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Expéditions romaines en Afrique subsaharienne

Les expéditions romaines en Afrique subsaharienne sont un groupe d'expéditions et d'explorations en direction du Lac Tchad et de l'Afrique de l'Ouest. Ces expéditions ont été menées par des groupes de militaires et marchands romains qui se sont déplacés à travers le Sahara ainsi que dans l'intérieur des terres africaines et de ses côtes. Elles ont eu lieu entre le Ier et le IVe siècle après Jésus-Christ. La principale motivation pour les expéditions est de sécuriser les sources d'or et d'épices[1].

Carte montrant les principales expéditions romaines en Afrique sub-saharienne et Afrique de l'Ouest.

Caractéristiques

Les Romains organisent des expéditions à traverser le Sahara, le long de cinq routes différentes :

Toutes ces expéditions ont été prises en charge par les légionnaires et ont surtout un but commercial. Seule celle menée par l'empereur Néron semblait être un préparatif pour la conquête de l'Éthiopie ou de la Nubie ; en l'an 62, deux légionnaires explorent les sources du Nil.

L'un des principaux objectifs de l'exploration est de localiser et d'obtenir de l'or, à l'aide de chevaux et de bœufs pour le transport par voie terrestre vers les provinces romaines sur la côte méditerranéenne[2].

Les explorations près des côtes sont effectuées par des navires romains et profondément liées au commerce d'outre-mer.

Principales explorations

Les Romains mènent cinq explorations principales : deux dans le Sahara occidental, deux dans le Sahara central, et une dans la région du Lac Tchad.

Expéditions du Sahara occidental

Dans le Sahara occidental, il y a eu deux expéditions romaines, juste au sud des montagnes de l'Atlas :

  • ExpĂ©dition de Cornelius Balbus[3] : La première expĂ©dition faite par les Romains dans le Sahara — selon Pline — a Ă©tĂ© celle de Cornelius Balbus, qui en 19 avant JĂ©sus-Christ a probablement atteint le fleuve Niger près de Tombouctou. Il est parti de Sabratha en Tripolitaine et a conquis, avec dix mille lĂ©gionnaires, la capitale des Garamantes dans le Fezzan et envoyĂ© un petit groupe de ses lĂ©gionnaires plus au sud Ă  travers le Hoggar afin d'explorer la "terre des lions" : ils dĂ©couvrent une Ă©norme rivière (le Niger) qui, Ă  leur avis, se dirige vers le Nil. En effet, en 1955, de nombreuses monnaies romaines et cĂ©ramiques latines ont Ă©tĂ© trouvĂ©es dans la rĂ©gion du Mali.
  • ExpĂ©dition de SuĂ©tone Paulin : La deuxième a Ă©tĂ© faite en l'an 41 par SuĂ©tone Paulin, un consul romain, qui a Ă©tĂ© le premier romain Ă  diriger une armĂ©e au sein de la chaĂ®ne de l'Atlas. Au bout de dix jours de marche, il atteint le sommet des montagnes couvertes de neige et, plus tard, il arriva Ă  une rivière appelĂ©e Gerj. Il pĂ©nètre ensuite dans le sud semi-dĂ©sertique du Maroc et certains de ses lĂ©gionnaires sont probablement allĂ©s près de la rivière Daras (l'actuel fleuve Drâa).

À partir du Ier siècle de notre ère, il y a des éléments de preuve (pièces de monnaie, fibules) d'un commerce romain et des contacts à Akjoujt et Tamkartkart près de Tichitt en Mauritanie.

Expéditions du Sahara central

Les deux principales explorations/expéditions dans le Sahara central sont :

  • l'expĂ©dition de Flaccus : Pendant le règne d'Auguste, le lac Tchad est un immense lac et deux expĂ©ditions romaines sont rĂ©alisĂ©es dans le but de l'atteindre : Septimius Flaccus et Julius Maternus atteignent le « lac de l'hippopotame » (c'est ainsi que le lac Tchad est appelĂ© par Claude PtolĂ©mĂ©e). Ils partent de la cĂ´te tripolitaine et passent près du massif du Tibesti. Les deux font leurs expĂ©ditions Ă  travers le territoire des Garamantes, et sont en mesure de laisser une petite garnison sur le « lac de l'hippopotame et le rhinocĂ©ros » après 3 mois de voyage dans des terres dĂ©sertiques.

Ptolémée écrit qu'en l'an 50 Septimius Flaccus effectue son expédition dans le but d'exercer des représailles contre des pillards nomades qui s'attaquent à Leptis Magna, et qu'il atteint Sebha et le territoire d'Aozou[4]. Il a ensuite atteint les rivières Bahr Erguig, le Chari et le Logone dans la région du lac Tchad, décrit comme le "pays des Ethiopiens" (ou les hommes en noir) et appelé Agisymba.

  • l'expĂ©dition de Matiernus : PtolĂ©mĂ©e Ă©crit aussi qu'aux alentours de l'an 90 Julius Maternus (ou Matiernus) a effectuĂ© essentiellement une expĂ©dition commerciale. Ă€ partir du golfe de Syrte, il atteint l'oasis de Koufra et la guelta d'Archei, puis arrive, après 4 mois de voyage avec le roi des Garamantes, Ă  la rivière Bahr Salamat et le Bahr Aouk, près de l'actuelle RĂ©publique centrafricaine dans une rĂ©gion alors appelĂ©e Agisymba. Il retourna Ă  Rome avec un rhinocĂ©ros Ă  deux cornes, qui est montrĂ© dans le ColisĂ©e[5].

Selon Raffael Joorde, Maternus est un diplomate qui explore avec le roi des Garamantes le territoire au sud du massif du Tibesti, en mĂŞme temps que ce roi fait une campagne militaire contre des sujets rebelles ou pour des "razzias"[6].

Région de la rivière Niger

Cependant, certains historiens (comme Susan Raven[7]) pensent qu'il y eut encore une autre expédition romaine en Afrique subsaharienne centrale : celle de Valerius Festus, qui pourrait avoir atteint l'Afrique équatoriale grâce au fleuve Niger.

  • L'expĂ©dition de Festus : Pline Ă©crit[8] qu'en l'an 70 un lĂ©gat de la Legio III Augusta nommĂ© Festus reproduit l'expĂ©dition de Balbus vers le fleuve Niger. Il est allĂ© Ă  l'est du massif du Hoggar et entrent dans le massif de l'AĂŻr jusqu'Ă  la plaine de Gadoufaoua. Gadoufaoua (mot touareg pour “l'endroit oĂą les chameaux ont peur de se rendre”) est un site dans le dĂ©sert du TĂ©nĂ©rĂ© au Niger connu pour ses nombreux cimetières de fossiles de dinosaures, oĂą les vestiges du Sarcosuchus imperator ont Ă©tĂ© trouvĂ©s. Festus arrive finalement Ă  la zone de l'actuelle Tombouctou. Mais quelques universitaires, comme Fage[9], pensent qu'il n'a atteint que la rĂ©gion de Ghat dans le sud de la Libye, près de la frontière avec le sud de l'AlgĂ©rie et du Niger (toutefois, il est possible que quelques Ă©claireurs parmi ses lĂ©gionnaires aient atteint le fleuve Niger et soient allĂ©s dans la forĂŞt Ă©quatoriale au niveau de l'estuaire de la rivière, dans l'actuel Nigeria, comme cela s'est produit pour l'exploration du Nil sous NĂ©ron lorsque des centurions romains ont atteint le lac Victoria).

Explorations maritimes

Le roi vassal des Romains Juba II organise avec succès un commerce depuis la région de Volubilis. Pline l'Ancien, un auteur romain du 1er siècle et officier militaire, en s'appuyant sur les comptes-rendus de Juba II, roi de Maurétanie, déclare qu'une expédition romaine partie de Maurétanie a visité les îles de l'archipel des Canaries et de Madère vers l'an 10 et a trouvé beaucoup de ruines, mais pas de population, seuls les chiens (en raison de ces animaux, il appelle les îles à l'aide du mot Latin "canarius" ou "canis" pour le chien).

Selon Pline l'Ancien, une expĂ©dition de MaurĂ©taniens envoyĂ©e par Juba II sur l'archipel visite les Ă®les : lorsque le roi Juba II a envoyĂ© un contingent pour rouvrir une production de colorant Ă  Mogador (nom historique d'Essaouira, Maroc) au dĂ©but du 1er siècle de notre ère, la flotte de Juba a par la suite Ă©tĂ© envoyĂ©e pour explorer les ĂŽles Canaries, Madère et probablement les Ă®les du Cap Vert, utilisant Mogador comme base de dĂ©part.

Il est historiquement constaté que, selon Pline l'Ancien, le Grec Xénophon de Lampsacus a déclaré que les "Gorgades" (les îles du Cap Vert) sont situées à environ deux jours de "Hesperu Ceras" (aujourd'hui Cap-Vert), la partie la plus occidentale du continent africain, montrant ainsi une connaissance de la région par les Romains.

En outre, selon Pline l'Ancien et via sa citation par Gaius Julius Solin, le temps pour naviguer en mer des Gorgades (Cap Vert) vers les îles des Dames de l'Ouest ("les Hespérides"[10], actuelles São Tomé et Príncipe et Fernando Po) est d'environ 40 jours : ce fait a conduit les débats académiques à envisager la possibilité de la poursuite des voyages romains vers la Guinée et même le golfe de Guinée. Une pièce de monnaie romaine de l'empereur Trajan a été trouvée en République démocratique du Congo[11]. D'autres pièces de monnaie romaines ont été trouvées au Nigeria et au Niger, mais aussi en Guinée, au Togo et au Ghana. Cependant, il est beaucoup plus probable que toutes ces pièces ont été introduites à une date ultérieure plutôt qu'à la suite d'un rapport direct des Romains avec la côte ouest. Pas un seul article incontestablement originaire de l'Afrique au sud de l'Équateur n'a été découvert dans le monde gréco-romain ou en Arabie contemporaine, il n'y a aucune mention d'un tel article dans les écrits ; tandis que les pièces de monnaie sont les seuls articles anciens européens ou arabes qui aient été trouvés dans les régions du sud de l'Afrique[12].

En outre il doit être noté que l'empereur Auguste a décidé que la circumnavigation de l'Afrique devrait également être tentée (en l'an 1 avant Jésus-Christ). Les Romains ont deux avant-postes maritimes sur la côte atlantique de l'Afrique : Sala Colonia près de l'actuelle Rabat et Mogador dans le sud du Maroc (au nord d'Agadir). L'île de Mogador a prospéré à partir de l'industrie locale de colorant pourpre (très apprécié dans la Rome impériale) à partir du règne d'Auguste jusqu'à Septime Sévère. Auguste, après la découverte d'une épave de navire marchand provenant du sud de l'Hispanie (Espagne) dans la région de Djibouti (faite par son fils adoptif Gaius César, lorsqu'il naviguait vers Aden), a voulu organiser une expédition depuis l'Égypte vers Mogador et Sala autour de l'Afrique, qui n'a jamais porté ses fruits.

Articles connexes

Notes et références

  1. Des objets romains ont été trouvés au Sahara, de manière significative, le long des routes caravanières occidentales. De nombreux artéfacts romains ont été trouvés à Germa, capitale des Garamantes, dans le Fezzan. Des traces d'irrigation de style romain sont présentes et, pour une partie des Garamantes, l'adoption de la sédentarité et d'un mode de vie urbanisé. Le plus frappant est le large mausolée de style romain trouvé, preuve soit de la présence romaine soit d'une romanisation de l'élite. Entre Germa et Ghat dans le Hoggar ont été trouvées des céramiques romaines, verreries, bijoux et monnaies datant du Ier au IVe siècle. Plus loin sur la route, à l'oasis d'Abalessa, se trouve le site connu sous le nom de Tombeau de Tin Hinan. Il semble que c'est une forteresse, avec une pièce dans laquelle ont été trouvés le squelette d'une femme, ainsi que de nombreux objets romains tardifs, ce qui inclut une lampe, un bracelet doré et de la monnaie du IVe siècle. Un trésor de monnaie romaine a aussi été trouvé à Timissao à seulement 600 kilomètres du Niger. Heinemann-University of California-UNESCO (p. 514 Map)
  2. Roth, Jonathan 2002. The Roman Army in Tripolitana and Gold Trade with Sub-Saharan Africa. APA Annual Convention. New Orleans.
  3. Balbus expedition and successive expeditions, with map
  4. John Coleman De Graft-Johnson." African Glory: The Story of Vanished Negro Civilizations"; p. 26
  5. Agisymba and Maternus
  6. Raffael Joorde." Römische Vorstöße ins Innere Afrikas südlich der Sahara: die geheimnisvolle Landschaft Agisymba", Dortmund, 2015 ()
  7. Raven, Susan. Rome in Africa. 3rd ed. London, 1993 ()
  8. Pline l'Ancien. "Naturalis Historia", V, 5.36
  9. Cambridge History of Africa; p. 286
  10. Certains historiens estiment que les "Hespérides" de Solinus pourraient être les Antilles orientales.
  11. Kelly Christopher. Republic of Congo ("Italy invades" section)
  12. (en) Eric Anderson Walker, The Cambridge History of the British Empire, CUP Archive, , 69 p. (lire en ligne)

Bibliographie

  • Coleman De Graft-Johnson, John. African glory: the story of vanished Negro civilizations . Black Classic Press. New York, 1986 (ISBN 0933121032)
  • Fage, JD. The Cambridge History of Africa, volume 2. Cambridge University Press. Cambridge, 1979 (ISBN 0521215927)
  • Mattern, Susan. Rome and the enemy: imperial strategy in the principate . University of California Press. San Francisco, 2002 (ISBN 0520236831)
  • Miller, J. Innes. The Cinnamon Route in the Spice Trade of the Roman Empire. University Press. Oxford, 1996 (ISBN 0-19-814264-1)
  • Raven, Susan. Rome in Africa . Publisher Routledge. Londres, 2012 (ISBN 113489239X)
  • Roth, Jonathan. The logistics of the Roman Army at war (264 B.C. – A.D. 235) . Köln : Brill, 1998 (Columbia Studies in the classic tradition; Vol. 23) (ISBN 90-04-11271-5)
  • The Cambridge History of Africa, Volume 2 (from CA. 500 B.C. to A.D. 1050). Michael Crowder (& J. Fage). Cambridge University Press, 1975 ISBN (ISBN 052122215X)
  • Maurice Sartre, Le Bateau de Palmyre. Quand les mondes anciens se rencontraient, Tallandier, 2021 (ISBN 979-10-210-4683-2)
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