Ar-Rum
Ar-RĂ»m (arabe : ŰłÙ۱۩ ۧÙ۱ÙÙ , français : Les Romains) est le nom traditionnellement donnĂ© Ă la 30e sourate du Coran, le livre sacrĂ© de l'islam. Elle comporte 60 versets. RĂ©digĂ©e en arabe comme l'ensemble de l'Ćuvre religieuse, elle fut proclamĂ©e, selon la tradition musulmane, durant la pĂ©riode mecquoise.
30e sourate du Coran Les Romains | |
![]() Le Coran, livre sacré de l'islam. | |
Informations sur cette sourate | |
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Titre original | ŰłÙ۱۩ ۧÙ۱ÙÙ , Ar-RĂ»m |
Titre français | Les Romains |
Ordre traditionnel | 30e sourate |
Ordre chronologique | 84e sourate |
PĂ©riode de proclamation | PĂ©riode mecquoise |
Nombre de versets (ayat) | 60 |
Nombre de subdivisions (rukus) | 6 |
Nombre de prosternations | 0 |
Ordre traditionnel | |
Ordre chronologique | |
Origine du nom
Le titre de la sourate provient du verset 2. Al-Rûm désigne généralement les Byzantins. Jan Van Reeth nuance cette interprétation hùtive, le terme arabe provenant du syriaque et désignant aussi simplement les soldats (puisqu'aux yeux des Syriens les soldats sont identifiés aux Byzantins, qui contrÎlent la région)[1].
Historique
Il n'existe Ă ce jour pas de sources ou documents historiques permettant de s'assurer de l'ordre chronologique des sourates du Coran. NĂ©anmoins, selon une chronologie musulmane attribuĂ©e Ă ÇŠaÊżfar al-áčąÄdiq (VIIIe siĂšcle) et largement diffusĂ©e en 1924 sous lâautoritĂ© dâal-Azhar[2] - [3], cette sourate occupe la 84e place. Elle aurait Ă©tĂ© proclamĂ©e pendant la pĂ©riode mecquoise, c'est-Ă -dire schĂ©matiquement durant la premiĂšre partie de l'histoire de Mahomet avant de quitter La Mecque[4]. ContestĂ©e dĂšs le XIXe par des recherches universitaires[5], cette chronologie a Ă©tĂ© revue par Nöldeke[6] - [7], pour qui cette sourate est la 74e.
Selon Neuwirth[Note 1], cette sourate daterait de la troisiĂšme pĂ©riode mecquoise. Cet avis est suivi par Bell qui y voit aussi de nombreuses additions mĂ©dinoises. NĂ©anmoins, cette sourate posant un problĂšme textuel important, lui-mĂȘme nuance sa position[1]. En effet, les premiers versets sâexpliquent davantage dans un contexte plus tardif. Ceux-ci semblent, en outre, pour des raisons stylistiques, une addition tardive. Lâattribution Ă la pĂ©riode mecquoise est donc vaine. Une Ă©tude plus approfondie du texte permet de mieux mettre en valeur certaines rĂ©visions tardives et les influences nombreuses (syriaque, biblique...)[1].
Interprétations
Cette sourate appartient au groupe des sourates 27 Ă 36 qui se trouvent presque au milieu du Coran. HĂ©tĂ©rogĂšne, en particulier en raison de leur style concis et allusif, cet ensemble se compose principalement dâhistoire de prophĂštes et de prescription en lien avec les fins derniĂšres. Elles ne sont pourtant quâallusives, ce qui appuie lâhypothĂšse selon laquelle le Coran est construit comme un commentaire midrashiques de textes bibliques connus de la communautĂ© recevant cet enseignement[8].
Versets 1â7 : la dĂ©faite des Romains
Dye considĂšre cette sourate comme « extrĂȘmement ambigu[e] ». Comme « il nâexiste pas de tradition orale fiable et ininterrompue qui [...] garantirait lâexactitude » de lâajout des voyelles sur le rasm consonantique, Dye le remet en question. Lâaspect des verbes dans leur composante consonantique ne permet de savoir sâil sâagit dâun texte qui se veut prophĂ©tique, dâune malĂ©diction (point de vue de Kropp[9]) ou dâun simple encouragement. Dye se dit tentĂ© de suivre la premiĂšre hypothĂšse et de dater la rĂ©daction dâaprĂšs 629[9]. Pregill sâinterroge sur lâĂ©vĂšnement historique qui pourrait ĂȘtre Ă©voquĂ© dans la sourate, plusieurs Ă©tant en contradictions avec le rĂ©cit traditionnel des dĂ©buts de lâislam[9].
Tesei, qui place un terminus post quem en 628 pour la rĂ©daction de ce texte fait une comparaison avec lâHistoire de Maurice de Theophylact Simocatta (datĂ© du rĂšgne dâHeraclius). Ce texte, comme dâautres de cette pĂ©riode, donne aussi une dimension eschatologique Ă la victoire romaine[9]. Dye et Hawting associent les rĂ©jouissances de « croyants » Ă une espĂ©rance eschatologique[9].
Imbert relĂšve quâun graffiti coranique trouvĂ© Ă Gabal âUsays (Syrie) est dĂ©contextualisĂ© et sâinterroge sur le sens de cette rĂ©jouissance. Hawting se demande si la mention de la dĂ©faite byzantine « dans le pays proche » pourrait nous renseigner sur lâorigine gĂ©ographique des matĂ©riaux intĂ©grĂ© au Coran[9].
- Texte de la sourate (Coran datant de 1874)
Voir aussi
Articles connexes
Bibliographie
- J. Van Reeth, "Sourate 30", Le Coran des Historiens, t.2b, 2019, 1071 et suiv.
- R. Paret, Der Koran. Kommentar und konkordanz, 1980[Note 2].
Liens externes
- Texte de la sourate 30 en français, d'aprĂšs la traduction de Claude-Ătienne Savary de 1783.
Notes et références
Notes
- Les islamologues ont utilisĂ© plusieurs approches pour tenter de dater les diffĂ©rentes sourates du Coran. Paret et Neuwirth appartiennent Ă lâ« Ă©cole allemande » qui, Ă la suite de Nöldeke, sâappuie sur la chronologie traditionnelle et sur un rĂ©cit « laĂŻcisĂ© » des traditions musulmanes. Autrefois dominant dans les Ă©tudes islamologiques, ce paradigme nöldekien n'est plus qu'« en partie prĂ©sent ». Les auteurs du Coran des historiens appartiennent davantage Ă lâautre courant (dit « sceptique ») qui prend davantage en compte une critique des sources traditionnelles. Voir : Historiographie de l'islam et du Coran
- En 2019, seuls deux ouvrages peuvent ĂȘtre considĂ©rĂ©s comme des commentaires scientifiques et continus du texte coranique. Il s'agit du Commentary on the Qur'an de Richard Bell publiĂ© en 1991 (aujourd'hui datĂ©) et du Coran des historiens publiĂ© en 2019. L'ouvrage de Paret s'inscrit, avec ceux de BlachĂšre, Khoury et Reynolds, dans un ensemble de traduction avec apparat critique. Voir : Sourate
Références
- J. Van Reeth, "Sourate 30", Le Coran des Historiens, t.2b, 2019, 1071 et suiv.
- G.S. Reynolds, « Le problÚme de la chronologie du Coran », Arabica 58, 2011, p.477-502.
- R. BlachĂšre, Introduction au Coran, p.244.
- R. BlachĂšre, Le Coran, 1966, p. 103.
- M. Azaiez, « Chronologie de la Révélation »
- G. Dye « Le Coran et son contexte Remarques sur un ouvrage récent », Oriens Christianus n°95, 2011, p. 247-270.
- E. Stefanidis, « The Qur'an Made Linear: A Study of the Geschichte des Qorùns' Chronological Reordering », Journal of Qur'anic Studies, X, II, 2008, p.13.
- J. Van Reeth, « Introduction aux sourates 27-36 », Le Coran des historiens, 2019, p.976.
- M. Azaiez (Ed.), G.S. Reynolds (Ed.), T. Tesei (Ed.), et al. (2016). The Qur'an Seminar Commentary / Le Qur'an Seminar. A Collaborative Study of 50 Qur'anic Passages / Commentaire collaboratif de 50 passages coraniques. Berlin, Boston: De Gruyter., passage QS 29 Q 30:1â7