Appareil stridulatoire de l'araignée
L'appareil stridulatoire des Araignées est une différenciation spéciale de leur tégument, paire, symétrique et pouvant occuper une position trÚs variée sur le corps araneidien. Censé pour la plupart des auteurs produire des sons, il peut intervenir dans l'équilibration, ce que confirme l'étude ultrastructurale, notamment chez les Argyrodes (Theridiidae). Dans ce genre, son aire se localise au niveau du pédicule sur la partie postérieure de prosoma et l'avant de l'abdomen (ci-contre).
Introduction
Il est bien connu que des Myriapodes, certains CrustacĂ©s (Busnel, 1963) et surtout, un grand nombre dâ Insectes appartenant Ă des ordres variĂ©s (HomoptĂšres, OrthoptĂšres, LĂ©pidoptĂšres tels que Parnassius mnemosyneâŠ) peuvent Ă©mettre des sons.
Divers Arachnides en produisent aussi mais ce phĂ©nomĂšne est gĂ©nĂ©ralement insoupçonnĂ© car les vibrations sonores ne sont perceptibles par les Humains que dans de rares cas. Il est ainsi dĂ©crit chez les Scorpiones, les Solifuges (in Berland, 1932) et, en ce qui concerne plus directement cet article, dans lâordre des AranĂ©ides.
La production de sons par les AraignĂ©es a Ă©tĂ© constatĂ©e pour la premiĂšre fois il y a plus de 130 ans, lorsque Wood-Mason (1876) [1]signala quâune grande Mygale de lâInde et Birmanie, Chilobrachys stridulans, peut ĂȘtre Ă la source dâun bruit que lâHomme perçoit Ă distance.
Il existe chez les AraignĂ©es trois mĂ©thodes pour produire des sons, ou, si lâon prĂ©fĂšre, trois types dâĂ©missions sonores : la vibration dâappendices, la percussion du substrat et la stridulation.
La vibration des pattes a été mise en évidence par Rovner (1980)[2] chez la grosse Araignée cosmotropicale Heteropoda venatoria (Eusparassidae). Elle se produirait aussi chez les Ctenidae dont le genre Phoneutria.
Encore appelĂ©e «tambourinage» («drumming» chez les auteurs anglophones), la percussion du substrat est rĂ©alisĂ©e avec les palpes, les pattes et (ou) lâabdomen.Elle a Ă©tĂ© dĂ©couverte chez des Alopecosa nord-amĂ©ricaines et, par la suite, observĂ©e bien souvent chez dâautres Lycosidae, les Clubionidae, les Anyphaenidae, les Ctenidae, les Thomisidae et les Salticidae (revue in Uetz & Stratton, 1982)[3].
Stridulation
La stridulation, ou supposĂ©e telle, existerait dans prĂšs dâune trentaine de familles dâAraignĂ©es.
Selon Busnel (1963)[4], elle peut ĂȘtre dĂ©finie chez tous les Arthopodes comme un moyen de production sonore qui met en jeu le frottement de deux parties rigides du corps lâune contre lâautre. Pourvues dâune surface tĂ©gumentaire spĂ©ciale, diffĂ©renciĂ©e, ces deux parties constituent lâorgane ou appareil stridulatoire.
Le son Ă©mis chez les AraignĂ©es nâest audible sans amplificateur que dans quelques cas privilĂ©giĂ©s. Lâoreille humaine le perçoit alors de trĂšs prĂšs (20 cm maximum) chez certains petits Theridiidae tels que Steatoda bipunctata (Meyer, 1928)[5], Ă la distance de 1 m. dans le cas de Micrathena gracilis (Araneidae)(Uetz & Stratton, 1982)[3] et jusquâĂ 2 ou 3 ms lorsquâune Mygale gĂ©ante comme Theraphosa leblondi , de Guyane française, se met Ă striduler (Lopez, 1989)[6].
On le dĂ©crit de maniĂšre imagĂ©e comme un bourdonnement (Sicarius, Micrathena), un cliquetis mĂ©tallique, un sifflement (Mygales), un grincement ou le bruit obtenu en frottant les dents dâun peigne avec lâongle ou un couteau. Il peut ĂȘtre mĂȘme enregistrĂ© et analysĂ© au laboratoire oĂč des sonogrammes et oscillogrammes ont Ă©tĂ© obtenus dans divers groupes araneidiens (Uetz & Stratton, 1982)[3].
Les vibrations qui le composent seraient transmises par lâair, par le substrat jouant le rĂŽle dâune table dâharmonie, et perçues ensuite par les autres AraignĂ©es de mĂȘme espĂšce, peut ĂȘtre aussi dâespĂšces diffĂ©rentes, ou par des prĂ©dateurs Ă©ventuels.
Chez les AraignĂ©es, cette mĂȘme perception est dĂ©volue Ă des organes sensoriels spĂ©ciaux, les trichobothries et les sensilles Ă fentes («slit sensilla») qui siĂšgent sur les pattes. Barth (1967) lâa dĂ©montrĂ©e sur les plans Ă©thologique et Ă©lectrophysiologique.
La signification des sons produits est trÚs discutée.
- Valeur sexuelle lorsque la stridulation nâexiste que chez le mĂąle. Ils pourraient alors faciliter lâaccouplement comme câest le cas, semble-t-il, chez les Theridiidae Teutana grossa et Steatoda bipunctata (Gwinner-Hanke, 1970)[7].
- Valeur prĂ©monitrice lorsque le son est Ă©mis par les deux sexes et semble reprĂ©senter un moyen dâintimidation. Il protĂšgerait lâAraignĂ©e contre ses ennemis naturels (Homme compris) en crĂ©ant un effet de surprise. Une telle fonction semble Ă peu prĂšs certaine dans le cas particulier des Mygalomorphes et des Micrathena.
Quoi quâil en soit, une stridulation effective nâest que rarement constatĂ©e «de auditu ». Lâappellation pourtant trĂšs suggestive de certaines espĂšces dâArgyrodes (Theridiidae : A.stridulator, A.ululans) semble avoir Ă©tĂ© inspirĂ©e Ă leurs descripteurs, dont Lawrence (1937)[8], non par la perception dâun bruit quâelles auraient Ă©mis, mais par lâobservation de crĂȘtes prĂ©sumĂ©es stridulatoires («stridulatory ridges»)
Chez la plupart des AraignĂ©es, lâexistence dâune stridulation est seulement prĂ©sumĂ©e lorsquâelles possĂšdent un appareil tĂ©gumentaire rĂ©pondant Ă la dĂ©finition gĂ©nĂ©rale de Busnel (1963)[4], censĂ© stridulatoire et que lâon estime capable de produire des sons.
Anatomie générale et classification
Lâappareil stridulatoire des araignĂ©es, nom que nous adoptons ici faute de termes plus appropriĂ©s, est une diffĂ©renciation spĂ©ciale de leur tĂ©gument, paire, symĂ©trique et pouvant occuper une position trĂšs variĂ©e sur le corps araneidien.
Comme chez les autres Arthropodes, il comporte toujours deux parties bien distinctes, dites «antagonistes», visibles à la loupe binoculaire et surtout, au microscope électronique à balayage (M.E.B.), moyen de recherche incomparable.
- La «lyre» ou «rape» («file» des auteurs de langue anglaise), noms dĂ©sormais consacrĂ©s par lâusage, est fixe, passive et se prĂ©sente comme un ensemble de rides, crĂȘtes (Fig. 1 Ă 3,5), rugositĂ©s diverses ou mĂȘme, de tigelles vibrantes.
- L'"archet", «peigne» ou «racloir» («scraper» des anglo-saxons), autres termes définitifs, est mobile, actif et formé par des dents, des épines, des tubercules chitineux (Fig.17 à 20) ou des soies rigides (Fig.8).
- L'archet frotte contre la lyre, ce jeu mĂ©canique Ă©tant responsable soit dâune Ă©mission sonore prĂ©sumĂ©e ou avĂ©rĂ©e, soit, du moins chez les Theridiidae Argyrodes, dâune stimulation nerveuse inĂ©dite et beaucoup plus subtile qui serait impliquĂ©e dansâŠlâĂ©quilibration (Lopez, 1988a ; Lopez, 1988b ; Lopez, 1994a ; Lopez, 1994b)[9] - [10] - [11] - [12], de concert avec des organes lyriformes pĂ©diculaires en « bourrelet », situĂ©s sur le pĂ©dicule et Ă©galement Ă©tudiĂ©s chez les Meta (Lopez & Juberthie-Jupeau, 1994a et b).
Les deux parties peuvent siéger :
- sur un mĂȘme appendice (surfaces segmentaires opposĂ©es dâune articulation de patte) (Rovner, 1975)[13],
- sur deux appendices diffĂ©rents, tels que les pattes I et II, les deux chĂ©licĂšres, le bulbe copulateur et la gnathocoxa, le pĂ©dipalpe et la chĂ©licĂšre (Fig.), le pĂ©dipalpe et la patte I, peut ĂȘtre aussi les filiĂšres antĂ©rieures chez certaines Malkaridae (Forster & Platnick , 1984)[14],
- sur les deux grands tagmes corporels (céphalothorax ou prosoma et abdomen ou opisthosoma), notamment chez les Argyrodes (Fig.),
- sur le pĂ©dicule (pĂ©dicelle) et lâabdomen,
- sur un appendice (patte IV ou postĂ©rieure) et lâabdomen (Fig.).
Ainsi a-t-on pu dĂ©finir plusieurs types ou catĂ©gories dâappareils stridulatoires, en se basant sur les positions respectives de la lyre et du peigne et en crĂ©ant ainsi au moins 4 classifications :
- 4 types, classés de « a » à « d » par Berland (1932),
- 7 types, présentés sans ordre défini par Millot (1949), et
- 7 types encore, dĂ©crits et Ă©numĂ©rĂ©s de « a » à « g » par Legendre (1963,1970[15]) dans son important travail, devenu classique et qui est basĂ© sur lâexamen de 74 espĂšces appartenant Ă une quinzaine de familles diffĂ©rentes.
- 8 types selon Uetz et Stratton (1982)[3] qui reprennent la classification de Legendre en lui adjoignant une catĂ©gorie particuliĂšre dans laquelle un seul et mĂȘme appendice se trouve concernĂ© (Rovner, 1975)[13].
Cas particuliers choisis
Sont prĂ©sentĂ©s ici trois types dâappareils stridulatoires, « a », « d » et « g » dont la dĂ©couverte et (ou) lâĂ©tude approfondie chez certaines espĂšces ont permis Ă A.Lopez de contribuer Ă leur connaissance.
Dans tous les cas, les examens ont été réalisés à la loupe binoculaire, en microscopie photonique sur des coupes colorées par des méthodes histologiques de routine, et surtout, en microscopie électronique à balayage (M.E.B).
Il sera montré d'abord pour la premiÚre fois que le type « d »(chélicÚres-pédipalpes) est présent dans le genre Holocnemus (Pholcidae) et que le type « g » (quatriÚme paire de pattes, IV- opisthosoma) se retrouve chez quelques Araignées Gasteracanthines de la Guyane française[16]
Le plus important, celui des Argyrodes (« a »), dit aussi «prosoma-opisthosoma», sera ensuite développé séparément et en détails, ultrastructure comprise (microscopie électronique à transmission : M.E.T.)[9] - [10] - [11] - [12].
Appareil stridulatoire d' Holocnemus pluchei
Lâappareil stridulatoire de type " d " associe une lyre, portĂ©e par la chĂ©licĂšre, et un archet, situĂ© sur le pĂ©dipalpe ou patte machoire.
DĂ©crit pour la premiĂšre fois par Simon (1893) chez lâAraignĂ©e sud-africaine Sicarius hahni (Sicariidae), il a Ă©tĂ© retrouvĂ© ensuite chez les Scytodidae (Pickard-Cambridge, 1895), les Diguetidae de Californie (Chamberlin, 1924) et, beaucoup plus rĂ©cemment, chez certains Pholcidae amĂ©ricains du genre Physocyclus (Gertsch, 1979,1982).
Il a Ă©tĂ© Ă©galement observĂ© dans cette derniĂšre famille (Lopez, 1988) mais il sâagit en lâoccurrence dâ Holocnemus pluchei (Scop.)[10] - [17], un Pholcide " indigĂšne " trĂšs rĂ©pandu dans les garrigues hĂ©raultaises et jusque dans les habitations du BittĂ©rois sensu lato, ainsi que leurs dĂ©pendances (Lopez, 1973). Cette dĂ©couverte prĂ©cĂšde donc de plusieurs annĂ©es le travail de Huber (1995)[18]. Holocnemus est fort intĂ©ressant aussi sur le plan histologique par ses curieuses cellules pigmentaires Ă©toilĂ©es de siĂšge profond, non Ă©pidermique (Lopez,)[19]. Des cellules pigmentaires enfouies analogues ont Ă©tĂ© Ă©galement observĂ©es chez l'espĂšce amĂ©ricaine Diguetia canities. (Lopez)
Les exemplaires Ă©tudiĂ©s, uniquement au M.E.B., provenaient de Cessenon (Ouest de lâHĂ©rault, Occitanie, France) , ainsi dâailleurs que de TĂ©boursouk (Tunisie), leur espĂšce prĂ©sentant une aire de rĂ©partition circum-mĂ©diterranĂ©enne trĂšs vaste.
La Lyre
Elle est située sur la face externe de la chélicÚre, plus précisément sur celle de son article basal, la tige ou paturon. Sous la loupe binoculaire, elle apparaßt comme une bande brillante, de couleur rougeùtre, striée en travers et disposée verticalement selon le grand axe de la tige chélicérienne.
Au M.E.B., il sâagit dâune zone oblongue, entiĂšrement glabre mais cernĂ©e par de nombreux poils, et dĂ©primĂ©e en gouttiĂšre peu profonde (Fig.1 Ă 3, Fig.5). Elle porte sur toute sa surface une sĂ©rie de 30 Ă 40 crĂȘtes parallĂšles, Ă©quidistantes, bifurquĂ©es parfois Ă leurs extrĂ©mitĂ©s et sĂ©parĂ©es par des sillons uniformes qui ont tous la mĂȘme longueur (Fig.3).
Cette lyre existe chez toutes les femelles, oĂč son aspect ne varie guĂšre (Fig.1 Ă 3), chez les mĂąles (Fig.4), les immatures oĂč elle paraĂźt dĂ©jĂ bien formĂ©e (Fig.5) et dont les crĂȘtes semblent plus longues, un peu moins rĂ©guliĂšres, plus nombreuses et tendent Ă sâanastomoser.
Lâ archet
Il est reprĂ©sentĂ© par le trochanter du pĂ©dipalpe (Fig.1 Ă 3). Entrant en rapport intime avec la lyre, cet article est beaucoup plus volumineux et renflĂ© que chez Pholcus phalangioides, espĂšce trĂšs commune dâun genre voisin, dĂ©pourvue, pour sa part, dâappareil stridulatoire sur la tige chĂ©licĂ©rienne Ă surface unie (Fig. 6). Il est fortement convexe et porte mĂȘme Ă sa surface une petite saillie hĂ©misphĂ©rique (Fig.2 : flĂšche) pouvant accroĂźtre les frottements exercĂ©s sur les rugositĂ©s de la chĂ©licĂšre
Appareil stridulatoire des Gasteracanthinae.
Lâappareil stridulatoire du type " g " se compose dâun archet situĂ© sur la 4e paire de pattes ambulatoires (P IV) et dâune lyre placĂ©e sur la face infĂ©rieure de lâabdomen. Carpenter (1898) lâa dĂ©couvert chez Rhaebothorax brocchus et Falconer (1910) lâa retrouvĂ© un peu plus tard en Angleterre chez une autre Erigoninae, Eboria caliginosa.
La lyre de ces AraignĂ©es est une surface rugueuse correspondant Ă lâ "opercule", "plaque" ou "couvercle" chitineux du poumon ou phyllotrachĂ©e ("booklung cover" des auteurs de langue anglaise). Le peigne qui balaye cette lyre est un relief en forme de dent aiguĂ« siĂ©geant sur le bord interne de la 4e hanche. Selon Savory (1928), ils nâexisteraient que chez le mĂąle.
En dehors des Erigoninae, seuls citĂ©s par Legendre (1963), le type " g " nâa Ă©tĂ© retrouvĂ© ultĂ©rieurement, et jusquâĂ l' Ă©tude de Lopez (1988,) que chez une Lycoside, Pardosa fulvipes (Col.)(Kronestedt, 1973) et surtout, chez les Gasteracanthinae, sous famille dâAraneidae remarquables par leur "armature" Ă©pineuse, leurs couleurs souvent vives et lâaspect original des filiĂšres .
Hinton et Wilson (1970) prĂ©cisent que lâarchet ("scraper") des Gasteracanthinae est formĂ© par des soies rigides dressĂ©es sur la base du fĂ©mur de P IV et que leur plaque pulmonaire est couverte de crĂȘtes extrĂȘmement fines et nombreuses ("file"). Leur description est basĂ©e sur une Ă©tude au M.E.B. concernant les femelles des Micrathena gracilis et Micrathena schreibersi, espĂšces amĂ©ricaines. De son cĂŽtĂ©, Levi (1985) prĂ©sente une planche photographique montrant les appareils stridulatoires de Chaetacis aureola et Micrathena mitrata, le couvercle du poumon de la premiĂšre ayant une forme quadrangulaire, celui de la seconde une forme arrondie.
Lopez a examinĂ© lâappareil stridulatoire du type " g " chez des Gasteracanthines de la Guyane [10]. Cette sous-famille est reprĂ©sentĂ©e dans notre dĂ©partement nĂ©otropical par de nombreuses espĂšces que les Zoologistes français, Arachnologues compris, semblent avoir pratiquement ignorĂ© jusquâĂ sa mise au point (Lopez, 1994c.)[16].
Chaetacis cornuta
La femelle de Chaetacis cornuta (Taczanowski), seule Ă©tudiĂ©e, a des plaques pulmonaires allongĂ©es, ovalaires, brunĂątres, disposĂ©es obliquement par rapport Ă lâaxe longitudinal de lâabdomen (Fig.7). Chacune dâelles mesure environ 0,6 mm de long sur 0,2 mm de largeur maximum.
La Lyre
Il sâagit dâun ensemble de crĂȘtes nombreuses (environ 150), fines, trĂšs serrĂ©es, lĂ©gĂšrement incurvĂ©es et sâanastomosant, Ă leur extrĂ©mitĂ©, en un rĂ©seau "gaufrĂ©" (Fig.8). Cet aspect rappelle celui quâoffre une espĂšce voisine, Chaetacis aureola (C.L.Koch) au M.E.B. (Levi, 1985 : pl.3). Toutefois, sa plaque pulmonaire paraĂźt plus petite et montre un moins grand nombre de crĂȘtes que chez C. cornuta.
Lâ archet
Il est constituĂ© par deux soies courtes, raides, incurvĂ©es vers lâarriĂšre et sâimplantant sur la base fĂ©morale (Fig.7,8) comme celles que Hinton et Wilson (1970)[20] ont figurĂ©es chez des Micrathena. Contrairement Ă ce quâa Ă©crit Levi (1985)[21], il ne sâagit donc pas de tubercules coxaux ou fĂ©moraux.
Micrathena schreibersi
Micrathena schreibersi (Perty) est la plus belle des Gastéracanthines guyanaises (Lopez, 1994c)[16].
Bien que Hinton et Wilson (1970)[20] ne lâaient pas spĂ©cifiĂ©, son mĂąle possĂšde aussi un appareil stridulatoire.
La lyre
Elle correspond Ă la plaque pulmonaire, zone oblongue, dâun noir intense et luisant, arrondie Ă son extrĂ©mitĂ© postĂ©ro-externe, encochĂ©e, prĂšs du pĂ©dicule Ă lâantĂ©ro-interne (Fig.9), mesurant 0,6 mm dans sa plus grande longueur, 0,3 mm de large, et portant environ 150 crĂȘtes qui sont parfois bifurquĂ©es (Fig.10).
Lâarchet
Il est encore formĂ© par des soies fĂ©morales de sorte que lâappareil stridulatoire rappelle, en plus petit, celui de la femelle, seule examinĂ©e par Hinton et Wilson (1970)[20].
Micrathena clypeata
Micrathena clypeata (Walckenaer), troisiĂšme et derniĂšre GastĂ©racanthine, est une curieuse espĂšce, aplatie, foliacĂ©e, beaucoup plus rĂ©pandue en Guyane (Lopez, 1994c)[16] que ne semble lâindiquer la citation trop restrictive de Levi (1985 : Saint Laurent du Maroni)[21].
La lyre
Elle reste confinĂ©e Ă la plaque pulmonaire, a une forme trapĂ©zoĂŻdale (Fig.11) et mesure 0,6 mm de hauteur pour une base de 0,7 mm. Les crĂȘtes y sont extrĂȘmement nombreuses et si rapprochĂ©es (environ 3 ”) que leur dĂ©nombrement est impossible ; elles ne sont pas rectilignes et se dĂ©doublent frĂ©quemment pour sâunir en oblique (Fig.12).
Lâ archet
Il est toujours fémoral et constitué par des soies (Fig.11).
L'Appareil stridulatoire des Argyrodes
Lâun des appareils stridulatoires les plus rĂ©pandus est le type « a », signalĂ© pour la premiĂšre fois par Westring (1843) sans toutefois le nommer ainsi, bien dĂ©fini par Berland (1932) et surtout par Legendre (1963). Une «lyre» cĂ©phalothoracique y serait raclĂ©e par le «peigne» ou, mieux, l'archet abdominal.
On le connaĂźt actuellement dans au moins 4 familles : les Theridiidae, les Clubionidae, les Gnaphosidae et les Hahniidae (Uetz et Stratton, 1982)[3].
Lopez l'a Ă©tudiĂ© chez les Theridiidae du genre Argyrodes dont il est lâune des nombreuses caractĂ©ristiques confĂ©rant Ă ces petites AraignĂ©es un intĂ©rĂȘt majeur. Elles sont en effet remarquables aussi par leur dimorphisme sexuel cĂ©phalothoracique, en rapport avec lâexistence dâune glande clypĂ©ale ou acronale nâexistant que chez le mĂąle, par des glandes Ă soie originales, par le vif Ă©clat mĂ©tallique de leur abdomen, la forme curieuse de leurs cocons et par le fait quâelles vivent gĂ©nĂ©ralement en kleptoparasites sur la toile dâautres AranĂ©ides.
Un appareil assez voisin pourrait exister aussi dans le genre Asagena.
Au moins chez les Argyrodes, il sâassocie aux organes lyriformes du pĂ©dicelle ou pĂ©dicule (Lopez, 1996) constituant avec ces derniers un complexe anatomo-fonctionnel sus-pĂ©diculaire prĂ©sumĂ© stato-rĂ©cepteur (Lopez, 1994a ; Lopez, 1994b)
Aspect au Microscope Ă©lectronique Ă balayage
Le M.E.B. montre sans équivoque l'aspect spectaculaire de l'appareil stridulatoire des Argyrodes, constant et assez homogÚne malgré des variations (Lopez, 1988 ; Lopez, 1994a ; Lopez, 1994b ; Lopez, 1996) (Fig.1 à 5)
Cet appareil est pair, symĂ©trique et surplombe les parties latĂ©ro-dorsales du pĂ©dicule oĂč sont visibles les deux organes lyriformes (Fig.13, 14, 16). Ici comme ailleurs, il comporte bien un archet ("peigne") et une lyre chez toutes les espĂšces dâArgyrodes Ă©tudiĂ©es, tant au M.E.B que par lâhistologie.
La lyre
SituĂ©e sur la partie postĂ©ro-latĂ©rale du cĂ©phalothorax ou prosoma, elle se compose d'une sĂ©rie de rides ou crĂȘtes subparallĂšles, Ă peu prĂ©s Ă©quidistantes, droites ou lĂ©gĂšrement incurvĂ©es, sĂ©parĂ©s par des sillons, simples ou fourchues, parfois anastomosĂ©es par des "ponts", un peu inclinĂ©es vers l'axe mĂ©dian du prosoma et se perdant, en pĂ©riphĂ©rie, dans la microsculpture tĂ©gumentaire (Fig.13 Ă 16).
Les crĂȘtes peuvent ĂȘtre les seuls reliefs tĂ©gumentaires de la lyre ou s'y associent avec de petites tubĂ©rositĂ©s (Argyrodes ululans).
Elles sont identiques les unes aux autres chez un mĂȘme individu ou s'accentuent d'avant en arriĂšre et de haut en bas.
Dans le cas particulier du mĂąle d'Argyrodes dracus (Fig. 16), elles forment deux groupes : l'un antĂ©ro-supĂ©rieur, qui en comporte une quinzaine, Ă©paisses, trĂšs saillantes, espacĂ©es, et l'autre postĂ©ro-infĂ©rieur oĂč elles sont beaucoup plus nombreuses, fines et trĂšs serrĂ©e. Il ne s'agit pas lĂ d'un artĂ©fact car cette bipartition a Ă©tĂ© observĂ©e chez plusieurs individus diffĂ©rents et confirmĂ©e ensuite par l'Ă©tude histologique
Il semblerait que les crĂȘtes des femelles soient gĂ©nĂ©ralement moins saillantes et moins rĂ©guliĂšres que celles des mĂąles.
L'archet
Il se compose de plusieurs unitĂ©s indĂ©pendantes qui s'Ă©chelonnent en file oblique et un peu arquĂ©e (Fig.13,16 Ă 18) ; elles y sont bien sĂ©parĂ©es les unes des autres, exceptĂ© dans sa partie supĂ©rieure oĂč peut apparaĂźtre un couple isolĂ© (Fig.16). Les axes de l'archet et de la lyre ne semblent pas ĂȘtre parallĂšles ; ils dĂ©limitent un angle aigu , Ă sinus supĂ©ro-interne (Fig.15 Ă 17). Chez A. argyrodes et A.fissifrontella, il y a gĂ©nĂ©ralement 5 ou 6 unitĂ©s par archet (Fig.13,16). Nous en avons comptĂ© moins chez A. elevatus et dracus (Fig.14,16).
Ces unitĂ©s ont un mĂȘme aspect fondamental : elles montrent un poil, ou soie, et son alvĂ©ole dont une partie de la margelle forme une dent excentrique (Fig.16 Ă 19).
Le poil est long en moyenne de 50 ”m chez A.argyrodes (Fig.18,19). Il s'effile progressivement depuis sa base, oĂč l'on ne note pas de constriction, jusqu'au sommet, trĂšs aigu et dĂ©pourvu de pore.
Orientant cette pointe vers la lyre, il a une surface lisse et prĂ©sente gĂ©nĂ©ralement une courbure Ă concavitĂ© postĂ©ro-infĂ©rieure. L'alvĂ©ole (largeur totale 15 ”m chez A.argyrodes) est une cupule plus ou moins profonde et d'orientation antĂ©ro-infĂ©ro-externe. Elle montre un fond "articulaire" et une margelle plus ou moins saillante. Cette margelle est toujours Ă©paissie en ergot dans sa partie supĂ©ro-interne oĂč elle constitue la dent ainsi excentrĂ©e : saillie acuminĂ©e triangulaire chez A.argyrodes (Fig.18,19) ou A.sp, espĂšce indĂ©terminĂ©e (Fig.21), "biseau" oblique d' A.cognatus, relief globuleux d' A.fissifrontella (Fig. 20). Variable d'une espĂšce Ă l'autre, la dent l'est aussi chez un mĂȘme individu oĂč elle tend parfois Ă s'Ă©mousser du haut en bas de l' archet (A. cognatus). Toujours lisse sur son sommet, elle peut prĂ©senter des rides basales (Fig.19) et est dĂ©pourvue de tout pore excrĂ©teur. Elle a enfin une orientation constante et se situe toujours au-dessus et
en arriÚre du poil, ce qui pourrait refléter un plan de symétrie bilatérale dans l' organe sous-jacent.
La lyre
Les coupes histologiques sĂ©riĂ©es (Fig.21 Ă 23) montrent que la lyre est un Ă©paississement chitineux d'aspect rigide, formĂ© surtout d'exocuticule. Sa face profonde est lisse, rĂ©guliĂšre et repose sur un Ă©piderme banal, uniforme, plus ou moins pigmentĂ©, qui ne la pĂ©nĂštre pas. Cet Ă©pithĂ©lium entre lui-mĂȘme en rapport avec un petit sinus hĂ©molymphatique et des fibres musculaires striĂ©es. La face superficielle est en revanche rĂ©guliĂšrement crĂ©nelĂ©e par la sĂ©rie des crĂȘtes et ne prĂ©sente aucune solution de continuitĂ©, la cuticule Ă©tant ininterrompue dans toute la lyre (Fig.21 Ă 23). Cette derniĂšre est donc bien un simple Ă©paississement cuticulaire pĂ©riodique, sans participation de l'Ă©piderme sous-jacent.
L'archet
Il est formĂ© par un ensemble d'unitĂ©s plus ou moins espacĂ©es (Fig.21 Ă 23). Au niveau de chacune d'elles, la cuticule est non seulement Ă©paissie en bloc mais forme aussi Ă sa surface chaque dent observĂ©e au M.E.B. Cette saillie est plus ou moins effilĂ©e et rĂ©guliĂšre ; elle flanque le poil ou soie, qui s'y superpose dans une mĂȘme coupe histologique (Fig.21) ou est retrouvĂ©, plus dĂ©gagĂ© et donc plus apparent, dans la section voisine.
L'épiderme sous-jacent est plus ou moins chargé de mélanine et présente un aspect banal entre les unités de l'archet. Au niveau de chacune d'elles, il se différencie en un petit massif cunéiforme s'engageant dans la cuticule jusqu'à l'alvéole du poil (Fig.21 à 23). Dans ce massif, qui correspond à l'axe sensoriel de la M.E.T, on peut discerner une cavité mal définie, deux cellules nerveuses à gros noyau nettement nucléolé et cytoplasme clair, leurs prolongements qui s'effilent vers la dent et le poil, ainsi que des cellules "satellites" plus petites et plus chromatiques. Leur ensemble entre en rapport avec des hémocytes, des fibres musculaires striées et les diverticules intestinaux de la partie antéro-supérieure de l'abdomen (Fig.23).
Ultrastructure
Alors que la lyre est continue, l'archet se compose de plusieurs unités bien distinctes qui sont indiscutablement sensorielles . Des sensilles cuticulaires d'ultrastructure trÚs voisine se juxtaposent en revanche dans le pédicule adjacent pour y former un organe lyriforme unique.
La lyre
Elle comporte vers l'extérieur une épicuticule réguliÚrement ondulée, mince (0,4 nm) et présentant deux couches : l'une externe, trÚs dense aux électrons ; l'autre interne, moins dense, moins homogÚne et d'épaisseur plus réduite. à leur zone de contact, ces couches forment de fines denticulations qui s'interpénÚtrent et les engrÚnent étroitement l'une dans l'autre.
L'endocuticule est épaisse d'environ 10 nm et suit les ondulations de l'épicuticule, atténuées toutefois sur sa face interne. Elle présente des canaux poraires étroits dans lesquels l'épiderme sous-jacent, uniformément plat, ne s'engage pas.
L'archet
Toutes les unitĂ©s qui le constituent possĂšdent une mĂȘme ultrastructure confirmant son aspect histologique d'organe nerveux et Ă©voquant d'emblĂ©e des sensilles mĂ©canorĂ©ceptrices du type I dĂ©fini et dĂ©crit par Mc Iver (1975) chez les Arthropodes.
Chacune d'elles comporte un capteur externe cuticulaire et un axe sensoriel. Ce dernier est formé par 2 neurones bipolaires
et par 3 cellules enveloppes entourant les dendrites.
Capteur externe
Il est formĂ© par le poil, son alvĂ©ole et lâexcroissance en dent quâelle porte (Fig.24).
Le poil est lisse, de section circulaire et creusĂ© dâun canal. Ce dernier ne renferme pas de prolongements nerveux et ne communique pas avec lâextĂ©rieur. Sa paroi est Ă©paisse, formĂ©e par de lâĂ©picuticule et surtout , par de lâexocuticule se poursuivant, Ă la base, dans la membrane articulaire qui constitue le fond de lâalvĂ©ole.
La dent est un Ă©paississement considĂ©rable de la margelle dans sa partie antĂ©rieure, entiĂšrement chitineux, ayant la forme dâun cĂŽne grossier, haut dâenviron 10 ”m et dĂ©pourvu de cavitĂ©. Son endocuticule lamellaire Ă©met un apodĂšme, expansion profonde dont lâaspect Ă©voque un " levier " vertical, lĂ©gĂšrement incurvĂ© (Fig.23, 27,28). Cet apodĂšme fait saillie dans une cavitĂ© qui excave la cuticule sous la membrane alvĂ©olaire, entre la base de la dent et la zone dâimplantation du poil, trĂšs excentrĂ©e.
Axe sensoriel
Comme lâhistologie permettait de lâenvisager, il est bien constituĂ© par deux neurones. Bipolaire, chacun montre un axone, un corps cellulaire et un dendrite se terminant par un cil.
âș L' axone est riche en mitochondries et neurotubules mais ne peut ĂȘtre observĂ© sur un long trajet. Avec son homologue, il rejoint peut ĂȘtre le nerf du pĂ©dicule (nerf segmentaire I de Legendre, 1958).
âș Le corps cellulaire est ovoĂŻde, assez volumineux et mesure approximativement 15 ”m dans son grand axe, 10 dans le petit. Le noyau est plus ou moins arrondi, rĂ©gulier et Ă chromatine peu dense, rĂ©partie en mottes, les plus petites sâaccolant Ă lâenveloppe nuclĂ©aire. Le cytoplasme renferme du rĂ©ticulum endoplasmique granulaire ou rugueux formant des saccules plus ou moins enroulĂ©s, des dictyosomes et de nombreuses mitochondries (Fig.25).
âș Deux dendrites, un pour chaque neurone, pĂ©nĂštrent latĂ©ralement dans la cellule thĂ©cogĂšne, dâabord sĂ©parĂ©s puis contigus (Fig.26). Leur segment interne (diamĂštre moyen : 1 ”m) renferme des neurotubules, de nombreuses mitochondries, des ribosomes, des corps multivĂ©siculaires et du glycogĂšne. Chacun dâeux donne naissance Ă un cil Ă la base duquel se trouve un seul centriole dâoĂč partent des racines ciliaires trĂšs courtes. Les microtubules y sont rĂ©partis en 9 doublets pĂ©riphĂ©riques. Les cils (Fig.27,28) ont dâabord le mĂȘme diamĂštre Ă leur base (0,4 ”m). Lâun dâeux devient ensuite plus gros que lâautre puis sâĂ©largit brusquement Ă son extrĂ©mitĂ© distale oĂč se diffĂ©rencie un corps tubulaire volumineux (Fig.24, 29 Ă 31). Ce dernier, long dâenviron 15 ”m pour un diamĂštre de 5, renferme de nombreux microtubules associĂ©s Ă un matĂ©riel peu osmiophile les unissant entre eux et Ă la membrane du cil. Il pĂ©nĂštre dans la cavitĂ© sous-cuticulaire, y entre latĂ©ralement en contact Ă©troit avec lâapodĂšme (Fig.24,29,30) et gagne la base du poil dans sa partie la plus proche de la dent chitineuse.Lâautre cil diminue progressivement de diamĂštre et disparaĂźt au niveau de la base du corps tubulaire.Libres Ă leur origine sur un trajet trĂšs court (1 Ă 2 ”m), les deux
cils sont ensuite enfermĂ©s dans une gaine cuticulaire ou scolopale(24,27,29). Elle les enserre dâabord Ă©troitement, au niveau des cellules thĂ©cogĂšne et trichogĂšne (partie infĂ©rieure), puis forme une cavitĂ© spacieuse, remarquable par les sinuositĂ©s de ses contours, jusquâĂ la base du corps tubulaire . Au niveau de ce dernier, elle se rapproche de la membrane du cil et nâen est plus sĂ©parĂ©e que par une couche de gros granules (29 Ă 31). Ils mesurent 150 Ă 200 nm de diamĂštre et selon lâincidence des coupes, paraissent libres ou unis par un pĂ©dicule Ă la face interne de la gaine qui paraĂźt alors les bourgeonner. Ils sont hĂ©tĂ©rogĂšnes, montrent un cortex Ă deux couches, lâune dense, lâautre claire, ainsi quâune zone centrale dâaspect rĂ©ticulĂ© (Fig.31) et refoulent la membrane du cil sans quâelle se plaque toutefois sur les microtubules sous-jacents. Au-delĂ du corps tubulaire, la gaine ne contient plus de prolongement nerveux mais s'inflĂ©chit, s'Ă©tire en cĂŽne et va finalement s'insĂ©rer sur la base du poil en s'y confondant Fig.24).
Cellules enveloppes
Etroitement accolĂ©es, elles sont au nombre de 3 par unitĂ© dâarchet : cellules thĂ©cogĂšne, la plus interne, trichogĂšne et tormogĂšne, la plus externe.Elles sont garnies de microvilli apicales en bordure des cavitĂ©s extracellulaires (Fig.27)
La cellule thĂ©cogĂšne (Fig.26 Ă 28) est trĂšs allongĂ©e et entoure les dendrites dĂšs leur apparition. Son noyau est basal, ovoĂŻde et riche en chromatine formant de grosses mottes denses. TrĂšs riche en ribosomes libres, son cytoplasme renferme des dictyosomes et de fins granules probablement Ă l'origine de la gaine scolopale. Cette derniĂšre se matĂ©rialise dans la cavitĂ© extracellulaire oĂč est Ă©galement visible un matĂ©riel subhomogĂšne, dense aux Ă©lectrons.
La cellule trichogĂšne (Fig.26 Ă 28)se referme sur elle-mĂȘme par un mĂ©so en formant un manchon. Sa partie infĂ©rieure enserre Ă©troitement la cellule thĂ©cogĂšne, tandis que sa partie supĂ©rieure prĂ©sente une cavitĂ© extracellulaire que bordent quelques microvillositĂ©s. Le noyau est basal, trĂšs allongĂ© et riche en chromatine. Moyennement dense aux Ă©lectrons, le cytoplasme renferme de nombreuses mitochondries, des grains de sĂ©crĂ©tion, de nombreuses vĂ©sicules de rĂ©ticulum lisse et des vacuoles Ă contours irrĂ©guliers avec des parois plus ou moins densifiĂ©es et un contenu amorphe. Volumineuse et aplatie, la cellule tormogĂšne fait suite Ă la prĂ©cĂ©dente. Sa cavitĂ© extracellulaire est trĂšs spacieuse, emplie d'une substance finement grenue, en continuitĂ© avec la sous-cuticulaire, prolonge celle de la cellule trichogĂšne et est bordĂ©e par de nombreuses microvilli (Fig.28,30).Ces derniĂšres sont irrĂ©guliĂšres et prennent souvent l'aspect de lamelles Ă©mettant des prolongements anastomosĂ©s. Le noyau est latĂ©ral, aplati, riche en chromatine. Le cytoplasme contient un grand nombre de mitochondries et de vacuoles.
Commentaires
Sur le plan anatomique
L' appareil stridulatoire dâHolocnemus pluchei correspond au sous-type " d II " (" organe de Simon ") individualisĂ© par Legendre (1963) [22]PrĂ©sent dans les deux sexes, il diffĂšre donc de celui des Pholcidae amĂ©ricains Physocyclus, propre aux mĂąles et dont lâarchet est un " Ă©peron " aigu siĂ©geant sur la base du fĂ©mur pĂ©dipalpaire (Gertsch, 1982)[23].
En ce qui concerne les Gasteracanthinae les appareils Ă©tudiĂ©s se rattachent bien au type " g ". Comme Hinton et Wilson (1970)[20] lâont suggĂ©rĂ© Ă propos des Micrathena schreibersi et gracilis, il existe bien des diffĂ©rences intergĂ©nĂ©riques et interspĂ©cifiques dans la microsculpture de la plaque pulmonaire. Mais outre lâespacement des crĂȘtes, elles semblent intĂ©resser aussi leur structure mĂȘme ce que devrait confirmer une rĂ©vision exhaustive.
Chez les Argyrodes, la lyre est une simple diffĂ©renciation cuticulaire prosomatique, dâaspect passif et inerte, non associĂ©e avec des cellules nerveuses. Lâarchet en revanche est un ensemble de sensilles, chacune de ces unitĂ©s, toutes semblables, appartenant au sous-groupe des mĂ©canorĂ©cepteurs cuticulaires dans le type I de Mc Iver (1975). Le corps tubulaire en est Ă©minemment caractĂ©ristique comme chez tous les autres Arthropodes.
Ces mĂ©canorĂ©cepteurs sont " purs ", lâultrastructure de leur poil, dĂ©pourvu de tout pore apical ou autre ouverture externe, et de terminaison nerveuse intra-luminale, permettant dâĂ©liminer une composante chĂ©morĂ©ceptrice.comme celle dĂ©crite par exemple dans les sensilles appendiculaires de Ciniflo (Dictynidae : Harris & Mill, 1973). Ils peuvent donc ĂȘtre toujours unique (rapprochĂ©s de ceux, Ă©galement " purs ", dĂ©crits dans les tarses dâautres AraignĂ©es (genre Araneus : Chu-Wang & Foelix, 1973) et retrouvĂ©s plus tard dans tous les poils tactiles. Leurs corps tubulaires ont une ultrastructure spĂ©ciale trĂšs voisine. Tous renferment en effet de curieux granules logĂ©s entre la gaine scolopale et la membrane dendritique, granules pouvant
ĂȘtre dâorigine cuticulaire. ObservĂ©s chez des AraignĂ©es de familles diffĂ©rentes (Ctenidae, Dictynidae)(Barth, 1971 ; Harris & Mill, 1977), ainsi dâailleurs que chez les Scorpions et les Tiques (Acariens), ces granules pourraient dĂ©river de la cuticule, d' oĂč leur autre nom de "globules cuticulaires".
Lâinnervation de chaque unitĂ© dâarchet est multiple, comme dans tous les mĂ©canorĂ©cepteurs dâ Arachnides, et la distingue
donc des sensilles mĂ©canorĂ©cepteurs dâ Insectes Ă neurone toujours unique (Mac Iver, 1975). Mais elle est Ă©galement double, ce qui lâoppose aussi aux poils tactiles banaux dâ AraignĂ©es toujours pourvus de 3 neurones que leurs terminaisons dendritiques rattachent Ă la base pilaire (Chu-Wang & Foelix, 1973 ; Harris & Mill, 1977), ainsi quâaux trichobothries qui peuvent en possĂ©der (Christian, 1971). Cette double innervation de lâunitĂ© dâarchet rappelle en revanche celle des lyrifissures, isolĂ©es ou rĂ©unies en organes lyriformes, sur les appendices de Cupiennius (Barth, 1971) et surtout, en ce qui nous concerne ici, sur le pĂ©dicule des Argyrodes oĂč des organes lyriformes en " bourrelet " (Lopez, 1996) sâassocient aux appareils "stridulatoires" pour former un " complexe " au moins anatomique.
Les rapports Ă©troits entre le corps tubulaire et lâ apodĂšme du bord de lâalvĂ©ole rappellent ceux qui ont Ă©tĂ© signalĂ©s par Hawke et al. (1973) dans lâ ovipositeur dâun Insecte HymĂ©noptĂšre, Orgilus lepidus. Une formation Ă©voquant la structure en "levier" quâĂ©met lâapodĂšme dâ Argyrodes a Ă©tĂ© dĂ©crite par Gaffal et Hansen (1972) dans les sensilles antennaires dâun autre Insecte, lâHĂ©miptĂšre Dysdercus intermedius. Elle se dĂ©tache toutefois du poil lui-mĂȘme et en transmet vraisemblablement au dendrite
la pression mécanique.
Les deux appareils stridulatoires " d " et " g "
Ils ne peuvent intervenir dans lâĂ©quilibration.
Lorsque celui dâHolocnemus pluchei entre en activitĂ©, son composant trochantĂ©rien doit ĂȘtre animĂ© dâun mouvement oscillatoire, uni ou bilatĂ©ral, qui lui fait frotter les crĂȘtes de la lyre. Les vibrations Ă©mises chez le Pholcide sont vraisemblablement impliquĂ©es dans la reconnaissance intra-spĂ©cifique. Ce rĂŽle paraĂźt beaucoup plus plausible quâune fonction dâavertissement, donc de dĂ©fense, vis Ă vis des agresseurs Ă©ventuels, et surtout, dâune attraction sexuelle car lâappareil est prĂ©sent chez le mĂąle, la femelle ainsi que les immatures.
Le frottement des soies fĂ©morales de GastĂ©racanthines contre les crĂȘtes pulmonaires est gĂ©nĂ©rateur de vibrations.
AmplifiĂ©es par le poumon jouant ainsi un rĂŽle de caisse de rĂ©sonance, elles ont pu ĂȘtre enregistrĂ©es en laboratoire (Hinton & Wilson, 1970 ; Uetz & Stratton, 1982), sont perçues aussi au toucher lorsquâon saisit une Micrathena avec les doigts et peuvent ĂȘtre audibles comme un bourdonnement, lorsquâon lâimportune sur sa toile. Ce bruit (" low-pitched buzz ") serait perceptible jusquâĂ 1 m de Micrathena gracilis (Hinton & Wilson, 1970 ; Uetz & Stratton, 1982). Levi (1985) nâa pu toutefois confirmer son Ă©mission chez plusieurs autres espĂšces.
Quoi quâil en soit, lâappareil stridulatoire des GastĂ©racanthines nâa pas de fonction sexuelle pour les prĂ©cĂ©dents auteurs, mais reprĂ©sente, par ses vibrations, un systĂšme dĂ©fensif :
âșEffet de " surprise " temporaire que lâ AraignĂ©e met Ă profit pour sâenfuir, se comportant ainsi comme certains Insectes stridulants (Masters, 1979)
âșImitation, par la frĂ©quence sonore, des battements alaires de certaines GuĂȘpes chasseresses que redoutent les autres
Arthropodes, cette sorte de "mimĂ©tisme vibratoire" protĂ©geant ainsi lâ AraignĂ©e.
âș Diffraction dâune lumiĂšre rasante par les lyres pulmonaires, du moins dans le cas de Micrathena schreibersi (Hinton & Wilson, 1970), le spectre Ă©mis jouant un rĂŽle de couleurs dâavertissement comme dans le cas de lâappareil stridulatoire abdominal des Mutillidae (Insectes HymĂ©noptĂšres) (Hinton, Gibbs & Silberglied, 1969). ComplĂ©mentaires ou pas de la stridulation, ces couleurs dâavertissement "intimideraient" lâadversaire des Micrathena en renforçant lâeffet aposĂ©matique de leur livrĂ©e abdominale brillante.
Lâappareil stridulatoire " a "
Cet ensemble fonctionnel des Argyrodes est, sans aucun doute, impliqué dans l'équilibration.
Comme chez certains Insectes, lâapodĂšme de lâunitĂ© dâarchet et son "levier" pourraient transmettre au corps tubulaire dâ Argyrodes les vibrations ou dĂ©placements de la dent, et la gaine dendritique, les mouvements et lâincurvation plus ou moins marquĂ©e du poil sous la poussĂ©e de la lyre.
Il est vraisemblable que la transduction du stimulus mĂ©canique en potentiel de rĂ©cepteur se produit au niveau du corps tubulaire comme dans les autres sensilles dâArthropodes (Mc Iver, 1975)[24]. Ce corps serait comprimĂ© (Thurm, 1964)[25] ou subirait une incurvation tendant la membrane dendritique contre le cytosquelette des microtubules. Il en rĂ©sulterait une dĂ©polarisation (Rice & al., 1973)[26].
Quant aux granules ou globules cuticulaires, ils jouent peut-ĂȘtre un rĂŽle de "couplage" ou dâ "accrochage" (Christian, 1971 : "clamping device")
Les cellules enveloppes doivent sĂ©crĂšter le liquide qui emplit les espaces extracellulaires ("inner and outer receptor lymph cavities ") et y assure pour les dendrites une fonction nutritive ou facilitant leurs activitĂ©s Ă©lectriques. De plus, lâune dâelles, la cellule thĂ©cogĂšne, est productrice de la gaine scolopale.
En ce qui concerne la fonction rĂ©elle de lâappareil dit "stridulatoire", une Ă©mission sonore paraĂźt trĂšs peu probable chez les Argyrodes. Bien quâ elle soit suggĂ©rĂ©e par les noms des deux espĂšces Argyrodes ululans et stridulator, on ne l'a jamais Ă©tĂ© dĂ©montrĂ©e dans le genre .La biologie des Argyrodes est aujourdâhui bien connue sous lâangle des mĆurs sexuelles liĂ©es en partie Ă la glande acronale, kleptoparasitaires et prĂ©datrices, au cours desquelles une intervention sonore, audible ou du moins enregistrable, nâa jamais Ă©tĂ© constatĂ©e pas plus dâailleurs que dans la grande majoritĂ© des autres appareils. Il sâensuit que la prĂ©diction de Legendre (1963) les crĂ©ditant dâun " rĂŽle beaucoup plus important que celui que nous tentons de (leur)attribuer " est aujourdâhui confirmĂ©e.
Une comparaison de la lyre et de lâarchet des Argyrodes avec certains champs sensoriels particuliers existant chez les Insectes permet dâen fournir une interprĂ©tation fonctionnelle.
Par leur structure et surtout leur situation dans les deux parties du corps (tagmes : cĂ©phalothorax et abdomen) indĂ©pendantes, bien que trĂšs voisines, et surtout, mobiles l'une par rapport Ă l'autre lors des dĂ©placements de l' AraignĂ©e, la lyre et lâarchet peuvent ĂȘtre rapprochĂ©s de certains "champs de soies" existant chez les HymĂ©noptĂšres sociaux. Parmi ces plages sensorielles pilifĂšres dĂ©crites en dĂ©tail chez l âAbeille, celle dite de "lâarticulation du pĂ©tiole" (Lindauer & Nedel, 1959 ; Markl, 1968)[27] - [28] rappelle tout particuliĂšrement le prĂ©tendu appareil stridulatoire dâ Argyrodes. Il sâagit de deux champs de soies, pairs et symĂ©triques, situĂ©s sur le deuxiĂšme segment abdominal et que des prolongements et replis thoraco-abdominaux "antagonistes ", les " butoirs " (SchĂ©ma), viennent heurter et tendent Ă courber plus ou moins lorsque lâAbeille se dĂ©place.
Les sensillae trichodea de ces soies, innervĂ©es aussi par des cellules bipolaires, ont une ultrastructure (Thurm, 1964)[25] rappelant celle de chaque unitĂ© dâarchet dâ Argyrodes, si toutefois lâon excepte leur innervation unique, et sont indiscutablement sensibles Ă la pesanteur comme lâont montrĂ© diverses recherches expĂ©rimentales (in Markl., 1968). Par rapport Ă lâensemble du corps, elles percevraient lâemplacement de parties toutes entiĂšres, mobiles suivant la gravitĂ©, et permettraient par voie rĂ©flexe, un contrĂŽle musculaire de la position des axes corporels les uns par rapport aux autres.
Lâexistence de tels mĂ©canorĂ©cepteurs paraĂźt conditionnĂ©e par celle dâun abdomen volumineux, susceptible de dĂ©sĂ©quilibrer lâanimal Ă tout instant : "gastre" des Abeilles et Fourmis mais aussi et surtout, abdomen ou opisthosoma des Argyrodes. Ce dernier, que pare souvent un vif Ă©clat mĂ©tallique (guaninocytes intestinaux), est en effet remarquablement volumineux et disproportionnĂ© par rapport au reste du corps (galerie photographique), plus ou moins Ă©levĂ©, conique, pesant et doit donc ĂȘtre sollicitĂ© sans cesse par les forces de gravitĂ©.
De ce fait, la petite AraignĂ©e est exposĂ©e Ă une distorsion du pĂ©dicule menaçant les organes fragiles qui le traversent lorsque son abdomen vient Ă sâincliner latĂ©ralement ou bascule contre le cĂ©phalothorax. Ă lâinstar des HymĂ©noptĂšres sociaux, oĂč les sensilles abdominales sont excitĂ©es par le thorax, on peut admettre chez Argyrodes que la stimulation des sensilles dâarchet (opisthosoma) par la lyre (prosoma) entraine des contractions musculaires suivant un arc rĂ©flexe et rĂ©tablit ainsi son Ă©quilibre : lâopisthosoma oriente en lâair sa face ventrale dans une position de "confort " optimum.
Cette stimulation pourrait ĂȘtre uni ou bilatĂ©rale, dâintensitĂ© plus ou moins grande suivant le degrĂ© dâincurvation des poils et le nombre des sensilles affectĂ©es, que la dent joue un simple rĂŽle de butĂ©e, limitant la course du poil dans un plan donnĂ©, ou quâelle heurte aussi les stries de la lyre. Dans ce cas, le maintien Ă un niveau constant du degrĂ© dâexcitation de lâappareil par le jeu Ă©quilibrĂ© des poils et des dents deviendrait concevable comme chez les Insectes HymĂ©noptĂšres (Markl, 1968)[28].
Lâultrastructure de lâappareil "stridulatoire" des Argyrodes et sa comparaison avec les champs sensoriels articulaires dâInsectes plaident donc en faveur dâun rĂŽle dans la statorĂ©ception.
Il est possible que du moins chez Argyrodes, le complexe pĂ©diculaire formĂ© avec les organes lyriformes en "bourrelet" ne se rĂ©duise pas Ă de simples rapports anatomiques de voisinage mais soit une vĂ©ritable association fonctionnelle entre rĂ©cepteurs de gravitĂ©. Coordonnant leur activitĂ© suivant un processus qui nous Ă©chappe encore, ils permettraient Ă lâAraignĂ©e dâorienter dans lâespace les deux tagmes de son corps, sans prĂ©judice pour le pĂ©dicule fragile et en fonction de sa position de repos habituelle.
Un tel concept du type " a " sera peut ĂȘtre Ă©tendu ultĂ©rieurement Ă dâautres appareils prĂ©sumĂ©s "stridulatoires", les vibrations sonores, si tant est quâelles existent rĂ©ellement, se prĂ©sentant alors comme un simple Ă©piphĂ©nomĂšne.
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