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Prescription (marketing)

En marketing, l'activité de prescription est le fait d'un tiers (le prescripteur), qui influence de manière plus ou moins forte le comportement ou les décisions d'un autre agent économique au travers du processus d'achat. Cette influence est d'autant plus forte que le prescripteur est réputé être source de bon conseil, à raison de son métier, de son activité, de son statut, de sa compétence, et/ou de sa personnalité.

L’activitĂ© de prescription repose sur la prĂ©sence d’un intermĂ©diaire ou prescripteur dans l’échange marchand. NĂ©anmoins, selon les auteurs, les thĂ©ories et les domaines applications, le champ d’usage de ces notions peut varier.

Prescripteur relatif

La prescription ne s'exerce pas de manière impérative, mais seulement indicative et consultative. Exemple : Un moniteur de ski peut prescrire à ses élèves l'achat de tel ou tel type de matériel (les consignes données visent à orienter et conforter le choix de l'élève plutôt qu'à lui imposer une solution unique).

Prescripteur absolu

La prescription s'exerce de manière impérative. Exemple : Un médecin prescrit à son patient les médicaments qu'il estime être les plus adaptés à son état. (Le patient est censé faire confiance à son praticien)

Fondements et disciplines de la prescription

La prescription marchande repose sur les travaux en science de gestion concernant le fonctionnement du marchĂ©. Les domaines d'Ă©tudes sur ce sujet ont des points de vue divergents. NĂ©anmoins les Ă©tudes et recherches sur le sujet ont traversĂ© les disciplines et se sont complĂ©mentarisĂ©s.

En Ă©conomie

La prescription est une notion introduite par le biais de travaux d'Ă©tudes sociologiques ainsi qu'en sciences de gestion, en prolongement Ă  celles rĂ©alisĂ©es en Ă©conomie sur la construction de la valeur marchande. Dans la perspective Ă©conomique, la valeur d'un bien rĂ©sulte de l'Ă©quilibre de marchĂ© dĂ©finit par l'offre et la demande et se rĂ©sume principalement au prix. La question de la qualitĂ© n'a donc pas Ă©tĂ© traitĂ©e car ce modèle suppose une homogĂ©nĂ©itĂ© de la qualitĂ© ainsi qu'une perfection de l'information.

En sociologie

Les sociologues se sont intéressés à la construction sociale de la valeur marchande. Dans le cadre du marché, cela suppose un accord entre les parties sur la qualité du bien et la traduction de cette qualité en prix. Les théories sociologiques remettent en cause les hypothèses économiques de marché concernant la qualité homogène des biens et la symétrie d'information.

Georges Akerlof (Market for Lemon[1]-1970), introduit le concept d'asymĂ©trie d'informations entre les offreurs et les demandeurs sur le marchĂ© des voitures d'occasion. Ses travaux dĂ©montrent que lors du processus d'achat, les offreurs ont une connaissance plus importante que les demandeurs sur la qualitĂ© des biens en vente. Cette asymĂ©trie d'information dĂ©montre que le prix n'est pas une assurance de la qualitĂ© d'un bien et que d'autres variables sont en cause. Ă€ partir de ses travaux, il met en lumière la nĂ©cessitĂ© de rĂ©duire l'incertitude afin de minimiser les consĂ©quences de cette asymĂ©trie sur le fonctionnement du marchĂ© (modification qui pourrait avoir pour consĂ©quence la disparition du marchĂ©).

Les travaux d'Akerlof mettent donc en Ă©vidence la complexitĂ© des marchĂ©s et la nĂ©cessitĂ© d'introduire des organisations sociales[1] qui participeraient Ă  la rĂ©gulation des Ă©changes.

En science de Gestion

Dans le prolongement des travaux d'Akerlof en sociologie, Armand Hatchuel (L'inscription sociale du marchĂ© -1995) souligne donc la diffĂ©rence de connaissances et savoirs entre les agents Ă©conomiques dans ses travaux en science de gestion. Ă€ partir de ce postulat, il est le premier Ă  introduire la notion de prescription au centre des Ă©changes marchands[2]. Il justifie son propos au travers des trois phases de la situation d'achat qu'il juge dans son ensemble complexe pour l’acquĂ©reur (reprĂ©sentation, usage et apprĂ©ciation du bien)[3]. Il est donc nĂ©cessaire que l'acheteur bĂ©nĂ©ficie de connaissances et surtout de confiance envers le vendeur auquel cas il aura recours Ă  un prescripteur (qui lui aussi aura besoin d'informations tout en ayant conscience des intĂ©rĂŞts de l'offreur)[4]. Il aborde Ă©galement la notion de prescription rĂ©ciproque, cela s'apparente Ă  un Ă©change de savoirs entre agents qui partagent des connaissances sur des Ă©lĂ©ments qui diffèrent.

Hatchuel modĂ©lise la prescription en trois dimensions de forme et de nature diffĂ©rentes [3]:

  • Prescription de fait : ce sont des informations neutres qui vont dĂ©crire le produit sans chercher Ă  mettre en avant les bĂ©nĂ©fices de celui-ci. Nous pouvons les apparenter aux caractĂ©ristiques du produits (Poids, taille, couleur...).
  • Prescription technique :cela correspond aux usages et pratiques possibles du bien. Ce sont des notions techniques initialement inconnues de l'acheteur[4].
  • Prescription de jugement : comme son nom l'indique c'est une opinion sur la manière de l'acquĂ©rir et de l'apprĂ©cier. C'est une manière d'Ă©valuer le bien. (Ex: les Ă©toiles du guide Michelin)

Évolutions et perspectives

À partir des travaux d'Armand Hatchuel, de nombreux scientifiques ont continué à compléter la théorie de la prescription en l'adaptant aux évolutions de consommation.

La prescription et e-commerce

Stenger. T, (2006, 2008) apprĂ©hende la prescription au travers de la vente en ligne et propose un complĂ©ment Ă  la vision d'Hatchuel sur les trois formes de prescription initiales. C'est au travers de la vente de vin et de la prescription des professionnels de ce secteur qu'il analyse les rapports de prescription et propose un cadre des sept dimensions de la prescription [5]

Dimension de la prescription Types ou degrés
Formes : Hatchuel 1995[3] De fait, technique, de jugement
Intensité de la prescription Nulle à forte

(Plus l'acheteur laisse le prescripteur le guider, plus l'intensité est forte)

Source Un tiers, le client ou le vendeur
CompĂ©tences requises chez l'acheteur : Nulle Ă  forte

(Plus le produit sera technique, plus les compétences requises seront fortes)

Portée De locale à globale

(Si elle s'adresse à une catégorie (Locale) ou l'ensemble des produits (globale))

Le niveau d'intervention Le moment du parcours client / d'achat oĂą intervient la prescription.

(Reconnaissance du besoin / Recherche d'informations / Évaluation des alternatives / Choix d'un produit / Analyse post achat)[6]

Les opérations vis-à-vis des possibles Réduction ou élargissement

(Ce sont les solutions envisageables, propositions d'offres alternatives)

La multi-interprétation de la prescription

De nombreux auteurs tentent de traiter du sujet de la prescription et de nombreuses disparitĂ©s sont Ă  souligner. Hatchuel (1995) traite de la prescription au travers de la relation marchande, le prescripteur a donc ici une fonction exclusivement cognitive. Benghozi et Paris (2003) abordent la prescription sous l'angle d'une comparaison avec l'intermĂ©diation sur le marchĂ© des tĂ©lĂ©visions et y ajoute une dimension marchande (le prescripteur n'a pas pour seule fonction d'informer) et Stenger propose un cadre conceptuel de la prescription adaptĂ© Ă  la vente en ligne en ajoutant Ă  celle de Hatchuel, plusieurs autres dimensions.

Notes et références

  1. (en) Georges Akerlof, « « The Market for "Lemons": Quality Uncertainty and the Market Mechanism », », The Quarterly Journal of Economics Vol. 84, No. 3,‎ , p. 488-500 (lire en ligne)
  2. Armand Hatchuel, Activité marchande sans le marché? Colloque de Cerisy, Paris, Presses des Mines, , 385 p. (ISBN 978-2-911256-21-9, lire en ligne), p. 159-179
  3. Armand Hatchuel, L'inscription sociale du marché "Les marchés à prescripteurs", Paris, L'Harmattan, , 296 p (ISBN 2-7384-3145-3), p. 205-225
  4. Thomas Stenger, E-marketing & E-commerce, Dunod, , 382 p, p. 265 p
  5. Stenger Thomas,, « « La prescription dans le commerce en ligne : proposition d'un cadre conceptuel issu de la vente de vin par internet » », Revue française de Gestion,‎
  6. Lamour Corrine, « « Prescription d'achats et style de décision : Une comparaison interculturelle sur le marché des aliments pour animaux de compagnie » », Thèse de l'université de Rennes 1,,‎ , p. 17/516p

Voir aussi

Bibliographie

  • Akerlof GThe market for Lemons : Quality uncertainty and the Market mechanism, The Quarterly Journal of Economics, Vol 84
  • Benghozi P.J & Paris.TDe l'intermĂ©diation Ă  la prescription : le cas de la tĂ©lĂ©vision, Revue Française de Gestion, 2003, no 142.
  • Belvaux B & Marteau SLes recommandations d'internautes comme source d'information, Les formes alternatives de communication en marketing, 2007, Vol 22 no 3
  • Hatchuel AApprentissage collectifs et activitĂ©s de conception, Revue Française de gestion, 1994,Vol 41,
  • Hatchuel A. Verin H, Jacob A., L'inscription sociale du marchĂ©, "les marchĂ©s Ă  prescripteurs", L'Harmattan, 1995, 296p
  • Hatchuel A.Rapports de prescription et conception collective du travail dans "Des pratiques en reflexion: 10 ans de dĂ©bats sur l'intervention ergonomique", Octares, 2003
  • Hatchuel A, ActivitĂ© marchande et prescription : Ă€ quoi sert la notion de marchĂ© dans "L'activitĂ© marchande sans le marchĂ©", 2010
  • Lamour C, Sarlandie de la Robertie C, Cliquet GPrescription d'achats complexe : propositions de dĂ©finitions et d'un modèle, International Marketing Trends ConfĂ©rence, Paris
  • Stenger TLa prescription dans le commerce en ligne : proposition d'un cadre conceptuel issu de la vente de vin par internet, Revue française du Marketing, no 209, 2006
  • Stenger T. Coutant ALa prescription ordinaire de la consommation sur les rĂ©seaux sociaux numĂ©riques : De la sociabilitĂ© en ligne Ă  la consommation, IAE de l'universitĂ© de Poitiers 2008-2009
  • Stenger T. E-Marketing et E-commerce, Dunod, 2011,

Articles connexes

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