Compressibilité
La compressibilitĂ© est une caractĂ©ristique d'un corps quantifiant sa variation relative de volume sous l'effet d'une pression appliquĂ©e. La compressibilitĂ© est une grandeur intensive homogĂšne avec l'inverse d'une pression, elle s'exprime en Paâ1 (Pa Ă©tant le pascal).
Unités SI | Pa-1 |
---|---|
Dimension | Mââ1·L·Tâ2 |
Nature | Grandeur tensorielle intensive |
Symbole usuel | , , Ă constant |
Lien Ă d'autres grandeurs |
Cette dĂ©finition doit ĂȘtre complĂ©tĂ©e car sous l'effet d'une compression les corps ont tendance Ă s'Ă©chauffer. On dĂ©finit donc une compressibilitĂ© isotherme, pour un corps restant Ă tempĂ©rature constante, et une compressibilitĂ© isentropique (ou adiabatique), pour un corps restant Ă entropie constante. Les deux coefficients ainsi dĂ©finis sont reliĂ©s aux capacitĂ©s thermiques du corps par la relation de Reech.
Le deuxiĂšme principe de la thermodynamique induit que la compressibilitĂ© d'un corps stable ne peut ĂȘtre que positive : le volume d'un corps doit diminuer lorsque l'on augmente la pression. Une compressibilitĂ© nĂ©gative ou nulle induit un corps instable, Ă moins que cette instabilitĂ© ne soit compensĂ©e par d'autres phĂ©nomĂšnes ou forces : une telle propriĂ©tĂ© est donc difficile Ă observer. La compressibilitĂ© est une propriĂ©tĂ© tensorielle, elle dĂ©pend de la direction dans laquelle la force de pression est appliquĂ©e. Des cas de compressibilitĂ© nĂ©gative dans une (compressibilitĂ© linĂ©aire) ou deux (compressibilitĂ© planaire) directions ont Ă©tĂ© observĂ©es expĂ©rimentalement, la trace du tenseur restant cependant positive.
La compressibilitĂ© isotherme des gaz est trĂšs Ă©levĂ©e (10â5 Ă 10â6 Paâ1), elle est faible pour les liquides (10â6 Ă 10â10 Paâ1) et trĂšs faible pour les solides (10â10 Ă 10â12 Paâ1)[1].
DĂ©finitions
Coefficient de compressibilité isotherme
Le coefficient de compressibilité isotherme, que l'on note le plus souvent (le Green Book de l'UICPA, page 56, préconise la notation ), est défini par la relation :
ou encore, en fonction de la masse volumique :
avec :
- la pression ;
- la température absolue ;
- le volume ;
- la masse volumique.
Coefficient de compressibilité isentropique
Le coefficient de compressibilité isentropique, que l'on note le plus souvent (le Green Book de l'UICPA, p. 56, préconise la notation ), est défini par la relation :
avec :
- la pression ;
- l'entropie ;
- la température absolue ;
- le volume.
Relations avec les coefficients de compressibilité
Relations avec la compressibilité isotherme
Puisque l'on a la relation :
on a :
avec l'enthalpie libre.
En considérant d'autre part que :
on a :
avec l'Ă©nergie libre.
Le coefficient de compressibilité isotherme entre dans la forme différentielle du volume d'un mélange :
avec :
- le coefficient de dilatation isobare ;
- la quantité ou nombre de moles du composant ;
- le volume molaire partiel du composant .
Si les quantités de matiÚre sont constantes on a : .
Le coefficient de compressibilité isotherme est également lié au coefficient de compression isochore par la relation :
Le coefficient de compressibilité isotherme est égal à l'inverse du module d'élasticité isostatique du milieu, généralement noté , aussi appelé module d'incompressibilité :
Le coefficient de compressibilité isotherme entre aussi dans la relation de Mayer générale :
avec :
Relations avec la compressibilité isentropique
Puisque l'on a la relation :
on a :
avec l'enthalpie.
En considérant d'autre part que :
on a :
avec l'Ă©nergie interne.
Le coefficient de compressibilité isentropique entre dans la forme différentielle du volume d'un mélange à composition constante :
avec l'un des coefficients calorimétriques (sans nom).
Ce coefficient entre dans l'expression de la vitesse du son dans un fluide :
avec la masse volumique du fluide.
Stabilité thermodynamique
Soit un systĂšme thermodynamique soumis au travail d'une pression extĂ©rieure constante. On suppose le systĂšme et le milieu extĂ©rieur Ă l'Ă©quilibre thermique permanent (mĂȘme tempĂ©rature) et que cette tempĂ©rature est constante. La variation de l'Ă©nergie interne du systĂšme vaut :
à température constante, on a, en introduisant l'énergie libre :
La pression extérieure étant constante, on a :
Le deuxiĂšme principe de la thermodynamique implique que le terme , ou chaleur non compensĂ©e de Clausius, ne peut ĂȘtre que positif ou nul dans une transformation spontanĂ©e et par consĂ©quent :
à température constante, lorsque le corps est soumis à une pression extérieure constante, la fonction ne peut donc que décroitre. à l'équilibre, si la fonction pouvait continuer à décroßtre alors toute perturbation relancerait la transformation, l'équilibre serait instable ou métastable. Toute évolution aprÚs l'équilibre ne peut par conséquent entrainer qu'une croissance de la fonction, interdite par le deuxiÚme principe. Un équilibre stable est donc atteint lorsque la fonction atteint un minimum : la fonction ne peut plus évoluer.
La fonction ayant pour variables naturelles le volume et la température , la fonction , à température constante, a pour seule variable . Pour que l'équilibre soit stable, la fonction doit donc répondre à :
- (condition d'Ă©quilibre : la fonction ne varie plus) ;
- (condition de stabilité : la fonction est à un minimum).
La dĂ©rivĂ©e seconde doit ĂȘtre positive strictement. Si la dĂ©rivĂ©e seconde est nulle, l'Ă©quilibre est mĂ©tastable, mathĂ©matiquement il s'agit d'un point d'inflexion de la fonction ; si elle est nĂ©gative, l'Ă©quilibre est instable, il s'agit d'un maximum de la fonction.
En considérant la dérivée partielle de l'énergie libre :
on a Ă l'Ă©quilibre stable :
On en dĂ©duit qu'un corps Ă l'Ă©quilibre ne peut ĂȘtre stable qu'Ă la pression et que si sa compressibilitĂ© est positive strictement[2] :
Autrement dit, un corps ne peut ĂȘtre stable que si son volume diminue lorsque la pression augmente.
Un raisonnement identique à entropie constante (soit ) au lieu de température constante, en utilisant l'énergie interne à la place de l'énergie libre conduit à la condition de stabilité[2] :
La thermodynamique n'interdit pas que le volume d'un corps puisse augmenter avec une augmentation de pression, et donc que sa compressibilitĂ© soit nĂ©gative. Un tel corps serait cependant instable et par consĂ©quent difficile Ă observer, Ă moins que d'autres phĂ©nomĂšnes ou forces que la pression compensent cette instabilitĂ©. Toutefois cette propriĂ©tĂ© est tensorielle, elle peut dĂ©pendre de la direction dans laquelle la force de pression est appliquĂ©e ; trois valeurs propres diffĂ©rentes peuvent ĂȘtre observĂ©es, le tenseur Ă©tant alors anisotrope. Des compressibilitĂ©s nĂ©gatives linĂ©aires (une valeur propre) ou planaires (deux valeurs propres) ont Ă©tĂ© observĂ©es sur des mousses mĂ©talliques et des cristaux composĂ©s d'eau et de mĂ©thanol, ces phĂ©nomĂšnes Ă©tant expliquĂ©s par l'architecture des cristaux Ă l'Ă©chelle molĂ©culaire[3] - [4] - [5]. La trace du tenseur (la somme des trois valeurs propres) reste cependant positive, assurant la stabilitĂ© thermodynamique.
Relation de Reech
La relation de Reech relie le rapport des capacités thermiques au rapport des coefficients de compressibilité :
avec :
- le coefficient de Laplace (adimensionnel), utilisé dans la loi de Laplace ;
- la capacité thermique isobare (en J/K) ;
- la capacité thermique isochore (en J/K).
Puisque , la relation de Mayer montre que . Par conséquent la relation de Reech montre que :
Cas d'un gaz parfait
Dans le cas d'un gaz parfait, on applique l'Ă©quation :
avec :
- la pression ;
- le volume ;
- la quantité de matiÚre (en moles) ;
- la constante universelle des gaz parfaits ;
- la température absolue.
On a donc :
et enfin :
Avec la relation de Reech et la relation de Mayer on a par conséquent :
avec :
- la capacité thermique isobare (en J/K) ;
- le coefficient de Laplace (adimensionnel).
Notes et références
Références
- Jean-Marie Perrier-Cornet, Marwen Moussa et Patrick Gervais, Applications des Hautes Pressions Hydrostatiques en Agroalimentaire, vol. F 3 225, Ăditions techniques de l'ingĂ©nieur, (lire en ligne), p. 4.
- Olivier Bonnefoy, Ăcole nationale supĂ©rieure des mines de Saint-Ătienne, « Thermodynamique » [PDF] (consultĂ© le ), p. 49.
- Compressibilité négative, A. Fortes et al., revue La Recherche, mensuel N°451, avril 2011.
- Un matériau aux propriétés contre-intuitives, Maurice Mashaal, revue Pour la science, 25/02/2011.
- Compressibilité linéaire négative géante dans le dicyanoaurate de zinc, site du CNRS - Institut de chimie, 20 février 2013.
Bibliographie
- Gérard Lesoult, Thermodynamique des matériaux : de l'élaboration des matériaux à la genÚse des microstructures, vol. TM 5, Lausanne, Presses Polytechniques Universitaires Romandes (PPUR), coll. « Traité des Matériaux », , 1073 p. (ISBN 978-2-88-074-690-2, lire en ligne), paragraphe 3.6.3.