Al-'Ankabut
Al-'Ankabut (arabe : ŰłÙ۱۩ ۧÙŰčÙÙŰšÙŰȘ, français : « L'araignĂ©e ») est le nom traditionnellement donnĂ© Ă la 29e sourate du Coran, le livre sacrĂ© de l'islam. Elle comporte 69 versets. RĂ©digĂ©e en arabe comme l'ensemble de l'Ćuvre religieuse, elle fut proclamĂ©e, selon la tradition musulmane, durant la pĂ©riode mecquoise.
29e sourate du Coran L'araignée | |
Le Coran, livre sacré de l'islam. | |
Informations sur cette sourate | |
---|---|
Titre original | ŰłÙ۱۩ ۧÙŰčÙÙŰšÙŰȘ, Al-'Ankabut |
Titre français | L'araignée |
Ordre traditionnel | 29e sourate |
Ordre chronologique | 85e sourate |
PĂ©riode de proclamation | PĂ©riode mecquoise |
Nombre de versets (ayat) | 69 |
Nombre de subdivisions (rukus) | 7 |
Ordre traditionnel | |
Ordre chronologique | |
Origine du nom
Bien que le titre ne fasse pas directement partie du texte coranique[1], la tradition musulmane a donné comme nom à cette sourate L'araignée en référence au contenu du verset 41[2] :
« 41. Ceux qui ont pris des protecteurs en dehors dâAllah ressemblent Ă lâaraignĂ©e qui sâest donnĂ©e maison. Or la maison la plus fragile est celle de lâaraignĂ©e. Si seulement ils savaient ! »
Le titre de la sourate provient des versets 41-42 et de la parabole de lâaraignĂ©e. Elle a fait lâobjet dâun rĂ©cit autour de Mahomet, qui se serait cachĂ© dans une grotte dont une araignĂ©e aurait cachĂ© lâentrĂ©e. Or, le mot « araignĂ©e » (âankabut) provient de lâaramĂ©en et ce passage semble une exĂ©gĂšse juive ou chrĂ©tienne syriaque du Psaume 83 et dâun passage dâEsdras. Cette relecture permettrait de conclure que le choix du titre nâĂ©tait pas liĂ© au hasard mais que cette parabole sous-tend les autres passages de la sourate qui possĂšde un caractĂšre homilĂ©tique[3].
Historique
Il n'existe Ă ce jour pas de sources ou documents historiques permettant de s'assurer de l'ordre chronologique des sourates du Coran. NĂ©anmoins selon une chronologie musulmane attribuĂ©e Ă ÇŠaÊżfar al-áčąÄdiq (VIIIe siĂšcle) et largement diffusĂ©e en 1924 sous lâautoritĂ© dâal-Azhar[4] - [5], cette sourate occupe la 85e place. Elle aurait Ă©tĂ© proclamĂ©e pendant la pĂ©riode mecquoise, c'est-Ă -dire schĂ©matiquement durant la premiĂšre partie de l'histoire de Mahomet avant de quitter La Mecque[6]. ContestĂ©e dĂšs le XIXe par des recherches universitaires[7], cette chronologie a Ă©tĂ© revue par Nöldeke[8] - [9], pour qui cette sourate est la 81e.
Selon Neuwirth[Note 1], cette sourate daterait de la pĂ©riode mecquoise avec des additions mĂ©dinoises. Bell, lui, la date principalement de la pĂ©riode mĂ©dinoise. BlachĂšre lui voit deux strates rĂ©dactionnelles et une mise en forme Ă lâĂ©poque mĂ©dinoise, avec la possibilitĂ© dâautres petites additions ou modifications[3].
LâĂ©tude de la parabole de lâaraignĂ©e permet de situer son introduction Ă un moment oĂč la communautĂ© musulmane cherche Ă se diffĂ©rencier des autres religions, soit Ă lâĂ©poque dâUthman, soit sous Abd al-Malik[3].
Interprétations
Cette sourate appartient au groupe des sourates 27 Ă 36 qui se trouvent presque au milieu du Coran. HĂ©tĂ©rogĂšne, en particulier en raison de leur style concis et allusif, cet ensemble se compose principalement dâhistoire de prophĂštes et de prescription en lien avec les fins derniĂšres. Elles ne sont pourtant quâallusives, ce qui appuie lâhypothĂšse selon laquelle le Coran est construit comme un commentaire midrashiques de textes bibliques connus de la communautĂ© recevant cet enseignement[10].
Versets divers
Ă propos des trois lettres alif, lÄm, mÄ«m, Grodzki cite la thĂ©orie de Luxenberg selon laquelle elles seraient une abrĂ©viation de la phrase syriaque emar lÄ« MÄryÄ, « le Seigneur mâa parlĂ© ». Certains manuscrits coraniques anciens porteraient un court signe horizontal utilisĂ© dans la tradition syriaque pour signifier une abrĂ©viation[11].
Tengour sâinterroge sur la notion de Gihad qui prend ici le sens de « faire lâeffort » de rejoindre Mahomet en effectuant lâHĂ©gire. De mĂȘme, il remarque que le terme (v.6) traduit par « monde » est une extrapolation mĂ©diĂ©vale et devrait ĂȘtre traduit par « tribus »[11].
Pour Dye, lâordre de succession des prophĂštes Ă©voquĂ©s dans cette sourate dĂ©pend davantage dâune approche homilĂ©tique que dâune approche chronologique[11].
Versets 2-13 : La tentation des croyants
Plusieurs auteurs pensent que les versets 2 Ă 11 sont un ajout rĂ©dactionnel, la sourate commençant abruptement sans introduction. Ces versets semblent, en outre, confus. Pour pouvoir les comprendre, il est nĂ©cessaire de les contextualiser comme Ă©tant des commentaires et dâavoir connaissance du texte Ă©vangĂ©lique quâils commentent (Mt 10, 34-37 ou moins probablement Lc 14,26). De ce texte Ă portĂ©e gĂ©nĂ©ral, le Coran va en faire un commandement spĂ©cifique[3].
LâidĂ©e dâĂ©preuve (fitna) prend une place importance dans ces versets et dans toute la sourate. Cette notion sera chargĂ© aprĂšs les troubles du califat dâUthman (644-656), troisiĂšme calife de l'islam, et la guerre civile entre les partisans dâAli et ceux de Muâawiya. Une seconde Fitna prend place durant le rĂšgne dâAbd al-Malik (685-705), le cinquiĂšme calife omeyyade. Ces deux pĂ©riodes Ă©tant des pĂ©riodes de travail rĂ©dactionnel sur le Coran, il est possible de sâinterroger sur la possibilitĂ© dâinterventions durant ces rĂšgnes. Il est malheureusement impossible dâen savoir davantage dans lâĂ©tat actuel de la recherche[3].
La suite des idĂ©es au dĂ©but de cette sourate est similaire Ă celle prĂ©sente dans le Diatessaron. Cela appuierait lâhypothĂšse de la connaissance par Mahomet des Ăvangiles via cet ouvrage Ă©crit vers l'an 170 en langue syriaque[3] (par Tatien si nous en croyons la Tradition, en particulier EusĂšbe de CĂ©sarĂ©e).
Voir aussi
Articles connexes
Bibliographie
- J. Van Reeth, "Sourate 29", Le Coran des Historiens, t.2b, 2019, 1049 et suiv.
- R. Paret, Der Koran. Kommentar und konkordanz, 1980[Note 2].
Liens externes
- Texte de la sourate 29 en français, d'aprĂšs la traduction de Claude-Ătienne Savary de 1783.
Notes et références
Notes
- Les islamologues ont utilisĂ© plusieurs approches pour tenter de dater les diffĂ©rentes sourates du Coran. Paret et Neuwirth appartiennent Ă lâ« Ă©cole allemande » qui, Ă la suite de Nöldeke, sâappuie sur la chronologie traditionnelle et sur un rĂ©cit « laĂŻcisĂ© » des traditions musulmanes. Autrefois dominant dans les Ă©tudes islamologiques, ce paradigme nöldekien n'est plus qu'« en partie prĂ©sent ». Les auteurs du Coran des historiens appartiennent davantage Ă lâautre courant (dit « sceptique ») qui prend davantage en compte une critique des sources traditionnelles. Voir : Historiographie de l'islam et du Coran
- En 2019, seuls deux ouvrages peuvent ĂȘtre considĂ©rĂ©s comme des commentaires scientifiques et continus du texte coranique. Il s'agit du Commentary on the Qur'an de Richard Bell publiĂ© en 1991 (aujourd'hui datĂ©) et du Coran des historiens publiĂ© en 2019. L'ouvrage de Paret s'inscrit, avec ceux de BlachĂšre, Khoury et Reynolds, dans un ensemble de traduction avec apparat critique. Voir : Sourate
Références
- A. Chouraqui, Le Coran, traduction et commentaires, 1990, p. 15.
- (en) « Le Coran/Sourate 29 : LâaraignĂ©e (Al-Ankabut) - Bibliowiki », sur biblio.wiki (consultĂ© le )
- J. Van Reeth, "Sourate 29", Le Coran des Historiens, t.2b, 2019, 1049 et suiv.
- G.S. Reynolds, « Le problÚme de la chronologie du Coran », Arabica 58, 2011, p. 477-502.
- R. BlachĂšre, Introduction au Coran, p. 244.
- R. BlachĂšre, Le Coran, 1966, p. 103.
- M. Azaiez, « Chronologie de la Révélation »
- G. Dye « Le Coran et son contexte Remarques sur un ouvrage récent », Oriens Christianus no 95, 2011, p. 247-270.
- E. Stefanidis, « The Qur'an Made Linear: A Study of the Geschichte des Qorùns' Chronological Reordering », Journal of Qur'anic Studies, X, II, 2008, p. 13.
- J. Van Reeth, « Introduction aux sourates 27-36 », Le Coran des historiens, 2019, p. 976.
- M. Azaiez (Ed.), G.S. Reynolds (Ed.), T. Tesei (Ed.), et al. (2016). The Qur'an Seminar Commentary / Le Qur'an Seminar. A Collaborative Study of 50 Qur'anic Passages / Commentaire collaboratif de 50 passages coraniques. Berlin, Boston: De Gruyter. partie. QS 28 Q 29