jeunes et les poussins sont nourris par les parents après le premier envol[1]. Un couple sur l'Ă®le Maurice a Ă©tĂ© observĂ© nourrissant ses deux poussins Ă  des intervalles d'environ cinq minutes[13].

Alimentation

Les hirondelles se nourrissent en vol, souvent Ă  très faible altitude sur le sol ou la vĂ©gĂ©tation. Elles chassent seules, en petits groupes ou avec d'autres hirondelles et martinets, et sont plus actives juste avant le crĂ©puscule[1]. Les insectes volants qui constituent la majeure partie de leur rĂ©gime alimentaire comprend les scarabĂ©es, les Elateridae et autres colĂ©optères, des Hemiptera et des fourmis volantes[15]. Ă€ Madagascar, l'Hirondelle des Mascareignes recherche sa nourriture dans les forĂŞts, les terres agricoles, les zones humides, les zones semi-dĂ©sertiques et les zones ouvertes jusqu'Ă  une altitude de 2 200 m. Ă€ l'Ă®le Maurice et Ă  la RĂ©union cette hirondelle se nourrit du niveau de la mer jusqu'Ă  1 500 m sur les rĂ©servoirs d'eau et les cĂ´tes, le long des falaises et sur les Casuarina ou d'autres arbres et buissons, et en Afrique de l'Est elle chasse dans les zones dĂ©boisĂ©es par l'exploitation forestière ou la conversion Ă  l'agriculture[1] - [16].

Prédateurs et parasites

Les Hirondelles des Mascareignes ont été vues régulièrement se regrouper pour harceler et éloigner le Crécerelle de Maurice, ce qui signifie qu'il est perçu comme un prédateur potentiel[17]. Les spécimens de l'île Maurice peuvent être infectés par un trypanosome endémique, Trypanosoma phedinae[18], mais le degré auquel il est pathogène est inconnu[12]. Des protozoaires parasites du sang du genre Haemoproteus ont également été trouvés chez cette hirondelle sur l'île Maurice[19], mais aucun parasite sanguin n'a été trouvé chez les spécimens de Madagascar[20]. Une nouvelle espèce de Hippoboscidae, Ornithomya cecropis, a été découverte sur une Hirondelle des Mascareignes à Madagascar[21], et un autre oiseau de l'île portait l'acarien des plumes Mesalges hirsutus, plus communément rencontré chez les perroquets[22] - [23].

Distribution et habitat

L'aire de reproduction de l'Hirondelle des Mascareignes est limitĂ©e Ă  Madagascar et les Mascareignes. La sous-espèce nominale se reproduit sur l'Ă®le Maurice et sur l'Ă®le de La RĂ©union et P. b. madagascariensis se reproduit Ă  Madagascar. Elle peut Ă©galement nicher sur l'Ă®le de Pemba, oĂą elle a Ă©tĂ© vue durant sa saison de reproduction. Elle niche partout oĂą elle peut trouver des sites appropriĂ©s pour la construction d'un nid, comme sur des corniches, des bâtiments, des tunnels, des grottes ou parmi les rochers. Cette hirondelle se trouve dans la partie est de la RĂ©union, entre 200 et 500 m, et sur les cĂ´tes sud et ouest de l'Ă®le Maurice. On la rencontre Ă©galement sur les falaises Ă  l'intĂ©rieur des terres de l'Ă®le Maurice[1].

La sous-espèce P. b. borbonica vit toute l'année sur l'île Maurice et La Réunion, même s'il y a des mouvements locaux et saisonniers sur ces îles, mais la sous-espèce malgache est migratrice. Le plateau de l'Imerina est désert d'avril à septembre, les hirondelles se déplacent à des altitudes inférieures ou sur le continent africain[1]. Elle est normalement rare et confinée à quelques endroits sur la côte du Mozambique[4] - [24] - [25], en Zambie, au Malawi et sur l'île de Pemba[26], et elle très rare au Kenya et en Tanzanie continentale[27] - [28] - [29], même si un grand nombre d'animaux hivernent ponctuellement au Mozambique ou au Malawi. Il a également été observé dans les Comores et d'autres endroits de l'océan Indien, y compris au moins quatre îles des Seychelles. À partir de 2012 un total de huit oiseaux avaient été aperçus aux Seychelles, se produisant au cours des deux périodes de migration du printemps et de l'automne[30]. Certaines de ces observations peuvent être dues à des oiseaux errants transportés par les cyclones tropicaux[1].

Taxonomie

La sous-espèce des Mascareignes par Claude W. Wyatt, 1894.

L'Hirondelle des Mascareignes a été décrite officiellement pour la première fois en 1789 sous l'appellation Hirundo borbonica par le zoologiste allemand Johann Friedrich Gmelin dans la 13e édition du Systema Naturae de Linné[31]. Il est probable que l'espèce ait déjà été décrite auparavant par le naturaliste français Philibert Commerson décédé à Maurice en 1773. Son énorme collection de spécimens et ses notes ont été renvoyés au Muséum national d'histoire naturelle en 1774, mais détruits par une fumigation de soufre en 1810[32]. Le biologiste français Charles-Lucien Bonaparte déplace cette hirondelle vers le genre Phedina nouvellement créé en 1855[33]. Le nom du genre dérive du grec phaios (φαιός) signifiant « brun » et de l'italien rondine signifiant « hirondelle »[34], et le nom spécifique fait référence à l'île de Bourbon (ancien nom de La Réunion)[35]. Il existe deux sous-espèces, P. borbonica borbonica sur l'île Maurice et La Réunion et P. b. madagascariensis à Madagascar[1].

Les espèces du genre Phedina sont membres de la famille des Hirundinidae, et font partie de la sous-famille des Hirundininae, qui comprend toutes les hirondelles à l'exception des pseudolangrayens. Des études de séquences d'ADN suggèrent qu'il existe trois grands groupes au sein de la sous-famille des Hirundininae, qui se distinguent très fortement par le type de nid construit. Ces groupes sont les espèces fouisseuses comme l'Hirondelle de rivage, les oiseaux qui utilisent comme nids des cavités naturelles comme l'Hirondelle bicolore, et les espèces qui construisent un nid en boue, comme l'Hirondelle rustique. Les espèces du genre Phedina nichent dans des terriers et appartiennent donc au groupe des hirondelles fouisseuses[36] - [37].

On pense que le genre Phedina a très vite divergé de la principale lignée d'hirondelle au cours de l'histoire, bien que le plumage rayé de ses deux espèces suggère une lointaine parenté avec des espèces africaines d'Hirundo, elles aussi striées[38] - [39]. Le seul autre membre du genre est l'Hirondelle de Brazza (P. brazzae), bien que par le passé il a parfois été suggéré de déplacer cette dernière dans son propre genre, Phenidopis, en raison des différences significatives au niveau du chant et du type de nid entre ces deux espèces[38] - [40]. Le parent le plus proche des hirondelles du genre Phedina est l'Hirondelle à collier, Riparia cincta, qui ne semble pas être étroitement liée aux autres membres de son genre actuel et ressemble à l'Hirondelle de Brazza au niveau de ses habitudes de nidification et de son chant[36] - [41]. L'actuelle pratique de l'Association of European Rarities Committees (AERC) consiste à placer l'Hirondelle à collier dans son propre genre sous le nom Neophedina cincta, plutôt que de fusionner ce genre avec Phedina, car l'Hirondelle à collier est nettement plus grande, a un bec et une forme des narines différents et la forme de son nid diffère de celui des espèces de Phedina[42]. L'ornithologue allemand Gustav Hartlaub a séparé la population malgache d'Hirondelle des Mascareignes, en faisant une espèce à part entière, P. madagascariensis[43], mais des auteurs plus récents ont estimé qu'il s'agissait seulement d'une sous-espèce, P. b. madagascariensis[44] - [1].

Statut

L'aire de reproduction de l'Hirondelle des Mascareignes est limitĂ©e aux trois Ă®les. Madagascar a une superficie de 592 800 kilomètres carrĂ©s[45], mais la seconde plus grande Ă®le, La RĂ©union, a une superficie de seulement 2 512 km2[46]. Bien que cet oiseau a une distribution limitĂ©e, il est abondant sur l'Ă®le Maurice et de La RĂ©union et localement commun Ă  Madagascar. La taille de la population est inconnue, mais dĂ©passe le seuil de vulnĂ©rabilitĂ© de 10 000 individus matures et est considĂ©rĂ©e comme stable. Cette hirondelle est donc classĂ©e comme une espèce de prĂ©occupation mineure par l'Union internationale pour la conservation de la nature[44].

Les cyclones tropicaux présentent une menace naturelle, en particulier sur les petites îles habitées par la sous-espèce nominale. Les populations de l'île Maurice et de La Réunion ont été durement touchées par un cyclone en , et un ornithologue britannique, Edward Newton, a affirmé ne pas avoir vu un seul spécimen sur l'île Maurice entre la tempête de six jours et le mois de juin de l'année suivante[47]. Il a fallu de nombreuses années pour que cette population se rétablisse complètement, mais dans les années 1900 elle est signalée commune localement, et en 1973-74 on comptait 200 à 400 couples à La Réunion et 70 à 75 couples sur l'île Maurice. Les cyclones les plus récents, comme celui de 1980, semblent avoir eu des effets moins nocifs que la tempête 1861[1]. Un certain nombre d'espèces de la région sont classées vulnérables en partie parce qu'elles sont limitées à une île, ou sont gravement affectées par la dégradation de l'habitat ou la présence de prédateurs introduits, et plusieurs espèces ont disparu des îles Mascareignes depuis la colonisation humaine au XVIIe siècle. L'Hirondelle des Mascareignes, comme la Salangane des Mascareignes, sont présentes sur toutes les îles principales et sont moins vulnérables aux effets des activités humaines, en particulier car elles peuvent utiliser les maisons comme sites de nidification[48].

Ă€ Maurice, l'Hirondelle des Mascareignes est lĂ©galement protĂ©gĂ©e comme une « espèce de la faune pour laquelle des peines sĂ©vères sont prĂ©vues Â». Il est interdit de tuer un oiseau de cette espèce ou de prĂ©lever les Ĺ“ufs ou dĂ©truire leurs nids en vertu de l'article 16 du Wildlife and National Parks Act de 1993[49]. Madagascar et les pays du continent africain n'ont pas de mesures spĂ©ciales au-delĂ  de la lĂ©gislation gĂ©nĂ©rale de protection des oiseaux[50]. La RĂ©union est un dĂ©partement d'outre-mer français, mais la directive oiseaux ne s'applique pas en dehors d'Europe, il n'y a donc pas au niveau europĂ©en de lĂ©gislation de protection efficace des oiseaux sur l'Ă®le, malgrĂ© la possibilitĂ© que l'agriculture et d'autres activitĂ©s subventionnĂ©es par l'Union europĂ©enne peuvent affecter nĂ©gativement les oiseaux et les habitats de l'Ă®le[48] - [51].

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