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Affaire du Crédit lyonnais

L'affaire du CrĂ©dit lyonnais[1] - [2] - [3] - [4] est une affaire politico - financière française des annĂ©es 1990. Le montant des pertes, qui s'Ă©lèvent Ă  plus de 130 milliards de francs, en fait l'un des plus grands scandales financiers de l'Histoire, au mĂŞme titre que le scandale du Panama, un siècle plus tĂ´t. Cette affaire a touchĂ© principalement, et dans un premier temps, plusieurs filiales du CrĂ©dit lyonnais, Ă  savoir : CrĂ©dit Lyonnais Bank Nederland (CLBN), SociĂ©tĂ© de Banque Occidentale (SdBO), International Bankers SA (IBSA) et Altus Finance.

Chronologie des faits

  • : alors que la gauche revient au pouvoir, Pierre BĂ©rĂ©govoy nomme Jean-Yves Haberer au poste de prĂ©sident[5] ; le CrĂ©dit lyonnais devient le premier rĂ©seau bancaire europĂ©en Ă  la suite de multiples acquisitions[6] ;
  • 1990 : le financier italien Giancarlo Parretti via PathĂ© Communication Corporation rachète la MGM avec le soutien de deux filiales du CrĂ©dit lyonnais, la CrĂ©dit Lyonnais Bank Nederland et la SociĂ©tĂ© de Banque Occidentale, pour un montant de 1,3 milliard de dollars[7] ;
  • 1991 : MGM est au bord de la faillite[8] ; la SASEA et Executive Life font faillite[9] - [10] ;
  • 1992 : l'activitĂ© Ă©conomique française ralentit et l'immobilier connaĂ®t une crise qui affecte les positions d'Altus Finance[11] ; le CrĂ©dit lyonnais enregistre ses premières pertes qui s'Ă©lèvent Ă  1,8 milliard de francs[6] ;
  • 1993 : le CrĂ©dit lyonnais publie un nouveau bilan dĂ©ficitaire et affiche des pertes historiques de 6,9 milliards de francs[12] ; la valeur des participations industrielles du CrĂ©dit lyonnais passe Ă  52 milliards de francs, contre 9,7 milliards en 1988[13] ; son portefeuille immobilier totalise 100 milliards de francs[14] ;
  • : Bernard Tapie, alors ministre, vend Adidas via la SdBO[15] ;
  • : Pierre BĂ©rĂ©govoy se suicide[16] ;
  • : Jean-Yves Haberer est remplacĂ© par Jean Peyrelevade Ă  la tĂŞte du CrĂ©dit Lyonnais[17] ;
  • 1994 : une commission d'enquĂŞte parlementaire est organisĂ©e ainsi qu'un premier plan de sauvetage du CrĂ©dit Lyonnais via la crĂ©ation de l'Omnium immobilier de gestion (OIG)[18] - [6] ;
  • : un deuxième plan de sauvetage est en oeuvre avec la crĂ©ation du Consortium de rĂ©alisation (CDR)[6] ;
  • : un incendie dĂ©truit le siège parisien du CrĂ©dit Lyonnais[19] ;
  • aoĂ»t 1996 : le ministre Jean Arthuis engage des poursuites judiciaires contre les anciens dirigeants du CrĂ©dit Lyonnais[20] ;
  • 1997 : les pertes du Consortium de rĂ©alisation sont Ă©valuĂ©es par Bercy et Karel Van Miert Ă  100,2 milliards de francs[21] ;
  • : un incendie du dĂ©pĂ´t d'archives de la IBSA au Havre dĂ©truit 30 000 mètres cubes d'archives[22] ;
  • : mise en examen de Jean-Yves Haberer et François Gille[23] - [24] ;
  • : le California Insurance Department intente un procès au CrĂ©dit Lyonnais[25]; Jean Peyrelevade, Jean-François HĂ©nin, Jean-Yves Haberer et François Gille seront mis en examen par la justice amĂ©ricaine en dĂ©cembre 2003[26] ;
  • Ă©tĂ© 1999 : le CrĂ©dit Lyonnais est privatisĂ©[27] ;
  • : en novembre, l'État vend ses parts restantes dans le CrĂ©dit Lyonnais[28] ; en dĂ©cembre, le CrĂ©dit agricole fait une OPA sur le CrĂ©dit Lyonnais[29] ;
  • 2005 : le CrĂ©dit lyonnais devient LCL[30] ;
  • : l'État emprunte 4,5 milliards d'euros pour solder la dette du CL[31].

Une situation devenue incontrĂ´lable

Le Crédit lyonnais (alors propriété de l'État), et plusieurs de ses filiales, sont au cœur d'une série d'enquêtes menées par la Commission bancaire française concernant des malversations qui conduisent le CL à la quasi-faillite en 1993 à cause d'investissements massifs (dont ceux opérés par le truchement d'une filiale aux Pays-Bas) dans la Metro-Goldwyn-Mayer[7].

L'ombre de Pierre BĂ©rĂ©govoy, alors Ministre des Finances, plane sur cette affaire, car le juge Thierry Jean-Pierre, met en lumière en 1991 la persistance de dĂ©couverts bancaires jugĂ©s « faramineux[32] » accordĂ©s par la SDBO, la filiale du CrĂ©dit lyonnais, aux membres de la famille BĂ©rĂ©govoy. ApparaĂ®t ainsi un dĂ©couvert de 199 737,20 francs au mois d’. Puis, de nouveau, on trouve la trace de prĂŞts d’argent aux membres de la famille BĂ©rĂ©govoy, notamment Ă  sa fille Lise, de cadeaux Ă  son Ă©pouse Gilberte, ainsi que des aides ponctuelles consenties Ă  Pierre BĂ©rĂ©govoy entre 1986 et 1988[32].

Début 1994, un premier rapport parlementaire dénonce le système des avances et prêts à risques, notamment dans le domaine immobilier, qui anticipaient la plus-value envisagée sur ces opérations immobilières[18]. L'affaire du Crédit lyonnais a mis en valeur certaines des causes financières de la crise du logement.

Le , alors qu'une plainte du Ministre des finances Jean Arthuis vise Jean-Yves Haberer, président du Crédit Lyonnais, et Jean-Claude Trichet, directeur du Trésor, le siège central parisien du Crédit Lyonnais est ravagé par un incendie qui soulève de nombreux doutes quant à son caractère accidentel, notamment en raison des multiples départs d'incendies durant cette nuit-là[20] - [33] - [19]. Le Crédit lyonnais sauve toutefois ses activités de marché grâce à une salle de marché de secours prête à fonctionner[34].

Un an plus tard, le , les archives de la filiale IBSA sont détruites dans un entrepôt situé dans le port autonome du Havre lors d'un incendie jugé inexplicable[35].

Dès 1994, l'Omnium Immobilier de Gestion (OIG) est crĂ©Ă© pour reprendre un ensemble d'actifs compromis du Groupe CrĂ©dit lyonnais en difficultĂ©, en particulier 41 milliards de francs de crĂ©dits immobiliers dont le remboursement est rendu alĂ©atoire par la crise que connaĂ®t le marchĂ© immobilier depuis le dĂ©but des annĂ©es 1990. Ce portefeuille de crĂ©ances est alors garanti par l'État français Ă  hauteur de 12,4 milliards de francs[36].

L'OIG a une existence courte, le premier plan de sauvetage du CrĂ©dit lyonnais se rĂ©vèle rapidement insuffisant et, dès 1995, un second plan plus vaste (environ 120 milliards de francs) doit ĂŞtre mis en place au travers du Consortium de rĂ©alisation (CDR), une structure de cantonnement et de dĂ©faisance qui reprend alors le portefeuille de l'OIG ainsi que pour 28,3 milliards d'euros d'actifs douteux et compromis du Groupe CrĂ©dit Lyonnais[37]. Le principe consiste Ă  sĂ©parer les actifs et crĂ©ances compromis de la partie considĂ©rĂ©e comme saine. Les crĂ©ances douteuses sont logĂ©es dans la filiale CDR, et cette dernière est ensuite cĂ©dĂ©e Ă  un Ă©tablissement d'État, l'EPFR, crĂ©Ă© pour l'occasion[38]. Ă€ l'issue de cette opĂ©ration, le CrĂ©dit Lyonnais se retrouve amaigri mais avec un portefeuille assaini. De son cĂ´tĂ©, l'État rĂ©cupère un ensemble d'actifs et de crĂ©ances posant problème.

En 2005, le Consortium de rĂ©alisation (CDR), hĂ©ritier du passif de la banque, accepte de payer 525 millions de dollars au dĂ©partement des Assurances de Californie pour mettre fin aux poursuites judiciaires dans le cadre de l'affaire Executive Life[39]. Cette compagnie d'assurances amĂ©ricaine, au bord de la faillite, avait Ă©tĂ© rachetĂ©e dans les annĂ©es 1990 par la MAAF grâce Ă  un financement du CrĂ©dit lyonnais, mais la justice amĂ©ricaine considère que la mutuelle n'Ă©tait qu'un prĂŞte-nom pour la banque. Or, Ă  cette Ă©poque, il Ă©tait interdit pour une banque d'acquĂ©rir une compagnie d'assurance amĂ©ricaine[40].

Fin 1992, Bernard Tapie devenu ministre souhaite vendre Adidas pour éviter tout conflit d'intérêts et confie un mandat de vente au Crédit lyonnais[15]. Le Crédit lyonnais effectue un montage opaque par laquelle elle revend Adidas à une société écran offshore qu'elle contrôle avec une option de revente avec plus value à Robert Louis-Dreyfus[41]. De plus, le Crédit lyonnais saisit les actions de la société Bernard Tapie Finance que détient Bernard Tapie et les met en liquidation. Bernard Tapie estime que le Crédit lyonnais l'a berné par ce montage opaque qui ne respecte pas les obligations du mandataire à exécuter le mandat de bonne foi dans l'intérêt de son client, donc sans conflit d'intérêts[42]. Il engage alors avec le mandataire liquidateur de Bernard Tapie Finance et des actionnaires minoritaires une longue procédure judiciaire qui se conclut en 2008 par la décision d'un tribunal arbitral qui lui octroie 285 millions d'euros de dommages et intérêts (dont 45 millions d'euros au titre du préjudice moral, ce qui est un record en France), plus les intérêts[43]. Une somme de 405 millions d'euros non imposable est versée peu après par l'État français qui reprend les dettes du Crédit Lyonnais à Bernard Tapie en exécution de cette sentence arbitrale[44]. Les conditions de recours à cette sentence arbitrale sont très controversées au niveau politique et font l'objet de plusieurs recours en annulation devant les juridictions administratives pour contester l'autorisation donnée par Christine Lagarde, alors ministre des finances, de recourir à l'arbitrage plutôt que la justice ordinaire[45]. Tous ces recours devant les juridictions administratives sont rejetés. De plus, une instruction de la Cour de justice de la République, compétente pour juger les ministres, vise Christine Lagarde pour rechercher d'éventuelles infractions pénales qu'elle aurait commises. Cette dernière est placée sous le statut de témoin assisté le [46]. Dans un autre volet pénal non ministériel de cette affaire, Pierre Estoup, l'un des trois juges arbitraux est mis en examen pour escroquerie en bande organisée[47]. L'arbitrage de 2008 est finalement annulé par la cour d'appel de Paris, le [48].

Bibliographie

Notes et références

  1. Le pari perdu du lyonnais - Guillaume Duval, Arte (voir archive)
  2. Comprendre l'affaire Tapie-Crédit Lyonnais - Jérôme Bouin et Damien Hypolite, Le Figaro, 9 juin 2011
  3. Combines et « tricheries » de l'État dans l'affaire du Crédit lyonnais - Libres.org, 26 août 2002
  4. Les protagonistes de l'affaire du Crédit lyonnais - Le Monde, 18 janvier 2006
  5. Jean-Yves Haberer, l'ancien PDG amateur d'art - Le Parisien, 6 janvier 2003
  6. « Crédit Lyonnais : chronique d'un naufrage bancaire historique », sur LEFIGARO, (consulté le )
  7. « Après l'OPA lancée par M. Giancarlo Parretti sur MGM-UA Les milieux financiers s'interrogent sur l'origine des fonds de Pathé Communications », Le Monde.fr,‎ (lire en ligne, consulté le )
  8. « L'histoire agitée (et même française) du mythique studio MGM », sur BFM BUSINESS (consulté le )
  9. « La faillite de Sasea serait prononcée la semaine prochaine », sur Les Echos, (consulté le )
  10. Nicolas Cori, « Executive Life : Pinault gagne une bataille », sur Libération (consulté le )
  11. « La crise immobilière revêt une dimension mondiale », sur Les Echos, (consulté le )
  12. « Après une perte de la banque nationalisée de 6,9 milliards en 1993 L'Etat vole au secours du Crédit lyonnais », Le Monde.fr,‎ (lire en ligne, consulté le )
  13. Damien de Blic, « « Le scandale financier du siècle, ça ne vous intéresse pas ? ». Difficiles mobilisations autour du Crédit lyonnais », Politix. Revue des sciences sociales du politique, vol. 13, no 52,‎ , p. 157–181 (DOI 10.3406/polix.2000.1124, lire en ligne, consulté le )
  14. « N° 1480 - Rapport d'enquĂŞte de M. François d'Aubert sur le Credit Lyonnais », sur www.assemblee-nationale.fr (consultĂ© le )
  15. Par Le 12 juillet 2008 à 03h43, « Quatorze ans d'une procédure à rebondissements », sur leparisien.fr, (consulté le )
  16. « Il y a trente ans, le 1er mai 1993, l'ancien Premier ministre Pierre Bérégovoy se suicidait », sur ladepeche.fr (consulté le )
  17. « Un feuilleton financier qui a débuté il y a cinq ans », sur Les Echos, (consulté le )
  18. « Crédit Lyonnais: le rapport de la commission d'enquête publié mardi », sur Les Echos, (consulté le )
  19. « Un gigantesque incendie ravage le siège du Crédit Lyonnais à Paris », sur Les Echos, (consulté le )
  20. « Dix ans d'une chronique mouvementée », sur Les Echos, (consulté le )
  21. « Le Crédit Lyonnais et Bercy ripostent aux déclarations de Karel Van Miert », sur Les Echos, (consulté le )
  22. Natalie Castetz, « 30000 mètres cubes d'archives en fumée. Le 19 août, les containers de carton d'Eco-Arc ont tous été détruits. », sur Libération (consulté le )
  23. Par Eric DECOUTY Le 24 septembre 1998 à 00h00, « L´ex-n° 1 du Crédit lyonnais encore mis en examen », sur leparisien.fr, (consulté le )
  24. Par Le 24 septembre 1998 à 00h00, « Les notes secrètes de François Gille », sur leparisien.fr, (consulté le )
  25. « La Californie intente un procès au Crédit lyonnais sur l'achat de l'assureur Executive Life », Le Monde.fr,‎ (lire en ligne, consulté le )
  26. « Cinq anciens dirigeants du Crédit Lyonnais sont mis en examen », sur Les Echos, (consulté le )
  27. « La privatisation du Crédit Lyonnais va procurer environ 46 milliards à l'Etat », sur Les Echos, (consulté le )
  28. « Crédit Lyonnais : l'Etat vend sa part aux enchères », Le Monde.fr,‎ (lire en ligne, consulté le )
  29. « Le Crédit Agricole lance une offre publique amicale sur le Crédit Lyonnais », sur Les Echos, (consulté le )
  30. « Le Crédit lyonnais veut faire oublier son passé sulfureux en se dotant d'un nouveau nom », Le Monde.fr,‎ (lire en ligne, consulté le )
  31. L'exécutif veut clore l'affaire du Lyonnais - Guillaume Guichard, Le Figaro, 10 novembre 2013
  32. Jacques Follorou, Bérégovoy : Le dernier secret, Fayard, 2008 (ISBN 978-2-2136-3426-5) (voir aussi Bakchich, qui rend compte de cet ouvrage le 12 avril 2008 : « Quand des affairistes « tenaient » Pierre Bérégovoy » et le 13 avril « Exclusif : La descente aux enfers de Pierre Bérégovoy »)
  33. « Le cas Trichet », sur L'Express, (consulté le )
  34. « Une salle de marché secrète a sauvé la mise du Crédit lyonnais », Le Monde.fr,‎ (lire en ligne, consulté le )
  35. Les incendies Ă©taient criminels - Denis Demonpion et Jean-Loup Reverier, Le Point, 10 janvier 1998
  36. Proposition de résolution no 2298 de l'Assemblée nationale du 29 mars 2000.
  37. « Le CDR réduit la facture du Crédit lyonnais à 11 milliards d'euros. », Le Monde.fr,‎ (lire en ligne, consulté le )
  38. « Affaire Tapie-Lagarde : pourquoi l'Etat va se constituer partie civile », sur Franceinfo, (consulté le )
  39. « Executive Life : un accord de principe été trouvé », Le Monde.fr,‎ (lire en ligne, consulté le )
  40. « Executive Life : l’affaire américaine du Lyonnais qui a coûté cher au contribuable français », sur Les Echos, (consulté le )
  41. « Affaire Crédit Lyonnais-Adidas: Emmanuel Gaillard, un atout maître pour Bernard Tapie », sur L'Express, (consulté le )
  42. « Crédit lyonnais : Tapie prêt à revenir devant les tribunaux », sur LEFIGARO, (consulté le )
  43. « Crédit lyonnais : l'article à lire pour comprendre le procès de Bernard Tapie dans l'affaire de l'arbitrage controversé », sur Franceinfo, (consulté le )
  44. « L'État va emprunter 4,5 milliards d'euros pour solder la dette du Crédit Lyonnais », sur France 24, (consulté le )
  45. Public Sénat, « Procès Lagarde: les grandes dates de l'arbitrage Tapie », sur Public Sénat, (consulté le )
  46. Lagarde : ce que signifie le statut de témoin assisté - Julie Reynié, RTL, 24 mai 2013
  47. Affaire Tapie : le juge arbitre Pierre Estoup mis en examen pour escroquerie en bande organisée - Guillaume Gaven, France Info, 29 mai 2013
  48. CA Paris (pôle 1 - chambre 1) arrêt du 17 février 2015 (13/13278) [PDF]
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