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Effet de mode

L’« effet de mode » (parfois aussi dénommé effet bandwagon : en anglais, bandwagon effect qui signifie en mot à mot sauter dans « le dernier wagon où joue l'orchestre ») définit l'effet d'un comportement grégaire où les individus se conduisent comme des moutons de Panurge. Soit le fait que certains esprits indécis finissent par prendre tardivement leur décision en imitant ce que pense ou fait la majorité.

Mode de l'année prochaine, caricature humoristique par Ch. Philipon, v. 1830, où figurent les futures robes courtes (v. 1960) et patt'd'éleph (v. 1970)

Il ne faut pas confondre un effet de mode avec un mouvement de mode. Le premier est davantage dans l'imitation, alors que le second dans la crĂ©ation. Un mouvement de mode est gĂ©nĂ©ralement inventĂ© par une jeune gĂ©nĂ©ration, regroupant un style particulier de musique, danse, attitudes, vĂŞtements, etc.[1] En France, il existe une infinitĂ© de modes au moins depuis le Moyen Ă‚ge : mignons, muguets, prĂ©cieuses, incroyables, merveilleuses, dandys, cocodettes, polkeuses, gandins, gommeux, zazous, existentialistes, branchĂ©s, BCBG, tecktoniks, etc.[2] Au XXe siècle, les mouvements de mode sont en majoritĂ© anglo-saxons et souvent liĂ©s Ă  un courant musical : rock, hippie, mods, punk, new wave, grunge, techno, etc. Les mouvements de mode « dĂ©veloppent, en complĂ©ment de la panoplie de leur parure, un langage, une Ă©thique et une esthĂ©tique spĂ©cifiques Â»[3].

Le phĂ©nomène d'effet de mode a notamment Ă©tĂ© employĂ© en science politique — dans les analyses des Ă©lections — pour caractĂ©riser les effets d'opinion provoquĂ©s par le comportement de certains Ă©lecteurs indĂ©cis qui en dernière minute votent comme la majoritĂ© prĂ©sumĂ©e et « ont tendance ainsi Ă  se ranger dans le camp de la victoire » pour jouir d'une sorte de valorisation sociale ou de satisfaction psychologique. En sens contraire, l'« effet outsider Â» ou « effet underdog », correspond Ă  la remobilisation d'Ă©lecteurs pour un candidat Ă  la lecture des sondages dĂ©favorables Ă  sa cause ou Ă  leur favori, voire Ă  soutenir le perdant annoncĂ©, par sympathie ou pitiĂ©[4].

DĂ©nomination

L’expression « courant de mode » est synonyme de « mouvement de mode ». En sociologie, on parle de sous-culture ou de subculture.

La locution « mouvement de mode Â» est dĂ©jĂ  prĂ©sente au XIXe siècle, mais dans le sens spĂ©cifique du livre Les Mouvements de mode expliquĂ©s aux parents, elle ne semble apparaĂ®tre que dans les annĂ©es 1970. Par exemple, on la retrouve en 1978 dans Punkitude de Jean Dominique Brierre et Ludwik Lewin[5] : « Le mouvement punk est nĂ© d’un refus qui s’organise autour d’un moyen d’expression privilĂ©giĂ© : la musique. Comme tous les mouvements qui l’ont prĂ©cĂ©dĂ©, il est le produit d’une sociĂ©tĂ© et contient toutes les contradictions de l’époque qui l’a fait naĂ®tre. » L'expression « mouvement de mode Â» a Ă©tĂ© popularisĂ©e par le livre Les Mouvements de mode expliquĂ©s aux parents de Hector Obalk, Alexandre Pasche et Alain Soral, paru en 1984, aux Ă©ditions Robert Laffont (ISBN 978 2221008782), rĂ©Ă©ditĂ© en format poche dans la collection Le Livre de poche, 1985.

À partir des années 1980 et jusqu'à aujourd'hui, elle est régulièrement employée dans des journaux, revues (comme Actuel), documentaires, sites, livres sur la mode, etc., comme dans Manière, mouvement, vêtement[6] ou Contre-culture de Jean Rouzaud[7].

Explications par la pression sociale

La pression sociale existe et incite au mimétisme, à un comportement conforme. Dans une situation ambiguë ou difficile à trancher, le choix de la majorité peut sembler d'autant plus acceptable qu'un grand nombre d'autres le partage.

La pression pour se conformer est alors si puissante qu'elle Ă©chappe Ă  toute forme de rationalitĂ© ou de critique. Des exemples d'utilisation de cet effet de mode sont « 4 docteurs sur 5 recommandent... Â», la claque dans un théâtre, les pièces de monnaie dans une sĂ©bile.

Dans le cas d'un groupe humain dans une situation incertaine, tout comportement ayant l'air accepté sera adopté. Cela explique pourquoi des passagers d'un bus restent immobiles durant un viol ou un meurtre. Il y a tellement de spectateurs que personne n'ose bouger. Chacun croit que puisque personne bouge, la situation n'est pas critique. Pour la même raison, il est plus difficile d'avoir de l'aide pour une panne de voiture sur une autoroute bondée que sur un petit chemin quasiment désertique. C'est l'ignorance de la conduite à tenir qui bloque l'action de la foule.

L'identification Ă  une autre personne, car « elle est comme nous Â» renforce notablement l'effet de mode. Les tĂ©moignages de gens ordinaires Ă  la tĂ©lĂ©vision en deviennent puissants. La tĂ©lĂ© rĂ©alitĂ© devient une rĂ©fĂ©rence pour les comportements Ă  adopter. Une leçon, un apprentissage est beaucoup plus facile Ă  accepter si l'enseignant est analogue Ă  l'Ă©lève. Cela s'observe avec la corrĂ©lation entre la publication en première page d'un suicide et une vague de suicides. Des matchs de boxe très violents ont un effet analogue. Les suivants imitent ce qu'ils ont lu.

L'effet de mode est une façon de compenser son ignorance dans une situation difficile. Il est souvent utile et permet de s'adapter à un groupe avant de le connaître.

Si un grand nombre de personnes pratiquent un comportement donné, il pourra être beaucoup plus facilement accepté. Cela donne une grande puissance aux films et à la télévision. Ces médias peuvent littéralement modeler une société. Un culte aberrant mais bien isolé des influences extérieures peut être jugé totalement rationnel sur la base de l'effet de mode. Ceci explique qu'il puisse être utilisé pour influencer volontairement des opinions, des comportements, des idées. Les stratégies de communication utilisent comme mode de persuasion la prescription, le témoignage de clients-référence, le recours aux leaders ou relais d'opinion, ou les techniques plus discutables du storytelling.

Les conséquences du mimétisme peuvent être néfastes : Les moutons de Panurge du Quart Livre de François Rabelais en sont une illustration. Le philosophe René Girard a mis en évidence le poids du mimétisme dans la vie sociale, pouvant engendrer pour se rassurer le phénomène de création du Bouc émissaire.

Pour Walter Benjamin, les modes ont une fonction sociale: « Les modes sont un médicament destiné à compenser à l'échelle collective les effets néfastes de l'oubli. Plus une époque est éphémère, plus elle est dans la dépendance de la mode ».

Source

  • La section Explications par la pression sociale a Ă©tĂ© Ă©crite Ă  partir du texte anglais http://www.media-studies.ca/articles/influence_ch4.htm. Ce n'est pas une traduction. Le texte anglais fait souvent rĂ©fĂ©rence au livre Cialdini, R. (1993) Influence: Science and practice (3e Ă©d.), New York: HarperCollins.

Notes et références

  1. La Mesure de l'Excellence, « Les mouvements de mode », sur lamesure.org, LA MESURE DE L’EXCELLENCE, (consulté le ).
  2. Richard Le Menn, Les Petits-maîtres de la mode, Paris, La Mesure de l'Excellence, (ISBN 9782955372500)
  3. Dictionnaire de la Mode, France, Encyclopaedia Universalis, (ISBN 9782341002202, lire en ligne)
  4. Nelly Haudegand, Pierre Lefébure, Dictionnaire des questions politiques, éditions de l'Atelier, (lire en ligne), p. 222.
  5. Dominique Brierre & Ludwik Lewin, Punkitude, France, Albin Michel et Rock & folk,
  6. Dominique Waquet & Marion Laporte, Manière, mouvement, vêtement, (lire en ligne)
  7. Jean Rouzaud, Contre-culture, Paris, Éditions Nova, (ISBN 1096681137)

Voir aussi

Bibliographie

Articles connexes

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