Cartographie hydrogéomorphologique
La cartographie hydrogĂ©omorphologique (HGM) est une mĂ©thode de cartographie des zones inondable qui sâappuie sur une interprĂ©tation gĂ©omorphologique des plaines alluviale. Elle permet grĂące Ă son approche naturaliste de spatialiser une emprise maximale des inondations par dĂ©bordement de cours d'eau ou par ruissellements.
Fondements scientifiques
Spatialiser les zones inondables en analysant la gĂ©omorphologie de la plaine alluviale est un principe que plusieurs gĂ©ographes et gĂ©omorphologues du XXe siĂšcle mettent en avant. En France, Jean Tricart propose dĂšs 1960 de distinguer plusieurs lits fluviaux, qui se dĂ©tachent du versant [1]. Dans la littĂ©rature anglo-saxonne, des auteurs s'intĂ©ressent Ă©galement Ă la possibilitĂ© de dĂ©limiter les zones inondables grĂące Ă la gĂ©omorphologie. Dans le but d'amener une alternative Ă l'approche hydraulicienne de l'alĂ©a inondation, Wolman[2] propose d'analyser les formes de la plaine alluviale et de l'associer Ă l'analyse de la vĂ©gĂ©tation et de la pĂ©dologie, et de favorise ainsi une vision naturaliste de la plaine alluviale. Victor R. Baker souhaite relier directement lâinterprĂ©tation de la gĂ©omorphologie des zones inondables Ă des crues historiques. Il dĂ©montre que lâextension de la crue de 1952 qui touche la riviĂšre Pedernales au Texas est dĂ©limitĂ©e par un conglomĂ©rat. Il met en Ă©vidence la relation entre zone inondable et interprĂ©tation gĂ©omorphologique. Il prĂ©conise dâutiliser cette approche Ă une Ă©chelle rĂ©gionale en prĂ©textant un coĂ»t relativement faible et une rapiditĂ© dâexĂ©cution.
LâinterprĂ©tation des unitĂ©s hydrogĂ©omorphologiques repose sur deux hypothĂšses. La premiĂšre dâentre elles suppose la stabilitĂ© depuis le dĂ©but de lâHolocĂšne (â 10000 BP) du systĂšme fluvial qui a mis en place la plaine alluviale active (lit majeur, lit moyen et lit mineur). La seconde considĂšre que les surfaces qui la composent sont susceptibles dâĂȘtre Ă nouveau inondĂ©es[3].
La cartographie hydrogĂ©omorphologique est issue d'une discipline scientifique : la gĂ©omorphologie, Science qui Ă©tudie, dĂ©crit et interprĂšte les formes du relief terrestre. Elle se divise en plusieurs branches, dont la gĂ©omorphologie fluviale qui Ă©tudie la formation et le fonctionnement des plaines alluviales des cours dâeau sur lequel se fonde la cartographie hydrogĂ©omorphologique, mĂ©thode appliquĂ©e au diagnostic des zones inondables[4].
Les principes de la cartographie HGM
Câest une approche qualifiĂ©e de « naturaliste » car elle se fonde principalement sur lâobservation et lâinterprĂ©tation du terrain naturel. Une plaine alluviale est composĂ©e de plusieurs unitĂ©s hydrogĂ©omorphologiques : ce sont les diffĂ©rents lits topographiques que la riviĂšre a façonnĂ©s dans le fond de vallĂ©e au fil des siĂšcles, au fur et Ă mesure des crues successives. Ces lits rĂ©sultent dâune combinaison entre les phĂ©nomĂšnes dâaccumulation des sĂ©diments et leur Ă©rosion. En effet, chaque crue dĂ©pose des matĂ©riaux dans certains secteurs, tandis quâelle Ă©rode ailleurs. Câest le rapport entre ces deux phĂ©nomĂšnes qui prĂ©side au façonnement progressif des diffĂ©rentes unitĂ©s. Lâaccumulation dans le temps des sĂ©diments construit les lits hydrogĂ©omorphologiques tandis que lâĂ©rosion marque leurs limites (talus) et modĂšle leur surface[5].
LâĂ©tude de ces unitĂ©s hydrogĂ©omorphologiques constitue la base de la mĂ©thode. Elles sont des tĂ©moins des crues passĂ©es et rĂ©centes dont elles traduisent le fonctionnement et lâextension, ce qui permet dâidentifier les zones inondables correspondantes. Plusieurs grandes crues en 1992 (Vaison-la-Romaine), 1999 et 2018 (Aude) et 2002 (Gard), 2010 (Var) ont rempli les plaines alluviales et validĂ© ainsi lâutilisation de la mĂ©thode pour dĂ©limiter les zones inondables actuelles.
Les critĂšres d'identification de la zone inondable
- la géologie : l'analyse des cartes géologiques et des formations rencontrées constitue une porte d'entrée indispensable pour comprendre les formes rencontrées sur le terrain. La visibilité d'un escarpement calcaire proche d'un cours d'eau constitue par exemple une limite de zone inondable nette.
- La morphologie : reconnaissance des talus, des ruptures de pente, des micro-topographies, de toutes les structures topographiques. Une zone inondable demeure une surface sub horizontale, car construite par sédimentation des limons de crue, donc toute rupture de pente est susceptible d'indiquer un changement d'unité géomorphologique.
- La sédimentologie : analyse de la granulométrie, de la nature, de la couleur des formations superficielles, étude des coupes naturelles dans les terrains. La granulométrie des sédiments fournit une indication sur les vitesses des courants qui les ont déposés.
- Les traces dâinondation : laisses de crues, Ă©rosions, dĂ©pĂŽts de sĂ©diments dans le lit majeur, traces des courants sur les photographies aĂ©riennes.
- La vĂ©gĂ©tation : une vĂ©gĂ©tation hygrophile (Saule, Aulne, FrĂȘne, Peuplier...) typique des ripisylve indique la prĂ©sence d'eau dans le sol et constitue un bon indicateur de l'inondabilitĂ© d'une zone. Par opposition, la prĂ©sence d'espĂšce xĂ©rophiles (ChĂȘne vert, Pin d'Alep, Romarin, Sauge SclarĂ©e...).
- Par ailleurs, lâanalyse des crues historiques fournit des informations qui permettent de confirmer lâĂ©tude hydrogĂ©omorphologique. Par exemple, la prĂ©sence d'un repĂšre de crue constitue un indice solide pour valider une zone inondable.RepĂšre de crue de la Loire
Les critÚres d'identification de la zone de mobilité latérale
L'interprétation des unités
Application de la méthode dans différents pays
Canada
Au Québec,
Ătats-Unis
Dans l'Ă©tat du Vermont,
Notes et références
- Jean Tricart, « Les types de lits fluviaux », L'information gĂ©ographique, no 24,â (lire en ligne)
- (en) Wolman, « Evaluating Alternative Techniques Floodplain Mapping », Water Resources Research, no 7,â , p. 1383-1392
- Jean-Louis Ballais, « La mĂ©thode hydrogĂ©omorphologique de dĂ©termination des zones inondables », Physio-GĂ©o,â , p. 168 (lire en ligne)
- DIREN PACA, L'approche hydrogéomorphologique en milieux méditerranéens. Une méthode de détermination des zones inondables, , 66 p. (lire en ligne)
- Marcel Masson, Gérald Garry et Jean-Louis Ballais, Cartographie des zones inondables. Approche hydrogéomorphologique, Les Editions Villes et Territoires, (lire en ligne)